L'auteur : rené80amiens
La course : 24 heures de Paris
Date : 4/12/2009
Lieu : Paris 07 (Paris)
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Distance : 0km
Objectif : Pas d'objectif
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Vendredi 04 Décembre 2009, 18h.
Ce aurait pu être Villepreux (78), Le Pontet (84), le golfe de Juan (06), ou encore un off à Hailles (80), mais ce fut Paris que le destin a choisi.
Pourtant, ce n’était point gagné d’avance lorsque la nouvelle est tombée et annonçait l’annulation des 24h de l’Assemblée Nationale.
A Seulement 5 jours de la date de l’épreuve, tout était à réorganiser faute d’un partenaire qui se désistait. La mission était difficile peut être impossible, et pourtant, ils ont relevé le défi pour le plus grand bonheur des coureurs (40 solo et 6 équipes relais), mais ils y parvinrent.
Alors je commencerai mon récit par remercier l’organisation, celle de l’ASCAN course à pied pour y être arrivé.
Say et Yann s’étaient entourés d’une équipe d’une grande compétence, d’une forte volonté, d’une équipe de kikous très motivés et dévoués, au point qu’on ne puisse l’imaginer.
Ensemble, ils se sont remobilisés et c’est ainsi qu’on s’est retrouvé au Jardin des Tuilleries, place de la Concorde , pour la 1ère édition des 24h de Paris.
Une belle histoire pu donc commencé, alors merci, car jusqu’alors j’avais connu Millau par une jolie course individuelle, la 6000D par une jolie course collective, mais ici ce fut une jolie course de complicité.
N’ayant jamais couru de 24h non stop, je m’étais donc minutieusement préparé physiquement et mentalement à vivre forcément de longues heures de galère, mais aussi à devoir canaliser des périodes d’euphorie qui m’amèneraiet à abandonner si je ne savais les maîtriser.
Pour se faire, j’avais opté pour la méthode Cyrano, qui consiste à alterner marche et course à pied au plus tôt.
Mathématiquement la vitesse théorique sur 24h se définit en multipliant la vitesse moyenne de son dernier 100km par 75%, ce qui me donnait 8.1 km/h, soit un objectif envisageable et maximal de 194km.
Sur le terrain, en courant à 9km/h, je m’efforçais de boucler le kilomètre en 7minutes en ajustant l’allure par de la marche, ce qui me donnait une vitesse moyenne de 8.57km/h, moins 4 minutes de pause par heure (ravitaillement ou tout autre cause), soit 8.1km par heure.
A cela, en optimisant une alimentation d’environ 330kcal/h et une hydratation à 660ml/h, tant que ce serait possible, j’évitais de rentrer dans le dur, le tout était de préserver une foulée économique, une posture gainée, et un ample mouvement des bras, aidé d’un système jamais vu jusqu’à là.
Pour cela, j’avais mon idée après 8 heures de course, c’était de mettre une minerve pour soutenir le cou, et porter…attention…une chambre à air pour porter mes bras !
Non, non, ce ne sont pas des carabistouilles, une vraie idée, qui a vu jadis des études menées en laboratoire pour démontrer l’économie d’énergie qu’obtiendrait le corps si il n’avait plus à supporter les poids des bras au file des kilomètres. A la longue, tout le monde le sait, le corps s’affaisse et la foulée se plombe.
Pour l’anecdote, cette idée est venue d’un article, lu, il y a quelques temps déjà, dans un magasine de course à pied. Elle a ressurgi lorsque mon beau-frère fut plâtré et qu’un copain lui avait confectionné une chambre à air pour supporter ses béquilles, permettez-moi, lorsqu’il irait se soulager!
Après en avoir testé les biens faits, non pas d’uriner, mais de la porter (à l’entraînement), je l’ai adopté en course, naturellement.
Evidemment, vous en conviendrez, on peut y arriver sans, mais je n’ai pas été déçu de l’avoir expérimenté, ça a dynamisé ma foulée par l’élasticité de l’amplitude des mouvements des bras. Peut être « l’air d’un con Jean-pierre », mais « pas fatigué » !!
Bon, c'est vrai, dans les premières heures je fis sans. Même le mp3 a attendu le premier quart de course, et pour cause: la foule présente sur le tracé balisé de 500m a bien occupé mon esprit. Perdu dans le peloton je cherchais mes repères, ceux que j’ai appliqués n fois à l’entraînement, les tours se succédaient malgré ça.
Par la popularité du Téléthon, chaque passage devant la tente de ravitaillement (sur la photo en vert et blanc) était à mon sens une complexité pour le comptage.
Parfois, on arrivait par groupe de 5 à 10 personnes, chacun annonçait son numéro de dossard en même temps !! Les pauvres, pour noter ce n'était pas évident. Je ne les enviais pas car au fond de moi je me voyais pas le faire, peut être que c’est pour cette raison que ma crainte était de savoir si ils avaient réussi à noter mon passage. Tranquille René, ‘’si toi, tu ne sais pas le faire, fais-leur confiance’’, la preuve, dans ce brouaa, tous les tours ont été enregistrés. Trop fort !
Rassuré, je poursuivais donc mon chemin. Au fil des heures, le circuit s’allégeait de coureurs, le comptage devenait humainement plus faisable. La répétition des tours permettait aux personnes qui s’occupaient des relevés de se familiariser avec les numéros et les coureurs.
Passé plusieurs heures, un code de communication s’instaurait entre eux et nous, je ne sais pas comment ils nous percevaient, mais une complicité s’installait, un signe de la tête, de la main, un clin d’œil, enfin quelque soit le moyen, l’émission et la réception du message se faisait.
On était au cœur de la nuit, et la course pouvait enfin commencer (...)
Chaque heure était le moment de faire le point sur la situation, de vérifier le nombre de kilomètre par heure, et de faire un bilan sur l’allure et de voir si je marchais assez ou pas en déplaçant le repère virtuel que je m’étais fait au bassin octogonal, et qui me permettait volontié de marcher.
Il a fallut tout de même la visite de ma sœur sur le site pour me mettre sur le bon rythme. Un arrêt prolongé mais profitable, un 9.4km/h jusqu’alors abusé devenait 9 km/h plus aisé que je tiendrais plus volontié. Avec les pauses, j’oscillais entre 8.10 et 8.15km par heure, pour moi c’était une copie parfaite que je rendais. Cette discipline m’encourageait, mais je veillais au grain, la calculatrice à la main.
Je surveillais ma foulée, gainais les dorsaux, fixais le sol qui se déroulait, ainsi les heures continuaient (…)
Dans les dernières heures de la nuit, lassé par mon propre ravitaillement gourmand et sucré, je profitais de mes arrêts pour m’alimenter différemment, banane, soupe, et purée, qu’on m’avait bien gentiment préparé, et que j’engloutissais lors de ma marche à pied.
Selon le tour où je la prenais, la recette de la purée changeait, ça m’amusait, tantôt solide, tantôt salé, tantôt liquide, tantôt fromagé, enfin tout y passait, mais c’était toujours avec plaisir que je la prenais ! Clic, une photo pour les remercier !
La tente, c’était le moment d’échange, un passage où psychologiquement je me ressourçais, on commençait à se connaître.On reconnaissait les voix, il y avait toujours un sourire, une joie, on sentait que le plaisir était là. Notre prénom était chaleureusement clamé, ils nous applaudissaient, nous encourageaient, chaque fin tour était ce que je préférais ! P’tit coquin !
Au petit matin, je guettais le lever du jour, car bientôt arrivait le moment où tout allait se jouer.
Le plan A avait parfaitement vécu jusque là. J’avais largement réduit le temps de marche pour compenser la fatigue qui m’envahissait lentement, dans le but de maintenir toujours la même allure des heures passées jusqu’à présent.
Le portable sonnait.
ma femme venait aux nouvelles, elle s’inquiétait.
Le froid et les petites averses de la nuit n’avaient guerre entamé le moral, ni l’allure. Je lui apprenais ma 2ème place, et je la rassurais sur les heures futures, en lui disant que je tenais, que les 195km étaient réalisables, et lorsque 10h sonneraient, je lancerai l’assaut que je me préconisais .
J’avais 2 possibilités pour cela :
Le plan B : maintenir l’allure et arrêter de marcher
Le plan C : augmenter l’allure en continuant d’alterner marche et course à pied.
La 1ère solution me fit découvrir que la marche était une nécessité, que je ne pouvais moralement et physiquement m’en passer. La 2ème solution fit apparaître deux importantes douleurs au niveau des genoux, qui me faisaient craindre le pire si cette allure je continuais à maintenir.
Alors, sagement, pour récupérer et ne pas tout gâcher, je revenais au plan A, et je me suis dis que pour ces 7 dernières heures, il me fallait contenir une allure que j’avais jusqu’ici su tenir.
Mais voilà, la théorie n’est pas celle du terrain, et c’est la pluie qui en changea mon destin. Une pluie diluvienne s’abattait, et tardait à vouloir cesser. Des flaques d’eau se formèrent, et en marres se transformèrent. Ca ruisselait de part en part, c’était un cauchemar, on se serait cru dans le compté de Galway!
Et pourtant paradoxalement c'est bien ses lacs qui allaient me sauver, mais en attendant je constatais que ma vitesse chutait inévitablement, les pieds pataugeaient, mais ça allait moralement.
A la sortie de ce m…que je ne saurai nommer, bien évidemment on était trempé, c’est là qu’on fit la différence entre imperméable et déperlant sur les étiquettes des vêtements !
Ah si jeunesse savait, ah si vieillesse pouvait !!!
Toujours est-il, à présent que l’eau s’évacuait et que la vitesse revenait, je me disais que maintenant le pire arriverait.
Effectivement, après le déluge, dans les chaussures, ça s’échauffait. Les pieds étant trempés, par frottement, la voute plantaire se fragilisait, des ampoules se formaient, les premières douleurs apparaissaient, de plus en plus ça progressait, la catastrophe arrivait.J’avais l’impression qu’il y avait comme du sable dans les ampoules, et par abrasion, chaque foulée que je faisais, peu à peu les ampoules s’arrachaient. Courir devenait un calvaire, et seulement ces douleurs ne cesseraient si m’arrêter je faisais.
Mais voilà, derrière, ça courait.
A 4heures de la fin, une avance de 13 km étaient guère suffisants. La seule solution était de continuer de courir, même à 7.5km/h, peu importante, il fallait continuer. J’étais néanmoins inquiet. Le moral était en berne, dans la douleur, même les sourires m’in-suffisaient…
Je fixais le sol, je courais au rythme de la musique que j’écoutais…puis ce fut les lacs du connemara, oui Galway..(http://www.dailymotion.com/video/x9jf34_michelsardoulelacduconnemara_music ) un élan m’envahissait, le courage revenait, la rage m’emportait, et ça me relançait.
Puis ce fut au tour de Vangelis, ( http://www.dailymotion.com/video/x6rh0_vangelis-1492-conquest-of-paradise_music) en moi ça connotait un effort tout autre, surdimensionné, celui de l’UTMB ! Si je n’étais pas capable de surmonté ce qui m’arrivait, alors ce n’était pas la peine de vouloir y aller d’ici 2 années.
Alors je poursuivais, courais, et le temps restant diminuait. Je ne voulais pas lâcher, je ne pouvais céder ma place par simple renoncement. J’aurai couru à sang si il fallait, mais les nouvelles étaient rassurantes, l’écart se maintenait, alors je mis le frein.Je décidais d’épargner ma santé de mes pieds, puisque le résultat était maintenant préservé.
La dernière heure fut très peu courue.
De temps en temps je revenais sur la piste, histoire d’immortaliser une photo avec le premier (àgauche sur la photo) :
Avec Albert, on se racontait nos vécus sportifs, son passé était impressionnant, mais pas étonnant, il avait une foulée qui en disant long sur ses ressources.
Ensemble, on gérait. Parfois il s’arrêtait au stand, et me rapportait ensuite les nouvelles du classement, histoire de me rassurer, que je ne me mettais pas en danger.
Le 3ème courrait toujours, sa foulée rasait le sol, on sentait une foulée très économique, il tenait, il revenait, mais ça allait, même si ma sœur et sa copine (de retour) s’en inquiétaient en étant surprises de ce que je faisais!
Encore quelques minutes…ça y est, c’est fait, 24h de course à pied !
C’est prodigieux, je suis aux anges, content du résultat, content de ma course, content des gens que j’ai rencontrés.
Des coureurs sympas ...
une ambiance de feu aux ravotos, plein de souvenirs avec un pincement au cœur pour un mémorable soutien..., d’encouragements incessants..., une course inoubliable, authentique et véritable.
Ces 24h dépassent toute mon imagination, c’est énorme comme effort, comme gestion.
Incontestablement ce fut dur, voire long, mais une chose est sûr, c'était bon !
J'ai vraiment envi de revivre cette expérience, cette étincelle , cette émotion, et c'est pour ces raisons, que je ne raterai pour rien au monde, la 2ème édition !!.
7 commentaires
Commentaire de francois 91410 posté le 13-12-2009 à 21:19:00
Magnifique !
Les efforts que tu as fait, ta gestion de course - comme celle de tes collègues - m'ont bluffés pendant ces 24 heures. Je mesure la grandeur de la performance, moi qui n'était " qu'en relais " !
Commentaire de c2 posté le 13-12-2009 à 21:21:00
Beau CR, préparé avec la tête mais écrit avec les trippes. Bienvenue en Circadie.
Christian
Commentaire de Pat'jambes posté le 13-12-2009 à 21:35:00
Merci pour ton récit.
24h... ça impressionne, de t'avoir lu je classe ce type de course dans mes projets les plus fous...
Tu sais... ceux qu'on ne réalise jamais autrement qu'en rêve ;-)
Bravo à toi.
Commentaire de taz28 posté le 14-12-2009 à 09:03:00
Merci René pour ce bien joli récit de tes 24 heures ...
Ce fût un vrai plaisir de pouvoir vous encourager sur ce bout de parcours, Nono kiffait tes lunettes de star :-)) et nous avons adoré crié Renééééééééééé !!!
Tu as fait une superbe performance, et je reste admirative, car tourner 24 h sur une petite boucle...Cela reste un truc de dingues pour moi !!
Remets toi bien,
Au plaisir de te voir tourner ailleurs ;-))
Taz
Commentaire de CROCS-MAN posté le 14-12-2009 à 13:56:00
BRAVO pour ta perf et merci pour ce partage d'expérience.
Commentaire de chtigrincheux posté le 14-12-2009 à 16:47:00
A oui en effet je t’ai bien vu avec une minerve mais loin de moi l’idée d’une stratégie sportive. Et qu’elle pluie à te faire monter tous les animaux de la planète dans une arche.
Comme tu le dit si justement « cela dépasse l’imaginable «
Au plaisir de tailler une bavette avec toi
Commentaire de Say posté le 21-12-2009 à 13:35:00
Ouah René!! Eh ben, très beau CR que voilà. Je décompresse avec les fêtes et on repart au travail pour une seconde édition alors...
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