L'auteur : bubulle
La course : L'Echappée Belle - 145 km
Date : 28/8/2015
Lieu : Vizille (Isère)
Affichage : 6228 vues
Distance : 145km
Objectif : Pas d'objectif
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Je finirai l'Échappée Belle le 30 août prochain. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
Ce début juillet a été riche, c'est le moins qu'on puisse dire. Une belle réussite à la Montagn'hard, ma chérie qui concrétise superbement une formation longue et très exigeante, notre Magali qui obtient brillamment son diplôme de kiné.
Mais d'autres sont en train de vivre une déchirure et je la vis avec eux. Cela fait mal. Mais cela motive. L'EB était déjà le gros objectif. Elle devient un but en soi, pour reléguer aux oubliettes les heures qui viennent de s'écouler.
Je finirai l'Échappée Belle le 30 août prochain. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
Une journée de folie qui va en appeler d'autres pendant lesquelles les déchirures changent, pendant lesquelles nous passons du rire aux larmes en permanence. Pendant lesquelles tant de choses changent chez tant de personnes.
Je finirai l'Échappée Belle le 30 août prochain. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
Le gros de l'entraînement se termine. Je suis dans une forme que je n'ai jamais eue, je bats tous mes chronos de référence. Et, comme mes amis, je suis sur un petit nuage : je vais partir 10 jours avec ma chérie pour ce qui s'annonce des vacances de vrai rêve. J'ai l'impression qu'en ce mois de juillet 2015, tout se met, se remet en place. Et je suis bien. Alors, forcément, l'Échappée Belle, là-dedans, elle va y passer....
Je finirai l'Échappée Belle le 30 août prochain. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
Je suis mes amis Sab et Fa2 au Cenis. Sab est en train d'égaler mon temps de 2013. Au vu des SMS, elle vole littéralement, aussi sur un petit nuage, probablement. Elle va finir le GRP dans 3 semaines, et pas qu'un peu (edit: eh oui, je l'avais écrit ainsi et donc comme tout les « pré-compte-rendus » que j'ai faits, je laisse cela en l'état...elle ne m'en voudra pas). Alors, que voulez-vous, je suis bien obligé de finir mon gros truc, moi aussi, non ?
Même Mozart vient de me le dire, d'ailleurs, en concert ici à Salzburg : du willst enden die Schöne Échappée, mein Freund, du willst alles éclatieren und alles machen péter. Jawohl. Remontiert wie eine Uhr, mein Gott. (edit post-course : j'ai raison de réviser mon allemand, tiens)
Ces vacances sont tellement belles. Elles doivent bien se terminer.
Je finirai l'Échappée Belle le 30 août prochain. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
L'échec serait dur, trop dur, je le sais maintenant. Je ne veux pas m'infliger cela. Donc je finirai, je refuse l'échec.
Je vais finir cette l'Échappée Belle dans deux jours. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
Tous les soutiens dans ma tête : Elisabeth, Sophie, Magali, Jean-Baptiste, Bertrand, Sabine, Fabrice, Andrée et sa famille, ma maman. En me réveillant, je les sors un par un de leur petite boîte, je les regarde, je pense à eux, j'avance. Je finirai, pour chacun d'eux.
Et comme ils me disent tous : je finirai encore plus pour moi. Parce que ce sport est tellement devenu part intégrante de moi, parce que j'ai (presque) tout axé sur ce but. Cela peut paraître prétentieux ou exagéré, ça l'est. Mais c'est la vérité.
En attendant, avant de finir, il faudrait déjà commencer.
Le silence s'est installé sur Vizille. Nous écoutons le briefing. Je suis impressionné par ce silence. Tout le monde est attentif, tout le monde est concentré. On ressent que nous nous sommes tous face à du gros et du lourd. On sent l'expérience de course de ceux qui nous entourent. Je ne vous referai pas le coup du trailer rasé aux jambes poilues. Nous sommes des personnes ordinaires, mais nous allons essayer de terminer quelque chose qui ne l'est pas tout à fait. Humilité générale. Impressionnant. Si j'avais du poil aux mollets, il se dresserait.
On fait les malins, notamment avec Xavhië et dan38 (et jpoggio) mais on n'en mène pas large
Départ. Je n'ai pas souvenir d'une musique grandiloquente. Juste d'une espèce de libération, presque en silence. Nous y voilà, m'y voilà. C'est parti pour 30, 40, 50 ou 55 heures, il n'est plus temps d'avoir peur.
Quand Akuna est là avec son appareil, c'est qu'il se passe quelque chose
Premier objectif : ne pas s'emballer. Tout le monde a le même et c'est évidemment difficile de le respecter malgré tout. Après un kilomètre de plat qui permet d'étirer le peloton, nous voilà partis pour une première longue montée sur des chemins relativement larges mais bien pentus (20% mini).
Je ne sors les bâtons qu'au bout de 3 kilomètres environ. Je ne veux pas faire courir de risques à ceux qui m'entourent car j'ai déjà expliqué que lorsque je me sers de bâtons, je m'en SERS. J'appuie dessus fermement et fortement vers l'arrière et les risques ne sont pas nuls pour ceux qui suivent.
Par contre, une fois doté de mes appendices carbonés, le rythme devient plus efficace, même si je me freine fortement en ralentissant le rythme d'enjambées, mais en restant sur des longueurs importantes de pas. À ce petit jeu là, un regroupement s'opère avec Mathias et trimoreo juste à l'arrivée au Mont-Sec qui marque un petit répit dans l'ascension. Ils parlent triathlon, ça occupe et cela évite de penser qu'on va trop vite...
Premier SMS collectif "Altitude 1250. Avec Mathias et trimoreo" (je vous le fais de mémoire car mon appli Android d'envoi groupé ne garde pas d'historique). Évidemment, je galère à l'envoyer car pas de réseau. Cela sera la constante de la journée au vu des lieux traversés. Mais j'essaie, surtout là au début, de donner des nouvelles car je sais que le suivi Live ne démarrera qu'au Refuge de la Pra, donc au bout de 5h30 à 6h de course. Et puis cela m'occupe (et me freine sainement) sur ce terrain facile que de bricoler le téléphone.
J'essaie aussi de bien penser à prendre des photos, aidé par le nouveau dispositif mis en place sur cette course : deux petites poches issues de ceintures Raidlight qui sont agrafées sur les bretelles du sac Salomon. L'appareil est dans l'une d'entre elle et bien plus accessible que dans les poches latérales avec filet. Il me faut 2 secondes pour le dégainer et guère plus pour le ranger. Je conseille le système pour tout besoin de rangement ultra accessible.
Autre dispositif en place, très important sur ces journées de chaleur forte annoncée : une éponge façon "Carré Veleda" pliée en deux à l'intérieur de la casquette et fixée à icelle par d'incontournables épingles à nourrice.
Lever du jour depuis les environs du Mont-Sec
Après un petit répit, un second raidard (pas trop raide) nous amène sans trop prévenir au Lac Luitel, caché au milieu des bois. Je reconnais car....Elisabeth est là, pour son premier "pit stop" de ces deux jours. Comment ne pas être au top quand votre chérie démontre une telle énergie pour vous suivre (et ce n'est pas fini !).
Elisabeth apostrophe aussi un peu tous les kikous reconnaissables et pas seulement Mathias qui m'accompagne. J'apprends que Tomtrailrunner est devant ainsi que zecrazytux (ainsi que d'autres évidemment). J'ai également vu passer Xavhië et je sais donc que je dois me trouver plus ou moins à la mi-peloton, ce qui n'est pas mal par rapport à mon objectif global.
À partir du lac Luitel, la pente est moins forte, les sentiers sont en sous-bois assez roulant, c'est très agréable. J'évite toutefois de courir un peu inutilement et, au contraire, j'avance de mon pas usuel (grandes enjambées, alternatif avec les bâtons...nordique, quoi). Je crois me souvenir que c'est dans ce secteur, également, que je retrouve Pascale, ma collègue de l'ONERA, que j'ai retrouvée par hasard aux dossards et que je ne connaissais que de loin. Nous faisons un bout de chemin ensemble.
Progressivement, nous voici sur le « plateau » avec des allées assez larges en sous-bois (des pistes de ski de fond, je pense), au alentours de 1500-1600m. Et, relativement sans peine, nous voici au foyer de ski de fond de l'Arselle. On n'a pas tant vu que ça le temps passer.
Lumière matinale sur (Le Taillefer ?) depuis l'Arselle
Élisabeth me guette depuis le balcon du foyer de ski de fond où est situé le ravitaillement, nous nous retrouvons sans difficulté. Je prends tranquillement mon temps : j'ai prévu 8 minutes ici (mais je croyais en avoir prévu 20) et cela me laisse de quoi refaire les pleins, aller piocher fromage et saucisson au ravito, envoyer un deuxième SMS collectif (même si je sais qu'elle relaiera les nouvelles par SMS vers Sab, qui relaiera vers Kikourou, notre organisation est très au point !) et ranger la frontale (mal ranger, on en reparlera).
Geek un jour, geek toujours
Le ravitaillement est bien peuplé, mais c'est malgré tout calme. On sent, là encore, que pas grand monde n'est stressé par le « temps perdu » sur une course qui va durer deux jours. Je retrouve d'ailleurs encore Pascale qui prend son temps, elle aussi. Élisabeth m'informe avoir vu Tom, zecrazytux, et quelques autres kikous. Il est vrai qu'avec 10% de la course dans le kivaou, nous sommes nombreux.
Je repars donc à peu près dans mes temps prévus, car l'arrêt a duré 15 minutes au lieu de 8 prévues (ce qui est bien trop peu). Un bisou, car nous savons que, maintenant, le prochain rendez-vous possible est à Jean Collet dans 5 heures environ, voire au Pas de la Coche dans 7 heures.
Une des rares contrariétés de cette course : en repartant, je tombe par hasard avec deux coureurs à l'accent trop marseillais pour être honnête. L'un d'eux lance à la cantonnade qu'on devrait vraiment interdire les ravitos aux accompagnants. Façon "ah peuchère, j'ai perdu du tang, quelleu problèmeu". Ça me gave. Grave. On n'est pas à l'usine, on n'est pas à 5 minutes près et c'est un peu la dernière occasion de voir nos proches et, pour eux, une des rares occasions de la journée de nous voir. Donc "eh, si ça te va pas, tu vas à Chamonix, là-bas les ravitos sont règlementés". J'espère qu'il n'a pas terminé, ce gros relou qui vous donnait presque envie d'être supporter du PSG, tiens (c'est dire si j'étais chafouin).
Bon, paf, marche à donf pour larguer le Père Ducros et on retrouve une agréable montée vers le Lac Achard. Peu de souvenirs de cette montée, en fait. Je crois avoir à nouveau cheminé avec Pascale, en parlant de ses courses et des miennes. Je suis content, j'ai trouvé quelqu'un de très sympathique.
Le Lac Achard n'est pas bien grand mais très joli. C'est vraiment le début d'une section qui va être superbe et de plus en plus sauvage. Le sentier est encore bien praticable et monte régulièrement. Je ne force pas trop, résistant à l'envie de dépasser tout ce qui se présente. Je cherche surtout à penser à boire régulièrement car la chaleur monte désormais, il est plus de 9 heures du matin.
Petit à petit, les coureurs s'espacent, également. Nous ne sommes désormais plus en file indienne : ça s'égaie vite, un peu plus de 400 coureurs, sur 10 kilomètres de montée.
Après le Col de l'Infernet, peu marqué, le Col de la Botte voit un peu d'animation. Il est accessible relativement facilement (depuis la Croix de Chamrousse) et plusieurs spectateurs y sont postés pour encourager les coureurs dans la fin de la montée. L'un d'eux m'apostrophe même par mon pseudo : c'est en fait JuCB qui va en fin de journée prendre le deuxième relais au Pleynet, mais est venu faire des photos entretemps.
(photo JuCB) Passage au Col de la Botte
Qui dit col, dit descente. C'est en fait quasiment la première, à part une section un peu roulante après Mont-Sec. Elle n'est pas très longue (environ 200D-) mais commence à nous donner un (très faible) aperçu de ce qui nous attend. Il faut être vigilant car les cailloux commencent à pointer leur nez.
Descente du Col de la Botte
Cette descente amène dans le joli secteur des Lacs Robert au milieu desquels le sentier zigzague. C'est de plus en plus beau, la lumière est très claire et les montagnes autour de plus en plus minérales.
Un des Lacs Robert
Le sentier abandonne le GR pour prendre la direction du Lac David et devient soudain plus technique. Dans cette section, j'ai rattrapé un grand échalas en short...qui me reconnaît. C'est cyss, que j'ai déjà croisé à la Montagn'hard. Nous n'avons pas fini de nous voir et faisons un petit bout du chemin ensemble jusqu'au raidard de l'Echaillon. C'est en fait la première vraie montée sérieuse et rude, avec option "cailloux". Le rythme général se ralentit nettement.
L'Echaillon (et cyss au pied)
Nous rattrapons deux des cameramen qui viennent réaliser de belles images. Ils vont se poster en haut de ce raidard et je pense que le résultat sera beau. Bon, j'ai un peu quelques difficultés pour les passer (car, en côte, je continue à avoir tendance à avancer vite, ça reste mon point fort). Dans l'affaire, je perds un peu cyss qui avance plus lentement (ou plus raisonnablement).
Montée de l'Echaillon (photo Pierrick Boyer)
J'ai relativement peu de souvenir de la section Echaillon-Lac David. Celui-ci est superbe, entouré d'un écrin de montagnes minérales. Je pense à prendre des photos, me félicitant encore de mon dispositif pour transporter celui-ci, dans cette petite poche avant agrafée aux fermetures de mon sac. Totalement à portée de main : je peux donc mitrailler sans passer mon temps à m'arrêter, repartir, etc.
Après un petit col peu marqué au dessus de Lac David, nous débouchons alors dans un espace plus dégagé et voyons le refuge de la Pra, deuxième ravito, tout au bout d'une longue traversée à flanc. Il va être le bienvenu car il est bientôt midi, la chaleur est forte. Cependant, je crois me rappeler de fréquents ruisseaux permettant de mouiller la casquette (et l'incontournable éponge à l'intérieur, deuxième innovation que je fais sur cette course, sur une suggestion de Bert').
Je suis très satisfait de cet arrêt car je me suis bien organisé. Il n'y a pas trop de monde, de la place. Je peux donc poser le sac sur un muret, sortir les flasques, aller les remplir (une avec coca/eau, une avec eau pétillante/eau), prendre un bol de pâtes instantanées (il y en a sur tous les "gros" ravitos et j'en ai pris à chaque fois car cela apporte nutrition et hydratation). Je prends le temps d'envoyer un SMS mais....pas de réseau, cela ne partira pas. Tant pis, le pointage (c'est le premier) renseignera mes proches.
Je recroise quelques kikous sur ce ravito, mais je commence à être en mode "bulle". C'est que va s'ensuivre un gros morceau avec la Croix de Belledonne et qu'on arrive dans les secteurs où c'est un peu l'inconnue pour moi.
En 20 minutes, tout est fait. J'avais prévu 15 minutes. Là aussi, pas assez, ce sera la constante...et ce n'est pas fini. Il faut vraiment prévoir large aux ravitos officiels sur cette course, car on a besoin de s'y poser.
Je repars en 5h53, ce qui est malgré tout 20 minutes en avance sur mes prévisions. Beaucoup m'avaient d'ailleurs prédit que mes 6h33 étaient assez pessimistes, cela leur donnera raison.
Pendant ce temps, sur le fil Kikourou, le Bouzin peine à récupérer de l'information car le pointage de la Pra est dans les choux (il paraît qu'il faut qu'un volontaire monte au Col de la Pra pour trouver du réseau et transmettre). Les informations circulent cependant grâce à Elisabeth, qui a posté depuis l'Arselle et aussi beaucoup grâce à JuCB qui envoie SMS sur SMS depuis le Col de la Botte. Merci ! Un jour, on va proposer aux Livetrail et autres GeoFP de compléter leurs infos par Radio Kikourou, ça sera plus efficace.
Renard Luxo sur le fil : « Planté le truc. C'est quand même pas possible qu'il faille 7h30 pour que Bubulle rejoigne La Pra ... ». Eh oui, planté, le truc, quand même..:-)
Loin de ces contingences, j'ai attaqué la montée du Col de la Pra. On commence à arriver dans le sérieux : c'est plus raide, les cailloux commencent à totalement masquer l'herbe : bienvenue dans Belledonne !
Lac du Petit Doménon (au dessus, la Croix de Belledonne, on va là-haut !)
Après le col, une montée plus régulière (rappel : on ne fait quasiment que monter depuis le départ et nous sommes au 30ème kilomètre !) nous amène à l'extraordinaire site des lacs du Doménon. C'est beau à tomber par terre, ces deux lacs dominés par ces cathédrales minérales du Grand Doménon et du Grand Pic de Belledonne.
On aperçoit sur la gauche le col de Freydane mais nous avons une petite formalité à accomplir avant : un aller-retour à la Croix de Belledonne.
Un pointage manuel où je m'étonne de ne voir personne redescendre dans l'autre sens. Nous aurons l'explication plus tard. Pour l'instant, c'est un mur qui se dresse devant nous et va nous mener d'abord vers 2700m près du Lac du Boeuf. C'est très très raide et j'ai décidé de prendre un pas assez lent, toujours avec mes grandes enjambées, afin de ne pas faire monter le cardio (les V2 à plus de 2500, faut les ménager). Et surtout, j'ai décidé de résister à l'envie irrépressible d'envoyer dans cette montée alors que j'adore cela.
Début de la montée de la Croix de Belledonne, au pied du Col des Rochers Rouges
C'est donc en file indienne assez lâche qu'on atteint le premier (petit) névé de la course. Les Tor Speed c'est bien sur les névés, d'ailleurs. On y croise quelques coureurs qui redescendent. En fait, ils se dirigent vers la gauche, donc le parcours semble redescendre plus près du col de Freydane. En pratique, il y a très peu de passages où les coureurs qui montent croisent ceux qui descendent. Tant pis pour la convivialité, mais on y gagne un peu en confort car, sur un terrain pareil, c'est un peu difficile de se croiser.
La Croix de Belledonne, c'est tout là-haut
A partir du niveau du Lac du Boeuf, on voit le haut de la Croix et on sait donc où on va. Le chemin est finalement bien raide, caillouteux, mais assez praticable. Sans aller jusqu'à dire que c'est une partie de plaisir, cette montée se passe donc vraiment bien, à une allure raisonnable. Je respire fort, mais l'altitude y est aussi pour beaucoup. Tout va bien.
Je suis exactement dans mon roadbook (en fait un peu en avance, mais l'arrêt de 10 minutes, non planifié, va consommer cette avance). Beaucoup, dont moi, se font une pause en haut. Déjà pour admirer l'extraordinaire panorama (il faut pas mal de motivation pour ne pas passer 1 heure à faire des panos avec l'appareil photo du téléphone), aussi pour se restaurer un peu. J'essaie d'avaler une de ces si difficiles à avaler barres de céréales. J'en mangerai très peu pendant la course : c'est vraiment pénible, ces trucs qu'on garde 10 minutes en bouche, qu'il faut tenir à la main (donc pas de bâtons). Je crois que je vais définitivement abandonner ces trucs. Heureusement, j'ai le fromage et le saucisson embarqués à la Pra.
On resterait bien éternellement là, à regarder le flux de coureurs arriver, puis repartir
J'envoie un SMS comme quoi je suis passé à La Pra en 5h40 et Arcelle arrive à le relayer sur le forum, ce qui confirme à tous que le pointage déconne bien. Et 15 minutes plus tard, Sab arrivera à relayer que je suis à la Croix de Belledonne. Eh oui, c'était une bonne idée d'essayer de trouver du réseau....au sommet.
Cela dit, il faut cesser de s'attarder et partir dans la descente. C'est que la voilà enfin, la première vraie descente "technique" de cette Échappée Belle. Au bout de 36km, franchement. Et on appelle ça un trail difficile ? ;-)
Bon, elle n'est pas très facile, mais ce n'est pas non plus une horreur. J'arrive à courir prudemment, quelques tentatives d'accélération étant vite freinées par des faux pas dont l'un aurait bien pu dégénérer en entorse....n'étaient mes chères et adorables et indestructibles Tor Speed. Evidemment, d'ailleurs, cela se produit sur une partie moins pentue, près du Lac du Boeuf.
Je calme donc le jeu au moment où nous croisons les coureurs qui montent, sur le névé. Ce n'est pas le moment de faire la seule chose qui pourrait me faire abandonner : me blesser. Cela d'autant que nous abordons en fait une longue section en traversée avec à gauche une pente très forte et qu'évidemment ma tendance maladive au vertige se réveille (on en reparlera). Non, Seb, ce n'est pas "gazeux"...mais c'est suffisant pour me freiner et me mettre en mode marche.
Avantage, cependant : là où je m'attendais à revenir quasiment au pied du Freydane pour une remontée bien rude, nous arrivons en fait quasiment sans monter audit col. Je ne vais pas me plaindre. Un bénévole nous pointe (ce sera un des rares pointages qui fonctionne sur le début de course).
J'ai à nouveau 1/4h d'avance. Non pas que j'aie foncé, mais mes simulations incluaient une montée pour le col. Montée qui n'a pas eu lieu.
Le temps d'être pointé au col, qui vois-je arriver ? Xavhië. Bizarre, j'étais persuadé qu'il était devant moi. Ce n'est que le début d'un long chassé-croisé. Je lui demande comment il va et il m'indique que c'est plutôt OK, mais qu'il a du mal en descente. Puis....il se lance dans la descente.
Et je vais le voir lentement s'éloigner. Je t'en ficherai, moi, du mal dans la descente. Moi, j'y vais toujours prudemment. Difficile, ici, d'appliquer les conseils de PhilippeG et de descendre perpendiculaire à la pente et les bras en avant. Si on fait ça, on se retrouve rapidement perpendiculaire, puis parallèle, puis perpendiculaire, puis parallèle, puis......
Le glacier de Freydane vu depuis le col. Noter le « chemin » balisé par un ou deux fanions
La descente est aussi truffée de plusieurs passages terreux et pentus, très glissants. J'y trouve à un moment notre cher zecrazytux, que j'entends pester. Nouvelles prises, le pauvre est pris de crampes, ce qui n'est franchement pas le bon moment. Il gère (il en faut plus pour l'abattre !) mais je ne peux malheureusement guère l'aider car je n'ai pas de salé sur moi.
Arrivés vers la cote 2300, la pente se calme un peu et on peut trottiner à peu près normalement pour le tour de Lac Blanc. C'est magnifique avec la Grande Lance de Domène sur l'arrière et la Croix de Belledonne juste derrière nous...très haut.
Le Lac Blanc. Il y a tromperie sur la marchandise !
Le Grand pic de Belledonne et la Croix (où nous étions voici une heure environ) depuis le vallon sous le col de Freydane
J'avais mémorisé qu'il s'ensuivait une traversée en plat descendant vers Jean Collet. Mais, euh....je dois avouer au risque de saboter toute ma réputation, que j'avais mémorisé comme une patate. Au lieu d'un doux plat descendant, c'est une belle dégringolade de 300D- près des cascades. Et pas de refuge en vue. Pourtant, là, je commence à avoir les jambes lourdes, je ferais bien une pause...:-)
Enfin, au détour d'une petite crète après un petit passage acrobatique (Le Ravin des Excellences, dit la carte), on aperçoit le refuge....à peu près 100 mètres plus haut....et on entend des cloches et le barouf fait par les spectateurs. Je sens que ça va être sympa, ce Refuge Jean Collet.
Pendant ce temps, de façon amusante, le live continue à délirer à plein tube....puis se débloque tout d'un coup...sauf pour moi, qui n'ai pas été pointé à La Pra. Heureusement, quand même, que j'ai envoyé mes SMS, histoire que le tout Kikourou sache que je ne suis pas encore en train de bronzer à Vizille. Du coup, ça se déchaîne sur le forum : "ca y est ca se debloque sauf pour bubulle;..." "bubulle est privé de live, c'est un comble !". Ah, c'est malin, je vous jure. Et ça fait rigoler Arcelle, en plus.
Et je ne vous raconte même pas Arclu qui suggère que, pour m'occuper, je fasse un roadbook pour Le Puy-Firminy pour coco38, qui voulait savoir si une frontale Myo Rxp suffirait pour la course, pendant que Sab râle parce qu'elle a la priorité pour que je raboute ses traces GPX du GRP. Ils partent totalement en live, sur le live. Finalement, nous, au milieu des cailloux, on est nettement plus sains d'esprit.
Je relèverai en passant cette perle de loiseau : "Nicou était classé 32ème à la Pra quand il est passé. Seulement, des données ont été transmises plus tard, dont celles de Meyzo qui était passé 27 minutes avant Nicou... Du coup, Myezo est devenu 32ème et Nicou 42ème (ce qui est toujours leur classement à la Pra dans livetrail) Pareil pour Françoise, qui est pointée 75ème à la Pra, parce que les données de centaines de coureurs n'ont pas été transmise. Mais vu qu'elle est 75ème sur son dernier pointage, elle apparaît avant M_Baton par exemple, qui était pointé 122ème mais au Col de Freydane, 7,4km plus loin..."
Les live Kikourou, si t'es pas agrégé de mathématiques, t'es foutu.
Bref, dans tout ça, j'arrive à Jean Collet. Et, le moins qu'on puisse dire, c'est que je n'arrive pas discrètement. Deux grands zigotos sont postés à l'entrée de la petite esplanade du refuge, l'un doté d'une énorme cloche et ils se mettent soudain à hurler : "Vas-y bubulle" et à secouer cette cloche comme des timbrés.
Je viens donc de faire connaissance avec Leurs Majestés Le Kéké et Le Dude. Dans la discrétion. Et ce n'est pas fini car, de loin, j'entends un "vas-y mon bubulle" que je ne connais que trop bien. Eh oui, "elle" l'a fait. Elisabeth a osé affronter les 1000D+ de la montée pour juste venir me voir une demi-heure sur un ravito.
L'ambiance sur ce ravito de Jean Collet est géniale. Dude et Kéké font la claque, on cause avec les suiveurs venus voir leur coureur, Elisabeth me raconte le début du suivi live, les pointages qui ne marchent pas, les échanges de SMS avec Sab qui relaie les infos sur le forum. Pile au moment où je suis là, c'est aussi là que se met en place l'opération "des bâtons pour Chti Gone" qui restera, je crois, un des grands moments de solidarité kikoutière. Sur la base d'appels téléphoniques d'Arclu, de SMS entre Elisabeth et Sab, de coups de téléphone à FranckdeBrignais, ChtiGone (qui vient d'arriver et avait cassé un bâton) va repartir avec les bâtons d'Elisabeth qu'il va utiliser jusqu'au Pleynet où il récupérera des bâtons de secours passés par FranckDeBrignais, pour laisser les bâtons d'Elisabeth dans un sac adressé à moi que je pourrai récupérer à l'arrivée. Et Elisabeth fera sa descente de Jean Collet avec le bâton survivant de ChtiGone.
Les live Kikourou, si t'as pas un Master en Logistique Internationale, t'es foutu.
Ce n'est pas le tout, il faut s'organiser. Heureusement, j'avais planifié l'arrêt avant d'y arriver. En premier lieu, je m'occupe de remplir les flasques, car j'ai trop peur d'oublier. Je pense aussi à engloutir (comme à La Pra) 3 ou 4 gobelets de coca ou eau gazeuse. L'hydratation est bonne et il faut la garder. Surtout, je sais que de Jean Collet au Pas de la Coche, il n'y aura rien et que les 1,5l d'eau vont être limite.
Je fais aussi le point sur les pieds. J'ai malheureusement commencé à sentir deux petits points type ampoules. L'un sur l'intérieur du gros orteil gauche, malheureusement un classique avec les Tor Speed. L'examen révèle effectivement une amorce d'ampoule que je m'empresse de soigner avec un Compeed tenu par une bande élastique que je me félicite d'avoir embarqué dans la mini trousse à pharmacie. Ce soin tiendra pendant toute la course et j'aurai juste à le refaire une fois. Un autre point sensible est à l'arrière de la cheville et, là ausi, un Compeed vient protéger cela. On n'a jamais trop de ces pansements : je devais avoir de quoi en fournir à une armée de trailers, sur moi.
Tout ceci me fait pressentir que les pieds seront le point sensible et qu'il va falloir y être vigilant. Tout cela prend aussi pas mal de temps, mais fait une pause salutaire, pendant laquelle je vois arriver zecrazytux, qui a géré ses crampes comme il a pu et qui va engloutir un bon litre d'eau salée pour en venir à bout. Pas très bon mais cela semble avoir été efficace. Cela nous permet de causer un peu et....c'est très apprécié.
Globalement, tout cela, et surtout tout ce que me raconte Elisabeth sur ce qu'il se passe sur le forum, me requinque totalement. A travers ses explications, je sens tout le soutien que j'ai sur cette course. Ils sont beaucoup à savoir l'importance que j'y ai donné, la motivation que j'ai annoncée à vouloir la terminer et bien la terminer (« ça va chier »). Et, à travers vos messages, vos réactions, je sais déjà qu'aux moments de grande solitude qui vont venir, je ne serai pas vraiment seul et qu'il y aura probablement à peu près à tout moment quelqu'un qui suivra le live (y compris depuis la Chine, pour assurer pendant la nuit, hein Juju ?). Mention extra spéciale aux SMS de Fa2 qui....font ultra chaud au coeur.
Et puis, bien sûr, il y a la présence d'Elisabeth. Un ultra où elle est là en suiveur, c'est carrément autre chose et je passe mon temps sur ce ravito de Jean Collet, à admirer qu'elle soit montée de là-bas, tout en bas, juste pour ça. Je vous l'ai déjà dit ? Bin tant pis, je le redis. Comme ça, ça s'ra dit (rose).
Je finirai l'Échappée Belle, dans une trentaine d'heures. Je le sais. Je ne peux faire autrement.
Je repars de Jean Collet, remonté comme une pendule, accompagné par la cloche, bien entendu. Merci à tous.
J'y ai passé 30 minutes, plus que les 20 prévues. Mais je repars quand même avec 20 minutes d'avance sur le roadbook. Tout se passe vraiment idéalement.
Les choses très sérieuses commencent. La Croix de Belledonne et Freydane étaient déjà sérieux, mais on va changer de catégorie. Enchaînement Mine de Fer, puis Brèche Fendue, ça vaut un enchaînement Glandon/Croix de Fer sur le Tour de France. Sauf que la route n'est pas goudronnée. Enfin, si elle est goudronnée, mais un facétieux s'est amusé à casser le goudron en gros bloc de quelques tonnes chacun et à les répartir avec une science de l'aléa qui relègue la physique quantique au rang d'aimable plaisanterie.
La Mine de Fer, je t'en ficherai. La MINE DE CAILLOUX, oui. Et la Brèche Fendue, bin oui, la brèche s'est fendue...en tas de cailloux qui ont débaroulé (patois gaga que les lyonnais croient être du parler gone, les naïfs) des deux côtés. Un vrai bazar, ces deux cols.
En dessous du Col de la Mine de Fer
Déjà, la Mine de Fer, faut y monter. Je m'y fais assez plaisir. Nous sommes très espacés, mais j'arrive à reprendre trois coureurs dans l'ascension et à faire un trou conséquent derrière moi. On est de plus en plus seuls. Arrivé en haut, la vue sur la Brèche est....impressionnante. Une espèce de vallon totalement minéral sépare les deux cols et, au fond, ce tout petit passage qu'on imagine très raide de loin et où on distingue à peine quelques taches vaguement colorées qui doivent être soit des trailers....soit de petits bouts de trailers éparpillés ça et là façon puzzle. L'une de ces taches doit d'ailleurs être la flaque de vomi que décrira fort délicatement Jacques dans son propre compte-rendu.
Le Col de la Brèche Fendue, depuis celui de la Mine de Fer
De façon assez étonnante, c'est impressionnant de loin et, quand on y est, eh bien on s'habitue. C'est très raide, on progresse à 2 à l'heure en cherchant les fanions dont l'organisation est tout de même avare (il faut dire que pour un fanion sur deux, ils sont obligés de construire un mini cairn pour arriver à le faire tenir debout quelque part). Mais on y arrive sans trop de peine.
25 minutes d'avance sur le roadbook. Bien monté, le gars (si je puis me permettre).
22 minutes d'avance sur le roadbook. Pas mal descendu/remonté.
Je fais une vague tentative d'envoi de SMS, mais nous sommes tout de même perdus au milieu de rien et, comme attendu, rien ne part. Tant pis, ils devront attendre le Pas de la Coche (hihihi, rigole le rude montagnard local : parce que tu crois que c'est moins paumé dans la belledono-pampa, le Pas de la Coche ?)..
Ils ne sont pas les seuls qui vont l'attendre, le Pas de la Coche. Deuxième mini erreur de lecture de carte à l'avance, j'ai mal apprécié la section entre la Brèche Fendue et le Pas de la Coche. Pour moi, il y avait la descente du col, probablement bien velue en terme de cailloux vu les photos, puis une traversée vaguement descendante vers un Pas de la Coche proche, dans des alpages sympathiques.
La descente velue, elle est bien là. En fait, cette descente de la Brèche Fendue est la première vraiment difficile, à mon sens, avec une longue section de gros blocs, une difficulté à trouver son chemin (relever la tête pour viser le prochain fanion, chercher un chemin pour l'atteindre, se demander quoi faire des bâtons, ne pas se vautrer au milieu de l'amas de frigos pétrifiés....et recommencer. C'est long, car la pente générale n'est pas très forte et qu'on descend quand même de 2500 à 2000. J'ai vraiment l'impression de me traîner sur cette section.
Début de la descente de la Brèche Fendue, côté Oisans. Au fond le lac de Grand-Maison, et très loin au fond, la Vanoise
Et, une fois les blocs plus ou moins terminés, en fait de section roulante vaguement descendante, c'est une assez longue remontée qui nous attend, peu roulante. Très solitaire, je ne vois personne. Cela paraît interminable et j'accuse le coup, toujours avec cette impression de se traîner et ne plus avancer, même en côte. Je dois même faire une pause "compote" car j'ai de premiers symptômes d'hypo et je ne dois pas attendre le ravito. Ce passage est la première vraie section de galère pour moi, avec cette impression (idiote) de « perdre du temps ». Donc, si jamais vous lisez cela pour préparer une prochaine EB, souvenez-vous : c'est très très long, la section Brèche-Pas de la Coche.
Enfin, après un temps qui semble infini, on aperçoit le ravito en bas : deux tentes et une vingtaine de personnes. Eh oui, « en bas », on est presque 150 mètres au dessous : c'est malin d'être remonté jusque là pour encore redescendre. Encore un bel exemple du vice qui anime les traceurs de sentiers dans les montagnes, je vous jure.
De 22 minutes d'avance à la Brèche, je passe à « pile dans le roadbook », à la sortie du ravito. En pratique, je n'avais prévu que 5 minutes sur ce ravito, ce qui est bien trop peu (10 minutes est vraiment un minimum sur ce type de distance et avec de tels écarts entre les ravitos). J'ai donc « perdu » presque 20 minutes depuis le Col de la Brèche. J'attribue cela à une sous-estimation du ralentissement dû à la difficulté du terrain, dans la descente, mais aussi une surestimation de la vitesse sur la partie supposément plus roulante. Au bout de 12 heures de course et, surtout quand on a une grosse lassitude, on avance très nettement moins vite. Les pauses « alimentation » en route en rajoutent également.
Bref, ceci me prépare psychologiquement à maintenant perdre du terrain sur le tableau de marche théorique. On verra ce que j'en ferai.
En attendant, je ne fais en fait pas grand chose à part prendre deux bols de pâtes instantanées et essayer de voir si j'ai du réseau (je n'en n'ai pas). En fait, j'ai surtout besoin d'une pause. C'est un effet classique de fin d'après-midi sur un départ matinal, cela m'avait fait pareil à la MH et à la TDS. Qui plus est, pas possible de faire le plein d'eau car le ravito est à court. Les bénévoles nous indiquent un torrent à 1/4h, en fait au pied du Col de la Vache.
Lumière du soir sur les crètes au dessus du Pas de la Coche
Au final, je repars donc assez rapidement. Enfin, assez lentement. Je sens qu'il ne faut pas que je tire trop sur la bête, donc j'y vais à l'économie. Le terrain est courable, mais une marche rapide suffira bien. Une façon comme une autre de continuer à souffler car je sens que le Col de la Vache ne va pas être une partie de plaisir (j'ai vu les photos !). Je vais donc comme cela jusqu'au torrent où je fais le plein assez tranquillement, ce qui me vaut de me faire passer par quelques coureurs.
Il mérite son nom, cette vacherie de col. Fetchez la Vache ! A posteriori, j'estime que c'est là le terrain le plus difficile de l'Échappée Belle. Oui, plus que le Morétan. Il faut monter environ 500D+ et, dès le départ et jusque tout en haut, c'est une accumulation de monstrueux rochers. Nulle part, il n'y a un vrai sentier. On hésite entre « frigo », « congélateur » ou « autobus » pour décrire les rochers. Pour moi, ce secteur est en fait le dépôt des bus retirés du service par les TAG (pour les Gondoriens : c'est la RATP de Grenoble) depuis le début du 20ème siècle, ce n'est pas possible autrement. Il va me falloir 1h35 pour monter ce truc....et 45 minutes pour le descendre jusqu'au Lac du Coc.
Col de la Vache, côté Oisans
C'est en permanence un jeu de piste joué à repérer les fanions à qui on fait vaguement confiance pour nous envoyer sur les endroits les moins pires, à mettre les mains pour grimper sur un rocher, les fesses pour descendre d'un autre, à chercher les prises pour en escalader un troisième. J'ai fort heureusement rangé les bâtons dès le départ, ils ne servent strictement à rien et je les reprendrai au Lac du Coc.
Seulement 6 minutes de « retard » en haut du col. L'estimation n'était finalement pas si mal que ça. A posteriori, j'en suis fier, il était vraiment bien ce roadbook.
Lever de Lune au dessus du Lac du Coc, depuis le Col de la Vache
Je ne m'attarde guère car je veux encore profiter au maximum de la lumière (qui est magnifique, cf la photo avec la lune se levant au dessus du Rocher Blanc). La nuit va vite arriver et autant se trouver sur le terrain "roulant" le long des lacs des 7 Laux. Je m'équipe d'ailleurs de la frontale et je reprends les bâtons, au Lac du Coc. Et là, mauvais surprise : la frontale était allumée dans le sac, j'ai l'impression. En la rangeant, j'ai du appuyer sur l'interrupteur....
Peu de souvenirs du passage le long des lacs. C'est très beau, mais je ne peux plus guère faire de photos. J'allume la frontale. Je dépasse quelques coureurs, c'est à peu près tout ce dont je me souviens. En fait, la seule chose dont je me souviens, c'est le clignotement d'avertissement de la Stoots et....son passage en mode « survie ». Meeeeerde, elle est bien restée allumée dans le sac depuis que je l'ai rangée, à l'Arselle, et donc....j'ai vidé la première batterie.
Cela me contrarie nettement. Me voilà déjà sur la deuxième batterie, je vais donc avoir besoin absolument de prendre la Fenix en frontale de secours au lieu de la petite frontale de dépannage D4. Et elle est juste énorme, la Fenix. Bref, ça me contrarie et je décide quand même d'essayer d'arriver à garder un max de batterie pour la Stoots, pour les passages délicats. Je me mets donc en 40 lumen. En fait....c'est bien suffisant car, au même moment, on passe le Lac Noir, le Col de la Vieille...et....
...du col il lui lui descendre dans le Cul, à la Vieille. J'y peux rien, c'est l'IGN qui l'a écrit. Et, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle a le cul escarpé, la bougresse. J'ai détesté cete descente, je ne sais pas pourquoi, elle n'est pas si difficile que ça, mais je bloquais, j'étais lent. Pourtant, en haut, je suis PILE dans le roadbook, à trois minutes près, un vrai métronome.
Mais là, je suis moins métronome. Cette descente n'en finit pas. Je me rappelle qu'elle se termine au Chalet du Gleyzin de la Ferrière, pile « en face » du ravito du Pleynet. Et qu'ensuite commencera un très long contournement de la vallée pour revenir au Pleynet. Mais j'ai l'impression que ce bas de descente n'arrive pas, je suis las, j'ai vraiment envie de me poser.
Des bénévoles pointent au chalet, nous annoncent « ravito à 1h » (ce qui est vrai), nous y voilà enfin. On tourne à gauche, on va prendre le sentier à flanc et.......je vois les frontales de mes prédécesseurs *remonter*. Et là, ça fait un déclic, j'ai un GROS coup de barre, la tête qui tourne encore, un gros coup de découragement, une immense lassitude. Il faut s'arrêter.
Pas d'affolement. Déjà, la compote salvatrice. Ah, et puis non. Deux compotes. Et un nougat Aptonia. Excellents, ces nougats, ils se mâchent bien. Pas comme ces m.... de barres. Dommage que j'en aie peu. J'attends, frontale éteinte, que cela fasse effet. 5 à 10 minutes, je ne sais pas trop. Enfin, je me sens un peu mieux, il faut repartir avant d'avoir froid. Je repars. Doucement. Très lentement. Il faut bien se la faire, cette espèce de montée. Car, oui, ça monte. Cela se voit à peine sur le profil, c'est une espèce de ridicule bosse, mais on remonte bien de 50D+. Et j'ai l'impression que c'est un mur. Je me fais dépasser, encore, mais je m'accroche aux gars devant. Il faut que je me batte un peu, je ne vais pas laisser la planète entière me laisser sur place, moi qui suis si fier de pacmaniser dans les montées.
TRÈS progressivement, cela se stabilise. Le chemin, interminable, traverse plusieurs torrents. Peu à peu, je reviens sur mes prédécesseurs. Peu à peu, le ravitaillement fait son effet, je retrouve de l'énergie. Je sais que ça ne durera pas forcément. Je viens de prendre la décision de dormir au ravito du Pleynet, d'y sacrifier du temps. Il m'a suffi pour cela de penser à tous ceux qui me soutiennent, ceux qui sont sur mon épaule, là. Il me l'ont bien répété que le plus important sera de terminer, que je dois oublier le roadbook. Et là, je viens en fait de décider d'oublier le roadbook. Parce qu'ils me l'ont rappelé, tous mes petits lutins invisibles qui me suivent. Merci, les lutins.
Et ça fait du bien. J'ai l'esprit libéré. Je commence à repasser les prédécesseurs. Puis, on arrive à la piste verte (Chalet du Pra), vague souvenir de mes années de ski adolescent. J'essaie de courir ? J'essaie. Ça marche. J'essaie d'accélérer ? J'essaie. Ça marche. Je vais repasser presque 10 coureurs dans ce long chemin roulant, yargla. Ça y est, je sens à nouveau couler dans les veines la toute bonne adrénaline, celle qui fait voler. Ça envoie du lourd (enfin...à 9 ou 10 km/h, hein). En plus, on croise des piétons fantômatiques sur ce chemin : ceux qui montent à la rencontre de « leur » coureur. Et ils sont super, ils encouragent à fond, on se sent porté. L'arrivée sur le Pleynet est magique avec tout ce monde qui nous applaudit et nous encourage.
Et puis, elle est là, bien sûr : « vas-y mon bubulle ». Y'a que sur les courses que je suis son bubulle, mais c'est aussi ça la complicité, non ? Donc j'y vais et j'atteins enfin cette base vie.
Arrivée d'un bubulle flou au Pleynet
Même si je l'ai oublié, le roadbook disait 16h43. Clairement, la descente de la Vieille et la pause qui a suivi m'ont coûté, mais le revival qui a suivi a limité la casse. Mais, maintenant, il est temps d'oublier cela. Je ne passerai pas qu'une heure comme prévu initialement : il me faut au moins 30 minutes de sommeil et je le dis à Élisabeth.
Sur le forum, je me fais traiter de cabot par Arclu parce que je suis arrivé 2 minutes après l'heure du « Bouzin » (suivi automatique qui donne les passages de tous les kikous, chaque heure). Soi-disant que je le ferais exprès pour qu'on s'inquiète. Namého.
Dans la descente, j'ai révisé le programme : prendre une douche (je sais qu'il y en a des chaudes), se changer entièrement, recharger les flasques, se poser un moment sans rien faire pour regarder les SMS et probablement un coup de téléphone avec Jean-Baptiste via Skype, aller manger chaud, puis dormir.
Coup de téléphone direct Le Pleynet-Montréal
Et je déroule ce programme à la lettre. Les douches sont un bonheur absolu. Rustiques, certes (à même le sol) mais superbement chaudes. Avoir pensé à mettre une serviette et du produit à douche dans le sac base vie est une bénédiction. Je ressors tout neuf avec une toute nouvelle tenue. Le reste passe tranquillement, avec l'aide d'Elisabeth. Grande joie d'avoir JB au téléphone, même si Skype fait que je l'entends très mal. Nous montons au restaurant et un énorme plat de spaghettis bolo (j'oublie un peu la limitation de la viande, là !) est englouti sans trainer. Il est tellement énorme qu'il m'est impossible de le terminer.
Il ne reste plus que la sieste prévue. Je laisse Élisabeth rentrer sur Allevard et gagner un repos bien mérité et je rejoins le dortoir. Las, je me rends vite compte qu'il me sera impossible de dormir. Je n'ai pas assez sommeil pour m'écrouler. Cependant, je reste ainsi 25 minutes allongé, les yeux fermés, dans le (relatif) silence. Ce sera sûrement profitable, malgré tout.
Vers 0h45, branle-bas de combat. Je rends le sac de base vie après une dernière vérification et je me remets en route avec un SMS à Elisabeth : « je repars ».....et je reçois illico un « et moi j'arrive à Allevard ». Voilà, je repars seul dans la nuit et elle, elle va se coucher.
On aramène le sac d'allègement et, hop, on s'y rejette (photo Jean-Luc Augier)
1h50 d'arrêt au lieu de 1h. J'ai donc 1h07 de retard sur le roadbook. Je note cela pour la postérité puisque je ne me préoccuperai du roadbook que pour les durées des étapes. J'ai normalement prévu un peu plus de 4 heures pour aller à Gleyzin, étape découpée en 4 parties : descente sur la vallée, montée raide et longue (presque un KV) jusqu'à la cabane de Tigneux, traversée jusqu'au Lac du Léat, descente sur Gleyzin.
Coup de chance, je repars avec un autre coureur et je lui propose de cheminer ensemble. Il est très sympathique (je n'ai malheureusement pas noté son nom, mais......le suivi live m'apprend qu'il s'agit d'un certain Pierre, qui finira en 52h34). Nous papotons tranquillement en descendant à belle allure. C'est son premier ultra de plus de 100km après « juste » un 80km du Mont-Blanc. Pour un peu, je ferais presque figure de vieux cador buriné avec mon petit « palmarès » à moi qui se monte à .....5 trails de montagne, et deux ultras de plus de 100km.
Sur la partie de plat en fond de vallée, nous envoyons bien et dépassons 2 ou 3 groupes, dont un où je me fais visiblement reconnaître grâce au petit Bob l'Éponge. Par contre, je ne sais pas trop qui est le kikou qui m'a interpelé car, comme pratiquement toujours, j'oublie stupidement de demander le « t'es qui toi ? » qui me semble de toute façon toujours impoli. Désolé, camarade.
Le repos m'a fait beaucoup de bien, j'ai l'impression d'avoir des jambes toutes neuves et j'ai une furieuse envie d'envoyer dans la très longue montée vers le refuge de la Grande Valloire. Je résiste car je me rappelle d'un CR lu sur Kikourou où l'auteur indiquait une belle euphorie après Le Pleynet où il s'était laissé aller...ce qu'il avait ensuite regretté dans le Morétan. Je décide donc de me raisonner et pour cela j'adopte une routine que j'utiliserai ensuite sur toutes les longues côtes :
Dès le départ de la côte, ma marche nordique bien envoyée a décroché Pierre, j'ai passé un groupe de trois et je me retrouve seul. Très seul. Je vais en fait faire cette montée quasiment totalement seul. Au bruit de conversation derrière, j'entends que je prends progressivement du terrain à ceux qui me suivent, mais je ne rattrape personne avant l'altitude de 1600m.
Le rythme est régulier. Relativement lent, mais toujours avec mes enjambées immenses, donc je monte cette côte à 550m/h, sans effort particulier. Vitesse pas météoritique, mais à ce stade de la course, assez respectable. Je finis par rattraper deux coureurs puis une coureuse néerlandaise, Martine, tout juste avant le refuge.
Au refuge, un pointage et....du café et du thé. Il faut profiter de toutes les occasions d'hydrater et nourrir tout cela, donc je prends le thé avec Martine à 1850m d'altitude. Il faut être sociable..:-)
Martine prend un peu de temps et je repars donc seul. En fait, elle va me suivre à quelques minutes et je verrai sa frontale jusqu'au lac du Léat. Pas grand chose à dire sur cette section, j'avance assez bien en alternant course (enfin trottinage) quand le terrain est plat et marche active quand ça monte.
Après un dernier petit raidard, le point le plus haut de cette section (1950m) est atteint avec 1h05 de retard sur le roadbook. Il est peu marqué et je m'en rends à peine compte, le sentier redescendant à flanc jusqu'au lac du Léat et un pointage effectué près d'un grand feu. Je ne m'attarde pas, je sais qu'il reste une longue descente que je crains un peu, je ne sais trop pourquoi. Je suis toujours aussi seul, les écarts deviennent très importants.
La descente est effectivement très longue et j'adopte la même tactique qu'en montée : boire tous les 200 mètres de dénivelé négatif. Cela permet de rythmer et me permet aussi d'avoir une idée de l'arrivée à Gleyzin, qui est à un peu moins de 1100m. Cette descente commence assez doucement sur un chemin facile où je me fais une seule frayeur : à un moment je me dis « eh, je n'ai pas vu de balisage depuis longtemps ». Or, le balisage est vraiment très lâche : bien souvent il peut y avoir 200 ou 300 mètres entre deux fanions et il suffit qu'un fanion soit tombé ou que sa partie réfléchissante soit invisible pour le louper. Finalement, fausse alerte, je retrouve un fanion, mais je me voyais déjà remonter pour retrouver le bon chemin....ou sortir la carte IGN de mon téléphone pour rattraper le bon parcours !
Un coup de chance : à mi-descente, j'entends des bruits se rapprocher. Un coureur me rattrape. Je ne sais pourquoi, je n'ai pas envie de me faire dépasser. Du coup, nous allons « fighter » pendant tout le reste de la descente, moi en point de mire...et lui s'efforçant de me dépasser. On s'occupe comme on peut, mais du coup, cela me fait tenir un bon rythme dans la descente. Peut-être un peu trop élevé car mes cuisses commencent à protester fermement.
Au final, il me dépasse, je baisse pavillon. Bravo, Pierre, dossard 54. Il finira, lui aussi, en 49h09. Merci de m'avoir aidé sans le savoir. Cela dit, je suis quand même à nouveau bien entamé en arrivant et les dernières centaines de mètres m'ont ramené un coup de moins bien et une grande lassitude.
1h37 de retard sur le roadbook. En fait, le temps perdu est plus ou moins l'arrêt non planifié au refuge de la Grande Valloire. Tous ces arrêts intermédiaires n'étaient pas anticipés : une autre leçon que je dois retenir pour d'éventuels futurs roadbooks sur ce type de format. Il y a forcément des arrêts de 5-10 minutes ça et là en dehors des ravitos, on n'est pas des machines.
Cela dit, à cet instant, je n'y prête aucunement attention. Cela fait un moment que j'ai décidé d'oublier le roadbook. D'ailleurs, je viens aussi de décider d'essayer à nouveau de dormir. Cette lassitude ressentie en bas de la descente, je ne me vois pas repartir vers l'Oule et le Morétan avec. Donc, après 10 minutes assez peu « productives » sur un banc dans le ravito (un peu désert : un ou 2 coureurs, un coureur qui abandonne et une dame qui attend visiblement son coureur avec un air...un peu endormi), je me dirige vers le dortoir. Ici, les bénévoles demandent l'heure à laquelle on veut être réveillé : je demande 30 minutes. J'ai envoyé un SMS à tous ceux qui me suivent pour indiquer « Gleyzin entree 5h07. Tres long le passage Pleynet-Gleyzin ». Puis « Repartir sera difficile mais on va se motiver ». Puis (au moment où je décide qu'il faut aller dormir) « Vais dormir. Trop sommeil pour le Morétan ». On voit qu'en fait, je n'avais pas le moral au plus haut à ce moment là...:-)
Peine perdue. Je ne m'endors pas. A nouveau ça se bouscule dans ma tête, je stresse de ne pas arriver à dormir, je stresse devant les 1500m du Morétan. Mais, à aucun moment, je n'envisage de laisser tomber. A aucun moment je n'envisagerai de laisser tomber. Je me répète dans ma tête « Je finirai l'Échappée Belle. Je le sais. Je ne peux faire autrement. Pour moi. Pour eux qui croient en moi ». Mais je ne dors pas.
Et donc, 25 minutes plus tard, je me résigne. Il ne reste plus qu'à repartir. Ne pas moisir ici. Je me motive en me disant que je connais les 1000 premiers mètres de la montée et que ça va donc aller. Que je vais prendre le même rythme qu'on avait avec Elisabeth mardi et que ça va donc aller. Ça va donc aller.
« En route pour la galère. Je vous fzis signe au refuge de l'oulr. Oublier le roadbook ». C'est, fautes de frappe incluses, ce que j'envoie à mes suiveurs.
Tout cela est fidèlement relayé par Sabine sur le forum. Et elle conclut par « Bon, il a le sourire, c'est bon signe ». Alors, là, Sab, je crois qu'il faudrait que je me revoie, mais je ne suis pas sûr que j'aurais parlé de sourire...:-).... Disons une espèce de rictus verdâtre et glauque, ce serait plus juste.
Mais quand, même, Sab, 5h du matin, quoi. Les live Kikourou, si t'es pas pompier de garde en Chine, t'es foutu.
Sab en plein live, le samedi
Top chrono. Je regarde l'heure. 1h39, temps de mardi à battre. J'ai promis à Elisabeth que je lui dirais. Et puis, ça occupe...:-)
Je repars en mode « marche nordique lente ». Mais alors bien lente, quand même. Toujours aussi totalement solitaire. Pas de repère pour savoir si j'avance bien ou pas. Je ne verrai strictement personne jusqu'au refuge de l'Oule. J'oublie de retrouver la balise « au pied de l'arbre » que j'avais promis à Elisabeth de chercher quand on l'a vue mardi. Je suis un peu focalisé sur « avancer, avancer, avancer ». L'éboulis est bien passé, le raidard qui suit aussi. C'est sympa de connaître le chemin et d'avoir des repères. Finalement, j'arrive « assez vite » au torrent, puis à l'endroit où, mardi, nous avions vu le troupeau (et fait notre première expérience de patous). Je guette à droite des coureurs du 87km descendant directement du Lac du Léat, mais je n'en vois pas. Et finalement, j'arrive au Refuge de l'Oule.
« Oule, 1h26. Montée plus vite que mardi ». Comment je me la pète....:-). « Le Morétan va voir ce qu'il va voir » dit Arclu sur le forum. Oui, bin quand même on se calme, hein. Déjà, petite pause (encore une pas prévue), un coucou à cyss que je suis content de retrouver ici (ce n'est pas fini !) et qui va se coucher au refuge (LA bonne idée, qu'a eue aussi TomTrailRunner : c'est bien mieux pour dormir au calme qu'à Gleyzin). Pour ma part, je n'ai qu'une envie : en découdre avec ce Morétan. Donc, je repars assez vite après avoir rangé la frontale (le jour s'est levé à mi-chemin du refuge).
La montée au plateau, j'avais mis 22 minutes, mardi, je vais essayer de voir ce que ça donne. Je repars sur mon rythme lent. Au milieu de la montée, je décide de ranger les bâtons. Trop de blocs, ils me gênent. Au final, j'oublierai de regarder l'heure au plateau et je ne saurai jamais si j'ai été plus vite (je ne pense pas : mardi j'étais monté vraiment vite). Curieusement, je trouve le terrain moins tourmenté que mardi : en effet, le balisage ne suit pas le chemin balisé par les cairns, mais une trace plus praticable. J'arrive enfin assez rapidement au pied de ce que je m'attends à être la même chose que le Col de la Vache.
Arclu sur le forum : « J'imagine ce qui doit se passer dans sa tête : du plaisir, de la souffrance et j'espère de la fierté d'être là car c'est mérité. ». Tu as totalement raison. Mais il y a aussi « Putain de chierie de cailloux de merde » en même temps que la fierté machin et les trucs littéraires bidule.
Eh bien non. Croyez-le ou non, mais je trouve cette montée nettement plus « facile » que la Vache. En fait, bien souvent, il y a une trace et on n'est pas en permanence sur des blocs instables. A tel point que je ressors les bâtons car il est souvent possible de marcher presque normalement. Attention, je ne dis pas que c'est « facile ». C'est raide, voire très raide. Et, parfois, totalement cahotique. Et les derniers mètres, après le micro-replat où sont les tentes des bénévoles, sont par contre une horreur. Très glissants et ultra raides, c'est à 4 pattes, voire presque à plat ventre que je termine. Je dois m'y reprendre à trois fois : « None Shall Pass ».
En fait, non, pas de Chevalier Noir en haut, juste les gentils bénévoles qui m'ont regardé patauger sur ces derniers mètres. « Bienvenue au Morétan ». C'est la phrase traditionnelle. Je suis fier. J'ai vaincu l'Ogre de cette Échappée Belle.
3h pile pour monter. Je pense que je peux être fier de moi, c'est bien mieux que le roadbook (3h40). Du coup, d'ailleurs, je n'ai plus qu'une heure de retard sur lui et, pour une fois je m'en rends compte. Je suis tellement fier que j'essaie d'envoyer un SMS, mais c'est peine perdue. Allez, j'arrose cela à coup de compote et....il faut songer à y aller pour le deuxième gros morceau : la descente sur Périoule.
Là, c'est le compte-rendu de l'ami Franck qui défile, et aussi l'accident d'Elcap en 2013. J'appréhende cette descente, c'est clair, je vais donc l'aborder prudemment. Déjà, on vise le névé, tout petit désormais...que j'atteins assez vite. Il glisse pas mal mais est en fait bien moins pentu que je ne pensais. Un coureur plus habile m'a cependant passé. Ce ne sera pas le dernier...:-)
Quelques amas de gros rochers après le névé et là je me prends deux grosses chutes successives sur le dos, dans les rochers. Pas de mal, mais j'ai peur a posteriori : j'aurais vraiment pu me faire très mal (d'ailleurs un coureur qui me suit et qui m'a vu a eu peur pour moi). C'est sûrement ainsi qu'Elcap a eu son accident. Je me crispe.
Oui, oui, c'est bien moi, perdu dans les rochers et pas super à l'aise. Casquette à l'envers pour y voir au loin et chercher les fanions (photo Matthieu Rieux)
C'est donc assez lentement que j'arrive à la moraine. Elle a en fait été entièrement équipée de cordes fixes et je ne me prive pas de m'en servir. C'est très raide, et glissant. Le fait d'être crispé n'aide guère et je vais cumuler quatre chutes sans conséquences dans cet interminable passage. Un coureur me dépasse comme un avion, très à l'aise. Je crois que c'est un coureur du 87km mais il n'en n'est rien.
Je « respire » quand on arrive en bas de la moraine. Nous sommes maintenant au fond du vallon de Périoule et ça va être roulant, il va suffire de dérouler.
Non. Il ne suffit pas. Ce vallon est un chaos d'éboulis, l'annexe du dépôt d'autobus de la Vache. Ils n'en finissent pas. C'est rythmé par des tirs de canon destinés à éloigner les loups (qui doivent se repaître des restes de trailers coincés dans ces foutus rochers). C'est un vrai bazar, cette montagne pas rangée. Je peste.
Bziiiiit, clac. Sur un appui innocent, mon bâton gauche vient de casser. La poisse. Et je perds encore du temps à le ranger. Et je perds encore du temps à ne pas avancer dans ces foutus éboulis. J'en ai marre, la chaleur commence à arriver, JE VEUX EN FINIR AVEC CE PUTAIN DE VALLON.
La moraine et la descente du Col de Morétan vu depuis le fond du vallon de Périoule
C'est à peine si je pense à prendre une photo de la descente. Je n'en ferai aucune autre dans cet endroit pourtant magnifique. Je n'en profite pas. J'avance mal, je me sens gauche, maladroit.
Pourtant, c'est roulant, non ?
D'autant plus gauche que soudain, le premier coureur du 87km me fond dessus. Il peste lui aussi (ça fait deux). Il me lance rapidement qu'il est en train de sentir la déshydratation qui vient. Je n'ai malheureusement rien à lui proposer, notamment pas de sel, désolé.
Je vais continuer à clopiner comme cela, avec mon unique bâton pendant ce qu'il me semble être des heures. Ce vallon est très long et je sens que j'ai le dessous des pieds qui commence à brûler, ce qui m'empêche en pratique de vraiment bien courir alors que je le pourrais enfin.
Deux autres coureurs du 87km vont encore me passer avant que je n'atteigne les petites tentes du ravito de Périoule. J'aurai rarement attendu un ravito avec autant d'impatience. Pas tellement qu'il me manque grand chose (quoique que je sois arrivé au bout de mes 1,5l d'eau), mais parce que j'en ai vraiment assez de ce terrain. Aussi, peut-être parce que c'est environ à ce moment là que je dépasse ma plus longue durée jamais faite en course (28h30 à la TDS). J'entre donc en « terra incognita ».
Périoule, le ravito du bout du monde (photo ElNumax)
1h06 de retard sur le roadbook. C'est fou, je n'ai presque pas perdu de temps malgré mes malheurs. Il était vraiment bien fait, ce roadbook. Mais, en fait, je ne m'en préoccupe pas une seconde. Je ne le sais d'ailleurs même pas !
J'essaie d'envoyer un SMS pour prévenir Elisabeth de m'apporter mes bâtons de secours, mais pas de réseau (je m'en doutais un peu). J'essaierai plus tard, tant pis. Au ravito, tout le monde est aux petits soins. J'engloutis deux bols de pâtes, pendant que le 4ème du 87km passe. Étonnant les écarts qu'il y a déjà sur cette course, d'ailleurs.
Je cause avec les bénévoles et avec elNumax (que je ne reconnais pas : ce n'est qu'après que je me rappelerai qu'il avait dit qu'il serait là). Un autre coureur qui a aussi cassé son bâton me suggère d'essayer de récupérer une branche dans la forêt. Je tâcherai de m'en souvenir.
La chaleur monte, il est temps de repartir. J'ai retrouvé un peu de jambes et j'essaie de trottiner. Malheureusement, cela me brûle vraiment fort sous les pieds, je crains l'effet déjà constaté à la Montagn'hard. Je peux donc à peine trottiner, surtout quand le terrain est difficile.
Et il l'est quand même. La descente sous le barrage, en forêt, est un peu cahotique. Oh, certes, en bon état, je la ferais sans problèmes, mais la souffrance sous les pieds me bloque vraiment. Je cherche aussi une branche adaptée, ce qui me fait perdre un peu de temps encore. Je fini toutefois par en trouver une, un peu longue, mais qui a une prise pas trop désagréable. Je l'appelerai plus tard « mon bâton de Gandalf ».
Pendant ce temps, c'est un peu le défilé de coureurs du 87km. Tous passent avec un mot gentil, mais c'est un peu déprimant de ne pas avoir l'impression d'avancer. En fait, j'attends le retour sur la route forestière avec une grande impatience. Elle finit par arriver et offre un petit kilomètre de répit en plat descendant, mais malheureusement toujours avec cette difficulté pour courir.
C'est donc la nouvelle montée vers la Pierre du Carré que j'attends. Là, au moins, je ne serai pas trop pénalisé par cette douleur aux pieds. Entretemps, j'ai encore perdu un peu de temps à essayer d'envoyer un SMS à Elisabeth pour les bâtons, ce que j'ai fini péniblement par faire. Je l'imagine en train de m'attendre avec grande impatience à Super Collet, et j'imagine un peu les amis qui attendent également.
La montée est là. J'ai fait mon calcul usuel : 500D+, départ à 1200m, donc un « stop intermédiaire » à 1450. Je me programme de boire tous les 50 mètres car il fait extrêmement chaud. Je me rends vite compte que la montée n'est absolument pas à l'ombre. En fait, elle est terrible, cette montée. Extrêmement raide (près de 30% en moyenne), en plein soleil. Tous ceux qui l'auront faite de jour diront plus tard que c'était un des moments les plus difficiles.
Pour m'occuper, je fais des calculs...:-). Vous serez ainsi heureux d'apprendre que je monte de 16 centimètres à chaque pas, ce qui veut dire 300 pas pour monter de 50 mètres et avoir droit à ma gorgée de glou-glou. Et donc, je compte mentalement « 1-2-3-4-5.......101-102-103.....298-299-300....Glou-glou....1-2-3-4.... ». 500D+, ça ne fait finalement que 3000 pas....
Je monte assez bien malgré le handicap du bâton unique. Moins de coureurs du 87km me dépassent et, visiblement, eux aussi ont du mal. Les deux premières féminines passent à 1 ou 2 minutes d'écart : belle bataille en perspective même si la deuxième a l'air de pester car la première a clairement des pacers avec elle. Je m'arrête comme prévu au milieu de la montée et j'engloutis deux compotes de suite.
Enfin, le Chalet du Compas se profile. C'est un point d'eau, mais je choisis de ne pas m'arrêter, je veux vraiment arriver à Super Collet. J'aurai mis une heure pour monter ces 500 mètres. Pas très glorieux, mais avec un bâton et demi, ce n'est pas mal. Je m'attends à une traversée d'abord un peu montante, puis à flanc, relativement courte, jusqu'au refuge de la Pierre du Carré. Mais cela n'en finit pas. Le refuge n'est jamais là. J'ai de plus en plus de mal à courir avec ce terrain bien que ce soit presque plat.
En fait, le refuge, on doit passer à côté mais je ne l'ai simplement pas vu. Et du coup, on débouche soudain à un petit col et c'est la délivrance : Super Collet est là, en bas. Du coup, mon bâton de Gandalf à la main, je me mets à dévaler la piste de ski qui nous amène à la station. J'ai super mal sous les pieds, mais je veux arriver. Je redépasse même ceux qui me dépassaient sur le plat. Et c'est presqu'aussi vite qu'au Pleynet que j'arrive, avec ma chérie qui m'attend, visiblement impatiemment.
Le roadbook disait 30h04. J'ai donc soudain 1h38 de retard. J'ai vraiment pris cher sur cette partie depuis Périoule, plus d'une demi-heure. Mais, je suis depuis un bon moment en mode finisher et il y a bien longtemps que j'ai compris que les arrêts seront bien plus longs que ceux prévus.
Justement, là, l'urgence, c'est de voir ce qu'il en est au niveau des pieds. Le déballage confirme les craintes. Le dessous des pieds est totalement blanc. Il faut que j'aille voir les podos pour voir ce qu'on peut faire, c'est clair. La médecin qui passe à ce moment regarde mes Tor Speed et me confirme que leur responsabilité n'est pas nulle. C'est bien, les chaussures WaterProof (pas totalement mais sur environ 1 ou 2 cm), mais c'est moins respirant. Et le résultat est là.
La podologue me fait toutefois des miracles. Elle soigne les petites ampoules apparues sur les gros orteils et me fait un super nokkage qui calme largement le problème. De plus, j'ai mis à tout hasard les Rapa Nui dans le sac d'allègement et, donc, je peux changer de chaussures pour des chaussures plus classiques. Comme, de plus, je peux totalement me changer, chaussettes comprises, il y a quand même beaucoup de mieux.
Elisabeth reste avec moi tout le temps. Elle va me chercher à manger, elle m'aide à gérer le sac d'allègement. Et même Caroline/Patrovite69 y va de son aide (elle attends Franck qui est sur le 87 et doit se rapprocher de moi). Je suis un peu comme un coq en pâte. Pour autant, je prends mon temps. C'est le "dernier" gros morceau qui va venir, maintenant, jusqu'à Val Pelouse, le dernier que je redoute. Donc, je dois partir dans les meilleures conditions et elles m'y aident bien. Quelle équipe de suiveuses...
Super Collet avec Caro. Noter également le « bâton de Gandalf » précieusement conservé
C'est au final une heure que je vais passer à Super Collet, au lieu de la demi-heure prévue. Mais c'était nécessaire et cette demi-heure "investie" va certainement payer car l'étape suivante doit durer 7 heures selon le roadbook. Et cette étape jusqu'à Val Pelouse sera la clé. Bien sûr, je vais terminer, je ne peux que terminer, sauf accident, je crois vous l'avoir dit. Je suis toujours aussi déterminé à le faire. Mais il faut gérer cela et, quand même, pour la première fois, je songe aux barrières horaires, moi qui ne le fais jamais (j'ai même été présomptueux au point de ne pas les indiquer sur mon roadbook).
J'envoie des SMS qui disent en gros que les pieds sont retapés, que je repars avec grosse motivation, en mode finisher. Arcelle et Sab les relaient sur le forum et me font confiance. Pfiou, a posteriori, comment voulez-vous décevoir des supporters comme ça ? Il faudrait pouvoir lire le forum pendant la course, on serait encore plus requinqués de voir tous ces amis, connus ou inconnus, qui se font des suspenses à nous voir avancer (ou pas).
2h36 de retard sur le roadbook. Je repars donc largement regonflé.....pour revenir 2 minutes plus tard. J'ai oublié de demander la batterie de Stoots à Elisabeth, qui l'a rechargée pendant la journée. J'aurais l'air malin à devoir utiliser la frontale de secours alors que j'ai une assistance de choc !
J'attaque à fond dans la côte......ou pas
Mercredi, j'avais dit à Franck : « s'il me reste des jambes à ce stade de la course, j'attaque fort dans la montée à la crète de Super Collet ». Il ne reste malheureusement pas tant d'énergie que cela. Donc, j'avance bien, je remonte même du monde mais ce n'est pas le bubulle volant, quand même. Le pire, c'est que je reperds tout le terrain gagné lorsque, arrivé en haut, je constate que j'ai oublié de reprendre des compotes dans le sac d'allègement. Il faut que je demande à Elisabeth de m'en apporter à Val Pelouse. Le seul défaut est que je passe mon temps à m'emmêler les crayons avec le téléphone pour l'appeler. Au bout de 10 minutes, j'arrive finalement à lui laisser un message, mais tout cela me contrarie. Je vais devoir passer ces 7 heures en gérant 3 malheureuses compotes.
La bonne nouvelle, c'est que les pieds vont clairement mieux. Bravo aux podologues....et bravo à moi pour ma prévoyance à mettre des chaussures de rechange.
Et puis de toute façon, j'ai ma nouvelle casquette rose trop belle qu'on a trouvée à D4. Donc, rien ne peut m'arriver. Je vous ai déjà dit que je vais la finir, cette Échappée Belle ?
C'est donc en mode requinqué que j'arrive au Col de Claran, pour la descente sur Le Chalet de Pré Nouveau. Cette descente, de 600D- m'a laissé peu de souvenirs. Je fais un peu le yoyo avec un duo (un coureur du 144 avec son pacer, puisque les pacers sont autorisés à partir de Super Collet), un peu trop bavards à mon goût, ce qui me motive à avancer autant que je peux pour les lâcher....ce qui n'est quand même pas facile car je ne vais plus très vite en descente.
Je dépasse aussi une des rares féminines de ma course, qui semble avoir du mal à avancer en descente mais qui reviendra plus tard, dans la montée du refuge des Férices. Cela dit, a posteriori, je note que j'ai mis 1h35 pour descendre ces 600m, ce qui n'est pas bien glorieux, tout de même (même s'il y a un petit coup de cul de 50m au milieu de la descente). On en reparlera, de cette coureuse.
Arrivé au torrent des Férices, j'y refais le plein car dans la descente, j'ai quand même descendu mes deux flasques, preuve tout de même que la chaleur est vraiment très intense. Il ne serait pas prudent de partir dans la montée du Refuge des Férices sans carburant. Car, elle est raide, cette montée....et en plein soleil. Certes, il est plus de 17 heures, mais ça tape encore très fort.
La montée du refuge. 500D+ à partir de 1350m. Donc, un arrêt programmé à 1600 et deux gorgées tous les 50 mètres de dénivelé, ce sera le protocole. C'est vraiment bien d'avoir inventé cette routine car cela évite d'avoir l'esprit obnubilé par le fait que « ça n'en finit pas » (vous connaissez, vous, une seule montée, en montagne, qui en finisse plus vite qu'on ne pense ? C'est un concept qui n'existe pas, on est bien d'accord ?). Je sais parfaitement quand ça va finir et, donc, je garde mon rythme d'escargot régulier. Et, finalement, bien que des coureurs du 87 me dépassent encore ça et là, c'est plutôt efficace.
Du coup, le Refuge des Férices arrive un peu par surprise car je voyais bien que j'étais à la bonne altitude, mais il est invisible depuis le bas. Il est quand même le bienvenu, et je vais célébrer ma petite victoire supplémentaire par une nouvelle compote (je les économise car il faut tenir jusqu'à Val Pelouse).
36h23 de course : un jour et demi que je suis parti. J'ai 2h32 de retard sur le roadbook (mais le roadbook, on s'en fout). On voit que ce retard augmente lentement : tous les petits arrêts indispensables à la récupération y sont sûrement pour beaucoup, c'est un des points dont il faudra que j'apprenne à tenir compte dans le futur. Je continue à apprendre.
Jacques râle sur le forum que je "féchié" avec mes heures de passage à la noix, pas calées sur les heures de bouzinage. Nan mais je vous jure.
Ici, nouvelle erreur de cartographie de ma part. Je croyais me rappeler que, depuis le refuge, on allait continuer à monter jusque sous le Col d'Arpingon (à 2250m), puis redescendre ensuite progressivement par la crète des Férices.
C'est une vision beaucoup trop simpliste et cela va me perturber. C'est le défaut d'avoir en général le parcours bien en tête : on a l'impression de le dominer, de le maîtriser. Cela va bien tant qu'on ne se trompe pas. Mais si on a mal mémorisé, ou mal compris la carte....eh bien, c'est perturbant, voire démoralisant. C'est un peu ce qui m'arrive sur cette section.
En réalité, après le refuge, on part en traversée plus ou moins à niveau, assez longue, puis on franchit une première crète (pour 100D+), on redescend un peu au pied d'un grand éboulis (La Grande Lanche), puis une remontée très sèche fait franchir un ressaut rocheux, suivi d'une traversée finale en pente plus douce jusqu'au col d'Arpingon (en fait quelques dizaines de mètres sous le col). Enfin, une dernière remontée encore assez rude fait monter AU DESSUS du col, presque à la Pointe de la Frèche. C'est ce dernier point que, sur mon roadbook, j'ai appelé "Col d'Arpingon".
Quelque part au dessus du refuge des Férices, dans la lumière du soir
Là, j'avance mal, dans ces montées assez cahotiques. J'ai à nouveau du mal à courir et je me fais progressivement dépasser, non seulement par des coureurs du 87km, mais aussi par des coureurs de ma course. Clairement, je suis dans le dur. D'autant plus dans le dur que je vois, dans la lumière faiblissante, les passages plus aériens de la crète des Férices qui se profilent au loin devant.
2h47 de retard sur le roadbook. Cela s'accumule. Je ne le sais pas, mais je me sens lent. Je ne suis pas satisfait de moi. Oh, je sais que plus ça va, plus il est certain que je finirai, que Val Pelouse marquera la fin des grosses difficultés techniques et que je n'aurai plus qu'à finir au mental.....et que le mental, j'en ai à revendre, avec tous les amis distants qui m'accompagnent de loin et à qui je pense régulièrement.
Mais me sentir lent et « mauvais » sur ce terrain me mine un peu. Et puis, surtout, la peur commence à arriver. Eh oui, la peur. Vous allez trouver cela idiot, mais je la vois là-bas devant, la crète des Férices, je vois le sentier et je vois bien que sur certains passages, la pente sur la gauche est très forte. Comme déjà dit des dizaines de fois, le vertige, cela ne se commande pas. On peut être aussi rationnel qu'on veut. Bref, je me crispe *à l'avance*, c'est dire.
Comment en voudrais-je, du coup, à Franck, qui avait quasiment paniqué l'an dernier après une chute (j'essaie d'imaginer une chute à cet endroit) ? Et moi j'ai encore la chance de passer avec un peu de jour. Quoique. Est-ce une chance ?
Je me fais une petite pause assis 5 minutes sur la crète, au moins pour admirer un peu le paysage et ne pas regretter ensuite de ne retenir que cette appréhension. C'est magnifique, dans cette couleur du soir. Je ne peux pas regretter d'être là, c'est une chance tellement unique. Bref, m'y voilà, je sais que c'est vraiment pour moi la dernière grosse difficulté. Peur ou pas, faut y aller. J'y vais. J'en profite pour mettre la frontale dont je vais avoir bientôt besoin car il sera impossible d'atteindre Val Pelouse avant la nuit.
Coucher de soleil sur la crète des Férices
SMS envoyé : « Crète des Férices. Reste descente Val Pelouse ». Je ne vais quand même pas écrire que j'ai les chocottes..:-)
Bon, après coup, tout s'est bien passé. J'étais parfois un peu bloqué, mais une fois lancé à ne regarder que mes pieds, à pencher inconsciemment vers la droite, vers la pente rassurante, ça allait. La fille de tout à l'heure m'a repassé. Elle n'avance pas bien vite, mais elle a l'air moins crispée.
Très progressivement, l'aspect aérien s'estompe, on est sur une descente en traversée un peu technique, mais relativement roulane (roulante, je n'irais pas jusque là). J'en rattrappe même la coureuse qui m'avait dépassé. Elle finit de sortir sa frontale et....m'emboîte le pas. Je la sens derrière moi, et comme j'en ai malheureusement beaucoup pris l'habitude, je lui demande si elle veut passer, en m'écartant.
« Par là », me dit-elle en m'indiquant le chemin avec son bâton. En fait, elle croyait que j'hésitais et elle n'a pas vraiment l'intention de passer. Je lui réponds « OK, pas de problèmes, tu me suis ? » mais je n'ai pas vraiment de réponse. En fait, à l'occasion de dépassement d'autres coureurs, je m'aperçois qu'elle est étrangère et parle seulement quelques mots de français. Je ne sais pourquoi, je me figure qu'elle est italienne et j'essaie mes vagues mots transalpins, mais je fais chou blanc. Une tentative en anglais : pas mieux. Bon, eh bien tant pis, on se suit, on se suit...pas besoin de causer.
En fait, mon rythme semble bien convenir...y compris à deux autres coureurs qui nous ont rejoints. Je suis donc, en marche rapide en descente légère, à la tête d'un inhabituel petit train de 4 coureurs. Certains seraient un peu lassés de cela, mais cela me donne de la compagnie et, quelque part, ça me rassure sur le fait que j'avance encore...:-).
Par contre, nous attendons tous avec impatience ce ravito de Val Pelouse. À un moment, un spectateur nous indique « ravito à 1,7km » puis un peu plus loin d'autres nous disent « ravito à 1/4 d'heure ». Bon, je veux bien qu'on soit lents, mais c'est pas très cohérent, votre truc, les gars, là. Ma compagne du moment me demande de lui traduire le « 1,7km », je le fais...en italien, ce qui ne sert évidemment à rien. La pauvre. Au bout de 10 minutes, on nous dit « ravito dans 10 minutes ». GRRRRRRR. On a beau savoir qu'il ne faut jamais écouter spectateurs et bénévoles, ça irrite. Bref, ça dure, dure, dure et Y'EN A MARRE.
Enfin, comme par une espèce de miracle, nous débouchons en haut d'une prairie et les tentes sont là-bas, tout en bas. Val Pelouse, terre promise, nous voilà. Du coup, j'accélère pour terminer et je largue plus ou moins les deux gars qui nous suivaient. Par contre, mon étrangère reste dans mes talons. Donc, soit j'ai un arrière-train plaisant à contempler des heures, soit elle trouve que le rythme lui convient. Bien entendu, Elisabeth vous confirmera que c'est la première réponse qui est la bonne.
Laquelle Elisabeth est là, fidèle au poste, qui me guettait depuis au moins 1/2h, plutôt inquiète. Mais elle me reconnaît de loin grâce à mes inimitables « mains de Mickey », mes gants blancs fluorescents (encore une façon de se distinguer : quand ce n'est pas une casquette rose, ce sont des gants blancs, il est cabot, ce bubulle, je vous dis). Et le désormais célèbre « vas-y mon bubulle » résonne dans Val Pelouse et tout Val Pelouse, voire toute la vallée, sait que, non pas Zorro, mais Bubulle est arrivé-é-é (et sans se presser-er-er, il faut bien l'avouer).
3h08 de retard sur le roadbook. Oui, on s'en fout toujours autant, mais oui, j'ai encore « perdu du temps ». Mais, déjà, j'ai à peu près sécurisé une chose : les BH ce ne sera pas pour moi. J'ai quand même laissé 20 minutes par rapport aux prévisions et j'ai donc mis 7 heures pour faire Super Collet-Val Pelouse, c'est à dire 17,3 kilomètres. Vous avez dit « course hors normes » ?
Je suis ultra-chouchouté à Val Pelouse : j'ai juste trois femmes pour s'occuper de moi. Outre ma « chérie à Bubulle » (qui, les copains, est quand même trop contente d'être devenue plus « la chérie à Bubulle » et moins « Madame Bubulle », merci pour ce petit signe sympa qui montre que vous avez remarqué qu'il y a quand même, au bout de 30 ans de mariage, un truc énorme entre nous), outre Elisabeth, donc, il y a Caroline qui attend Franck, mais aussi Ingrid qui attend Spir. Je n'ai pas à bouger le petit doigt, les flasques se remplissent toutes seules, les bols de pâtes arrivent tout seuls, les précieuses compotes oubliées à Super Collet sont là, j'ai juste à récupérer et engranger des tonnes de motivation, de mental. Mais, avec ce soutien, comment puis-je échouer ? Trop fortes, les filles.
Ma compagne de la descente vient me voir (quand je vous dis que j'ai ma cour d'admiratrices...). Cela me permet enfin de voir qu'elle s'appelle Angelika et qu'elle est allemande. Elle me demande (en fait elle parle un anglais un peu basique, mais suffisant) si cela m'embête qu'on reparte ensemble. Pourquoi pas ? Je suis usuellement assez solitaire sur les courses, mais cette course est hors normes, donc rien ne sera comme d'habitude. Je lui indique que je compte repartir au bout de 30 minutes, cela lui convient. Voilà, j'ai un rencard avec Angelika. Évidemment, cela va faire le tour de Kikouroù, ça.
Tiens, un ravito où j'ai à peu près tenu mes prévisions de durée d'arrêt. C'est presque le seul..:-). 3h37 de retard et en théorie un peu moins de 5 heures pour atteindre le prochain (et dernier) ravito au Pontet.
Nous voilà repartis, avec Angelika calée dans ma « foulée »...enfin dans mon pas. Je lui ai annoncé la couleur : montée régulière, à vitesse lente (à peu près la même que celle de la montée à la Pierre du Carré). C'est dré dans le pentu dans l'alpage au dessus du ravito, très raide, mais curieusement je me sens bien. Ce passage sur la crète est extraordinaire : on voit en dessous de nous les frontales de ceux qui arrivent sur Val Pelouse. On voit même « en face » des frontales dans la descente du col de Claran (donc on voit des coureurs qui ont environ 5 heures de retard sur nous !).
Nous discutons comme nous pouvons avec Angelika (il faut que j'évite tout ce qui est un peu compliqué, en anglais...mais l'allemand ne marche vraiment qu'en dernier recours). Elle n'en n'est pas à son coup d'essai : elle a terminé quatre UTMB successifs, le meilleur en 37 heures et quelques, 2 GRP160 dont un comme 7ème féminine, une TDS 2011 en 505ème position et, surtout, c'est sa deuxième Échappée Belle. Bref, j'emmène dans ma roue une sacré traileuse. A posteriori, je pense pouvoir en tirer quelque fierté, que quelqu'un de ce calibre m'ait choisi comme lièvre.
Globalement, toutefois, nous n'avons pas besoin de beaucoup nous causer. Ce duo fonctionne bien et je pense que nous nous devons respectivement une fière chandelle d'avoir joué la carte de la solidarité pendant que nous en avions besoin. Du coup, la descente vers les sources de Gargotan depuis le col de la Perrière (400d-) passe tout à fait bien. Il faut juste que je veille à ne pas trottiner car Angelika m'indique qu'elle a vraiment du mal à courir. J'adopte donc une espèce de marche sautillante en descente qui est, ma foi, plutôt efficace. 50 minutes pour 400D-.
La montée du Col de la Perche est du même ordre : environ 400D+, très raides au départ. J'explique tant bien que mal mon protocole à Angelika à qui cela va très bien. En fait, j'ai l'impression que tout lui va très bien. Cependant, au milieu de la montée, je commence à avoir de mini-vertiges. Comme le protocole bubullien impose un temps de compotage à ce moment là, je le prends, pensant que cela va, comme d'habitude, me requinquer. Et nous repartons, sans même nous être faits dépasser (cela indique quand même la densité de plus en plus faible de coureurs.)
Mais non, cela ne va pas. J'ai toujours ces mini-vertiges. Et, surtout, dans le vallon qui monte au col, je commence à voir des trailers assis au bord du chemin, qui se transforment en rochers à notre passage. Ce ne sont pas des mini-vertiges. Je m'endors et j'ai de petites hallucinations. Je dors debout par moments, d'où la sensation de vertige. Impressionnant comme cela m'est tombé dessus en même pas 15 minutes.
Arrivés au col, je dois la vérité à Angelika : je dois absolument m'arrêter car ça va être dangereux. Je lui dis d'avancer, que je suis vraiment désolé de la laisser seule, que je vais dormir 10-15 minutes et que j'essaierai de la rattraper (je sais que je peux courir et pas elle). Les bénévoles du col me proposent gentiment d'utiliser leur tente et leur sac de couchage car il fait un petit vent frais. Quelle gentillesse ! Bon, j'évite de m'enrouler dedans car je sens un peu le fennec mordorien (expression (c) RayaRun).
Je ne suis pas vraiment sûr que je dorme, mais ces 10-15 minutes vont me faire du bien. J'avais indiqué à la bénévole de me faire signe au bout de 1/4h, mais je me lève tout seul. Obnubilé par une idée fixe : il faut que je rattrape Angelika, je lui ai promis.
C'est donc reparti, avec désormais 4h de retard sur le roadbook. Cela ne s'arrange pas. Mais : 1) je ne le sais pas, je n'y fais plus attention et ne l'ai pas regardé depuis le Morétan 2) je sais que je vais finir 3) et puis il faut que je rattrape Angelika.
Leitmotiv de tout ce passage en crète : il faut que je rattrape Angelika. Comme si j'avais abandonné une pauvre brebis égarée dans la montagne, je me vois tel le Chevalier Blanc, voler au secours de ma teutonne en perdition. Vous avouerez qu'on est quand même bien niais, non, au bout de 44h de course, non ?
L'avantage, c'est que ça motive. Du coup, je cours (enfin, je trottine) toute cette descente légère jusqu'au col d'Arbarétan, puis j'enquille une très solide marche nordique pour la remontée du Grand Chat (qui est quand même assez sérieuse). Le tout dans une solitude absolue. Absolument personne derrière, même loin. Et....absolument personne devant aussi. C'est que, brebis en perdition ou pas, 15 minutes d'avance, ça fait quand même une sacré distance !
Même là, en avançant "bien", je perds du temps sur le roadbook, tiens (4h32 de retard). Donc, il était vraiment trop optimiste, autant pour moi, l'auto-proclamé Maître des Roadbooks. Pour les courses normales, peut-être. Pour les courses hors-normes, j'ai vraiment des progrès à faire.
Sans prévenir, au détour d'un chemin, des lumières. Un 4x4. Des humains. C'est donc possible, je ne suis pas seul sur cette planète après que des extra-terrestres l'aient nettoyée de tous ses êtres vivants en prévision du passage d'une autoroute inter-galactique (les quelques geeks qui lisent ici se retrouveront). Il reste de la Vie sur Terre. Et, tiens, de la Vie Allemande! Angelika est là, youpala ! Et pas que de la vie allemande mais aussi.....des gones. Et pas n'importe quels gones. C'est FranckdeBrignais et Spir. Accompagnés de Cyss. L'ensemble de la fine équipe m'a donc dépassé au col pendant mon petit dodo. Franchement, être content de trouver des lyonnais au détour d'une montagne, faut vraiment 2 jours de course pour atteindre cet état de confusion mentale (ou bien il faut que ce ne soient pas des lyonnais ordinaires, allez savoir). Oui, Cyss, t'es pas lyonnais, je sais...:-)
C'est donc une solide équipe motivée qui part à l'assaut de ce que nous savons être une longue longue longue descente. C'est aussi un peu là que je perds l'esprit, je vais essayer de vous raconter cela...:-)
Au début, fier d'avoir rattrapé ma compagne de route, je prends la tête du petit groupe. Je me dis que je vais peut-être finir avec mes amis et avec elle, que ça va être bien, une belle arrivée dans la joie, la bonne humeur et la fraternité internationale, transcendant même l'ancestrale rivalité stéphano-lyonnaise, c'est dire.
Au bout de 2-3 kilomètres, je me sens même tellement des ailes que, renversement inexplicable, je deviens soudain totalement égoïste. Je ne peux pas dire que j'en sois fier, mais faut bien que je vous explique, je vous ai dit que je dirai tout. Nous sommes sur une piste de 4x4 et je pense que je vais pouvoir accélérer et faire une belle descente, voire même « rattraper du temps ». Quelle sotte idée. Et je le dis comme ça, aux autres et à Angelika. En gros que je les abandonne et que je vais aller plus vite. Et j'« accélère ».
Je pense qu'ils en rigolent encore, soit avec l'accent lyonnais, soit avec l'accent de Freiburg-im-Breisgau. Parce que je prends à tout casser 30 mètres d'avance....et qu'au premier single descendant, toute la petite troupe me rattrape allègrement. Ma superbe envolée aura duré à peu près 500 mètres.
Franck, qui doit commencer à se douter de quelque chose, prend alors la tête du groupe, avec Spir. C'est lui qui va nous donner le rythme pendant un bon moment. Je suis derrière, avec Angelika et Cyss, cela ne va pas trop mal. Nous regardons les altitudes de nos montres pour essayer de savoir où nous en sommes, mais, déjà en haut du Grand Chat, j'avais un doute : au lieu d'être à 2000m, il était à 1900. Mon altimètre s'est décalé. Nous « savons » deplus que le ravito est à 1050m d'altitude, ce que j'affirme péremptoirement à mes compagnons. Sauf qu'il est en fait à 850m, nouille que je suis. Et que l'altitude des montres est fausse. Et qu'au bout de 2 jours, l'esprit devient incapable de faire de la correction barométrique automatique tenant compte de l'inhabituel gradient de température de ce jour qui, en vertu de la loi des gaz parfaits fait que la Suunto perd les pédales. Foutus finlandais. (et merci à fred_1_1 pour les détails de l'interprétation scientifique de ce phénomène curieux)
Aux alentours de 1200m d'altitude, j'ai à nouveau ces mini-vertiges. Je ne fais plus le malin. Plus du tout. Piteux, j'indique à mes compagnons qu'il faut que je m'arrête pour m'alimenter. Angelika, qui commence à ne plus très bien comprendre ma stratégie (normal, il n'y en a aucune), s'interroge. Les autres finissent par la persuader de continuer. Elle accroche un autre groupe, ce qui provoque quelques vannes de mes compagnons qui ironisent sur le fait qu'elle joue plusieurs lièvres à la fois. Mais je crois qu'elle était à peu près dans la même confusion que moi et je ne lui en veux surtout pas.
Ceux qui ont bien vu mon état de confusion, c'est Franck, Spir et Cyss. Je ne m'en rends absolument pas compte, mais ils restent volontairement avec moi. Ils voient bien, eux, ce qui est en train de se passer : je dors de plus en plus debout. Le dispositif « Rhône-Alpes au secours du bubulle » est en place : Franck en tête, relayé par Spir, et Cyss qui me suit sans jamais passer devant. Je ne me rends compte de rien. Il paraît toutefois qu'à un moment je leur aurais dit « non mais laissez moi, j'attends quelqu'un derrière ». Je n'en ai aucun souvenir.
L'altitude ne cesse de descendre : 1100m, 1050m (altitude supposée du ravito !), 1000m, 950m, 900m. Méheuuuuuuuuuu. Enfin, nous arrivons sur une espèce de chemin avec une pancarte de circuit touristique « Le tour des Huiles » ou un truc du genre (les bleds du coin s'appellent « Machintruc en Huile » et équivalent, quels noms idiots.....de toute façon, je trouve tout idiot). Une vague carte semble indiquer que « le ravito est à 500m ». Dans nos rêves....
Nous voici donc un bon petit groupe (curieusement une petite dizaine de coureurs se sont plus ou moins regroupés) sur un chemin interminaaaaaable en faux plat montant. Franck mène le groupe, suivi de Spir. J'avance totalement mécaniquement dans un vague reste de marche qui n'a de nordique que le nom. Et les hallucinations arrivent. Tout va y passer : 4 ou 5 pancartes « ravito à 500m » qui se révèlent être de simples branches...ou rien du tout, bénévoles assis au bord du chemin (normal, c'est bien connu, sur l'Échappée Belle, on vous met des bénévoles tous les 100m avant les ravitos), coureurs venant en sens inverse. Il ne manque que les éléphants roses.
Ce qui est réel, c'est que tout le monde en a marre. Cela se sent. Le groupe s'étire. De plus en plus. Franck, devant, accélère pour arriver au ravito. Je pense, en fait, pour pouvoir prévenir que je ne suis pas loin et que je ne suis pas frais du tout. Je les vois disparaître un à un. Même Cyss passe, pressé lui aussi d'arriver. Seul un coureur aussi mal en point reste derrière moi et nous titubons de concert. Cette sensation de dormir debout est incroyable.
Enfin, au bout de longues minutes, j'aperçois la lueur du ravito. Elle est réelle, elle. Aussi réelle est la silhouette grise d'Elisabeth qui avance vers le bois et la cohorte de zombies chancelants. Par contre, c'est quand même bizarre cette colonne de silhouettes oranges qui la suivent. 6 ou 7 personnes en gilet fluorescent : une colonne de secouristes. Ils s'inquiétaient tellement qu'ils m'envoient les pompiers, les secouristes, qui sais-je encore ?.
Ab bin non. Bien que, certainement, la planète entière se demande ce que je deviens, personne n'a dépêché une « colonne de secouristes » vers moi. Juste ma grandissime chérie. Les secouristes s'évanouissent dans la nuit, rejoignant les pancartes, les trailers fantômes et les hippopotames qui font de l'acro-branche (ah non, ça c'est une hallucination de Land).
« Il va falloir que je dorme ». « Ça ne se discute même pas ». Voilà en gros notre dialogue. Il est évident que je n'ai pas d'alternative. On est certes à 15 kilomètres de l'arrivée, mais cela peut prendre 4 heures. Il me sera impossible de finir comme cela.
Histoire de rire : le roadbook disait 41h55. Donc, nous en sommes à 4h50 de retard, ça devient comique..:-). J'ai donc mis 6h32 pour faire 16,5 kilomètres. Eh, c'est mieux que Super Collet-Val Pelouse..:-)
SMS aux amis : « Le Pontet. Je suis épuisé. Je vais dormir ». Sab relaie « Bubulle arrivé au Pontet, épuisé. Il va dormir pour se retaper. Xavhié vient d arriver, plutot bien, le dodo à Valpelouse lui a fait du bien. Franck de B et Spir ont escorté Bubulle, ils sont très bien. ». Il est 5h05 du matin, hallucinant qu'ils arrivent à tenir ce suivi live sur le forum, une des plus incroyables suivis jamais réalisés sur Kikourou, en parallèle avec un UTMB haletant où RayaRun, mon Pingouino préféré, impressionne tout le monde. Sabine et Elisabeth ont fait une équipe d'enfer pour relayer les infos me concernant, je n'en reviens toujours pas de susciter cela. Merci encore, et encore, et toujours. Vous avez été Grandes. Mais aussi Grandes furent la Caro de Franck et l'Ingrid de Spir. Toutes trois (avec Elisabeth) passant la nuit dans leurs voitures respectives, juste pour être avec nous. Tout comme Fab a franchi 5 fois le Tourmalet en une seule nuit voici une semaine. C'est aussi cela que nous gagnons dans ces ultras de dingues : nous prouver combien nous nous aimons respectivement et ce que l'un(e) est capable de faire pour l'autre.
End of larmichette. Il faut aller dormir, Monsieur Bubulle.
Elisabeth m'accompagne, que dis-je, me dirige autoritairement vers les yourtes. Elle me demande combien de temps je pense dormir, en suggérant que je reste une heure. Mais le dernier zeste d'orgueil compétitif qu'il me reste me fait dire « non, une demi-heure ». On transige pour 45 minutes, instruction donnée au responsable des lieux.
La yourte est super accueillante. Il fait bon, pas trop chaud. Je suis loin d'être seul. Comme quoi, dormir à 15 kilomètres de l'arrivée n'est pas une hérésie. Et je m'écroule.
Là, clairement, je dors. Et bien. Il paraît même que je ronfle de manière assez sonore, dixit le Dude (enfin, je crois : Dude tu étais bien là ?). Et.....mentalement programmé pour rester 30 minutes, je me réveille tout seul au bout de 25 minutes, je remets les chaussures et je sors.
Élisabeth me connait trop bien. Elle n'est presque pas surprise. Je vais donc manger tranquillement (deux bols de pâtes de plus se voient engloutis, je suis un puits sans fond).
C'est déjà relayé sur le forum par les fidèles : « Bubulle est déjà réveillé, il mange ». Quasiment du reportage en direct. À 5h46 du matin.
Je refais le plein des flasques, je prends des nouvelles : Angelika, arrivée peu avant moi, est repartie depuis un bon moment. Franck, Spir et Cyss également. Xavhië, qui m'a rattrapé une fois de plus (nous avons fait un mémorable chassé-croisé), également. J'apprends par Élisabeth que zecrazytux est toujours en course, proche des BH, mais que ça devrait le faire. Je suis super content pour lui.
Je repars tout de même résigné à mettre très longtemps. Je pense que j'en ai pour 4 heures pour faire ces 13 kilomètres (13 ou 15, à force, je ne sais plus), que je vois un peu comme le chemin de croix de la TDS de l'an dernier. Le SMS envoyé dit donc « je repars pour 13km de MN ». 13 kilomètres, mais aussi 400D+ et 1100D-. 30 secondes plus tard, le forum est au courant. Il est 6h02 du matin.
Allez, pour rigoler encore une fois, chers lecteurs : retard sur le roadbook, 5h41. C'est sûr qu'avec 1h31 d'arrêt au lieu de 20 minutes, on peut difficilement prendre de l'avance. Voilà, donc, ça fait deux jours que je suis en course. Deux jours entiers. Avec 25 minutes de sommeil réel. Nous sommes vraiment timbrés.
Je repars un peu comme à l'abattoir, quand même. Élisabeth ne dit rien, mais elle n'est pas super tranquille, je pense, de me voir, un poil chancelant , partir sur cette route. De mon côté, je pense y aller en bonne marche nordique, en essayant de retrouver un peu de technique et d'efficacité. Mais je n'y crois guère. Ce sera long, très long.
Je suis assez seul à repartir. Cependant, un premier coureur me dépasse, marchant assez vite. « Bon, eh bien, ce ne sera pas le dernier », me dis-je. Que je crois.
Le jour se lève doucement, la frontale devient inutile. Donc, à peu près au 1/3 de la montée au Fort de Montgilbert, je m'arrête pour ranger la frontale, et surtout mettre la casquette rose, et rapprocher les lunettes de soleil car, le temps que j'arrive, il fera grand jour.
Un duo de coureurs passent pendant ce temps. « Et de trois », me dis-je....et je repars dans mon mode escargot.
Quoique. Le mode escargot, il n'est pas si escargot que cela. Je sens tout le corps qui se réveille. Je vois les deux, là devant, qui se rapprochent. La petite étincelle du compétiteur revient. J'appuie plus fort sur les dragonnes des bâtons, je me mets à nouveau à pousser bien derrière, j'allonge les enjambées. Pif, paf, les deux gars sont laissés sur place. Et je continue à accélérer. En regardant de près ma courbe de vitesse, je vois que je termine cette montée à plus de 6 km/h ! En marchant.....sur du 10% de côte.
Et, dès que le terrain s'abaisse, bien plus tôt que je ne l'imagine....je relance en courant. EN COURANT ! Le zombie court. De sentir que je peux le faire, eh bien.....j'accélère encore.
Je cours, je cours, je cours. Je cours sur du plat, je cours dans les dernières petites montées, je passe le pointage/mini ravito du sommet, près de la ligne à haute tension, en coup de vent. Plus j'avance, plus j'accélère. Je retrouve l'euphorie totale connue en fin de nuit à l'Origole, la descente vers les Tappes sur la Montagn'hard, l'avant-dernière côte des Lavoirs, le passage de Flipou sur les Deux Amants, tous ces moments incroyables où, dans un trail, je me mets à me sentir invincible. Et là, c'est fou, ça vient tout à la fin, après avoir été en mode survivor pendant des heures.
A un moment un peu surréaliste, je reviens comme un avion sur un coureur en train de téléphoner et que je surprends quelque peu et dont je pique même un peu la fierté visiblement car....il range le téléphone et fait l'effort pour me repasser. En fait, c'est lui qui m'avait dépassé juste après le départ du Pontet. Je crois que je l'ai surpris un peu en revenant ainsi...:-)
Du coup, il faut que je prévienne car je commence à craindre qu'Élisabeth, qui s'attend à une arrivée vers 10h, ne soit surprise. SMS : « Spmmet detniere coe. Je vole enfin...grace a vous » (fautes de frappe incluses). J'espère qu'ils comprendront.
Je repars de plus belle, j'adopte à nouveau la « PhilippeG-attitude » en descente : bras vers l'avant, corps perpendiculaire à la pente et zzzzzzzzzouuuuuuuu. Seul un avion encore pire me passera, mais je m'en fiche, c'est un gars du 87km... Pour le reste, je dépasse tant et plus...tellement que sur cette section, je vais regagner 3 places malgré l'arrêt très long au Pontet.
Je n'ai même rien à décrire de cette descente tellement elle semble se passer vite (elle va quand même durer presque 1h30 !). Ce n'est qu'une accélération permanente, à une interruption près : je suis soudain obligé de m'arrêter deux fois de suite car une douleur insupportable apparaît entre deux orteils. En fait, un des pansements d'ampoules a glissé à cause des chocs très violents de la descente, et il me met à la torture. A près un premier arrêt pour essayer de le remettre, je dois en faire un deuxième pour éliminer totalement ces pansements....et repartir de plus belle.
Je dois passer une quinzaine de coureurs dans cette section, ce qui est énorme vu la densité très faible. Je ralentis un peu en retrouvant cyss qui, en fait, prend son plaisir en prenant son temps et en profitant de ces dernières minutes de course. Du coup, j'en viens même à rêver revenir sur Franck et Spir. Il s'en faudra en fait de 29 minutes...:-). Mais, quand même, je vais reprendre 1h06 au roadbook entre Le Pontet et Aiguebelle. Namého !
Plus je descends, plus tout se bouscule dans ma tête. Là où je m'attendais à une agonie façon TDS, je suis en train de descendre avec 3 millions de litres d'adrénaline dans les veines. Je suis en train de finir mon gros objectif de l'année. Je vais être finisher de l'Échappée Belle Intégrale, nous allons probablement être moins de 200, cette année, à pouvoir dire cela. Je ne les ai pas déçus, tous ces amis, famille, qui sont avec moi. Les deux, là, qui sont sur mon épaule depuis le début, je les imagine en train de suivre, là-bas. J'imagine JB, alors qu'il est 2 heures du matin à Montréal, qu'il n'a pas les SMS, mais presque seulement le Livetrail et le forum. Ou ma soeur Andrée, qui doit être en train de faire son tour de course à pied du dimanche matin, à Sainté. Et Élisabeth, en bas, après une nuit blanche, après des moments trop courts à se voir. On va enfin en profiter.
"J zttive" : je n'y vois rien en écrivant ce SMS presque au jugé à Élisabeth. Je ne peux pas imaginer qu'elle rate l'arrivée, on a tellement attendu ce moment tous les deux.
Je profite de chaque instant de cette descente. Tout est oublié : les planches à clous sous les pieds, le bâton cassé, la colonne de secouristes, le parking d'autobus du Col de la Vache. Tous les bons moments reviennent : l'écrin des Lacs de Doménon, la vue en haut de la Croix, le lever du jour sur l'Oule, la crète de Super Collet et sa vue à 360°, la superbe solitude dans la montagne de Tigneux. Et tant et tant d'images qui resteront de cette course hors normes. Et cette certitude que j'avais que je la finirais. Cette certitude sans prétention, juste parce que le 16 juillet, je me l'étais promis.
Oui, cette course, je la courais d'abord pour moi. Mais je la courais autant pour mes amis. Et tout autant pour Élisabeth avec qui j'ai passé un été si fusionnel. Comment vouliez-vous que je ne sois pas certain de la finir ? Je ne pouvais QUE la finir. Je suis fier de porter cette force avec moi et c'est cette fierté qui m'emmène à 10, 12 ou 15 à l'heure vers cette ligne d'arrivée.
Ça y est, l'autoroute est passée, ça ne descend plus. Une longue ligne droite de bitume s'ensuit. Même pas mal, j'accélère. Je passe le long des parkings, des gens applaudissent : merci merci merci. Comment que je profite. Et ça y est, je la vois là bas, qui regarde arriver « son bubulle ». On est loin de la ligne, mais je lève les bras pour elle. On se rejoint, c'est bon.
Un petit bonhomme tout au bout du chemin. Et qui savoure....
J'oublie juste un peu que courir à fond, pour quelqu'un qui n'a pas son intraveineuse d'adrénaline et qui n'a pas dormi de la nuit, c'est un peu violent. Je ralentis, j'attends Elisabeth. Forcément, nous devons passer la ligne ensemble. Ce sera la toute première fois que nous faisons cela. Mais, même après 34 ans, nous devons avoir des premières fois, non ?
Alors, nous la passons cette ligne. Je n'en n'ai pas de photo. La photo, elle est là, dans ma tête et elle y restera. C'est un peu le tournis, tout d'un coup. Et, bien sûr, je n'oublie pas la tradition et je la sonne, cette cloche. J'ai l'impression de la sonner si fort pour être sûr qu'on l'entend bien à Guyancourt, à Maurepas, à Saint-Étienne, à Montréal, à tous ces endroits où j'ai disséminé des petits bouts de mon coeur avant de partir. Cela doit résonner encore.
J'ai fini l'Échappée Belle il y a 30 secondes. Je le savais. Je ne pouvais faire autrement.
Merci.
71 commentaires
Commentaire de sabzaina posté le 09-09-2015 à 20:25:22
OK j'ai lu les 2 premiers paragraphes, je pleure évidemment...
Je continue?
Commentaire de cloclo posté le 09-09-2015 à 20:35:17
J'ai rien lu encore, mais bravo !
Commentaire de Arcelle posté le 09-09-2015 à 20:38:40
Au secours, 3.000 caractères seulement, à ce rythme, la semaine ne sera pas de trop !
Les feuilletons de l'été, c'est très intéressant, mais on va parler de la course ?
Cela dit, c'est un peu barbant, le "là ça monte", puis "ça descend" ...
Commentaire de Fa² posté le 09-09-2015 à 20:42:27
J'attaque le morceau
Commentaire de cyss posté le 09-09-2015 à 20:54:07
j'ai (presque tout lu)... J'avoue que j'ai un peu sauté un ou deux passages mais depuis que tu avais annoncé ton CR, j'attendais le passage grand chat/angelika avec grande impatience, afin de comparer nos impressions respectives.
Tout d'abord bravo pour ton CR et pour ta course! Ce fut un plaisir de partager un bout de celle ci avec toi :-)
Ensuite, pour mon ressenti sur le passage avant le Pontet :
Si je ne me trompe pas, quand t'es revenu sur nous, spir franck et angelika, on était à un ravito de fortune si je puis dire... autour d'un feu, à boire du thé. Tu t'es à peine arreté, t'as récupéré angelika, et t'es parti comme une fusée. On a bien mis 5/10 minutes à te rejoindre (j'étais impressionné et c'est un passage où on a bien rigolé). Au final, on t'a rejoint pile poil sur l'embranchement single-piste forestiere.. Et à partir de là, angelika s'est sauvé avec les bretons, tu titubais pas mal et nous nous sommes pas mal trainés (mais ca m'allait bien personnellement).
Pour finir, pour le moment où tu attendais quelqu'un derrière, c'etait 100 m avant le ravito, pas plus... :-)
Maintenant, peut être que je me trompe car j'étais pas beaucoup mieux que toi au niveau fatigue/lucidité (même si ce n'est pas le passage de ma course où j'ai eu le plus de mini-vertiges, cf mon futur CR) :-p
Encore une fois bravo à toi et au plaisir de te recroiser ;-)
Commentaire de Fa² posté le 09-09-2015 à 21:16:36
J'attaque le morceau
Commentaire de sabzaina posté le 09-09-2015 à 21:17:46
2 fois?
Commentaire de Renard Luxo posté le 09-09-2015 à 21:42:44
Fantastique récit une fois encore, une petite heure de lecture parfaitement jubilatoire (et surtout très instructive pour les autres fous qui s'y risqueraient). Outre la technicité, ce qui est impressionnant sur cet EB c'est la très faible densité de coureurs, en particulier la seconde nuit (de tous les dangers !). Bravo pour ton fighting spirit, je pense qu'on peut dire que ton année 2015 est "réussie". ;-) Reste une question existentielle : qu'est devenue Angelika ???
Commentaire de bubulle posté le 10-09-2015 à 07:18:43
Ah, je vais déroger à mon principe usuel de ne pas "commenter les commentaires"..:-)
La première nuit était en fait plus solitaire car il n'y a pas les coureurs de la Traversée Nord. Par contre, la deuxième journée est beaucoup plus "dans sa bulle". Cela se voit d'ailleurs au nombre de photos infiniment plus faible.
Qu'est devenue Angelika ? Eh bien, elle a terminé quelques places devant moi. Je l'ai recroisée après la course, avec son mari (comme quoi tout était en tout bien tout honneur, il ne semblait pas contrarié que j'aie passé la nuit avec sa femme). Elle m'a confirmé qu'elle avait vraiment besoin de ne pas être seule car elle avait beaucoup de mal.
Commentaire de Renard Luxo posté le 10-09-2015 à 21:56:42
Merci Christian d'avoir dérogé au "no comment to comments". Plus le temps passe, et plus j'ai l'impression que la montagne devient prétexte, prétexte certes à se prouver un petit qqc (quand même ;-)), mais prétexte aussi à de beaux échanges et rencontres dans un environnement tellement écrasant qu'il rapproche les petits êtres fragiles qui s'y risquent. J'en reviens au concept de "mini-vie" que constitue un ultra : grandir, fanfaronner, douter, tomber parfois, renaître aussi ... Outre les images belles à pleurer qui refont surface dans la grisaille belge ou parisienne, restent ces moments improvisés de "serrages de coude". Et si la BELLE Angelika c'est ECHAPPEE, c'est tout aussi bien finalement.
Commentaire de franck de Brignais posté le 09-09-2015 à 22:18:15
Tu as explosé un road book sans importance. Tu as été fort. Tu as parcouru ces montagnes pour toi et pour d'autres. Tu as fini l'échappée belle. Merci pour ces moments passés ensemble.
Tu as mis ton coeur et tu as tout sorti dans ces centaines de lignes. Il est beau ce récit Christian, Merci.
Commentaire de Bacchus posté le 09-09-2015 à 22:28:02
Merci pour ce CR et bravo pour ta gestion de course.
Il devait y en avoir de la volonté en toi pour repartir après certains passages difficiles.
Connaissant ta perf sur la MH100, ça donne une idée de la difficulté de cette course, pas sûr que je m'y aligne un jour, enfin j'y réfléchirais à deux fois en Février prochain :)
Commentaire de jpoggio posté le 09-09-2015 à 23:28:38
Enfoiré, poster ça un mercredi soir alors que j'ai escalade et que je ne peux pas faire autrement que de commencer à le lire à 22h55...!
(m'en fous, j'ai encore repris 60m de D+ ce soir, d'abord. Et toc.)
Commentaire de arnauddetroyes posté le 09-09-2015 à 23:43:22
je l attendais ce CR,enfin l EB facon bubulle...
Il y a deja eu le live du forum pour faire ressentir la difficulté ,les inquiétudes ,les arrets, et surtout les arrivées héroiques d un petit nombre.
Je viens de passé un très bon moment de lecture ou comme toujours je reste sur le cul du nombres de détails ,de chiffres que tu te souviens à chaque fois.
l EB intégrale c est déjà une course pour warrior ce que tu es définitivement maintenant!
Bravo à toi et aussi à ta "Bubulle chérie" qui le mérite vraiment.
Commentaire de Benman posté le 10-09-2015 à 00:14:19
Bon, j'ai commencé par la fin. wahou, quel récit, et quelle course!
Commentaire de pdu78 posté le 10-09-2015 à 00:14:57
Un superbe récit !
Bravo et merci.
Commentaire de Arcelle posté le 10-09-2015 à 01:52:19
Au secours, 3.000 caractères seulement, à ce rythme, la semaine ne sera pas de trop !
Les feuilletons de l'été, c'est très intéressant, mais on va parler de la course ?
Cela dit, c'est un peu barbant, le "là ça monte", puis "ça descend" ...
Commentaire de Namtar posté le 10-09-2015 à 09:32:50
Un tout grand bravo pour ta course et ton récit. Si je me suis mis à la course à pieds il y a un peu plus d'un an maintenant c'est grâce à ce genre de récit que je lisais et qui m'ont donné envi d'essayer, dans un registre plus modeste. Je suis sur que ce récit donnera envi aussi.
Commentaire de Jam posté le 10-09-2015 à 10:50:53
C'est vache ça...peux pas le lire :( Débordé par le taf grrrrrrrr. Et après tant d'attente être obligé d'attendre encore. J'va mourir. Quoiqu'à la réflexion, encore un peu d'attente ne m'en donnera certainement que plus de plaisir. A+ tard pour les félicitations et les remerciements.
Commentaire de Jam posté le 10-09-2015 à 11:12:32
'tain j'ai craqué. Ma soirée au taf va être très looooongue.
Commentaire de Japhy posté le 10-09-2015 à 10:57:53
Ben dis donc, je suis quand même très contente que tu sois arrivé au bout, tu y avais mis tant d'affect apparemment, tu aurais eu un sacré creux de vague dans le cas contraire j'imagine !
Ces courses ne sont pas tout à fait humaines n'est-ce pas ? Il va te falloir te reposer un peu quand même, après cet exploit hors du commun, ok?
Sinon je sais pas mais vu que ta chérie enquille les 1000m de D+ comme des perles, quand est-ce qu'elle va faire une course ?
(c'est idiot, à chaque fois qu'on parle d'Angelika je t'imagines en Vianey en train de crier "Angelika", au lieu de Veronica :D
Commentaire de Taldius posté le 10-09-2015 à 11:23:56
Beau Compte-Rendu. Nous nous sommes souvent croisé sur la course, c'est marrant d'avoir le vécut de chacun ;) Bravo en tout cas.
Commentaire de Noruas posté le 10-09-2015 à 13:12:41
Récit très émouvant !!!
Bon mental et bel exploit sportif !
Commentaire de Tonton Traileur posté le 10-09-2015 à 13:16:48
c'est long ... mais c'est beau ... les photos, déjà ! Pour le texte, il va falloir patienter un peu (débordé de taf, mais je retrouverai un peu de temps dans les transports à partir de la semaine prochaine ...).
En tout cas, bravo pour ton EB, Christian, c'est du lourd !
Commentaire de Godot posté le 10-09-2015 à 13:53:30
bravo! bravo! et merci pour ce superbe récit! Cheminer un peu par les mots, histoire de mieux visualiser ce que l'on a pu imaginer lors du suivi kikourou! Bon, ben maintenant, on a hâte d'un finish et d'un récit de 100 pages du Tor (l'année prochaine?)
Commentaire de trailaulongcours posté le 10-09-2015 à 14:45:57
FINI! Je viens de lire le pavé. Tu m'épates Christian, parce que tu es allé au bout et parce que tu restitues avec finesse et concision ton expérience. Je ne connais pas Belledonne mais je termine ton récit en ayant l'impression d'y avoir passé quelques heures.
On sent le ton moins léger que dans tes précédents récits, plus impliqué, plus concentré, l'humour est intact mais plus mesuré, à l'image de cette course imposante.
Si un jour je m'aligne pour la tenter, j'imprimerai ton récit plutôt que de faire un roadbook.
Commentaire de Jam posté le 11-09-2015 à 19:31:09
Tout pareil ! J'ai imprimé le profil de l'EH, et j'ai découpé le texte bubulle en petit morceaux que je recolle sur le profil. C'est extrêmement parlant et hyper intéressant. On mesure mieux les périodes jour/nuit, les coup de mieux et de moins bien. C'est top.
Mais bon, ça fait deux jours que je suis dessus, et toujours pas finis (maudit taf). Alors j'y retourne goulûment.
Commentaire de Antoine_974 posté le 10-09-2015 à 16:04:07
J'ai commencé ce matin et j'ai été dérangé (par le boulot ;-)) donc je termine seulement.
Bravo !
Commentaire de flyingkitty posté le 10-09-2015 à 16:23:06
Que d'émotions!
Bravo pour cette course et cr si palpitant à lire. On court, on marche, on rit, on pleure et on arrive au bout de cette course et de ce cr avec toi.
Merci de nous avoir fait fait partager cette magnifique course.
Commentaire de Françoise 84 posté le 10-09-2015 à 18:10:56
Magnifique!!! Merci et...bravo!! Bisous à vous deux!
Commentaire de Double_U posté le 10-09-2015 à 18:13:32
Jeudi 10 septembre, 16h. Je finirai le CR bubullesque de l'EB. Je le sais. Une fois qu'on l'attaque, on ne peut faire autrement.
Merci bubulle pour ce récit très instructif, félicitations pour cette course hors-norme, et à bientôt dans le Mordor pour des choses un peu plus "ordinaires" :-)
Commentaire de randoaski posté le 10-09-2015 à 19:41:09
Juste énorme... Le récit, la course et surtout le bonhomme. Il a fallu aller la chercher cette course malgré tous les soutiens que tu as eu. Tu peux être fier de toi.
Bravo!
Commentaire de le_kéké posté le 10-09-2015 à 19:50:40
On s'en fout mais je le dis quand même, 12h32 de retard sur le road book des commentaires.
Bravo bubulle t'es un chef, bien préparé, et bien fini du travail de pro tu peux être fier de toi car c'est un sacré morceau que tu as mis à ton palmarès.
Je t’écris mon commentaire en regardant le jour tomber sur Belledonne c'est magnifique et j'en rêve ...
Commentaire de patrovite69 posté le 10-09-2015 à 20:55:08
Commencé un peu tard hier soir , la lecture s'est continuée toute la journée ,ligne par ligne entre chaque patients.....mais ça y est je suis arrivée au bout!
Bravo!! Tu as fait une course incroyable avec un mental en acier. Honnêtement je n'était pas rassurée quand tu es reparti de Val Pelouse.....
Très contente d'avoir fait votre connaissance Elisabeth et toi. j'ai passé un très bon moment avec ta petite femme à vous attendre tous....
Au plaisir de vous revoir tous les deux
Commentaire de Runphil60 posté le 10-09-2015 à 22:04:41
Moi, je te tire mon chapeau au carré !
Pour la course, forcément, c'est pas vraiment humain, du coup tu es en train de te surhumaniser!
Pour ton CR, ou ma encore je pense que tu es sur le podium des meilleurs kikourédacteurs
Merci pour le voyage... Dans min canapé!
Fait que je regarde ton programme....
Commentaire de anthodelb posté le 10-09-2015 à 22:13:34
Quel compte rendu ! Être capable de retranscrire tout cela avec ce niveau de détail est déjà un bel exploit. Et finir cette course en est un aussi. Bravo. J'espère être en mesure de faire de même en 2016.
Commentaire de Arclusaz posté le 10-09-2015 à 22:14:00
premier CR que je saucissonne pour le lire sinon j'aurais fini en compote.
ben, oui, c'était bien !!!!!
très envie de faire la connaissance d'Elizabeth, moi....
Commentaire de ch'ti Gone posté le 10-09-2015 à 22:32:29
When there is a will, there is a way.
Si on vous demande qui est l'auteur de cette magnifique citation, dites que c'est Bubulle!
Sacré course! sacré compte rendu! Ma productivité au boulot n'a pas été fabuleuse aujourd'hui.
Et je le relirai ton récit avant d'attaquer pour la seconde fois cette folie.
Et encore merci à Elisabeth pour les bâtons.
Commentaire de akunamatata posté le 10-09-2015 à 22:41:15
eh bien, quelle aventure, je comprends mieux ta démarche robotique a l'arrivée, bravo Bubulle
Commentaire de lapuce92 posté le 11-09-2015 à 07:05:46
Ca y est j'ai pris le temps de déguster ton récit. Bah Tolkien, Frodon et tous les autres peuvent aller se rhabiller! Quelle aventure! Que dire à part "bravo" tant ça semble extraordinaire.
Commentaire de Overnight posté le 11-09-2015 à 09:06:26
Celui-là c'est un peu la cerise sur le gâteau des CR! Une histoire, un univers, y a du coeur et du style et du coeur (oui encore)
Un vrai plaisir a parcourir!
Et pour cette belle aventure, cette magnifique échappée... juste énorme et bravo!! Et bravo à la chérie de bubulle !!
Commentaire de Baboon posté le 11-09-2015 à 15:18:22
Du grand maître dans l'effort et dans le récit.
Alors simplement merci pour tout et au plaisir de te croiser dans le Mordor.
Commentaire de philtraverses posté le 11-09-2015 à 20:58:44
Tu t'es engagé corps et âme dans la course, comme dans ton récit où tu te livres avec tout ton univers et les personnes qui en font partie.
Cela se sent. Difficile d'y rester insensible. J'ai mis du temps à m'en détacher après l'avoir lu..
Commentaire de RayaRun posté le 11-09-2015 à 22:17:26
Je sais désormais qui est Angelika ! J ai beaucoup pensé à toi lors de ma course (ou en est il, comment il va,...) surtout aux Pyramides Calcaires avec son air d'Echappée Belle (si l'UTMB commence à faire un complexe d infériorité par rapport à l EB.....). Elisabeth m a impressionné, mais quand je vois l inquiétude qu on génère chez nos proches, je comprend cette capacité à nous suivre dans n importe quelles conditions ! Tu en as bien ch.., et j avais assez peu de doute sur le fait que tu finirais (sauf blessure) et je l ai compris qu outre une préparation sportive et mentale, une organisation préalable sans faille est un vrai facteur de réussite. Christian, grâce à toi, j ai beaucoup appris, et je pense que c est une des raisons qui m ont permis de terminer. Bravo à vous 2, on est quand même des gros malades ! Bises Yann
Commentaire de Fimbur posté le 12-09-2015 à 09:38:24
"Je finirai l'Échappée Belle le 30 août prochain. Je le sais. Je ne peux faire autrement."
Belle préparation mentale,
Bravo pour ta course, super récit, superbe aventure
Commentaire de tidgi posté le 12-09-2015 à 10:17:50
Fort... Très fort! Bravo pour ce truc de fous.
Et superbe récit. Merci.
Commentaire de Arcelle posté le 12-09-2015 à 14:41:13
Voilà, j'ai fini l’Échappée belle ! Enfin le CR de bubulle de l’Échappée Belle quoi.
On devrait mettre des barrières de caractères, au-delà de 50.000, t'es éliminé.
Mais, merci pour ce CR bubulle, quelle course, quel mental, quelle Elizabeth !
C'est impressionnant la force que semblent donner les proches, présents sur place ou non.
BRAVO
Commentaire de Bert' posté le 12-09-2015 à 16:36:14
Ça y est j'ai enfin pu finir de lire cette très belle épopée :-)))
Déjà ta partie photo est diablement chouette ! (C'est important de ramener des photos de tels "voyages")
Ensuite, ton duo avec Elisabeth est tout simplement magnifique et émouvant :-)
Je découvre aussi avec plaisir tous ces bons échanges avec les autres et la fameuse Angelika qui nous a bien intriguée pendant le live !
Enfin, tu as super bien assuré et su t'adapter aux circonstances. Tu as encore franchi un palier et est rentré aussi dans une autre dimension avec 2 nuits d'affilée...
J'étais extrêmement confiant dans ta réussite tant tu cumules toutes les bonnes qualités physique, mentale et intelligence de course.
Il fallait quand même le faire !
Maintenant que tu as superbement bien réussi ta saison 2015, et malgré ton âge canonique (! ;-), tu as encore bien de beaux exploits possibles en perspective. Continue de t'éclater et nous donner envie de suivre ça avec passion :-)
Commentaire de JuCB posté le 12-09-2015 à 16:37:21
Un bien joli morceau où l'on voit l'importance du mental en ultra.
Une nouvelle preuve que l'assistance et les contacts avec les potos "bien au chaud" sont une des clefs de la réussite.
Merci d'animer ce site avec tant de ferveur, c'est contagieux mais là, pas envie d'antibio... @ la prochaine
Commentaire de M_baton posté le 12-09-2015 à 19:59:18
J'ai gardé ton récit pour un trajet en train long. Je n'étais pas déçu. Magnifique. Très impressionnant. Donc félicitation :D
Commentaire de M_baton posté le 13-09-2015 à 17:10:42
"@M_Baton: impressionnant de savoir qu'un récit de course peut servir de compagnon de voyage. J'espère quand même que ça ne t'a pas pris tout le voyage de le lire, sinon ça veut dire qu'il faudrait que je sois plus raisonnable"
Si, si. Bâle à Genève. J'ai du aussi rêver un peu de mon propre aventure, mais si, un passe-temps magnifique. Je connais bien l'EB donc ton récit mets tous en perspectif ;-)
Merci!
Commentaire de Albacor38 posté le 12-09-2015 à 20:46:22
Il ne lâche rien. C'est un 'pitbulle.
Commentaire de Spir posté le 12-09-2015 à 22:29:33
Voilà un récit qui pourrait renvoyer l'épopée de Gilgamesh au placard de l'histoire!
C'était un plaisir de faire un bout de chemin avec toi et on aurait même toléré que tu nous rattrape dans la descente, mais on avait des bretons à poutrer...
Je n'ai pas de photo de votre arrivée, par contre j'ai une petite vidéo de ton arrivée au pontet, en cours de montage avec le CR à venir. Enfin, je dis ça, je dis rien 😊
Bravo et félicitations pour être venu à bout de ce gros morceau. Quelle équipe vous faites!
Commentaire de sabzaina posté le 13-09-2015 à 07:58:18
Waouh...
Il m'a fallu une insomnie pour avoir enfin la possibilité de tout lire.
Bien entendu que tu allais finir, Bert et moi n'en avons jamais douté, comme tu l'as lu a posteriori sur notre "petite fenêtre"
Il s'est passé des choses étranges avec les sms matinaux d'Elisabeth. Mon tel était sur le mode avion la nuit mais...les 2 matins en question, je me suis réveillée seulement quelques min avant de recevoir les news d'Elisabeth (vers 5h du mat donc).
Je suis fière de toi Chris.
Je suis fière aussi de faire partie, avec Fab, des raisons qui t'ont poussé à dire : "je finirai"
On a encore de belles pages à écrire, en trail ou ailleurs. Je pense qu'on n'a pas fini de se taper des crises de rire lors du Raid 28.
Ton récit est magnifique, je me suis régalée à le lire.
Ta course est un modèle de courage, de gestion et d'humilité.
Quand j's'rai grande, j'voudrai être une ultra traileuse comme Bubulle.
Merci pour tout et le reste.
Commentaire de bubulle posté le 13-09-2015 à 14:43:00
Merci à tous ceux qui ont commenté et mis des tonnes de mots sympas. Vous savez (ou pas) que je réponds rarement aux commentaires sur mes récits, mais je tenais quand même à vous mettre un petit mot supplémentaire.
Les récits, c'est toujours un peu égocentrique et ce n'est jamais très facile de les rendre intéressants ou passionnants. C'est vrai que j'ai un peu l'impression d'y être arrivé, ici. Surtout, si cela peut vous donner l'envie de venir voir ce qu'est cette course magnifique, il aura atteint son but.
Peut-être ce récit peut-il faire peur et vous faire croire qu'il est indispensable d'être un genre de surhomme (ou surfemme) pour terminer l'Échappée Belle. Pourtant, il n'en n'est rien. Ceux qui me connaissent savent que je suis un coureur relativement ordinaire. Certes, je m'entraîne énormément, mais je ne pense pas que cela soit indispensable. Là où l'Échappée Belle est exigeante, c'est sur votre motivation, votre capacité à dépasser les moments de moins bien, à gérer la fatigue, physique et morale.
J'avais la chance, comme j'ai cherché à vous le faire ressentir, d'avoir une motivation très solide et des raisons personnelles d'aller au bout. Parce que je m'étais mis ce challenge. Cela a suffi.
(bon, faut aussi un peu aimer les cailloux, d'accord)
@Arcelle: j'espère avoir évite le "ça monte, ça descend". Je me suis aussi rappelé de petites bouts du bouquin que tu avais apporté à la NLF. Et oui, la force que les proches peuvent donner est impressionnante.
@cyss: Franck et toi avez l'air d'accord sur le "j'attends quelqu'un", donc je vous crois. En tout cas, c'était extra de te retrouver régulièrement. Avec Xavier, tu es le kikou que j'ai le plus vu sur cette course, et j'ai adoré ta façon de prendre ton temps en fin de course
@RenardLuxo : oui, "mini-vie", c'est tout à fait ça
@Franck: si le récit est beau, c'est parce que d'autres beaux récits m'ont donné envie et je dois bien à d'autres de leur donner envie. Le merci à Caro et toi ne sera jamais assez grand
@Bacchus: au mental, au mental. Tu en as et tu vas en gagner au Tor. Donc, n'hésite pas à t'y aligner
@jpoggio: tu vas nous la faire comme la MH, cette course, par petits bouts, et comme tu es un têté, comme Françoise, ça le fera un jour. En plus, t'as encore plein le temps, non? ;-)
@arnauddetroyes: en fait pour me souvenir, assez souvent dans la course, je préconstruis le récit. D'abord, ça occupe...:-)....et ça permet aussi de fixer les détails quelque part
@Benman: commencer par la fin, j'te jure. C'est bien la peine que je m'échine à fair emonter la pression, tiens.... Géant merci pour ta présence sur le live. A posteriori, je me suis payé des fou-rires de malade
@Namtar: "registre plus modeste", c'est ce qu'on croit en fait. Alors qu'en gérant progressivement l'augmentation des difficultés, je reste sidéré de ce qu'on finit par arriver à faire. Je n'ose même pas imaginer ma tête si on m'avait dit en 2011 ou 2012 que j'allais faire ce truc.
@Jam: désolé d'avoir pourri ta journée de taf. Cela m'arrive aussi parfois si j'ai le malheur d'ouvrir un récit Kikourou le matin dans le train et que je ne le termine pas
@Japhy: je me repose là, promis. J'ai fait une SL de 22km sous la pluie
@Taldius: mince, on s'est croisés ? Mon pauvre, t'as du tomber dans les kikous à qui j'ose pas demander "qui t'es toi ?". La prochaine fois, insiste..:-)...C'était toi, peut-être du côté de Fond-de-France
@Tonton: quand je pense qu'il y a quelques années, c'étaient les récits de TontonTrailer qui me donnaient envie de faire des trucs de ouf. Et féchié, quand même, pour ta TDS, tabarnak !
@Godot: ah, le Tor. Si effectivement, ça se fait, le challenge sera de faire le récit. Faudra sûrement que je vérifie auparavant avec Mathias les limites de taille des récits et la place disque encore disponible su rle serveur qui héberge Kikourou
@Bart: oui, y'a un grand respect pour cette course. C'est bref dans mon CR, mais je peux t'assurer que le briefing était très impressionnant, avec un silence que je n'avais vraiment jamais rencontré. Cela dit en passant, c'est une course pour toi....
@Antoine26: il y avait beaucoup de kikous que j'ai été très content de rencontrer pour la première fois, et tu en fais partie. J'ai eu une grande déception pour toi en apprenant que tu avais du arrêter. Il faut revenir, tu es fait pour terminer !
@flyingkitty: beaucoup de choses m'ont fait avancer dans cette course, mais les souvenirs des offs de Mai et juin en ont fait partie et, donc, tu m'as aussi aidé. Et puis, en plus, y'a plein de marche nordique à faire (bon des fois, c'est de l'acro-nordique mais on ne va pas se laisser s'arrêter à si peu)
@Françoise84: bisous pareil. Je me suis rendu compte que je faisais un truc bien quand j'ai vu que j'étais souvent avec Xavhië, l'indestructible. Vous allez forcément revenir, non ?
@Double_U: notre Mordor m'a bien aidé, quand même. Et notre ridicule colline aussi. APrès tout, le mental nécessaire sur la crète des Férices n'est pas bien différent de celui qu'il faut une nuit de décembre dans la forêt de Rambouillet
@randoaski: je te dois le matériel (la trace) qui m'a permis de connaître ce parcours à l'avance sans l'avoir fait...et aussi, peut-être, l'envie d'aller u njour voir dans les Vosqes si on trouve des trucs sympas à faire..;-)
@le_kéké: c'est déjà dit dans le récit, mais votre présence à Jean Collet avec Dude, WOW. C'est aussi ça, Kikourou et ça fait aussi partie des tas de petits trucs qui font avancer....et arriver
@patrovite69: GOTO @Franck...:-)...mais un spécial merci, quand même, pour l'aide apportée et désolé de tavoir inquiétée à Val Pelouse. J'étais donc déjà si zombie que ça ? Pourtant j'étais motivé par ma nuit à venir....;-)
@Runphil60: si si c'est totalement humain. Si je voulais bien dire dans ce récit, c'est qu'on n'est pas des machines et que, justement, ces courses qui paraissent inhumaines, restent totalement humaines et accessibles
@anthodelb: je te souhaite totalement de connaître la même chose en 2016 et s'il y a un suivi et que je ne suis pas en train de faire le guignol du côté de Chamonix, on te suivra et on te verra aller au bout
@Arclusaz: mais moi je veux pas que tu fasses connaissance d'Elisabeth ! Pense donc, un beau ramoneur savoyard qui sait changer Étoile des Neiges et qui va lui faire le Bouzin de Minuit en soufflant un peu avant sa deuxième demi-dalle, elle va craquer
@ch'tiGone: on vient d'emballer le bâton...:-). Et, en plus, la semaine dernière, en reprenant ses bâtons pour aller faire un tour de MN, nous nous sommes dits que ces DEUX paires de bâtons avaient fait l'Échappée Belle, quand même. Je ne doute pas que le Morétan c'est pour toi, l'an prochain ou plus tard !
@akunamatata: namého, robotique...:-). Merci géant encore pour ces fabuleuses photos (j'ai l'impression de me répéter)
@lapuce92: pourtant mon Hobbit préféré était pendant ce temps en train de se battre contre les BH du côté du Val d'Aoste. Mais c'est vrai que Belledonne a des côtés des Monts Brumeux....
@Overnight: merci pour avoir pensé à elle. Oui, bravo à elle
@Baboon: grand maître, comme dit plus haut, même pas. Juste motivé...mais c'est normal, le Mordor mène à tout
@philtraverses: j'aime quand mes récits touchent les lecteurs. C'est bien le but : faire partager les émotions ressenties. C'est rarement aussi fort que sur cette course là, c'est souvent plus léger...heureusement...:-)
@Rayarun: nous apprenons mutuellement et apprenions en parallèle ce week-end là. Je sais que chacun a bien pensé à l'autre et j'attends avec impatience ton récit à toi
@Fimbur: cela faisait partie de la préparation mentale, oui. J'étais tellement sûr, au final, que j'ai un peu peur que ça paraisse prétentieux
@Bert: tes récits à toi et ton expérience à toi m'ont beaucoup servi, tu le sais bien. COmme dit Sab, ce qui est bien, c'est de savori qu'on a encore tellement de trucs à vivre, à commencer par ce déjà quasiment mémorable Raid 28.
@JuCB: eh oui, la "communauté Kikourou" ce n'est pa squ'un truc virtuel, c'est ce que genre de course nous démontre. Et ta présence au Col de la Botte, avant une perf mémorable sur le relais, l'a bien démontré
@M_Baton: impressionnant de savoir qu'un récit de course peut servir de compagnon de voyage. J'espère quand même que ça ne t'a pas pris tout le voyage de le lire, sinon ça veut dire qu'il faudrait que je sois plus raisonnable
@Albacor38: mdr....digne d'un Benman !
@Spir: je ne sais pas si je veux vraiment voir cette video. J'ai peur de me faire peur....façon "la nuit des mort-vivants". Merci énorme encore pour votre présence, à Franck, Cyss et toi
@Sabzaina: tu es la dernière de la liste, mais la première quand je liste mes amis de Kikourou, tout le monde le sait bien. Et ce n'est pas sans raison : c'est pour des commentaires comme celui-là. C'est pour cette amitié qui s'est construite au fil des courses, au fil du partage de tellement de choses. Il y a encore de belles pages à écrire, oui.
Commentaire de coco38 posté le 13-09-2015 à 16:00:21
Bon j'ai mis une semaine à tout lire. Tout d'abord ; IMMENSE BRAVO. Ensuite, je suis impressionné à quel point chaque détail est imprimé dans ton esprit... même le passage avec les hallucinations (qui fait peur). C'est sur que c'est une course hors norme, inclassable, imprévisible (pas de Road book fiable possible). C'est sur que ça laisse des souvenirs indélébiles qu'en plus tu peux partager avec "ta chérie". Encore Bravo. Rendez-vous au Puy dans 2 mois ! Pour moi c'est un rendez-vous également très important pour pleins de raisons personnelles.
Commentaire de Vik posté le 13-09-2015 à 17:06:35
Je n'avais pas compris avant de lire ton roman que finir l'échappée elle avait autant d'importance à tes yeux.
Nous n'avions pas la même façon de savoir que nous finirions (moi c'était facile: intrinsèque, sans questionnement, toi un besoin de te le répéter) ni les mêmes motivations (je ne coure que pour ma gueule, égoïste que je suis, pour me changer en ce moment), mais nous partagions finalement une volonté sans faille sur cette elle aventure.
Au plaisir de te recroiser sur une course ou en off. Je suis persuadé que tout ceci n'est qu'un début. L'horizon nous promet encore de bien beau paysages à admirer, et sentiers techniques où poser nos panards malhabiles.
Commentaire de Trimoreo posté le 13-09-2015 à 19:04:49
Ton récit mais surtout ta course est belles : que d'émotions!!!
Revivre ces bons moments grâce à ton récit et un vrai bonheur. 90 % de sensations, douleurs, plaisir, partage et rencontres ont été identique à toi. pour les 10% restant il va falloir faire un récit et tu m'en a donné l'envie.
Tu méritais vraiment de finir cette fabuleuses aventure, chapeau d'être aller au bout. Ce n'est pas un hasard.
Au plaisir de te recroiser.
Commentaire de banditblue29 posté le 13-09-2015 à 21:43:49
Enfin, je termine ton CR (cela m'aura pris une semaine).
Merci à toi, de nous faire partager une aventure aussi forte.
Commentaire de banditblue29 posté le 13-09-2015 à 21:45:39
Je complète : Avancer avec un bâton, ça le fait plutôt pas mal ;-)!
Commentaire de Zanthony posté le 13-09-2015 à 23:48:16
Bravo à toi! Tu m as dépassé vers le pleynet, je me souviens de bob l éponge ;)). C est super de lire ton C.R, je m y retrouve, j avais les mêmes difficultés notamment la chaleur de la 2 eme après midi..en te lisant je revis ces moments hors normes où on dépasse nos limites..Merci!
Commentaire de Jam posté le 14-09-2015 à 15:48:40
Cher (puis-je me le permettre même si je n'ai le plaisir de te connaître) Bubulle,
Je viens de terminer la trilogie bubullienne, 3 jours et 2 nuits. Et 25' de sommeil.
J'ai lu le périple d'un bubulle en Terre du Milieu de Belledone et depuis....je te maudis. Oui, je te maudis car tu as instillé en moi l'envie de découvrir cette course. D'aller à mon tour m'élancer sur ces magnifiques terres hostiles et très caillouteuses. Je te maudis car ma femme va à son tour me maudire.
On a tous un petit grain quelque part, mais voilà tu es venu le chatouiller, l'agiter chez moi et je ne vais pas pouvoir faire autrement que changer tout mon programme. 2016 est foutu. Je suis foutu. Je ne peux qu'y aller aussi. Par ta faute. Oh, (je) ne t'en veux pas, il n'y a pas que moi qu'y suis happé par le virus. J'en prends pour preuve ces innombrables commentaires admiratifs et envieux que tu as suscités.
Aujourd'hui tu as finis ce voyage quand moi je me prends tout juste à rêver d'en prendre le départ. Alors je vais garder bien au chaud ton récit parce que tout y est: la hargne, la peur, la joie, l'amour, l'angoisse.
Pour tout ça, merci. Merci de nous l'avoir fait partagé. De nous avoir transmis un peu de toi. De nous avoir fait vivre cette course de l'intérieur. Félicitation d'avoir terminé. Et aussi un grand bravo à "la chérie à Bubulle" pour tant de dévouement. Car il en faut pour nous supporter dans nos délires.
Commentaire de st ar posté le 14-09-2015 à 16:05:49
C’est vraiment un beau CR Christian !
Tout plein de détails. Je ne sais pas comment tu fais pour retranscrire tout ça après coup. Tu dois commencer ton CR pendant la course en fait c’est ça .. ? ;-) On s’y croit vraiment, avec toutes les émotions passées en revue. Génial.
Pour ta course, évidement un grand bravo ! C’était un gros morceau cette EB…Aller au bout d’une telle épreuve c’est faire preuve d’une grande capacité physique mais surtout mentale. Une motivation extrême. Encore bravo et merci pour le partage !
Commentaire de Pigou86 posté le 15-09-2015 à 11:30:39
D'abord bravo pour avoir passé cette (ces) épreuve(s) ! J'ai du poil au mollet moi ;-) et j'ai frissonné tout au long de la lecture de ton récit que j'ai parcouru d'une traite ... Que dire à part te remercier de partager toutes ces émotions ... J'ai commencé à courir en 2012 et je rêve de pouvoir vivre un jour cet type d'expérience. C'est grâce à des récits comme le tien
Commentaire de PhilippeG-641 posté le 16-09-2015 à 11:55:16
Merci pour ton roman Christian, c'est un bon morceau de vie dans la montagne, agréable à lire, qui nous apprends beaucoup de choses sur nous mêmes, je parle de ceux qui courent des ultras en montagne.
J'ai adoré comme tous avant moi !
Nous pouvons un peu tous nous retrouver à travers quelques lignes ou transparaissent entre autre les doutes, la motivation, la fatigue, l'euphorie, la lassitude, etc...
A travers ton récit je retrouve plein de sensations qui me conforte dans les choix de trail en milieu montagn'hard, c'est ce qui m'attire dans cet exercice, quel plaisir.
Je me doutais que tu irais au bout et sans ton fameux roadbook, de même pour Raya :)
Quelles belles photos, vous avez eu de la chance avec le temps, j'imagine pas si...
C'est vrai que tu fais passer de belles émotions également, c'est un plaisir de lire une mini tranche de vie: Bravo !
Merci de m'avoir cité à travers un détail, la méthode n'est pas de moi mais d'illustres descendeurs, le tronc (pas les jambes)
Allez, bonne récup (ce doit être fait si j'ai bien lu par ailleurs) et à une prochaine ce qui ne devrait pas trop tarder...
Bonne Virée des 2 bois, bon trail du viaduc des fauvettes également !
@+
Philippe
Commentaire de Bikoon posté le 19-09-2015 à 14:37:06
Si ça ce n'est pas de la détermination !!
Un immense bravo Christian, cette course doit être superbe mais terriblement difficile (les autobus...!!!), faut aimer les gros cailloux apparemment ;o)
Tu peux vraiment être fier de toi, et de ta petite femme / groupie / assistante de choix !
Les photos sont magnifiques, mais je n'irais pas jusqu'à dire que ça me fait envie... peut-être un peu trop minéral.
A très vite
Commentaire de bubulle posté le 19-09-2015 à 15:32:12
Il n'y a pas que de minéral, Olivier...:-). Et puis, le minéral, il est particulièrement beau. La fin, à partir de Périoule, est plutôt "verte". Sérieux, te connaissant, c'est le genre de course faite pour toi.....
Commentaire de float4x4 posté le 20-09-2015 à 13:56:53
Aussi volumineux qu'un autobus en granite ce CR :) - Mais évidement une mine d'information à picocher si on souhaite se lancer sur l'Echappée Belle... Ça à quand même l'air d'être un sacré foutu chantier cet ultra - Et bien évidement, félicitation pour ta course :)
Commentaire de Bérénice posté le 22-09-2015 à 23:56:21
Je viens de lire ton CR juste avant d'aller me coucher et bien je ne pensais pas entamer autant mon capital sommeil !!! Mais comme c'est passionnant, on n'en lâche pas une miette. Juste 1000 adjectifs élogieux se bousculent dans ma tête.
Un immense bravo à toi et à Elisabeth qui joue un rôle si grand dans cette réussite.
Commentaire de Cricridamour195 posté le 08-10-2015 à 08:37:21
Ca faisait un bon bout de temps que je ne venais plus sur ce site. Je le redécouvre depuis quelques temps, et vraiment on peut y trouver des fabuleux récits de courses, tels que celui-ci. Un vrai roman!
Merci Bubulle pour le temps que tu as consacré pour nous (me) faire partager cette expérience: sacré boulot! Chapeau!
Commentaire de bottle posté le 16-08-2016 à 14:34:55
Salut Bubulle. Mon plan B du Tor m'envoie sur l'Echapée Belle. Je viens de lire (en entier) ton fabuleux CR plein d'émotions et ce fut un plaisir (de le lire). S'il ne faut en lire qu'un c'est le tien. Merci pour ce récit de ta course qui je pense va ressembler à la mienne cette année. A+
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