Puisque l'on en est à citer des économistes, glissons gentiment sur la pente du HS
Bert75 a écrit: L'idée de décarbonation, c'est plutôt d'essayer de limiter au maximum les émissions carbone en diminuant la consommation des avions. Tout cela passe par de l'investissement et de la recherche qui ne doit pas, en schématisant au maximum, pénaliser par exemple la compétitivité à court terme d' Airbus par rapport à Boeing.
Donc, au fond, on peut optimiser le fonctionnement actuel pour maintenir la croissance, et surtout ne mettre en œuvre aucune action pouvant nuire à la compétitivité des grandes entreprises. Car en effet, la compétitivité est la condition
sine qua none de la croissance. Outre que la notion de "compétitivité" mériterait d'être interrogée, l'idée de croissance constitue l'alpha et l'omega de la pensée économique.
Pourtant cette idée se heurte à plusieurs écueils. Par exemple, comment fait-on sachant que si tout le monde sur terre vivait comme nous (et nous ne sommes pas les "pires"), il faudrait 3 planètes ? Bien sûr, la réponse immédiate est "tu as envie de vivre sans chauffage, éclairé à la bougie ?".
Rien n'empêche pourtant d'y réfléchir. Quand je suis dans un embouteillage, je fais de la croissance. Je consomme du carburant, j'utilise ma voiture. Comme je m'énerve, ma tension monte, je vais voir le docteur qui me prescrit des antihypertenseurs, des antidépresseurs (croissance encore). Tandis que si je vais au travail à vélo (en admettant que ce soit faisable), paf, la croissance s'écroule. Mon vélo coûte une misère à entretenir, l'effort physique me maintient en meilleure forme et je suis moins malade. Je vais moins voir le médecin et consomme moins de médocs.
Je passe ma soirée à manger une pizza livrée devant Netflix, c'est bon pour la croissance. J'anime le club local de karaté ou de course à pied et bim, ma contribution au PIB s'écroule.
Donc cette notion de croissance à laquelle on est si attachée est très discutable en fait. Elle est souvent associée à la notion de "globalisation" et de "rapidité". Tout est sensé aller plus vite, il ne faut donc plus réfléchir. Or ce moment suspendu pourrait nous permettre de repenser pas mal de modes de fonctionnements.
Une vision et une action à court terme sont nécessaires, ne serait-ce que pour soutenir celles et ceux, personnes physiques ou morales, durement touchés par l'arrêt d'activité, pour leur permettre de traverser cette période. Pour beaucoup de salariés ou non salariés, ce moment est un drame sans fin.
Mais la seule perspective dessinée pour l'instant est le retour le plus rapide au "business à usual". Avec des personnes comme Lemaire ou Darmanin, ceci dit, rien d'étonnant. Ce dernier a d'ailleurs encore parlé ce matin de retour le plus rapide possible "au monde d'avant" (le fameux "nouveau monde" qui ressemblait furieusement à l'ancien).
Le gouvernement permet de rogner sur les maigres limites à l'épandage de pesticides (
ramenées de 5m à 3m des habitations). Le ministère du Travail
fournit des "instructions" aux Inspecteurs du Travail si progressistes que certains de leurs syndicats envisagent de porter l'affaire devant le Bureau International du Travail. Un article du Monde de ce jour montre le
travail des Lobbies pour mettre à terre ou repousser aux calendes grecques les maigres avancées en matière d'environnement.
Pourtant, cette période montre également quelques initiatives très intéressantes. Les circuits courts se réinventent pour améliorer leur distribution, le télétravail se met en place avec plus ou moins de bonheur, mais montre que dans certaines grosses entreprises une organisation différente de l'activité peut être pensée. L'école à distance, pour peu que l'on dispose des outils, permet également une approche différente.
J'ai trouvé le "nous devons nous réinventer, moi le premier" de Macron un peu court en conclusion d'un discours qui ne disait rien sur le fond (à part cette date martelée du 11 mai). D'un simple point de vue humain, on aurait pu s'attendre à quelques propositions d'aménagement à l'attention de ceux pour qui le confinement est très dur à vivre (logements exigus ou autre) et qui venaient d'apprendre que cela durerait encore au moins un mois...
Et en écho aux citations précédentes, la citation d'un économiste que j'aime bien:
"Non seulement les adversaires de la croissance ne sont pas des ennemis du développement, mais ils sont sans doute les meilleurs défenseurs de la civilisation, l'autre nom du développement."