L'auteur : Nono limit
La course : Eco-Trail de Paris® Ile de France - 80 km
Date : 14/3/2009
Lieu : St Quentin En Yvelines (Yvelines)
Affichage : 3418 vues
Distance : 80km
Matos : Saucisson
Bière fraîche
Espadrilles
Lampe-tempête
Objectif : Faire un temps
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L'hiver a été long. Les entraînements courts mais intenses (faire de la VMA en côte par 0 degrés, faut être un peu givré!) ont succédé aux sorties longues mais bucoliques (oh, le joli petit lapin ! ah, le fringuant chevreuil !). Les cross ont un peu pimenté le tout. Mais ouf ! Enfin, le 14 mars arrive. Avec Coach, nous sommes allés retirer les dossards et montrer nos deux frontales (eh les gars, c'est pas un peu abuser de nous faire déplacer juste pour montrer les loupiotes ?) vendredi soir. Samedi matin, nous rejoignons la base de Saint Quentin à 11h pour retrouver Pascal, un ami triathète qui participe à son premier ultra trail, son objectif : entre 9 et 10 heures. Pour Coach et moi : au mieux 7h30, au pire 7h52 et des poussières (comme l'année dernière). Mais il faut garder à l'esprit qu'une course de 80 bornes peut réserver de nombreuses surprises, bonnes comme mauvaises. Nombre d'ultra traileurs disent qu'il n'y a pas une course mais des courses dans un ultra. Alors à bon entendeur ...
Nous nous plaçons dans les 100 premiers dans le sas afin de ne pas reproduire l'erreur de l'année dernière, càd partir à l'arrière pour avoir à remonter tout le peloton sur les sentiers de la base. L'idée est de partir lentement, de continuer lentement pour finir lentement ... tout le contraire d'un 10 bornes ! En fait, je ne sais jamais partir doucement. Coach me tient en laisse sur toute la base, nous doublons régulièrement. Au détour du 250 000 000 000ème grain de sable, nous croisons une silhouette connue, habillée à la dernière mode Lafuma : ne serait-ce pas ? Mais si, mais si, c'est bien elle, toujours vue sur des magazines, mais jamais en chair et en muscles : Madame Karin Herry ! Un petit bonjour, on se dit "il faut la suivre, on est sûr de faire un bon chrono". ouais, mais là encore, je ne sais pas ralentir. Coach n'arrête pas de me dire qu'on va trop vite : "du 12 ? non, plutôt du 13 ou du 14... " Temps que je me sens bien, je sens rien !
Nous voici au premier ravito en 1h40. Ouah ! J'avais tablé sur 1h45, ça va trop vite, c'est sûr, comme d'hab' Coach a toujours raison. 5' d'arrêt pour remettre de l'eau et du coca (oui curieux, je sais, mais j'ai essayé à l'entraînement et ça me convient, alors ...), on avale une banane et c'est reparti pour 29 km dans la nature!
500m après le ravito, nous sommes rejoints par un gars qui nous interpelle et nous dit avoir couru avec nous sur le trail de Sully l'année dernière : "vous vous souvenez pas, le gars qui courait toutes les côtes ?". Oh putain que si, on s'en rappelle, "la mobylette" qu'on l'appelait ! Même les côtes à 40 %, il les courait ! Il est parti de la base de saint quentin en même temps que tous les coureurs, mais juste pour s'entraîner 2h30. Il prépare le marathon de Paris et nous tient un bout de causette pour ne pas s'ennuyer tout seul.
Nous arrivons au pied de la côte de la Sablière, celle-là même que nous avons montée 6 fois avant de faire le cross de la Sablière il y a quelques semaines. Nous courrons pendant quelques km avec le dossard 18, un gars parti avec sa baguette de pain dans son camelbag (je soupçonne la présence d'une bouteille de rouge et d'un bon saucisson dans la poche intérieure ...).Aux alentours du 25ème kilo, Coach a un gros coup de moins bien. En fait, je le tire depuis quelques kilos et il sait que s'il continue comme ça, la suite va être très dure. Alors il lève le pied (et l'autre aussi !) et me laisse partir. Je lui dis qu'on se reverra sûrement plus tard car dans toutes les courses nature au dessus de 20 bornes, il finit par me rattraper.
Je me sens bien, mes jambes tricotent sans que je m'en rende compte. Merci l'entraînement, l'eau, le pain d'épice, les bananes et la sporténine (1 pastille toutes les heures, c'est écrit sur le tube !). Dans une clairière, au 43ème km, je passe en 3h55. Les km défilent et j'arrive au 50ème en 4h38 aux environs de la 30ème place crois-je entendre dire... reouah !!! Je n'en reviens pas. Oui, mais en même temps, j'ai peur d'être allé trop vite. Alors, pour la peine, je m'arrête 10' pour laisser un message à ma douce, je mange, je bois 2 bols de soupe, j'écoute la fanfare, je dis "non merci" à un barbu très gentil qui veut absolument me rendre service en me remplissant mon camelbag. "Non merci Môsieur Hamelinck, vainqueur de l'édition 2008 !" aurais-je dû dire. C'est quand même génial le trail !
Je repars donc avec l'idée qu'il va falloir gérer la suite car il reste encore 30 bornes ! Oulala, c'est encore loin l'arrivée. Et c'est aux environs du 55ème que je commence à sentir mes intestins me crier leur ras le bol d'être maltraités depuis quelques heures. Je cherche un arbre, un coin tranquille, même pas de toilettes dans cette foutue forêt. Alors, merde, je m'arrête à un carrefour à 10 m du sentier. Deux coureurs auront vu la pleine lune entre 17h et 18h le samedi 14 mars...
Je suis à l'affût du moindre signe de fatigue de mon corps. J'ai vécu cette situation où je me vidais aux derniers Templiers et je ne souhaite pas finir dans le même état. Alors, je pense à beaucoup boire et à essayer de manger, même si c'est difficile. Je vois arriver le ravito du 63ème au bout de 5h57 de course avec un grand bonheur. Je prends un thé chaud car j'ai froid depuis le dernier ravito, je mange de la banane (encore !) et je repars au bout de 3'. Cela fait 6h que je cours (et marche dans les côtes, faut pas éxagérer quand même !). Plus que 17 km et 1H30 pour remplir le contrat de 7h30. Cela veut dire, courir en moyenne à 12 km/h ... ça va être dur mon gars ! Mais tous ces entraînements difficiles, ces sorties longues ... c'est pas pour rien. Alors cours Forrest, cours !
Je commence à me réchauffer enfin. J'avance en me chantant dans la tête un morceau que je dois travailler à la trompette, ça passe le temps et les km avec. Depuis quelques temps je ne voyais plus personne et là au détour d'un chêne ou d'un hêtre (enfin un truc avec des branches et des feuilles, ne m'en demandez pas plus, mon esprit s'égare !), je rattrape un gars qui finit par s'arrêter au bout de quelques kilos tétanisé par des crampes. Je lui propose une sporténine et je repars. j'arrive en 6h25 au 70ème km. Plus Qu'une heure cinq ! Mais je tiens encore, que c'est chouette ! Je prends la frontale et le bracelet et je repars après 5' d'arrêt.
La descente dans le Parc de Saint Cloud est vraiment agréable. Au niveau des grilles de sortie, je rejoins un gars, V2 qui se demande bien s'il peut faire une bonne place, voire finir sur le podium (il finira 2ème V2). Je l'encourage à me suivre car je me souviens de la galère pour suivre les balises en ville et surtout sur les quais. Mais il coince et me laisse partir seul.
Sur cette portion de la course, je suis hyper concentré, par peur de rater une balise et de devoir retourner en arrière. Je fais aussi gaffe à mes pieds. L'année dernière, par trois fois, j'ai manqué de m'étaler de tout mon long, non par excès de boisson alcoolisée, mais par manque de vigileance sur les irrégularités du bitume (oh un trottoir, une marche, zut !). J'ai bien vu la Tour Eiffel depuis Saint Cloud, mais sur les quais, elle se fait longtemps désirer et lorsqu'on l'aperçoit enfin, cette grande dame de fer n'en a que faire de nos foulées et plus on s'en approche, plus elle semble s'éloigner, la femme inaccessible !
Je rejoins deux coureurs marchant ensemble, les dépasse et continue à regarder en l'air et ma montre en voyant les minutes défiler. En bas du dernier pont, des promeneurs nous encouragent. Je suis aux anges. Au pied du dernier escalier, celui qui mène au Paradis, il est 19h26 ... plus que 4' ... je ne sais plus si la montée est longue, alors je cours dans les 50 premières marches, je vois un gars devant moi à 5 m. Puis, je n'en peux plus, alors je marche à grandes enjambées. Puis je n'en peux encore plus du tout, alors je marche doucement, je croise les photographes, esquisse une grimace, j'entends le speaker, mais où, loin ? je ne sais plus et je m'en fous, je veux que ça se termine, là, maintenant, tout de suite ! Je monte 10 autres marches, arrive sur un tapis, regarde le chrono : 7h28 et des poussières, je m'arrête une seconde pour bien voir ce que mes yeux voient. Je franchis la ligne symbolique. Il est 19h28'42''. Paris gagnée !!!
Coach arrive en 7h45, voilà une belle perf et surtout une belle preuve de courage, car il a traversé un enfer pour pouvoir finir cette course. Même après : un bon quart d'heure pour rejoindre le gymnase à 300 m de la Tour Eiffel !!!
Pascal fera 9h05, bravo pour un premier ultra.
Revenir l'année prochaine ? Jamais plus ! Impossible pour moi de faire mieux, alors à quoi bon ... Mais il ne faut jamais dire jamais ... Et puis c'est vraiment une belle course à deux pas de chez nous, alors ...
10 commentaires
Commentaire de seapen posté le 19-03-2009 à 09:57:00
Bonjour Nono limit. Bravo pour cette performance qui a vu réaliser ton objectif. Je l'ai trouvé exaltant et passionnant à lire. Ce niveau de performance est à la limite sidérant et fait rêver. Tant mieux pour la stimulation. Quant à faire mieux tu trouveras sans aucun doute de nouvelles motivations. Salutations sportives.
Commentaire de gmtrail49 posté le 19-03-2009 à 14:47:00
Salut Nono limit
Beau Cr qui donne envie de courir cet ultra ! Mais un ultra de 80 bornes avec 1500 m de D+ dès le mois de mars impose de faire du long à l'entrainement depuis plusieurs mois. Ce qui est clair, c'est que le jour où j'y viendrai, je ne m'aviserai certainement pas de partir à 13/14 à l'heure comme toi sans quoi je ne verrai pas la vielle dame !
En tout cas, une super perf, 31ème sur plus de 1000 arrivants, chapeau bas !
JP.
Commentaire de Mustang posté le 19-03-2009 à 22:45:00
belle course sur les chapeaux de roue! Bravo!
Commentaire de tintinmar75 posté le 20-03-2009 à 21:38:00
chapeau !
Commentaire de marioune posté le 21-03-2009 à 06:36:00
J'adore cet humour un poil décalé.
Bravo bravo pour ta belle course, rondement menée, à travers les "trucs avec des feuilles" en résistant à des "gentils barbus" qui veulent t'aider à remplir ton camel!!!!
Commentaire de agnès78 posté le 21-03-2009 à 08:46:00
un grand BRAVo pour ta course et merci pour ce récit plein d'humour!
sympa!
Bonne récup' & à bientôt
agnès
Commentaire de Bikoon posté le 21-03-2009 à 15:07:00
Bravo Arnaud pour ta course, et merci pour ton CR décalé.
Encore une fois, j'étais sûr tes talons ;o)
A bientôt
Commentaire de nono's coach posté le 21-03-2009 à 15:38:00
A force de te courir après, je parviens plus à te rattraper. Sur un forum, c'est bien plus simple!!
Bravo pour ton cr et ta course, surtout qu'avec une remorque en moins au premier semi,tu arrivais avant la nuit.
Commentaire de bluesboy posté le 21-03-2009 à 19:04:00
Bravo Nono Limit(ce surnom te vas bien)
Une course parfaitement bien gérée ,je n'ose imaginé les km d'entrainement qu'il faut pour arriver à ce niveau
Bonne récup
Commentaire de gastéropode posté le 26-03-2009 à 21:21:00
Bravo pour ta perf et celle de coach!Votre sérieux à l'entraînement a payé, mais quand même quelle perf!Beaucoup de coureurs s'entraînent encore plus dur et arrivent loin derrière vous. Tu as raison, c'est vraiment bien le trail!
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