Récit de la course : Sur les Traces des Ducs de Savoie 2019, par truklimb

L'auteur : truklimb

La course : Sur les Traces des Ducs de Savoie

Date : 28/8/2019

Lieu : Courmayeur (Italie)

Affichage : 2681 vues

Distance : 145km

Objectif : Terminer

49 commentaires

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Mon top 50 sur la TDS

Préambule

Lecteur, appâté par ce titre aguicheur, tu t’attends certainement à trouver le récit d’un cador ayant fini dans les cinquante premières places de la course. Tu es donc légitimement en quête de moult conseils sur l’entrainement, la stratégie de course, l’alimentation idéale et toutes les autres facettes qui constituent notre beau sport. Si c’est le cas, passe ton chemin ! On va tuer le suspens tout de suite : je n’ai fini qu’à une médiocre 379e place… Mes entrainements sont d’une telle qualité que je me suis blessé deux fois ces neuf derniers mois. J’ai surement pris du poids pendant la course tellement j’ai dévalisé les ravitos. Ma stratégie pour le jour J était de partir avec le frein à main, ralentir au milieu puis finir tout doucement, avec nulle autre ambition que de franchir la ligne d’arrivée.

Non, moi ce que je te propose, c’est un top 50 musical de la TDS. J’ai en effet ce syndrome bizarre, en course, d’avoir un tout petit bout de chanson dans la tête, genre vingt secondes, mais qui tourne en boucle et en continu, pendant des heures. C’est juste insupportable, surtout que je ne contrôle pas la chanson sur laquelle mon esprit moribond a décidé de rester bloqué. Ça va des Rita Mitsouko à NTM en passant par les comptines de ma fille de 2 ans, c’est très varié mais toujours inattendu.

Attention, comme pour toute manifestation qui se respecte, il te faut du matériel obligatoire. On ne s’aventure pas sur un trail de renom sans gigoter dans au moins trois mille balles de matos ; là, c’est pareil. Cet attirail te permettra de jouir pleinement de l’expérience audiovisuelle proposée, en mettant tes sens en éveil dans des conditions optimales. Avant d’aller plus loin, veille donc à t’équiper des éléments suivants :

  • Une bonne connexion internet, car les chansons sont puisées sur YouTube.
  • Une sono branchée à fond, ou à défaut un casque sur tes oreilles si tu es compacté dans une rame de RER ou en train de glander au boulot.
  • Toujours si tu es au boulot, un minimum d’intimité : ton boss ou les RH qui passent sans cesse dans l’open-space, ou cette collègue un peu reloud qui matte tout le temps par-dessus ton épaule pour voir ce que tu fais, c’est pas le bon plan.
  • L’itinéraire de la course peut aider ; la chronologie du récit est un peu aléatoire, tu risques de t’y perdre. Tu comprendras plus tard…
  • Une certaine dose de second degré.

Comme à l’école, on va faire un petit exercice ensemble, pour être sûr que tout le monde a bien compris. Par exemple, quand au petit matin tu arrives sur la ligne de départ, frais comme un gardon, véloce comme un guépard, chaud comme un… Ok ok, j’arrête là les comparaisons animalières. Bref, quand t’as envie d’en découdre, tu as l’œil du tigre !


Mon astuce de pro : le compte-rendu est un peu long ; regarde déjà la taille du préambule ! Si tu es un peu ric-rac pour achever la lecture du pavé avant ta réunion de 14h, ne reste pas bloqué à regarder les vidéos jusqu’au bout. Tu lances la vidéo et tu continues sereinement ta lecture. Car oui, nonobstant ce qu’en disent les langues de vipère de ton entourage, tu es parfaitement capable de faire deux choses en même temps, du moment qu’il ne s’agisse pas de tâches trop complexes. Et lire un compte-rendu tout en profitant d’un fond musical approprié est à la portée de n’importe qui. Sauf des sourds évidemment, sois pas stupide !

 

Mais trêve de galéjades, maintenant que tout le monde a compris le principe, compte jusqu’à trois, et c’est parti !

 

Beaufort, minuit - L’heure du crime

 

Il est minuit ce 28 août (ou peut-être le 29, je ne sais pas si minuit fait partie du jour « d’avant » ou du jour « d’après » …) quand le double homicide a lieu. Les victimes ? Mes deux genoux. Le mobile ? Venir à bout de cette immonde descente de plus de 1400 mètres en moins de 8 km pour rejoindre le 90e kilomètre et sa « base vie », qui porte donc assez mal son nom. Saletés de genoux, une fois de plus mon corps me lâche. Quand je pense que tout à commencer par ce stupide marathon l’année dernière…

 

297 jours plus tôt – La grosse pomme

Ou peut-être même 298 jours plus tôt, si on considère que minuit fait partie du jour « d’après » …

 

Paf ! Elle explose ! Cette foutue ampoule que j’ai sous le pied éclate alors que je passe le semi-marathon. Je n’ai jamais eu la moindre ampoule sur mes trails, mais là va savoir pourquoi, j’ai une grosse ampoule qui s’est formée dès le dixième kilomètre. Il me reste le deuxième semi à courir pour boucler le marathon de New-York.

Je termine la course tant bien que mal en modifiant ma foulée pour ne pas trop galérer. Je ne le sais pas encore mais IL est là, IL s’est engouffré dans la brèche, IL s’installe sournoisement… Trois lettres qui font trembler les plus solides, les plus vaillants d’entre nous : T… F… L. Acronyme de « Tenseur du Fascia Lata », dont la tendinite associée porte le nom de « syndrome de l’essuie-glace ». Quelqu’un me faisait remarquer sur Strava que ça pouvait aussi signifier « T’es Foutu Longtemps ». Un visionnaire. Six mois de galère à réapprendre à courir, à faire des séances de quelques minutes en alternant marche et footing. Je peux enfin reprendre la course en mai, sans aucun dénivelé jusqu’en juin.

 

Pour compenser et garder la forme, je fais un maximum de vélo, en particulier quelques voyages sur plusieurs jours avec sacoches et tout le barda de bivouac. Mais peut-on préparer une TDS à vélo ?

 

Beaufort toujours, minuit toujours - La base vie

Rien à faire, pour être fort en trail, il faut faire du trail, à plus forte raison en descente. C’est ainsi avec la ferme intention de subir une ablation des deux rotules que je pénètre enfin dans le gymnase parquant le bétail de la TDS, et pire que ça, son assistance. Je récupère mon sac d’allègement auprès des bénévoles, puis me meut comme je peux vers les chaises et tables, lesquelles sont occupées en grande majorité par… les assistant(e)s en question. Et quand tu regardes à droite et à gauche, l’œil hagard et la patte folle, dans l’espoir de trouver une précieuse place assise, on dirait bien que, pour rester poli, ça leur en touche une sans faire bouger l’autre…

 

C’est bien simple : un coureur tout seul, c’est maximum deux chaises. Une pour son sac d’allègement, une pour ses fesses. Un coureur avec assistance, ce n’est pas moins de sept chaises qu’il faut sacrifier sur l'autel de la performance : une pour le champion, une pour ses pieds, une pour l’assistant un train de dénouer les lacets des chaussures des pieds du champion, pieds positionnés sur la chaise numéro deux susnommée, une pour le sac de linge sale porté jusque-là par le champion, une pour le sac de linge propre que le champion va enfiler par la suite, et enfin deux autres chaises pour deux autres assistants qui restent ici bien que leur champion respectif soit déjà parti depuis belle lurette, mais qui aiment bien tailler le bout de gras avec les autres assistants tout en profitant d’un peu de bouffe gratos.

Après quelques kilomètres à tourner en rond dans la salle (sans exagérer, c’est pas le genre de la maison…), je mets enfin la main sur le graal et peux m’affaler de tout mon long. Je prends une demi-heure pour me changer et manger. Je passe ensuite au stand des kinés et, coup de bol, une place se libère très rapidement pour moi. Je leur raconte mes malheurs : deux tendons rotuliens en fin de vie et un TFL récalcitrant. Ce dernier ne semble pas l’inquiéter plus que ça, c’est donc des « tapes » (prononce tèïpe, c’est de la langue de Shakespeare), sortes de grands pansements élastiques, que l’on va me greffer. Sauf que les tapes, ça ne tient pas sur les poils, donc il faut raser. Je me fais gentiment chambrer par la kiné qui me dit que les coureurs ne veulent jamais s’épiler les jambes, sous prétexte que cela fait fille, ou pire, cycliste.

 

Elle s’équipe donc d’une tondeuse et rase tout ce qui doit l’être. Et alors, on n’est pas bien là, sur la TDS, à se faire une petite épilation du maillot ?

Au final, j’aurais pris une heure de pause, comme je l’avais prévu dans mon roadbook. Je quitte le ravitaillement, pressé mais surtout anxieux de tester l’efficacité de ces artifices censés me permettre de courir convenablement. Au passage, je m’arrête vers Ewi, qui a opté quant à lui pour le stand podologue, chacun ses goûts. Je lui montre ce qu’il qualifiera de « genoux bioniques ».

 

Je lui souhaite bon courage pour la suite, en ne sachant pas à ce moment-là que c’est la dernière fois que je le croiserai sur la course, alors que nous avons fait jusque-là un bon bout de route en commun. #GangDesLyonnais. Mais surtout, c’est à lui que je dois la nuit tout confort passée à Courmayeur la veille…

 

36 heures plus tôt – La pression monte

Comme pour toutes mes courses, j’ai du mal à dormir les nuits avant l’événement. J’ai peur mais j’ai hâte d’y être. Dans tous les cas, je suis tout excité.

 

On se retrouve à Cham’ avec les kikous Ewi et Méocli, qui ont la gentillesse de me prêter deux mètres carrés de carrelage dans leur chambre d’hôtel à Courmayeur pour que je puisse y installer mon matelas et mon duvet. Nous rejoignons également ilgigrad pour prendre notre navette et passer au contrôle du matériel, puis yves_94 pour un bon diner au Cadran Solaire, repaire kikourou pré-TDS depuis de nombreuses éditions. Puis au dodo vers 21h30 pour une courte nuit. Je tâche de faire abstraction du brouhaha extérieur, mais dois finalement me résoudre à sortir mes boules Quies pour espérer trouver le sommeil. Pas grave si je n’entends pas le réveil, mes deux colocataires me réveilleront bien avant de partir partir.

 

Réveil à trois heure, rapide petit déjeuner et préparatifs, puis nous déposons nos sacs vers le départ, où nous perdrons malheureusement déjà Méocli. Ewi et moi rentrons en queue du sas de départ ; à peine trente secondes après, le mec à ma droite se tourne vers nous : il a reconnu nos attributs kikourou, dont il est également membre. Il s’agit de fred1975, avec qui nous partagerons les cinquante premiers kilomètres jusqu’à Bourg Saint Maurice.

 

Un rapide briefing de la part de Catherine Poletti, puis c’est le compte à rebours final. Et c’est enfin parti ! Les UTMBistes vibrent au son de Vangelis lors de leur départ, mais pour ceux qui partent côté italien, les frissons montent en écoutant la musique de Pirates des Caraïbes.

 

Le speaker s’égosille à nous dire que nous sommes 1800 concurrents de toutes nationalités, que c’est la plus grande course du monde, qu’on est fabuleux de prendre le départ, blablabla… Vu qu’on est dans les derniers, ça prend bien quelques minutes pour franchir l’arche de départ et pour pouvoir se mettre à trottiner dans le centre-ville. On se souhaite bon courage et chacun part à son allure.

 

Beaufort encore et toujours, 1h du matin – Enfin seul

Cette heure de pause m'a requinqué. Je pars en marche rapide sur le plat pour m'habituer aux tapes sur mes genoux. Il y a maintenant pas mal d'espace entre les participants, je me retrouve isolé dans les sous-bois et profite du silence environnant.


Le ravitaillement d'Hauteluce est presque désert : trois gars qui dorment sur une table, deux qui mangent, quatre bénévoles pour contenir toute cette foule en liesse. Ça tranche par rapport à l'effervescence de la base vie. Il y a même une tente médicale avec plusieurs lits, tous vides. Quand je pense à tous ceux qui cherchaient un petit coin où dormir à Beaufort, s'ils savaient qu'ils pouvaient être peinards moins de deux heures plus tard. Parmi les deux mangeurs, j’en reconnais un : il s’agit du Norvégien qui nous a sauvés de la troisième guerre mondiale lors de la toute première montée…

 

18 heures plus tôt – L’incident diplomatique

Quelques kilomètres de goudron permettent d’étirer un peu le peloton, puis nous attaquons cette première montée vers le col Checrouit par de larges pistes de ski. Le troupeau est dense, mais tout le monde peut évoluer à son rythme, c’est-à-dire celui d’un sénateur en ce qui me concerne. En aval du premier ravitaillement, un ralentissement s’opère. Je me retrouve alors derrière deux concurrents asiatiques, dont l’un a son téléphone en haut-parleur.

 

Ce dernier fait tourner le même message en boucle et tend systématiquement son portable vers l’oreille de son voisin, que celui-ci soit devant, derrière, à gauche ou à droite. Sur le coup, je n’écoute pas trop mais entends juste que le texte semble porter sur la grandeur de la Chine, peut-être une manière de se motiver lui et son pote. Manière par ailleurs assez surprenante, puis plutôt irritante après cinq minutes en leur compagnie. Le gars à côté de moi soupire un « putain, un lavage de cerveau en pleine TDS… ». J’écoute alors plus attentivement la prose, pour finalement comprendre (le téléphone est en anglais évidemment, je ne parle pas le mandarin…). Les trois phrases disent : « Il n’y a qu’une seule et unique Chine dans le monde. Hong-Kong appartient à la Chine. Si quelqu’un veut diviser la Chine, je me battrai pour mon pays. ». Intrigué, je regarde alors le drapeau sur leur dossard : le type au portable est chinois, et celui que je pensais être son pote est… hongkongais ! Et ce dernier arbore une grosse étiquette « Freedom for Hong-Kong » sur son sac. Je reste hébété devant cette scène ; je suis persuadé que le truc va se terminer en un brutal combat de rue entre ressortissants asiatiques.

 

Mais non, l’indépendantiste reste de marbre ; ce cirque dure pendant plus d’un quart d’heure, lorsqu’un Norvégien attrape le bras du Chinois en lui disant qu’il ne compte pas écouter ses conneries jusqu’à l’arrivée. Le Chinois fait mine de ne pas comprendre en quoi ça dérange les gens autour (sérieux mec ??) ; le Norvégien sort alors son portable et menace de filmer l’incident et de le dénoncer à l’organisation. Les deux protagonistes rangent finalement leur gros engin alors que nous arrivons au ravitaillement.

J’attrape juste un verre de coca et repars, accompagné d’Ewi et Fred1975. A peine sortis du ravito, nous sommes bloqués par ce qui sera le seul vrai bouchon de la course. Nous restons malheureusement à piétiner, voire à l’arrêt complet, pendant quinze bonnes minutes.

 

Evidemment, il y a toujours des imbéciles pour doubler dans des conditions impossibles, et qui ne font qu’empirer le problème. Quand on peut enfin se remettre en branle, c’est un monotrace jusqu’au sommet de l’arête du mont Favre, point culminant de cette grimpette d’échauffement, atteint avec seulement quatre minutes de retard par rapport à mon roadbook de 37 heures. Ce n’est finalement pas si mal.

On peut désormais éteindre la frontale pour basculer dans la descente menant au lac Combal, enclavé au pied de l’envers du mont Blanc et recouvert d’une nappe de brouillard, qui pourrait donner au panorama un aspect un brin mystique… s’il n’y avait ces rotations d’hélico toute proche, et cette camionnette diesel puante qui roule au pas juste devant nous !

La barrière horaire est fixée à 7h30, et nous arrivons à 7h15. On est large ! Mais bon, on essaie quand même de ne pas trop trainer. La montée vers le col des Chavannes se fait à la queue-leu-leu.

 

Je pensais être un peu plus tranquille, et le début est un poil longuet. Les derniers hectomètres sont néanmoins superbes sur des petits lacets à flanc de montagne. Le point culminant et ses 2603 mètres sont passés, cette fois-ci avec quatre minutes d’avance sur le planning. Je suis assez étonné de voir le nombre de personnes qui semblent être à bout de souffle, voire complètement en perdition, et qui incriminent l’altitude. On n’est quand même pas sur le toit du monde…

La descente qui suit, en revanche, est une vraie vacherie : c’est une piste de 4x4, ne présentant aucune difficulté technique, en pente douce et régulière… Une vacherie je te dis ! Pourquoi ? Parce qu’avec ses airs débonnaires, elle t’invite à te faire plaisir et à dérouler à grandes enjambées. Sauf qu’elle dure presque dix kilomètres et qu’une fois en bas, ton capital quadriceps peut s’avérer déjà bien entamé, alors que tu n’as parcouru qu’un cinquième de la course.

 

Donc on y va avec le frein à main, tout doucement, despacito comme dirait le Kiki catalan. C’est un peu frustrant cette impression de se trainer, mais c’est un mal pour un bien, je suis persuadé que ça paiera plus tard. Une fois à l’Alpetta, la remontée vers le petit Saint Bernard se fait sans souci, si ce n’est ce dernier petit mur juste sous le col, où bison futé déplorera encore quelques menus ralentissements.

Au-delà du ravitaillement, l’intérêt majeur de ce passage est de nous ramener à la mère patrie.

 

Bon ce n’est que la Savoie, mais c’est quand même toujours ça de pris. Je me sentirai définitivement à la maison quand je foulerai le sol de la Yaute… Comme depuis le début, je fais un ravitaillement express et abandonne mes deux acolytes à leurs victuailles, tout en sachant qu’ils me reprendront facilement dans la très longue descente vers Bourg Saint Maurice. Là encore, la règle est la même : ne surtout pas s’emballer sur cette section, d’apparence facile, mais qui s’avèrera destructrice de quadri. Au sommet de l’échelle de la fourberie il y a la perfide Albion, puis la descente de Bourg Saint Maurice.

J’y vais donc franchement despacito, mais je commence à ressentir un truc bizarre, puis une gêne, et finalement une franche douleur au genou droit.

 

Alarme, alarme ! IL est là ! IL est revenu ! Le retour de la revanche du TFL. Comme prévu, Ewi puis Fred1975 me rejoignent, puis je les vois irrémédiablement s’éloigner. Je cogite, j’enrage ; je n’ai même pas fait cinquante bornes et je perds déjà un genou. Heureusement j’en ai un deuxième mais quand même, ça sent pas très bon cette tisane. Une fois au point d’eau de Séez, je prends soin de m’étirer. Les trois kilomètres jusqu’à Bourg Saint Maurice sont plats et j’arrive à relancer. C’est le premier ravitaillement où l’assistance est autorisée ; ipso facto, c’est le gros bordel. Je mange un morceau vite fait, mets de côté quelques réserves et explique à mes deux compères que je préfère ne pas m’attarder. Surtout, je fais le plein en eau, avant de pénétrer dans ce que les finishers des éditions précédentes qualifient comme le mouroir de la TDS. C’est le début des montées raides, très raides…

 

Hauteluce, 2h30 du matin - Le tour du cadran

Encore une montée, encore du pentu, comme toujours depuis Bourg Saint Maurice. Un gars me rattrape, je lui demande s'il veut passer mais il préfère rester derrière. Visiblement mon rythme lui convient bien, un peu trop même. Je passe en mode « marche nordique » dans les faux plats, il fait pareil. Je trottine, il me colle. Je ralentis pour manger ou boire un coup, il ne dépasse pas. Pendant les 2h30 de montée jusqu'au mont de Vorès, le mec s'accroche à moi comme une moule à son rocher.

 

Je n'ose même pas m'arrêter pour pisser de peur qu'il vienne me la tenir ! Cette ascension marque également ma première sortie de plus de vingt heures. Je n'ai jamais fait le tour du cadran en course ; ça va être chose faite. Sauf que la vingt-quatrième heure, précisément, se passe très mal. Je n'arrive plus à boire ni à manger, j'ai une sensation d'écœurement, mal au bide, gros coup de barre. Je me force à boire de l'eau, j'ai sans doute trop forcé sur le sucre lors de mes derniers arrêts au stand. Cependant, je ne veux pas m'allonger ni même m'arrêter. C'est peut-être une erreur mais j'estime pouvoir venir à bout de l'épreuve sans dormir. Il y a pourtant partout des gars en train de ronquer, dans des lieux et des positions parfois improbables : bordures de chemins évidemment, bancs devant les chalets, mais aussi adossés à un pont, voire en vrac sur un trottoir avec les jambes qui dépassent sur la route ! Et ce n'est pas nouveau : en fin d'après-midi, déjà, les premiers dormeurs faisaient leur apparition. C'était dans la montée du monstre, après Bourg Saint Maurice…

 

14 heures plus tôt – Le juge de paix

Il faut emprunter les rues piétonnes du centre-ville pour s'extraire de la bourgade saint mauricienne. A peine plus haut, je trouve un coin à l'ombre pour me faire une bonne séance d'étirements, manger les denrées embarquées au ravito, et surtout faire le point. Je m'apprête à attaquer le gros morceau de cette TDS, avec presque deux mille mètres de montée d'un coup, si on omet la courte descente entre le col de la Forclaz et le pied du Passeur de Pralognan. Surtout, cette grimpette est très raide, orientée plein sud, avec très peu d'ombre, et nous la parcourons en début d'après-midi. Par chance, aujourd'hui le ciel est couvert et nous ne devrions pas trop souffrir de la chaleur. Concernant mon genou, je repense au récit de Spir qui avait également souffert du TFL il y a quelques années. Il avait poursuivi en argumentant que jusqu’au Cormet de Roselend, on ne fait quasiment que prendre du D+. Le TFL étant problématique en descente, il n’y a aucune raison de jeter l’éponge ici ; on avisera donc dans seize kilomètres. Pas de raison de paniquer, on reste zen.


Effectivement, c’est drôlement pentu, sur un petit sentier qui serpente et nous fait d’abord rejoindre le fort du Truc. Les montées passent toujours bien, je double beaucoup même si ce n’est pas toujours évident. A ce propos, j’avoue que j’ai été un peu frustré par le déroulement de ma course jusqu’à mi-parcours. Parti très prudemment, j’étais pointé 1600e au premier ravitaillement, soit dans les abysses du classement. Je n’ai ensuite fait que doubler, et même si le mode pacman est efficace pour flatter mon égo, cela signifie aussi que je suis toujours derrière des gens plus lents que moi. Les dépassements étant parfois ardus, soit je ronge mon frein et ça m’énerve, soit je double en devant me mettre un peu dans le rouge.

 

Par contre, je reste pantois devant tous ces dormeurs confortablement installés dans l’herbe pour faire une sieste. Il n’est que l’heure du goûter et les gars sont déjà en train de piquer un roupillon. Je n’ai pas le souvenir d’avoir vu ça sur la CCC, et plus on monte, plus ça ronfle.

Bref, bon an mal an, j’approche petit à petit du fort de la Platte quand je lève les yeux et reconnais… Ewi, une vingtaine de places au-dessus de moi ! Je suis parti avant lui de BSM, et le voilà devant moi ! Je présume naturellement qu’il a fait du stop et trouvé un 4x4 qui lui épargna une bonne partie de la montée. Je me fais un peu violence pour le rejoindre au niveau du fort. Lui aussi apparait bien étonné, et ne sait pas non plus justifier cette inversion de positions. Cela me conforte dans l’idée qu’il a usé d’un habile mais néanmoins délictueux stratagème pour me dépasser. Je dénoncerai sans vergogne cette immonde tricherie dès mon arrivée au Cormet, m’assurant ainsi le gain d’une précieuse place au classement.

 

Plus qu’un petit millier de délations fallacieuses comme celle-là et je monterai sur la boite à Chamonix…

Je profite que la pente s’adoucis pour pousser fort sur les bâtons jusqu’au col de la Forclaz, m’accorde une petite pause au sommet, puis enchaine avec la courte descente et les quatre cent mètres d’ascension jusqu’au Passeur de Pralognan. Je me fais alpaguer par Cyss avec qui j’échange quelques mots, puis m’engage dans la descente, sécurisée pour l’occasion par des cordes fixes. J'apprendrai après la course qu'un certain nombre de coureurs ont été bloqués au Passeur à cause du mauvais temps, et qu'ensuite pas mal ont été sortis par la barrière horaire à Roselend.

 

Je me dis que tu dois vraiment avoir les boules de te faire arrêter comme ça alors que tu en as encore sous le pied.

Quoi qu'il en soit, la descente du Passeur débute par une petite section dans un raide pierrier, puis le chemin s’assagis pour devenir une large piste qui nous amène alors tranquillement au Cormet de Roselend. Comme à chaque fois, je déglingue le ravito en prenant absolument de tout : fromage, cookies, tucs, pain d’épice, soupe, pâtes de fruit, saucisson, chocolat… Je gloutonne comme un barjot.

 

Je m’offre un vrai repos et décide, pour la première fois depuis soixante-sept kilomètres et quatorze heures de pérégrinations, de m’assoir un peu. Une fois repu et reposé, je me lance à l’assaut du col de la Sauce, encore une montée très raide, mais cette fois-ci directement à travers les alpages. Je n’aime que modérément ce genre de montée, je ne vois pas trop l’intérêt, on ne sait pas trop si on est sur une tentative de record du monde du KV ou sur un ultra. Ils n’ont pas eu l’idée de tracer des chemins les savoyards ? Après ça, je n’ai absolument aucun souvenir de la descente du col sur la Gittaz.

 

Ça doit être plutôt bon signe, c’est que ça a dû bien se passer. Ou alors c’est cette huitième bière que je me suis enfilée avant d’attaquer la rédaction de ce compte-rendu qui me joue des tours, va savoir. Toujours est-il que j’arrive au petit ravitaillement de la Gittaz avant la tombée de la nuit. Ce dont je me souviens en revanche, c’est l’accueil absolument irréprochable des bénévoles, ici comme tout au long de l’itinéraire d’ailleurs. Cœur avec les doigts et plein de gros poutous à eux pour nous permettre de vivre notre course dans ces conditions parfaites. Je me décide à prendre un café histoire de tenir le choc avec l’arrivée de la nuit, puis repars, frontale vissée sur la tête, prêt à affronter la terrible section nocturne du Beaufortain…

 

Sommet du mont Vorès, 6h du matin - Il n'y aura pas d'aube pour les hommes

Et elle est effectivement terrible, cette partie en nocturne ! Le soleil ne se lèvera donc jamais ? J'encaisse petit à petit cette vingt-quatrième heure et me refais un peu la cerise dans les replats légèrement descendants qui suivent, et zappe le point d'eau du col du Very. Deux heures plus tard, je suis au pied du col du Joly, une montée courte mais comme toujours, raide. Nouveau coup de mou, cette fin de nuit est décidément compliquée. Pour la première fois, je n'arrive plus à me focaliser uniquement sur le prochain tronçon et fait l'erreur de considérer l'ampleur de la tâche qu'il me reste à accomplir. Mon esprit bascule du côté obscur.

 

Dix heures au mieux, plus de quinze au pire. Et encore, si je finis… Chamonix me parait tellement loin. Je mise gros sur le lever du soleil pour me rebooster. Au ravitaillement du col du Joly, je ne prends que du salé en espérant que ça passera. Rien de mieux que quelques tranches de saucisson pour le petit déj' ! Je peux enfin éteindre la frontale et profiter de la lumière du jour. Cela fait un bien fou d'observer le panorama avec le soleil levant, de ne plus se focaliser sur les cinq mètres éclairés devant ses pieds, comme c'est le cas depuis la Gittaz. La Gittaz, c'était il y a une éternité, voire deux…

 

11 heures plus tôt - Mes genoux sont morts, vivent mes genoux !

A la sortie du ravitaillement de la Gittaz, on est rapidement dans le vif du sujet pour rejoindre le col éponyme. Pas de chichi, on n'est pas là pour faire des détours, c'est dré dans le pentu. A défaut d'être intéressant, au moins ça dénivèle vite. La nuit tombant, quelques groupes se forment. Je préfère rester seul puisque c'est enfin possible. On pourrait jouir d'un peu de calme, mais c'est sans compter sur cet imbécile de patou qui gueule sans cesse dans un champs à côté. Qui l'a laissé dehors celui-là ?

 

Une jonction s'opère au sommet du col et j'attaque la descente avec quelques personnes dans mon sillage. On traverse un pierrier, il n'y a plus trop de chemin (y'en a-t-il jamais eu en Savoie, je me pose toujours la question…) et le balisage est un peu espacé, on est parfois obligé de chercher pour trouver un fanion qui brille au loin. Ce qui n'aide pas, c'est que j'ai à ce moment-là un léger problème ophtalmique, certainement lié à la fatigue, et je commence à voir double, ou triple, ou un mélange des deux : trouble. Avec l'humidité de la nuit, il y a quelques passages sur des cailloux hyper glissants. Un gars me fait remarquer que ce n'est pas de la course mais « holiday on ice », et ma vue qui flanche ne facilite pas la progression. Je me dis que je vais finir aveugle, et là ça sera en effet une sacrée danse.

 

Les difficultés s'estompent, et deux petites bossent nous mènent finalement au pas d'Outray, point d'entrée de l'abominable redescente sur Beaufort. Je m'étire un peu, alors qu'une fille à côté de moi dégaine son téléphone. Elle se met à errer un peu partout et n'a visiblement qu'une seule idée en tête : trouver de la 4G ! Idée franchement saugrenue mais ma foi, nous ne sommes pas tous égaux face à la fatigue…

Le premier tier de la descente est raide et caillouteux. Le deuxième tier est raide et gravilloneux. Le troisième tier est raide et terreux. Le quatrième tier est raide et herbeux. Oui, il y a quatre tiers dans cette descente, elle est juste interminable. Mes genoux sont à l'agonie, je suis en route pour l'enfer.

 

Je m'arrête régulièrement pour m'étirer. Evidemment je ne cours plus du tout et peine de plus en plus à simplement marcher. Presque 1500 mètres à dévaler en sept kilomètres, ce truc est une abomination. Mes deux genoux ont passé l'arme à gauche, et il reste encore, en tout, trois mille mètres de désescalade pour espérer rallier l'arche d'arrivée. Sans rotule…

 

Col du Joly, 6h30 du matin - Le jour le plus long

Impossible de courir. La descente vers Notre Dame de la Gorge est une horreur. Si les tapes m'aident à trottiner sur le plat, ils semblent totalement inefficaces en descente. Je me fais régulièrement doubler, ce qui ne fait qu'accentuer ma fracture au moral. Je me force à rester calme, faire attention à mes appuis car la descente est technique, et à ne me focaliser que sur une chose : le ravitaillement des Contamines. Rien d'autre n'a d'importance.

 

Le replat après Notre Dame de la Gorge me fait du bien. J'arrive même à trottiner, alors qu'un gars sur le bord de la route m'interpelle d'un « Hey, kikourou ! ». Je mets un peu de temps à réaliser qu'il est lui-même un kikou. C'est keaky, le keaky de tous les keakys ! Il m'accompagne quelques minutes, ça fait du bien de discuter un peu. Il me donne des nouvelles des autres kikous engagés, j'apprends malheureusement qu'il y a plusieurs abandons dans nos rangs.

Le ravitaillement des Conta est immense, puisque c'est un des premiers qui sera utilisé lors de l'UTMB. Mais là, complètement désert, ça fait un peu bizarre. Je me pose un peu mais comme d'habitude, prends le parti de décoller assez rapidement, nourriture en poche plutôt que de m'attarder sur place.

La montée vers les chalets du Truc est similaire à toutes les autres depuis Beaufort : raide. J'accuse vraiment le coup, c'est dur de repartir. Mais les quelques gars autour de moi ne sont pas en meilleur état. Tout le monde est dans le dur, tout le monde souffre.


J'entends alors une voie derrière moi : « Hé mais c'est toi que j'ai suivi pendant la montée du mont Vorès ! ». J'ai retrouvé ma moule ! Du coup on fait la causette et on avance d'autant plus vite. En fait c'est un bon gars, un mec du coin donc forcément (sans chauvinisme aucun). Il a un sacré palmarès par rapport à moi : Montagn'hard, TDS ancienne version, UTMB, et même PTL. Il m'avoue qu'il trouve cette nouvelle TDS bien plus dure que l'UTMB, ce qui me met du baume au cœur. Sans surprise, il me sème dans la descente vers les chalets de Miage. Mais ça y est, je suis au pied du col de (pas du…) Tricot. J'y suis presque à la même heure qu'il y a trois semaines lorsque j'étais venu faire une reconnaissance de cette dernière difficulté. Sauf qu'à l'époque, ça me paraissait miraculeux d'espérer arriver là. Je ne pensais même pas prendre le départ, et pour cause…

 

45 jours plus tôt – Quand ça veut pas, ça veut pas

Ma blessure au TFL semble être de l’histoire ancienne, j’envisage enfin de refaire des virées en montagne. Mais crac ! Il se déchire ! Un bête faux mouvement trop brutal en sortant du lit et mon biceps se rompt. Les meilleurs médecins cherchent encore une explication rationnelle à cette blessure des plus improbables.

 

Mon corps me lâche ; plutôt que de me remettre en question, je préfère blâmer un héritage génétique inadapté à mes exigences sportives. Normal.

Direction le kiné et le home trainer avec le bras en écharpe devant le tour de France, toujours dans le fol espoir qu’un maximum de vélo, même sur place, me permettra de limiter la casse. Au final, je ne pourrai faire que trois weekends de randonnée ou trail avant la TDS. Ça ne pèse pas bien lourd face aux mensurations de la bête qui accuse, sur la balance de l'ITRA, un beau 145 kilomètres pour 9000 mètres de dénivelé.

Quitte à faire peu de sorties, j'en profite pour me faire plaisir et décide d'arpenter quelques sommets emblématiques des environs. Je pars donc randonner, avec ma frangine, du côté de la Pointe Percée et de la Tête du Colonney. Je fais aussi une belle sortie vers le col de Tricot et la cabane des Rognes. C'est l'occasion de reconnaitre ce qui sera la dernière ascension de mon hypothétique TDS. Jusqu'au dernier moment j'hésiterais à prendre le départ. Je me décide finalement en me disant que je n'ai rien à perdre, on sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher…

 

Chalets de Miage, 10h du matin - L'Ascension (avec un A majuscule)

La reconnaissance a été utile. Bien que raide (encore et toujours), je connais cette montée et elle ne m'inquiète pas plus que ça. Chaque pas me rapproche du paradis.

 

Je retrouve et double mon crustacé haut-savoyard, je donne le peu qu'il me reste dans cette ultime grimpette. Et enfin je l'aperçois, le bénévole qui scanne mon dossard au sommet du col. Je lui dis qu'il ne peut pas imaginer à quel point ça me fait plaisir de le voir. En descente, par contre, c'est toujours la catastrophe. Je marche du mieux que je peux, jetant régulièrement des coups d'œil à la superbe Aiguille de Bionnassay dont la traversée m'obsède depuis des années. Il y a parfois de grosses marches dans les rochers, je suis soulagé d'avoir mes bâtons pour m'aider. Arrive enfin la passerelle de Bionnassay, puis la ravageuse traversée vers Bellevue. J'ai jeté mes dernières forces dans le Tricot, je suis absolument vidé. C'est fini, je ne peux plus courir, même sur le plat. Alors je marche, seul.

 

Nous arrivons conjointement à Bellevue avec mon fruit de mer du 74. Il me dépose littéralement dans le début de la descente sur les Houches, je ne le reverrai plus, emporté par la vague.

Personnellement j'avance comme un mollusque, mais je sais que j'avais des temps hyper pessimistes sur la fin de mon roadbook. Même en déambulateur, je parviens donc à rester dans le chrono prévu. Je rejoins le ravito des Houches où les bénévoles sont encore incroyables. Une gentille dame me dit de m'assoir et me demande ce qu'elle peut m'apporter. En fait je ne veux rien, si ce n'est en finir. Je remets juste un peu d'eau dans mes flasques, m'étire une dernière fois et reprends mon chemin. Je ne me risque même pas à courir sur le bitume de peur de réduire en miette les derniers fragments de genoux qui me restent. Je mise sur l'effet « écurie », celui qui te fait retrouver des forces insoupçonnées quand la fin est proche. Mais même une fois arrivé au bord de l'Arve, je continue de marcher. J'entame la discussion avec un autre larron, on se motive pour trottiner. Nous fixons cependant quelques règles de bonne conduite, on n'est pas des bêtes, même après trente-trois heures d'effort.

  • Règle n°1 : bitume = on marche.
  • Règle n°2 : pente > 0,001% = on marche.
  • Règle n°3 : footing en continu pendant plus de 300 mètres = on marche.

Le respect assidu de ces règles nous mène, doucement mais surement, jusqu'à la falaise des Gaillands, puis enfin l'entrée de Chamonix.

 

Une bénévole nous lance un « Bravo, c'est fini ! ».

Son homologue la reprend d'un « Mais non c'est pas fini, il reste un kilomètre. Mais celui-là c'est le meilleur, y'a plus qu'à profiter ! ».

Les règles volent en éclat ! Les spectateurs en délire et l'odeur de la bière d'arrivée nous transforment en furies évoluant à un rythme effréné de 8 km/h. Même 8,5 km/h pour mon comparse, qui me faussera compagnie dans le final.

La larme me monte à l'œil. Profite mon gars, profite. Porté par les encouragements, je veux accélérer pour enfin en finir. Mais je n'ai pas envie que ce moment se termine. Profite, profite encore. Dans le dernier virage, papakipik est là pour m'encourager. Encore un kikou du gang des Lyonnais, ils sont partout, ça me fait super plaisir de le voir. Profite, encore un peu.

Je ne sais pas quel sentiment domine lorsque je m'engouffre sous l'arche d'arrivée. Une joie immense ? Du soulagement peut-être ? Un subtil mélange des deux, à n'en pas douter. A moins que ce ne soit la fatigue ? Il y en a, c'est certain. La douleur ? Non, elle s'est envolée.

Profite, toujours…

 

Lyon, J + 8 - Péroraison

Péroraison, mot compte triple, 66 points ! C'est toujours classe de placer un mot fraichement appris dans un compte-rendu de course…

Et après, que dire de plus ? Terminer un récit, c'est un peu comme terminer un ultra, les spectateurs en moins. On ne sait jamais trop comment on va finir et c'est dur de le faire avec style. Conclure est un art qui supporte mal les approximations, dans tous les domaines.

Conscient que la structure du texte puisse nuire à la compréhension globale de l'histoire (t'as quand même compris que ça parlait de la TDS, rassure-moi !), un petit schéma synthétique clarifiera peut-être la situation. Déformation professionnelle… Tu vois donc à gauche l'ordre des chapitres dans le récit, et à droite les mêmes chapitres remis dans l'ordre chronologique.




Aidé dudit schéma, si tu es vraiment un passionné, tu peux tout relire en remettant les chapitres dans le bon ordre. T'es pas obligé de reregarder les vidéos par contre, sauf si t'as vraiment du temps à perdre, ou que tu n'arrives pas à faire le lien entre la chanson et ce que je raconte. Normalement c'est plutôt évident, cherche avec le titre, le chanteur ou les paroles. Mets-y un peu du tien !

Sinon, bien qu'étant encore un peu sur mon petit nuage gonflé aux endorphines, et puisqu'on parle de déformation professionnelle, il a tout de même fallu retourner au boulot. C'est qu'un dossard pour l'UTMB ça coûte un bras, donc il faut que je commence à mettre quelques sous de côté. Bref, la vie, la vraie…


49 commentaires

Commentaire de Dahus69 posté le 05-09-2019 à 23:06:21

Ce CR drôle et atypique mérite bien un podium car seul toi arrives à ce niveau de chef- d'oeuvre ! et bravo encore une fois pour ta course, tu as bien fait de prendre le départ !

Commentaire de truklimb posté le 05-09-2019 à 23:46:52

Merci beaucoup collègue !
En espérant que ce soit la bonne pour toi cette année au tirage au sort de l'UTMB... Et pour moi aussi !
;o)

Commentaire de Mazouth posté le 05-09-2019 à 23:34:40

Je viens juste de lire l'intro... je ne sais pas si ce n'est pas risqué de lire la suite avant de dormir...

Commentaire de truklimb posté le 05-09-2019 à 23:44:07

Si tu joues le jeu et que tu écoutes toutes les musiques, y'en a pour un peu moins de 2h30 d'écoute... A toi de voir !

Commentaire de Mazouth posté le 06-09-2019 à 00:03:56

J'ai pris le risque de lire (je n'ai pas encore fini...) mais sans écouter la zik #pasfou ;) mais juste pour te situer, entre la Sauce et la Gitte, il y a le passage du Curé, pas avant le Cormet. Enfin je crois, vu que j'ai bâché lamanetablement l'UTB avant d'y passer ;) Allez, je reprends la lecture !

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 00:36:38

Pinaise, heureusement que tu veilles au grain, j'ai effacé cette erreur. Du coup j'ai bien un souvenir de la descente du col de la Sauce car je me rappelle clairement du passage du curé. A vouloir faire des récits qui partent dans tous les sens, je m'embrouille moi-même !

Commentaire de Mazouth posté le 06-09-2019 à 00:17:03

Et ben pu*** il est beau le malentendu !! Bravo !! Mais quand même, la Reine des Neiges à la fin c'est pas cool... Bonne nuit !

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 00:38:23

C'est pour ça que j'ai mis un petit stupeflip sur la conclusion, histoire de finir sur quelque chose de qualité ! La reine des neiges je l'entends en boucle à la maison, maintenant je suis immunisé...

Commentaire de SlowTrailer posté le 06-09-2019 à 08:07:54

Voilà un truc qui change des (trop) nombreux récits insipides.
Bravo pour ta course en tout cas.

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 10:42:47

Merci, et oui j'essaie en général de faire des récits plus divertissant qu'informatif...

Commentaire de shef posté le 06-09-2019 à 08:45:00

Excellent ce CR !!

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 10:38:17

Merci, et félicitations pour ton UTMB (surtout en 34 heures !)

Commentaire de LaBalle Rine posté le 06-09-2019 à 09:23:36

OMG, ce CR c'est quelque chose !!! bravo pour ta course et bravo pour le partage !!!

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 10:40:57

Merci, c'est toujours un plaisir d'écrire un CR.
Je m'en sers un peu comme d'une psychanalyse personnelle post-course !

Commentaire de vamosplaya posté le 06-09-2019 à 11:46:31

Génial !
Ton CR est aussi chouette que ta course, c'est très cinématographique

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 12:40:02

Merci, après il faut pas être pressé si tu regardes toutes les vidéos !

Commentaire de la buse de Noyarey posté le 06-09-2019 à 14:57:11

Récit de l'année , que dis-je , de la décennie . En tout cas merci d'avoir egayé ma matinée de bureau. Et accessoirement , bravo pour ta course

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 18:40:16

Merci, c'est bien trop élogieux, il y a pas mal de très bons auteurs de récit sur kikourou...
Mais content que ça t'ait plu !

Commentaire de BouBou27 posté le 06-09-2019 à 17:33:34

Ça c'est un chouette CR non linéaire !
Bravo pour ta course et avoir surmonté tes douleurs.

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 18:41:30

Merci, c'était pas une mince affaire, autant les douleurs lors de la course que de m'y retrouver dans tous les flashbacks du CR !

Commentaire de Arclusaz posté le 06-09-2019 à 17:44:18

Quel OVNI !!! je parle de ton CR mais plus généralement de toi. Un mec touché mais pas coulé, touchant mais pas collant (contrairement à la moule). Du coup, j'en oublierais presque tes attaques anti-savoyardes et de te faire payer des droits d'auteurs pour TFL. Un grand moment cette TDS et un grand moment de lecture et d'écoute ce CR. Merci.

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 18:44:13

Merci beaucoup Laurent.
Mes attaques ne sont que légitime défense, c'est toi qui a commencé sur le bouzin !!
;o)

Commentaire de coco38 posté le 06-09-2019 à 20:28:40

Grand moment que de suivre ta course... autre grand moment que ce récit (récit c'est plus joli que CR qui fait un peu trop penser au boulot !)
Tu as plus qu'à enchaîner quelques dizaines d'ultra... et tu pourras faire un livre de tes récits !
A+
JC

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 21:00:15

Merci JC, le problème c'est que les vidéos YouTube ça rend pas très bien en livre !

Commentaire de coco38 posté le 06-09-2019 à 20:28:40

Grand moment que de suivre ta course... autre grand moment que ce récit (récit c'est plus joli que CR qui fait un peu trop penser au boulot !)
Tu as plus qu'à enchaîner quelques dizaines d'ultra... et tu pourras faire un livre de tes récits !
A+
JC

Commentaire de kelek posté le 06-09-2019 à 21:33:13

Merci pour cet exquis moment de lecture kikouresque !
Et bravo pour être allé au bout malgré t pis tes pbs.

Commentaire de truklimb posté le 06-09-2019 à 22:01:25

Merci kelek. Quand je serai grand j'aimerais bien le TOR, je te demanderai des conseils !
:)

Commentaire de catcityrunner posté le 07-09-2019 à 09:39:57

Waouh quel CR ! J'ai commencé la lecture, enfin l'écoute et j'adore ! UN GRAND bravo pour ta course et le récit.

Commentaire de truklimb posté le 08-09-2019 à 10:58:21

Merci, ça fait plaisir !
:)

Commentaire de ilgigrad posté le 07-09-2019 à 16:40:37

waouh !
Je ne sais pas si je dois te féliciter pour ta course ou pour ton récit. Tu as été géant sur la TDS et la façon dont tu nous la raconte est monumentale. Tu as peut-être même passer plus d’heure sur le second que sur la première.
Je te souhaite de réussir beaucoup d’autres courses de cette dimension et je suis impatient d’en lire le récit.
À bientôt

Commentaire de truklimb posté le 08-09-2019 à 10:59:50

Merci David, j'attends de lire des news sur ton tour de mont Blanc en off !

Commentaire de ilgigrad posté le 07-09-2019 à 21:04:50

waouh !
Je ne sais pas si je dois te féliciter pour ta course ou pour ton récit. Tu as été géant sur la TDS et la façon dont tu nous la raconte est monumentale. Tu as peut-être même passer plus d’heure sur le second que sur la première.
Je te souhaite de réussir beaucoup d’autres courses de cette dimension et je suis impatient d’en lire le récit.
À bientôt

Commentaire de Trottinette posté le 07-09-2019 à 22:57:55

Et bien, nous avions décidé de nous faire une petite lecture tranquille pour nous endormir avant le tor demain, ben c'est raté ! Mais merci quand même, c'est top comme lecture. Quelle rigolade. Bravo pour ces 2 réussites. Signé marat 3h00 ?

Commentaire de truklimb posté le 08-09-2019 à 10:57:25

Merci beaucoup Marat, et bon courage pour ton dernier ultra, pas des moindres... avant le prochain ?!

Commentaire de rvialles posté le 08-09-2019 à 21:40:14

bravo pour cet excellent compte rendu, j'ai beaucoup ri !

Commentaire de truklimb posté le 08-09-2019 à 22:03:46

Merci beaucoup, c'est sympa !

Commentaire de robin posté le 10-09-2019 à 14:09:40

Libérez, Délivrez !
J'ai fini ce C.R. excellent.
Bravo tu t'es battu comme un lyon !

Commentaire de truklimb posté le 11-09-2019 à 09:59:31

Merci robin, je comprends ton sentiment de libération pour être venu à bout de ce long récit !

Commentaire de snail69 posté le 11-09-2019 à 05:51:58

En te suivant sur le live, j’étais vraiment content pour toi et m’attendais à un délicieux récit auquel tu nous as habitué.
Bravo Xavier. Tu as vraiment un mental de dingue : mettre en ligne sur kikourou un CR comme celui-là avec toutes ces insertions et couleurs de typo, faut vraiment être solide !

Commentaire de truklimb posté le 11-09-2019 à 10:01:52

Merci David !
C'est vrai que j'ai dû m'y reprendre à plusieurs fois pour finaliser la mise en forme du CR, j'étais pas loin de la crise de nerf au bout d'un moment. C'est plus stressant de poster un récit sur kikourou que de prendre le départ de la course !

Commentaire de Jean-Phi posté le 11-09-2019 à 14:04:16

Tip top ce CR, j'ai adoré ! Je note que la bande son est un vrai melting pot tout comme l'ordre de tes chapitres mais c'est classe. Et puis ça me rappelle un CR de STL avec la bande son aussi
N'empêche tu as fait fort de prendre le épart sans certitudes et avec un TFL. Bravo pour le mental et merci pour la marrade !

Commentaire de truklimb posté le 11-09-2019 à 17:52:23

Merci Jean-Phi, on se voit dimanche sur le RI2M !

Commentaire de L'Dingo posté le 11-09-2019 à 19:49:56

apres avoir fait une première lecture telle quelle, j'ai tentée la relecture chronologique.
les 2 sont excellentes ( un peu comme Courmayeur-Chamonix sens de la CCC , suivi par une TDS dans l'autre sens ).

La bande son est top, j'ai découvert quelques perles dont "who let's the dogs out" :-)

concernant le patou tu aurais pu l'illustrer par ceci :
https://www.youtube.com/watch?v=ZjYjjLJtGpo ,
mais je te déconseillerais de lui donner "l'os"
dont il est question dans les paroles , aaarrff ;-)))

Commentaire de L'Dingo posté le 11-09-2019 à 20:49:11

apres avoir fait une première lecture telle quelle, j'ai tentée la relecture chronologique.
les 2 sont excellentes ( un peu comme Courmayeur-Chamonix sens de la CCC , suivi par une TDS dans l'autre sens ).

La bande son est top, j'ai découvert quelques perles dont "who let's the dogs out" :-)

concernant le patou tu aurais pu l'illustrer par ceci :
https://www.youtube.com/watch?v=ZjYjjLJtGpo ,
mais je te déconseillerais de lui donner "l'os"
dont il est question dans les paroles , aaarrff ;-)))

Commentaire de truklimb posté le 11-09-2019 à 23:20:24

Haha merci l'dingo, tu es donc vraiment un passionné !!
Bien vu pour la chanson. Je ne suis pas un fin connaisseur de AC/DC ; ça sera mon thème musical quand j'aurai mon casque sur les oreilles demain au boulot...

Commentaire de Fennec74 posté le 12-09-2019 à 06:53:47

Oh toi alors, aussi bien d'un point de vue sportif que narratif , tu es un https://www.youtube.com/watch?v=1LKvMLmgAEY

Bien joué.

Commentaire de truklimb posté le 12-09-2019 à 10:38:54

Merci beaucoup mec ! Mais où trouves tu des chansons pareilles ?? C'est énorme ce truc ! Je vais vite écouter les autres, ça va me foutre en l'air mes suggestions journalières sur Spotify, mais tant pis.
Remets toi bien, j'espère te revoir bientôt en selle ou dans des chaussures de trail...

Commentaire de Benman posté le 12-09-2019 à 08:21:20

Je prends enfin le temps de te faire un grand bravo, j'étais bloqué sur le clip de despacito... ce CR est juste génial. Bravo pour ta ténacité en course et au stylo.

Commentaire de truklimb posté le 12-09-2019 à 10:20:40

Merci beaucoup Benoit, ça fait plaisir de lire un commentaire comme ça de la part d'un maître ès récit de course comme toi ! Les miens sont néanmoins un peu moins photogéniques, j'ai la flemme de sortir l'appareil en course...

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