Récit de la course : Via Romana - 58 km 2006, par L'Castor Junior

L'auteur : L'Castor Junior

La course : Via Romana - 58 km

Date : 13/8/2006

Lieu : Carpineto (Haute-Corse)

Affichage : 5916 vues

Distance : 58km

Objectif : Terminer

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Voyage au royaume du châtaignier...

Voyage au royaume du châtaignier...

Comment se jeter dans la gueule du loup
Fin 2005, lors de la dernière assemblée générale du JDM, pendant laquelle j'avais déjà signé, sans réaliser vraiment ce que cela impliquait, pour un week-end d'initiation à la Haute Montagne ( http://www.kikourou.net/recits/recit-1720-week_end_d_initiation_a_la_haute_montagne_-_ecole_de_glace-2006-par-l_castor_junior.html ), Frédéric Orsoni nous avait proposé sournoisement de participer à un trail, mi-août, dans sa Corse natale. Pour moi, la Corse, c'était un vague souvenir de vacances il y a plus de quinze ans, avec, au programme, plage, plage, plage, et un peu de lacs de (très basse) montagne. Bref, un décor de rêve pour une petite coursette sans prétention. J'avais donc, sans trop réfléchir, dit banco. Ah, fougue impétueuse de la jeunesse ;-)


Le flyer de la course.

Frédéric nous rappelant régulièrement, lors de nos séances de fractionnés ou de nos sorties dominicales, la nécessité de nous inscrire et de réserver le trajet, je me décidai finalement à jeter quand même un petit coup d'œil sur Internet. Le seul site trouvé sur Google était resté bloqué sur l'édition 2005, et ce n'est que courant avril, après le Marathon de Paris, que je trouvai enfin une version actualisée présentant le parcours 2006 et les modalités d'inscription. Pour le profil, gasp : 58 km et 3300m de D+. Pffiou... Ils ne rigolent pas les Corses. Il doit donc y avoir de belles et hautes collines dans cette île de beauté... Bah, ça me fera toujours un entraînement pour le CCC, auquel je me suis inscrit depuis l'automne, et qui devait être ma première course de montagne. Certes, moins de deux semaines séparent les deux épreuves, mais je ne vais pas m'arrêter à ce genre de préoccupations matérielles... Pour l'inscription, tout peut se faire par Internet. Je m'inscris donc le 31 mai, dernier jour avant l'augmentation des tarifs, scellant ainsi mon sort définitivement...


Pêle-même des photos de la semaine.

Cependant, la vie continue, à coups de trails ( http://www.kikourou.net/recits/recit-1600-trail_du_pays_de_sully_-_42_km-2006-par-l_castor_junior.html ), CO et raids ( http://www.kikourou.net/recits/recit-1715-le_trophee_picard_xtrem-2006-par-l_castor_junior.html ) plus ou moins vallonnés, mais toujours aucune confrontation avec la montagne. Ce n'est qu'en juillet que je vais prendre conscience de ce qu'est réellement la montagne. L'ascension du Mont Blanc avec le JDM ( http://www.kikourou.net/recits/recit-1735-ascension_du_mont_blanc_-_montee_au_sommet_puis_redescente_a_tete_rousse-2006-par-l_castor_junior.html ), puis le Tour de l'Oisans avec Mathias, Serge, Nico et Michel ( http://www.kikourou.net/recits/recit-1745-tour_de_l_oisans_-_etape_1-2006-par-l_castor_junior.html ) vont me fournir deux occasions extraordinaires de faire un apprentissage accéléré de cet univers ô combien magnifique et exigeant. Accessoirement, c'est d'ailleurs depuis la chambre que je partage avec Dominique, François et Roger dans notre gîte d'Argentière début juillet que je vais, enfin, me préoccuper, à distance, de mon trajet vers la Corse. En raison du stage Thalasso / Course à pied que j'ai prévu de suivre à Pornic jusqu'au 10 août, la traversée en bateau n'est pas jouable, et je me rabats donc sur l'avion, Orly-Calvi (Fred m'a conseillé Calvi plutôt que Bastia). Il me suffira ensuite de prendre le petit train (le plus pittoresque de France paraît-il) pour gagner Ponte Leccia, directement au Nord de Moltifao, point de ralliement des JDM engagés sur la course. Encore faudra-t-il se renseigner un peu sur les horaires de train... On verra ça de retour à Paris...


La Corse vue du ciel. Enfin, d'un A320...

Un Mont Blanc, un Tour de l'Oisans et une thalasso à Pornic plus tard, je me décide enfin à vérifier lesdits horaires, et là, c'est la douche froide : une liaison par jour dans chaque sens et, bien sûr, aucune ne me permet de rejoindre mes amis... Las, bien qu'ayant caressé un instant l'idée de m'inviter à effectuer le trajet à pied (voilà ce que c'est que de fanfaronner qu'on aime courir loin et longtemps ;-) ), mes camarades décident de prendre en charge le boulet que je suis, et c'est Marc qui se dévoue pour venir me chercher à l'aéroport. Heureusement, les choses ne se goupillent pas trop mal, puisqu'il en a profité pour ramener Marianne, que mon père, qui m'a amené à Orly, pourra donc ramener ainsi à Bures. Un chassé-croisé de haut vol ;-)

Arrivés à Moltifao, nous retrouvons Frédérique et Yves, pour un dîner "Chez César". Cette pizzeria au bord de la route est une première plongée dans la Corse profonde, avec des hommes et des femmes au caractère bien trempé, pleins de charme et très accueillants cependant.


Marc et Yves chez César.


Yves et Frédérique, toujours chez César.

Je ne verrai pas les Fayoux, qui ont embarqué vers le continent dans l'après-midi. Apparemment, tous les JDM, présents sur place depuis une semaine, ont déjà pu goûter aux charmes de la montagne corse, notamment lors d'une belle randonnée en début de semaine dans la Restonica, empruntant des bribes du parcours de l'Interlago. Ils sont donc autrement mieux préparés au terrain que moi, qui n'ai fait que quelques footings autour de Pornic... Après cette agréable mise en bouche, nous rejoignons l'hôtel où je prends la place, dans la chambre de Marc, de Marianne. Marc, minutieux dans sa préparation, a étalé quasi religieusement le contenu de son sac sur le lit superposé que je dois occuper, et me fait donc rapidement une place afin que je puisse étaler, de façon hélas beaucoup plus anarchique, mes propres affaires.

Le lendemain, samedi, nous partons, Frédérique, Marc et moi passer prendre Frédéric pour rallier ensemble Carpineto, afin d'y retirer nos dossards. Le voyage vaut le détour : des routes de montagne qui n'ont pas à rougir de la comparaison avec les routes alpines les plus tortueuses et les plus dangereuses, agrémentées, particularisme local, d'un nombre incalculable d'animaux divagant, au premier rang desquels les vaches, dont on pourrait penser qu'elles sont, comme en Inde, des animaux sacrés. La dextérité de Marc, qui connaît bien l'île, nous permet d'arriver à bon port, mais j'avoue redouter déjà le même trajet que nous devrons accomplir le lendemain, dans la nuit, afin de gagner le départ de la course...


Carpineto le samedi.


Les sponsors sur les murs de l'église.

La distribution des dossards s'effectue dans la mairie de Carpineto, où organisateurs et bénévoles sont aux petits soins pour accueillir la poignée de concurrents venus accomplir les formalités d'usage. En nous remettant dossard, gourde et TS (enfin une course où je peux obtenir une taille S : merci !), ils nous indiquent que nous serons peu nombreux à nous élancer le dimanche sur les deux circuits (le nôtre et un, plus court, de 38 km et 2400 m de D+). En particulier, un bénévole glisse à Frédérique que seules trois femmes sont inscrites, ce qui, d'après le tableau des récompenses, devrait lui permettre, si elle parvient au terme de l'épreuve, de nous offrir un bon resto ;-)


Essayage des TS. Qu'est-ce qui est écrit dessus ?


Allez, Fred, ne fais pas cette tête ;-)


En plus, je t'assure qu'il te va bien...


Oh, les jolis petons...


Un châtaignier. Dans l'ambiance tout de suite...


Des châtaignes. Quoi de plus normal sur un châtaignier ?


Fred, Fred et Marc.

Après un essayage rapide des TS et une première acclimatation à l'ambiance très particulière du pays de la châtaigne, nous reprenons la route, sur laquelle nous trouvons une jeune fille du crû qui veut regagner Ponte Leccia en autostop. En chemin, elle nous explique l'origine du nom donné par les habitants de la région à un pont, le Pont des Trois Sœurs : trois de ses tantes auraient eu un accident de voiture à cet endroit plusieurs années auparavant. Décidément, les Corses et leur terre sont intensément liés. Nous la déposons à Ponte Leccia, puis déjeunons à l'hôtel à Moltifao. Dans l'après-midi, nous partons, Frédérique, Yves, Marc et moi sur Corte, avec sa citadelle imposante, pour une séance de shopping de dernière minute. Frédérique et Marc se laisseront tenter par le double porte bidons Salomon pour lequel j'avais déjà craqué en juillet, tandis que j'aperçois, au rayon des articles soldés, une paire d'Asics DS Racer VI vert pomme du plus bel effet : allez, ce n'était pas prévu, mais je craque tout de même pour ces chaussures avec lesquelles j'aurai intérêt, désormais, à courir un peu plus vite sur les épreuves de route ;-)))

J'envoie un SMS à Mathias, qui a dû terminer, normalement, son GR20 OFF sur cinq jours (moins de trois semaines après notre GR54 sur quatre jours et moins de trois semaines avant son UTMB... Un fou, vous dis-je...). Ce dernier me répond, assez rapidement, que tout s'est bien déroulé pour lui (chouette, encore un beau CR à lire !), et me renvoie, dans la foulée, un MMS où il a attaché une photo... du balisage de la Via Romana !!! En fait, comme il me l'avait indiqué, il séjourne dans la région, et a entrepris ce jour une randonnée au-dessus de Piedicroce, qui se situe à peu près au tiers du parcours de la Via Romana. Les fous ont ceci de particulier qu'ils aiment visiblement fréquenter les mêmes lieux et suivre des chemins similaires...


La photo que m'avait envoyée Mathias du balisage de la Via Romana.


Fred au bord de la rivière.


Paysage idyllique, où la baignade est un réel bonheur.

De retour, encore, à Moltifao, chacun des coureurs prépare son sac de course pour le lendemain (pour ma part, ce sera assez léger, avec ma veste légère Salomon et une couverture de survie, mon Camelbak de 2 litres rempli, mon téléphone portable ainsi que trois barres énergétiques rescapées de l'Oisans - je veux tester une course avec uniquement le ravitaillement de l'organisation - et mon appareil photo dans les poches extérieures), puis, après une petite baignade dans la rivière qui coule au pied de Popolasco, nous rejoignons les Orsoni dans leur maison de famille dans le cœur du village, pour une "pasta party" dont ils ont le secret.


Les sommets de Popolasco.


Les hommes aux fourneaux. En Corse. On aura tout vu...


Sabine, Fred et Yves.


Damien étudie le parcours de la course. Ils ont vraiment ça dans le sang chez les Orsoni...


Marc révise également.

Frédéric insiste tout particulièrement pour que je reprenne de l'excellente mousse au chocolat préparée par Sabine. Diantre ! Ce personnage a certainement de mauvaises arrière-pensées... ;-) Heureusement, Sabine fait preuve de bien plus de générosité, et m'offre quelques tranches de Lonzu, sorte de filet de jambon fumé, que je range dans des films plastiques, afin de pouvoir pallier un éventuel manque de ravitaillement salé sur la course. Après une nuit néanmoins légère, nous nous réveillons vers 4h15 pour être fins prêts au RDV, fixé à 5h00, avec Frédéric, puis nous reprenons la route escarpée jusqu'à Carpineto, où Marc parvient, difficilement, à se garer dans une rue étroite à 500 m de distance et une trentaine de mètres de dénivelé positif du départ.


Le parcours 2006, avec le tracé bleu pour le 38 km.


Le parcours en 3D.


Le profil officiel de la course.


Fred et Fred avant le départ.


Les mêmes, rejoints par Marc.


Grâce à un villageois, je rejoins mes camarades sur la photo. Notez déjà le teint blême.

La course : de Carpineto à Piedicroce
A 6h45, après une minute de silence observée en hommage à un jeune traceur du parcours décédé quelques semaines auparavant et, surtout, après la bénédiction donnée par le curé du village (l'homme d'église, comme c'est paraît-il la coutume en Corse, nous a souhaité une bonne course, de bonnes conditions météorologiques et, cerise sur le gâteau, de n'avoir aucune crampe pendant l'épreuve !), le départ est donné, et la centaine de concurrents inscrits sur l'ensemble des deux courses s'élance, devant les caméras de Sport+, pour une première montée bien raide dans les rues du village. Ca part vite, déjà, et je préfère trottiner à mon rythme plutôt que de chercher à tout prix à suivre les cabris partis en tête.

La météo est encore agréable, et ma tenue Salomon (short, TS et saharienne) est parfaitement adaptée. Mes chaussures NB1100 ont franchi les 1000 bornes dans l'Oisans, mais j'entends les pousser encore un peu, au moins jusqu'après le CCC. Je commence enfin, grâce à mon périple dans l'Oisans, à maîtriser l'usage des bâtons, et les sors donc dès que nous quittons la route pour la montée vers le Col d'Arcarota. Mes camarades du JDM, qui m'ont mis la pression la veille pour que j'approche des premières marches du podium (les fous ! Je débute encore, moi, en montagne...), sont restés en retrait derrière, et je progresse donc dans ces forêts denses de châtaigniers au milieu de coureurs aguerris, dont j'imagine, à leur accent, que la plupart sont Corses.

La montée se poursuit, toujours très raide, jusqu'au Col d'Albi, puis c'est la première descente, assez roulante car sur de la bonne terre bien meuble et sèche, qui nous emmène vers la chapelle San Giorglio. Certains coureurs que j'avais doublés dans la montée (j'étais à 830 m/h) me repassent dans la descente, me rappelant ainsi cruellement mes piètres talents de descendeur. À Tramica, nous rencontrons le premier point de contrôle, avec des bénévoles charmants, puis la deuxième ascension débute. Après 140 m de dénivelé, nous passons dans le petit village de Parata, où est installé le premier ravitaillement. L'ambiance est fantastique : on dirait vraiment que l'ensemble des habitants de la Castagniccia ont envie de faire de cette course une grande fête : leur fête. Les mammas aux fenêtres ou devant leur porte, les enfants qui jouent dans les rues : tout le monde nous encourage avec une ferveur rare. Certes, les coureurs corses bénéficient parfois d'attentions particulières (après tout, chacun n'est-il pas, dans cette île, le cousin plus ou moins éloigné de son voisin ?), mais même le "continental" que je suis est salué et encouragé comme on l'est rarement sur une course. Le ravitaillement lui-même est très correct, avec notamment une variété de fruits et autres aliments sucrés, et de l'eau gazeuse en plus de la sempiternelle eau plate. Je décide de me ravitailler en solide à chaque ravitaillement, et prends donc une demi banane et quelques abricots secs, ce qui constituera mon régime alimentaire sucré pendant toute la course.


Vue depuis la chapelle San Bartolomeo.


Vue depuis la chapelle San Bartolomeo. Quelle belle journée...

Le chemin continue à travers les châtaigniers, en forte côte, jusqu'à la chapelle San Bartolomeo, d'où la vue sur les environs est saisissante. Un petit mot gentil aux bénévoles présents au point de contrôle, puis il est temps d'entamer la descente sur Piazzole, où se trouve un nouveau ravitaillement, puis Chiarasgiu. La descente se passe toujours relativement bien pour moi, même si je me fais doubler par quelques concurrents, notamment lorsque, arrivé à une barrière fermée (alors que le positionnement du balisage laissait penser qu'elle aurait dû être ouverte), j'hésite bien longtemps avant de l'enjamber. Je passe un autre passage difficile un peu plus bas, lorsque, suivant deux autres coureurs, je néglige de suivre le balisage et me retrouve, derrière eux, dans un enchevêtrement de ronces plus hautes que moi, dont ils s'extraient bien plus facilement que moi. Entre les griffures aux jambes et aux bras et une belle descente sur les fesses, je me laisse dépasser par trois nouveaux concurrents, qui, ça me rassure tout de même un peu, sont inscrits sur le "petit" circuit de 38 km. Ce système de départ commun aux deux courses, ajouté au démarrage rapide des premiers dans Carpineto, rend d'ailleurs difficile l'estimation de son positionnement dans la course. Je m'imagine alors, à tort, être dans les dix ou quinze premiers, et me prends à rêver d'une place honorable sur cette course qui, pour l'heure, m'apparaît largement en adéquation avec mon niveau actuel.


Les sources d'Orezza, d'où jaillit l'eau ferrugineuse.

Nous remontons ensuite vers les fameuses sources minérales d'Orezza, où un ravitaillement est installé dans l'enceinte même de l'établissement, à deux pas de la fontaine d'où coule, en permanence, cette eau ferrugineuse dont la réputation s'étend bien au-delà des frontières insulaires. C'est là que je rencontre Eric, coureur "continental" comme moi, engagé lui sur le 38 km, avec qui j'entreprends de discuter un peu. Nous discutons d'abord de nos origines et de nos terrains d'entraînement, et c'est lorsque je lui parle du Tour de l'Oisans OFF avec Mathias, Serge, Nico et Michel qu'il me dit qu'il connaît bien Mathias, pour l'avoir croisé sur différentes Saintélyon ainsi qu'en tant que membre du bureau de Courir Le Monde. Eric est également un kikoureur, sous le pseudo de Gamajade, qui a d'ailleurs rédigé un compte-rendu passionnant de sa Via Romana 2004. Drôle d'endroit pour une rencontre, mais j'ai pris l'habitude, sur les différents ultras que j'ai pu courir, de rencontrer presque systématiquement soit des gens connus car déjà rencontrés sur d'autres courses, soit de nouer des liens avec des inconnus qui partagent cette même passion d'aller au bout d'eux mêmes, sur des terrains on ne peut plus variés, toujours avec un esprit de générosité rarement rencontré par ailleurs. Je le laisse partir devant, car je souhaite profiter, gourmand que je suis, des délices du ravitaillement. En plus de ma classique demi banane et de ma poignée d'abricots secs, je me laisse tenter, ici, par un verre d'eau d'Orezza qu'une charmante bénévole m'amène après l'avoir rempli directement à la source. A ma grande surprise, cette eau n'est pas gazeuse à l'origine, et son goût extrêmement marqué est difficilement supportable. Tant pis pour les vertus ferrugineuses, je resterai à l'eau plate !


L'ancien couvent d'Orezza, haut lieu de faits politiques majeurs pour l'île.


Il paraît que de belles peintures subsistent. Une prochaine fois, peut-être...

Je quitte ensuite les sources d'Orezza pour reprendre un chemin forestier qui monte, toujours aussi raide, vers l'ancien couvent d'Orezza, d'où le clergé corse déclencha, au 18ème siècle, la guerre de libération contre la domination génoise de l'Île. Les chemins sont toujours aussi agréables, et la forêt, dense, nous protège des rayons du soleil qui se font de plus en plus perçants. Je prends quelques photos des ruines du couvent, puis poursuis la montée vers Pastoreccia, où se situe un nouveau ravitaillement. Je rattrape en chemin Gamajade, qui m'avait avoué être moins bon grimpeur que moi (ah, s'il m'avait connu avant mon dépucelage de la montagne entre Mont Blanc et Oisans cet été...), puis nous descendons ensemble sur Piedicroce, où l'accueil par les habitants est, une fois de plus, mémorable.


Vue sur Piedicroce depuis Pastoreccia.

De Piedicroce à Caldane
C'est dans la montée vers Pied'Orezza que j'abandonne mon compagnon, avant de parvenir au petit village de Campodonico où un ravitaillement nous est offert, servi au milieu d'une foule enthousiaste mais rendue quelque peu inquiète par l'amoncellement de nuages noirs au-dessus de nos têtes. Heureusement, ils se dissiperont finalement rapidement, et nous pourrons continuer la course sous un soleil à peine voilé, parfois, de quelques nuages d'altitude.

La portion qui s'annonce est, à mes yeux, la meilleure occasion de regagner un peu du temps perdu dans les descentes précédentes. En effet, on nous a annoncé une montée raide, et d'une traite, jusqu'à Bocca Favalta, soit 840 m de D+ que je parcourrai en 1h25', sans avoir croisé quiconque hormis un Corse, visiblement un Vétéran 3, que j'ai aidé à se relever d'une chute heureusement sans gravité, et un organisateur, qui me prévient de bien suivre le balisage car un concurrent devant moi s'est totalement fourvoyé. Je ferai donc attention !

Je me retourne, durant la montée, tant pour m'imprégner de la vue à couper le souffle que pour scruter, en bas, la présence d'éventuels poursuivants, en vain. C'est probablement aussi cela qui fait le charme d'une telle course : une toute petite centaine de concurrents lâchés sur un circuit de 58 km ont peu de risque de se sentir, à un moment ou à un autre, pris dans des embouteillages comme cela peut arriver sur des courses plus fréquentées. Je profite de ce calme relatif pour, lorsque sonnent les 4h30’ de course (soit la moitié de mon « objectif » inavoué de terminer en 9h00’), engloutir une des trois tranches de lonzu que j’ai prises avec moi, seule entorse à ma volonté d’utiliser uniquement les ravitaillements de l’organisation.


Vue sur Pied'Orezza depuis la montée sur Bocca Favalta.

A mon arrivée au ravitaillement de Bocca Favalta, je suis accueilli tout de go par une dame qui me crie : "Allez Cédric !!!". Je ne la connais pourtant pas, et nos nom et prénom ne figurent pas sur nos dossards. Je sais que ma notoriété prend une ampleur considérable (hum...), mais je suis tout de même très surpris qu'elle ait atteint, surtout sous ma véritable identité, des endroits si reculés. Un bref échange avec cette charmante dame permet d'élucider rapidement ce mystère : je ressemblerais beaucoup, d'après elle, à son fils Cédric, engagé lui aussi sur la course, qui, d'après les résultats publiés après course, aura été contraint à l'abandon. Qu'à cela ne tienne, ces encouragements totalement inattendus, ajoutés à l'accueil chaleureux des trois jeunes qui tiennent le ravitaillement, me font un bien fou et me permettent de repartir le cœur léger vers la Bocca Calerrucio.

Un détail me surprend toutefois : alors que j'ai réalisé la dernière ascension sur un rythme très correct, et qu'il me semblait avoir distancé largement les coureurs qui me suivaient, j'aperçois, dès mon départ du stand, une fusée revenir vers moi. J'interpelle gentiment ce coureur qui avance d'un pas qui m'apparaît extrêmement rapide, et fais ainsi connaissance avec Jean-Paul, abonné à Ultrafondus Magazine mais qui n'est pas membre du forum UFO. Personne n'est parfait... ;-) Il m'explique rapidement les raisons de sa remontée fulgurante. Plutôt mal en point au départ, et à peine remis d'une blessure, il a préféré partir très tranquillement, puis a pu, au fur et à mesure que revenaient l'énergie et l'envie d'en découdre, rattraper puis déposer les coureurs partis devant lui. Jean-Paul est un sacré coureur : finisher de l'UTMB en 2005, dans des temps comparables à ceux de mon père, il est sans cesse à la recherche d'expériences nouvelles, avec, je le comprends, une nette préférence pour le trail, en particulier en montagne.

Je me présente à mon tour, et lui décris, en quelques lignes, ma transformation de sédentaire allergique au sport pendant 28 ans en coureur régulier, fan comme lui de courses nature au long cours. Comme souvent lorsque j'étale ainsi ma petite histoire, Jean-Paul est d’abord surpris, avant de reconnaître, en mordu qu’il est, que l’envie de courir peut faire des miracles… Nous parcourons quelques centaines de mètres ensemble, mais je sens qu’il est plus « frais » que moi, et que je ne pourrai tenir bien longtemps à son rythme. Aussi, malgré ses encouragements à le suivre, je le laisse filer dans une montée vers une hêtraie, et ne le reverrai plus avant l’arrivée.

Je passe à Orticaggio, point où le 38 et le 58 km se séparent, vers 12h30, soit près de 5h45’ après le départ de Carpineto. Les organisateurs ont annoncé qu’ils imposeraient à tous les coureurs qui passeraient après 6h00’ de course de se rabattre sur le 38 km. Tiens, moi qui croyais être plutôt large avec cette barrière, je ne suis pas passé très loin… Comment donc vont faire mes petits camarades buressois, a priori un peu moins à l’aise en montée ??? J’ai à peine le temps de penser à eux : une bénévole présente à ce point stratégique s’inquiète de ma pâleur extrême, et me suggère d’abandonner… Il me faut donc lui expliquer, pour la rassurer, que ce sont bien les litres de crème solaire que j’ai grossièrement étalés sur mon visage qui me donnent cette allure cadavérique. Ouf : je pourrai donc continuer mon périple !

Le trajet se poursuit par une montée assez raide sous une hêtraie, d’abord jusqu’à la Muffraja, à 1600 m, puis vers Punta Caldane, le point culminant de la course, à 1724 m. Toujours aidé de mes bâtons, et assez désagréablement surpris par le peu de marge dont je dispose par rapport à la barrière horaire, je m’efforce de relancer la machine, et boucle cette ascension à près de 800 m/h. La vue, depuis cette crête, est magnifique, et contribue elle aussi à me redonner du baume au cœur.


Vue sur la crête depuis Punta Caldane, point le plus haut de la course.

De Caldane à Carpineto
Hélas, qui dit point culminant de la course, dit aussi fin (au moins provisoire) de la montée, et début de la descente. Et, en la matière, je suis servi… Plus de 800 m de descente ininterrompue, d’abord à travers des prés encombrés de cailloux, dans lesquels je manque de perdre le balisage de vue, puis sur des chemins secs remplis eux aussi de caillasse, où mes piètres talents de descendeur trouvent de multiples occasions de se rappeler à mon bon souvenir. Je peine tellement dans cet exercice que je suis contraint, rapidement, de marcher, complètement tétanisé par la peur de chuter.

Celle qui terminera deuxième féminine de l’épreuve me double assez rapidement, bientôt suivie par deux vétérans, que je suis contraint de laisser filer impuissant. J’essaie bien de relancer un peu la machine, repensant aux conseils de mes camarades lors du Tour de l’Oisans : toujours trottiner, même lentement, plutôt que marcher, mais rien n’y fait, et je m’imagine déjà passer de longues heures dans ces terrains hostiles qui semblent ne jamais finir.


Les abords de la chapelle Saint Vincent.

Je parviens à reprendre un peu de poil de la bête à l’arrivée au bas de la descente, où, après une vision agréable de la chapelle Saint Vincent vers laquelle nous repasserons quatre kilomètres plus tard, nous prenons une piste, assez large, sur quelques kilomètres. Le décor est moins agréable que dans les montagnes, mais le fait de pouvoir courir à nouveau est un carburant extraordinaire pour relancer une machine bien rouillée et un moral en berne. Je parviens ainsi à rattraper les deux vétérans qui m’ont doublé dans la descente, et passe les montagnes russes qui suivent sans trop de difficulté. Seule une colonie allemande (une secte ?) en bord du chemin nous distrait un peu.

Arrivé au ravitaillement de Pianellu, je suis rejoint par un Fred Orsoni, visiblement en pleine forme, qui, visiblement heureux de m’avoir rattrapé, me dépasse comme un boulet de canon, et s’envole dans le balcon qui nous ramène à la chapelle Saint Vincent. Diantre, je dois vraiment être à la ramasse pour qu’un p’tit jeune (certes de dix ans mon aîné ;-)) ) parvienne à me mettre une telle raclée. Mais, après tout, seul Corse du JDM, il connaît certainement le terrain comme sa poche, et est probablement bien plus à l’aise que moi sur les sentiers faits de caillasse dans lesquels la course évolue depuis une dizaine de kilomètres… En tout cas, je commence à mieux comprendre ce qu’il avait dans la tête lorsqu’il nous a proposé cette « coursette » à l’automne dernier…


Vue sur la Méditerranée depuis le Col de Muteri.

La dernière grosse montée (enfin, à peine 260 m…) nous emmène au Col de Muteri, et j’espère bien en profiter pour revenir sur les pas du ci-devant Orsoni, à qui j’entends bien faire payer son machiavélisme et sa fourberie : après tout, c’est à cause de lui que je galère, dans un environnement magnifique, certes, mais tout de même !, depuis près de 9h maintenant. D’ailleurs, l’approche des 9h de course, en plus de faire sombrer définitivement mes espoirs de boucler l’épreuve dans ce chrono, m’incite à prendre une nouvelle tranche de lonzu, qui me redonne (un peu) de pêche. Ironie du sort, c’est la charmante épouse du Corse fourbe qui me l’a préparée, et c’est en partie grâce à elle que je vais pouvoir, à défaut de le rattraper, le garder en ligne de mire.

La descente sur Perelli se passe un peu mieux que les précédentes, même si je me refais doubler par les deux vétérans, dont François Adobati, V3 « phénomène » de l’épreuve, qui me conseille, au passage d’admirer, avant l’arrivée au village, un abreuvoir à cochons parmi les plus imposants de l’île, installé à l’ombre d’un châtaignier majestueux. Merci l’ami pour cette recommandation à visée culturelle et touristique, que je suivrai quasi-religieusement (après tout, je ne suis plus à une pause photo près ;-)) ).


Un des abreuvoirs à cochons les plus longs de l'île.

L’arrivée à ce village, dernier point de ravitaillement avant l’arrivée, me redonne un bon coup de fouet, d’autant plus que la montée vers la Chapelle Sant’Alibertu, est plutôt agréable, toujours sous les arbres, et me permet de revenir pas à pas sur Frédéric, qui fait la course avec un vétéran apparemment en pleine forme. Les deux compères se motivent mutuellement, mais grâce à un soudain regain d’énergie et de motivation, je parviens à les avoir en ligne de mire, quelques dizaines de mètres devant moi, à l’arrivée à la chapelle.

Malheureusement, je sais qu’il faut encore descendre pour regagner Carpineto, et je redoute de me faire lâcher à nouveau. C’est là qu’intervient un de ces retournements de situation si fréquents dans les épreuves d’ultra, où trop de paramètres entrent en jeu pour assurer à n’importe quel coureur, y compris en tête du peloton, une course sans embûche. La fatigue, le coup de fringale ou de moins bien, les crampes, tous ces éléments que l’on ne peut totalement prévenir peuvent faire basculer brutalement une course du paradis à l’enfer et, heureusement, de l’enfer au paradis.

Dans le cas présent, c’est Fred qui voit sa course basculer… du mauvais côté de cette ligne invisible et ténue. Probablement puni par là où son pêché d’orgueil s’est réalisé, il est victime de crampes terribles dans la descente finale vers Carpineto, peu de temps après m’avoir averti qu’il supporterait difficilement que je le double dans une arrivée au sprint dans le village. Alors même que je descends, comme à ma détestable habitude, à un rythme horriblement lent, je parviens ainsi à le déposer sur place, avant même de mettre les pieds sur le bitume. Ouf ! Je l’aurai ainsi vaincu à la loyale bien sûr, mais aussi en respectant les règles du jeu qu’il avait fixées in extremis. Bien fait pour lui ;-)))

Je passe ainsi sous l’arche d’arrivée 10h39’08", 58 km et 3450 m de D+ après le départ de Carpineto, trente secondes derrière le compagnon de route de Frédéric, et six minutes avant ce dernier. Ouf, l’honneur est sauf : j’ai gardé une (courte) avance sur mes camarades JDM.

L’après course
Je suis à peine surpris de trouver Frédérique sur les marches de l’église, car je sais que la barrière horaire à mi parcours a dû être un obstacle sérieux pour elle. Las, elle m’explique que ce n’est même pas là la cause de son abandon. En fait, elle s’est perdue complètement (probablement là où un organisateur est venu m’alerter sur la nécessité de suivre scrupuleusement le balisage. Résultat : arrivée dans un village où les habitants semblaient à peine informés de l’existence de la course, elle a réussi à se faire rapatrier au départ. Dommage, notamment au vu de l’importance des récompenses offertes.

En effet, arriver classée quatrième lui aurait valu, comme à Marc, qui, dernier de la course en 11h25’, finira tout de même cinquième V2, une paire de chaussures de trail Montrail, offerte par Christophe Vatinel, responsable de la marque en France, rédacteur en chef de Trail Attitude (dont il nous a remis un exemplaire consacré à la Via Romana et à l’UTMB 2005), habitant de Boutigny sur Essonne et donc habitué des courses vertes et trails d’IDF et, accessoirement, troisième au scratch et deuxième V1 à Carpineto ce jour là.


L'arrivée de Fred, tout sourire.


Le même, un peu moins souriant. Bien fait ;-)))


Marc arrive, dernier de la course conformément à son objectif de ne pas se griller avant l'UTMB.


L'intérêt d'applaudir en tenant la ceinture de son cardio ? Euh, je ne le vois plus trop avec le recul...


Qui de nous deux est le plus fringant ? Moi bien sûr... ;-))


Fred et Marc.


Le speaker interviewe Marc. Comment ça j'ai l'air fatigué ?


Aaahhh, t'as vu tes pieds ?


Quoique les miens ne sont pas mal non plus. Eh, Marc, tu t'en fous, toi...


Eh, Frédérique, c'est bien sympa de prendre les photos, mais il faudrait aussi veiller à ne pas se perdre pendant la course...

A l’arrivée de Fred Orsoni, nous allons profiter des douches de campagne offertes par l’organisation en bordure d’un champ. Marrant ce système de douche branchée directement sur tuyau d’arrosage : l’eau est fraîche, mais le soleil permet de la chauffer à quelques quinze ou vingt degrés. Pas de quoi pavoiser, mais l’occasion, au moins, de se rendre un peu plus présentables (dans mon cas, la crème solaire a, comme à l’habitude, permis à la poussière de se fixer partout…), tout en faisant profiter les villages perchés dans les montagnes environnantes d’un beau point de vue sur nos corps d’athlètes quelques peu courbaturés…

Après la douche, n’ayant pas pris le temps de m’étirer sérieusement après l’arrivée, je décide de me faire masser. Surprise : c’est l’église qui a été réquisitionnée pour abriter le staff médical et les kinés. Pour moi qui fréquente rarement ces lieux saints, j’avoue que la situation est cocasse : un masseur s’occupe avec minutie de mes cuisses et mollets, tandis que je contemple les chefs d’œuvre d’art baroque qui s’étalent sous mes yeux dans la nef de l’église de Carpineto. Tiens, la prochaine fois, je prendrai carrément des photos de la scène…


Le podium de face. Impossible de le revoir ainsi pendant la remise des récompenses : trop de monde !


Yves, Fred et Fred. Frédérique a couru le Marathon de la Rochelle ;-)


J'ai dit une co..erie ?


Les nuages s'amoncellent à nouveau, mais nous épargneront encore.

Après cet intermède agréable, nous assistons, avec Yves qui nous a rejoints à l’improviste, à la remise des prix, où, finalement, seul Marc sera honoré (Fred et moi sommes un poil trop loin dans le classement Senior, et l’erreur de Frédérique l’a écartée définitivement du podium féminin). Le speaker, qui interroge notre V2 préféré, semble surpris que des « parisiens » puissent venir se perdre en Castagniccia. Eh quoi, il ne connaît pas les Orsoni le monsieur ??? ;-)) (visiblement, pas totalement, car même ici Fred voit son deuxième O se muer inlassablement en I. Dur…)

En tout cas, la course est extrêmement bien dotée en terme de récompenses : plus de dix mille euros de primes, plus un grand nombre de lots de valeur, pour une petite centaine de coureurs inscrits, soit au maximum six mille euros d’inscriptions… Ca laisse rêveur !


Le tableau des récompenses.

Dans un autre registre, Pierre Santucci, détenteur du record de la traversée du GR20 en 36h53’04", prévient discrètement une partie de l’assistance : inscrit cette année, pour la première fois, à l’UTMB, il entend bien y réaliser un exploit supplémentaire, et, pour ce, finir dans les dix premiers de l’épreuve. Nul doute que ce montagnard aguerri a largement la caisse pour venir à bout d’une telle épreuve dans un temps canon. Reste néanmoins à voir comment il pourra réagir sur un terrain a priori plus roulant que le GR20… Réponse dans deux semaines…

Après la remise des prix, nous nous attardons dans le village pour profiter du buffet, particulièrement copieux, offert par l’organisation aux coureurs, bénévoles et habitants, pour clore en beauté et dans la convivialité cette belle journée de fête. Les quiches, pissaladières et pizzas sont un régal, surtout pour moi qui ai complètement zappé le mini plateau repas offert aux coureurs après l’arrivée… Je retrouve alors Jean-Paul, fringant, avec sa petite famille : il a fait une très belle course, et me félicite pour mon temps, dont je ne suis pourtant pas particulièrement fier. Je ne m’étais en fait jamais retrouvé dans la seconde moitié du classement sur un trail. Il faut un début à tout, mais j’avoue que cette 28ème place (sur 54 concurrents au départ et 34 à l’arrivée), pas très éloignée de la barrière horaire, m’inquiète un peu, à deux semaines du CCC. Si j’évolue autour du Mont Blanc à ce rythme, il me faudra, là-bas aussi, composer avec ces barrières stressantes…


Le classement du 58 km.

Heureusement, Marc, qui a terminé l’UTMB l’an dernier, me rassure en soulignant que les chemins empruntés par l’UTMB sont autrement moins techniques que ceux de la Via Romana, et que mon « véritable » niveau se situe bien au-dessus de ce que j’ai réalisé aujourd’hui. J’aimerais le croire, mais sens le doute s’immiscer en moi : suis-je réellement prêt ? Et cette compétition, difficile et éreintante, si près de l’objectif essentiel de ma saison, n’était-elle pas, comme m’en avait averti Atomic JF, une véritable folie ? Pour moi aussi, la fin du mois d’août apportera beaucoup de réponses à ces interrogations quelque peu inquiétantes…

Nous nous éclipsons à la nuit tombée, Yves conduisant les deux Fred et Marc me ramenant. La remontée vers l’endroit où nous avions garé la voiture le matin n’est pas vraiment une sinécure, mais elle se passe mieux que j’aurais pu le craindre. Sur le chemin du retour, nous avons une pensée, en passant à Morosaglia, pour Pasquale Paoli, le fondateur de la première république jamais mise en place sur un territoire appartenant aujourd’hui au territoire national.

Après une nuit de repos bien méritée, nous décidons, le lundi, d’aller fêter nos exploits respectifs dans l’Oliveraie, un restaurant situé sur une colline face à Corte, où nous retrouvons ainsi toute la famille Orsoni. Marc, qui repart en bateau le lendemain d’Ajaccio, nous quitte pour partir dans le sud directement après le repas, tandis que les Lecoanet, qui partent le lendemain également, mais de Bastia, me déposent à Moltifao, chez les Orsoni, qui vont m’héberger jusqu’à mon départ de l’île le jeudi midi.


Damien et Fred. Tu veux ou tu veux pas ?


Antoine et Louis.


Ah, ces parents... Incapables de se tenir correctement ;-))


Marc, décontracté comme à son habitude, fier et heureux d'avoir bien géré sa course.


Antoine et Damien tenant dans leurs mains une tomate géante.


Yves et Sabine épatés par la taille de la tomate...


Fred préfère la prendre en photo avant qu'elle ne finisse dans nos assiettes...

Le mardi, après le départ des Lecoanet, est une journée de repos, qui fait un bien fou : la semaine en thalasso à Pornic était, mine de rien, particulièrement remplie, et ne m’avait pas laissé le moindre temps libre… Nous décidons de planifier une randonnée dans la Restonica le lendemain, vers les lacs de Mello et Capitello. Las, les prévisions météorologiques, particulièrement mauvaises, nous incitent à la prudence, et le mercredi sera donc une journée farniente. Nous apprendrons ainsi à nous méfier des prévisionnistes, car la journée sera finalement une des plus belles de la semaine, mais, comme il est trop tard pour démarrer la randonnée, nous décidons plutôt d’aller nous baigner vers l’Ostriconi (c’est ma première sortie plage depuis au moins deux ans), puis terminons l’après-midi dans les rues de l’Île Rousse, entre dégustation de glaces (miamm !!!) et shopping.


Au secours, on a coupé Damien en deux...


Une ruelle de l'ïle Rousse, face à la mer.

Reste une difficulté : l’organisation de mon retour sur Paris. Toujours très bien organisé personnellement, j’avais complètement négligé la problématique « ralliement » de l’aéroport avant le décollage de l’avion… Le problème apparaît rapidement : un seul train circule dans le sens Ponte Leccia – Calvi, et il arrive à Calvi un petit quart d’heure avant l’heure limite d’embarquement de mon vol retour. Et, comme la gare et l’aéroport sont distants de sept bons kilomètres, la solution n’est définitivement pas jouable. Tant pis, donc, pour la découverte de ce train qu’on présente comme un des plus pittoresques de France…

Finalement, après avoir envisagé toutes les possibilités (taxi, livreur de fruits et légumes, pompier, infirmière, etc.), Fred et Sabine, qui ont vraiment été aux petits soins pour moi, proposent que Fred me dépose le jeudi matin de très bonne heure à Calvi, avant de partir faire la randonnée que nous avions envisagée pour le mercredi. Je me retrouve donc dans le hall de l’aéroport Sainte-Catherine le jeudi à 6 heures, pour une longue attente de six heures avant embarquement. C’est là aussi que je mesure les apports de la pratique de l’ultra dans la vie quotidienne. Cette attente, sans réel moyen de se distraire (sécurité oblige, je ne peux même pas abandonner mon sac un instant sous peine de risquer qu’il soit détruit préventivement…), se passera finalement bien, dans un état de « zénitude » que je n’aurais jamais envisagé il y a à peine deux ans.

Sitôt arrivé à Orly, dans une grisaille et une fraîcheur saisissantes, je me prépare à repartir immédiatement pour les Alpes, où, entre l’anniversaire de ma grand-mère et le CCC/UTMB, je vais boucler définitivement ces vacances, les plus chargées et les plus dynamiques que j’aie jamais vécues…

L'Castor Junior

13 commentaires

Commentaire de zakkarri posté le 25-09-2006 à 06:17:00

Bravo pour ta course ! et de magnifiques paysages ça me donne envie d'y aller ... zak.

Commentaire de NoNo l'esc@rgot posté le 25-09-2006 à 08:46:00

Heureusement que tu traines moins sur
tes courses, que pour faire tes récits ...
Un mois qu'on attendait, mais ça valait le coup !!!
Et puis, la crème solaire te sied si bien !!!!!!!!!!
Bravo pour la performance, comme pour les photos,
un vrai régal !
Noëlle

Commentaire de Manuwak59 posté le 25-09-2006 à 09:09:00

Superbe, comme d'hab!!!
Quelle chance de vivre toutes ces belles aventures !!! Veinard!!!!

Commentaire de Manuwak59 posté le 25-09-2006 à 09:10:00

Superbe, comme d'hab!!!
Quelle chance de vivre toutes ces belles aventures !!! Veinard!!!!

Commentaire de Manuwak59 posté le 25-09-2006 à 09:10:00

Superbe, comme d'hab!!!
Quelle chance de vivre toutes ces belles aventures !!! Veinard!!!!

Commentaire de béné38 posté le 25-09-2006 à 13:15:00

Bravo Cédric, moi aussi j'étais en Corse, mais en vacances... Le lac de Mello, magnigique !!! Ce sera pour une autre fois.
Merci pour ce superbe récit, agrémenter de commentaires touristiques très agréables. Je te conseille vivement le GR20, peut-être en prenant plus de temps que Mathias, car la Corse est trop trop belle.... mais c'est comme tout, ses paysages les plus sauvages, et ses criques les plus retirées se méritent.
Bravo pour ta perf, la suite t'a bien montré que tu sais bien gérer... et comme dit Nono, heureusement que tu ne cours pas à la vitesse où tu écris tes récits....
A bientôt
Béné38

Commentaire de le_kéké posté le 25-09-2006 à 20:12:00

Super, ça donne envie, quoi que ça a l'air dur, peut être le petit parcours.
En tout cas super CR, comme d'hab, même si il faut prévoir 1 heure pour tout savourer.

Commentaire de totote01 posté le 26-09-2006 à 21:05:00

Entre les photos et ton CR, ça sent bon les châtaigners et la charcuterie corse...(miam)...
le 13 aout... il faisait déjà pas bien chaud...
Pffff...j'ose pas imaginer une course pareille avec la canicule!!!
bravo et merci ;o)))

Commentaire de eric41 posté le 06-10-2006 à 13:46:00

Trop fort Cédric,tu arrives à prendre toutes ces photos lors d'une course officielle.C'est bien ma foi de lire cela 2 mois après ,on se retrouve en vacances.

Commentaire de oufti posté le 29-12-2006 à 22:00:00

Cherchant une course en Corse, je suis tombé sur ton récit, et quel beau récit!

Bravo aussi pour ta perf au CCC. C'est pour quand le récit?

Commentaire de mysterjoe posté le 03-08-2009 à 22:54:00

par ton lien sur le forum suite au jt de tf1 je decouvre cette course et un des récits qui font notre bonheur d'avoir découvert kikourou, merci pour ce récit bien illustré.
au plaisir de se rerencontrer.

Commentaire de gmtrail49 posté le 07-02-2011 à 10:13:00

Salut Cédric,

Mieux vaut tard que ...

Je découvre seulement ton récit de la Via Romana 2006. Comme tu le soulignes, je n'étais à l'époque ni un fidèle du forum UFO ni kikoureur. Bien que n'intervenant pas activement dans les discussions, il ne s'écoule pas maintenant une journée sans que je ne me fasse une petite dose de récits ou de forum sur kikourou.
Je me suis essayé à l'exercice difficile des récits de course, mais je dois avouer que je suis un admirateur de tout ce que tu a pu poster sur notre site préféré !
Je garde un souvenir ému de la Via Romana 2006, de cet accueil si chaleureux des corses, des paysages et ... des rencontres que j'ai pu y faire.
Tu conclus ton récit en émettant des doutes sur ta préparation en vue de la CCC 2006 ; deux semaines plus tard, tu volais littéralement sur le demi-tour du MB ! Chapeau !

A bientôt.

Jean-Paul.

Commentaire de LtBlueb posté le 13-07-2012 à 08:59:37

Jamais trop tard pour découvrir les perles de récit. Je ne l'avais jamais lu à priori , bizarre .... Bon j'espère qu'on se reverra avant que tu ne sois capable de ré-enfiler le short noir de ta via romana :))))

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