L'auteur : Bikoon
La course : Grand Raid du Golfe du Morbihan - 177 km
Date : 27/6/2014
Lieu : Vannes (Morbihan)
Affichage : 6841 vues
Distance : 177.2km
Objectif : Objectif majeur
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Mes beaux-parents habitant dans le golfe du Morbihan depuis une dizaine d’années, ça fait un petit moment que cette ballade de 177 km me trotte dans la tête…
Cette année c’est décidé, plutôt que d’aller faire un tour comme d’habitude fin juin début juillet en Haute-Savoie, et plus particulièrement du côté de St Nicolas de Véroce , je vais prendre un bon bol d’iode « autour de l’une des plus belles baies du monde ».
Le hasard veut que ça tombe à une date anniversaire : l’année des 10 ans du grand raid. Tiens, la dernière fois que j’ai participé à une course anniversaire c’était pour les 20 ans de la diagonale des fous en 2012, et j’en garde un souvenir ému, pour ne pas dire douloureux... . J’espère fêter moins péniblement cet anniversaire de l’Ultra Marin !
Je vous passe les détails de la préparation ; mais sans être axée très très longues sorties, j’aligne quelques belles semaines en volume et surtout je ne me blesse pas en cours de route ! Comme d’habitude, mais sans aller jusqu’à un tableau de marche hyper précis, je fais quelques calculs pour estimer un temps approximatif de course. Le truc avec ce grand raid du Morbihan c’est que c’est plat. Ou quasiment. La distance je la connais (à 1 km près) pour l’avoir parcourue justement à la Réunion ; mais cette fois il y a 10 000 mètres dénivelé en moins !!
Du coup c’est quand même l’inconnu car c’est potentiellement courable tout du long… Je me fixe alors un objectif ambitieux (très) de 21h correspondant à une vitesse moyenne comprise entre 8 et 8,5 km/h. Sur le papier c’est jouable ; mais tellement de paramètres entrent en jeu sur ce genre de ballade qu’on n’est jamais sûr de rien.
Et parmi ces paramètres, il y en a un non maîtrisable qui me fait particulièrement de souci : la météo ! Je sais pour y venir régulièrement qu’il peut faire TRES chaud, et l’édition 2013 en atteste avec son lot de défaillances et de déshydratation. Le week-end qui précède le départ il fait 29° à Vannes, je suis dans mes petits souliers, presque au fond du trou, scrutant les prévisions à 7 jours, et j’achète en urgence une poche à eau d’1,5 litres en complément de mes 3 soft flask de 500 ml… Et puis, les jours passant, les prévisions sont de plus en plus favorables (comprendre : fraîcheur et humidité annoncées).
Le hasard veut que j’ai le dossard 666 : le chiffre de la bête, du diable !!! J’en rigole en imaginant faire vivre un enfer aux autres concurrents A moins que la chaleur inhérente à la bestiole s’en mêle et me fasse cuire dans les flammes de l’enfer… Mine de rien, ce petit détail m’amuse et augmente encore ma motivation !
Ça y est ! nous sommes sur la ligne de départ, et les cieux sont clairement du côté des coureurs cette année : les prévisions annoncent une température de l’ordre de 20° et des averses ; caramba ! c’est parfait !
Avec mon pote Arnaud sur la ligne de départ, nous dissertons sur la stratégie à adopter pour notre rythme de course : il semble que ça parte TOUJOURS BEAUCOUP trop vite, ce qui expliquerait les récurrents 50% de non finishers ! On se dit que (pour une fois) on va tâcher d’être raisonnables quitte à se faire doubler par des meutes de coureurs, et se tablant sur un 10/11 km/h dans les 1ères heures.
Oui bon, sauf que ça aussi c’est de la théorie (même à 2 mn du coup d’envoi) ; et une fois le départ donné c’est difficile de se freiner… le tour d’1 km de parade dans Vannes est très sympa, on emmagasine ces encouragements pour plus tard. Difficile de se freiner, d’autant plus que comme à notre habitude nous nous sommes placés dans les 1ers sous l’arche de départ… Alors OK, c’est loupé pour un départ prudent au fond du peloton, alors maintenant on va essayer de ne pas faire n’importe quoi sur les 1ers kms. J’ai l’œil rivé sur mon Polar pour ne pas dépasser les 11,5 à 12 km/h, la sortie de Vannes se fait par le chantier naval où de superbes multicoques, véritables formule 1 des mers font escale pour réparation, et nous passons justement à proximité de l’imposant maxi trimaran Sodébo.
Nous arrivons vite à la presqu’île de Conleau, les jambes tournent bien (heureusement vous me direz après 4 km de course ), et j’ai hâte d’arriver au 1er ravitaillement de Kerbilouët où m’attendent ma petite femme, mes filles et mes beaux-parents. Arnaud et moi gardons le pied sur le frein, et dès que la pente s’accentue un peu nous n’hésitons pas à marcher pour vraiment nous économiser sur ce début de course. Arradon / Kerbilouët arrive vite et je profite de ces quelques minutes pour emmagasiner un maximum de bisous et de câlins de mes puces et de ma petite femme que je ne reverrai que le lendemain, quelques 160 km plus loin.
Ayant souscrit au suivi SMS pour ma pomme et mon pote Arnaud, j’apprends que nous sommes pointés 23 et 24ème à ce 1er ravitaillement… oui là clairement nous sommes partis très vites, on va donc voir s’il est judicieux de temporiser en levant un peu le pied. Et en parlant de pied, j’en prends un total sur cette partie que je connais comme ma poche entre Arradon et Port-Blanc ; c’est génial de porter un dossard sur des sentiers qu’on parcourt habituellement à l’entraînement ! et comme je connais cette portion par cœur, je dois saouler un peu mon camarade de course à faire le guide touristique « tu vois cette magnifique maison avec piscine, il y a quelques années c’était une vieille ferme à l’abandon » ; « regarde ce superbe châtaigner multi centenaire » ; « tiens là ce sont les îles Logoden » ; « ah l’île aux moines, j’y ai fait ma demande en mariage » etc. etc… Pauvre Arnaud.
Juste après ce 1er ravitaillement nous passons au pied de la tour Vincent sur la commune d’Arradon, et ayant remarqué que la marée était haute, je sais que si on emprunte le sentier côtier sur la gauche de cette tour, ça ne passe pas à pied sec. Et quelle ne fut pas ma surprise de constater que les organisateurs nous font belle et bien prendre cette voie humide… On hésite quelques instants à retirer nos chaussures puis on se dit qu’il vaut mieux perdre quelques minutes à rechausser que de faire floc floc pendant des heures… J’ai une pensée pour tous les poissons qui ont dû ressentir un changement de leur environnement avec les litres de NOK dilués à cet endroit
Peu après Port-Blanc, nous revenons sur Stéphanos qui s’inquiète lui aussi d’être peut-être parti un peu rapidement (j’avais vu sur Kikouroù qu’il a le même objectif chronométrique que moi). Nous échangeons quelques mots, et je suis très impressionné d’apprendre qu’il cumule déjà plus de 2500 km de course à pied depuis le début de l’année, alors que je viens seulement de franchir les 1000 km sur la même période… je comprends mieux l’origine de ses cuissots musclés !
Arnaud et moi continuons de progresser à belle allure, mais nous sentons que ce rythme ne pourra pas durer indéfiniment, il qu’il va maintenant être question de gérer au mieux l’inéluctable décroissance de rythme que nous allons vivre.
Le jour commence à décliner lorsque nous arrivons au 2nd ravitaillement de Larmor-Baden après un peu moins de 3h de course pour environ 33 km où nous sommes pointés 22 et 23ème. Arrêt d’une dizaine de mn pour recharger nos bidons, s’alimenter un peu en solide (bananes et pâtes de fruit pour moi) et c’est reparti. Ici comme sur tout le parcours emprunté depuis le départ, il y a de très nombreux spectateurs sur les bords des routes et chemins pour encourager les raiders, TOP ! Que c’est bon de courir aux côtés d’un ami ! Nous continuons de cheminer tantôt au plus près de cette « petite mer » (signification de Morbihan), tantôt plus à l’intérieur des terres, mais toujours à bon rythme ; et même si nous n’en parlons pas, nous savons que nous sommes vernis de pouvoir courir côte à côte sur le même rythme ; pourvu que cela dure le plus longtemps possible !
Le port du Bono est atteint juste avant 5h de course pour environ 53 km, contrôle du matériel obligatoire puis il est l’heure de chausser la lampe frontale et d’enfiler les manchettes car la fraîcheur commence à tomber ; nous naviguons toujours dans les mêmes eaux du classement : 25 et 26ème, les sensations sont toujours excellentes pour l’un comme pour l’autre, même si la fatigue se fait sentir légèrement.
J’aime ces moments de crépuscule en course, où les paysages accessibles à notre vue laissent peu à peu la place à l’obscurité la plus totale et où le halo de notre frontale nous plonge dans une course différente : nos sens (tout du moins les miens ) sont plus en éveil la nuit, comme si l’ouïe et l’odorat venait suppléer à la vision par définition largement réduite. Alors ce n’est certes pas la ville des glaciers à l’occasion d’un UTMB sous une tempête d’étoiles, mais cette nuit morbihannaise est pour l’instant très agréable.
Un petit moment de gloire éphémère est toujours bon à prendre pour l’égo, et nous savourons donc pleinement ces applaudissements et ces « bravo » de personnes attablées sur le magnifique port illuminé de St Goustan.
A vrai dire, je n’ai pas trop de souvenir du parcours entre le port du Bono et le tennis club de Crac’h… c’est sûr que les paysages sont moins variés que le franchissement de cols et de vallées montagnards ! je me souviens tout de même qu’Arnaud et moi avons légèrement jardinés un moment avant de revenir sur le sentier côtier. Nous débouchons sur ce tennis club peu de temps avant minuit après environ 6h50 de course pour 69 km, la moyenne horaire a forcément déclinée mais le classement est toujours constant autour de la 21ème position. Nous faisons un bon plein de carburant car nous savons que la prochaine échéance c’est l’embarcadère avec la traversée en Zodiac qui marque peu ou prou la mi-course .
Je reconnais que cette portion est longuette, et pour tout dire je ne vois pas le bout de Locmariaquer arriver… nous sommes très (trop) souvent sur la route et les articulations commencent à couiner ! Puis arrive enfin la libération : ce bout du bout de quai illuminé en pleine nuit avec quelques courageux bénévoles toujours accueillants, chaleureux et encourageants. Le bip retentit et on nous informe qu’à partir de cet instant, le temps est décompté jusqu’au prochain bip du débarcadère d’Arzon. Nous sommes 4-5 coureurs à arriver quasiment au même moment, et on nous informe qu’un Zodiac va donc pouvoir partir dans quelques minutes, même pas le temps de se refroidir . Nous enfilons un gilet de sauvetage et un poncho et roule ma poule ! Cette traversée qui dure une quinzaine de minutes est une parenthèse féérique dans cette course : il n’y a certes pas de lune pour sublimer le paysage, mais je jubile (malgré les frissons) en filant à vive allure à 2h du matin sur les eaux noires d’encre du golfe en apercevant ici et là quelques lumières au loin.
L’arrivée est nettement moins magique : les organismes se sont très vite refroidis et nous avons tous l’air de petits vieux grabataires en descendant du bateau, grelotant pour rejoindre la tente de pointage. Diantre, bigre, fichtre, DIABLE que c’est dur de relancer la machine pour rejoindre le prochain ravitaillement d’Arzon annoncé seulement 6km plus loin ! Il finit tout de même par arriver cet oasis de chaleur et de lumière ! Nous faisons ici une vraie grosse pause après 94 km et 9h40 de course. Arnaud se change quasi entièrement, enfin je ne l’ai pas observé de près, il est parti s’isoler au fond du gymnase . Quant à moi je me NOK les pieds tout en gardant l’intégralité de mes effets, n’ayant pas prévu de sac de délestage sur ce grand raid.
Au menu : des pâtes, du fromage, du jambon et tout plein de riz au lait Mont-Blanc que je trouve habituellement immangeable et avec lequel je me délecte… [ça me fait penser que pour faire manger plus facilement des légumes à nos enfants il faudrait leur faire courir des ultras, ils trouveraient ça excellent aux ravitaillements… !!!] Côté boisson : coca, soupe, eau pétillante et eau plate pour rincer tout ça ; bref un vrai ravito revigorant. Je me refroidis très vite (bah oui bêta ton débardeur est trempé par 10h de transpi…) et j’ai hâte de redécoller pour me réchauffer. Encore une fois le redémarrage est très laborieux et on a l’impression d’avoir (encore) pris 20 ans en ¼ d’heure. Prochain pit stop : port Nezé seulement 11,5 km plus loin.
Une fois réchauffé je me sens super bien, et même de mieux en mieux. Imperceptiblement, je prends assez rapidement un peu d’avance sur Arnaud sans que je ne m’en rende vraiment compte, et c’est une fois que je réalise qu’il n’y a plus le faisceau de sa frontale sur mes mollets que je ralentis pour l’attendre. Cet événement se reproduit à quelques reprises tandis que nous commençons à essuyer une belle averse, il ne fait pas froid donc je n’envisage même pas de sortir ma veste de pluie. Cela fait maintenant plus de 10h que nous avons la chance de courir côte à côte, et nous n’avons pas encore abordé le difficile moment (et inéluctable moment) où l’un des deux se sentira mieux que l’autre. Et comme par un malheureux hasard, il se trouve qu’Arnaud endure un petit passage à vide au moment même où j’ai un regain d’énergie. Il me pousse à partir, à « faire un truc » et je suis tiraillé entre l’envie indéniable de profiter de ces bonnes jambes et le sentiment cruel de l’abandonner… Et c’est donc la mort dans l’âme que j’abandonne mon ami en lui souhaitant de continuer à faire une très belle course, et de prendre encore un max de plaisir jusqu’à Vannes.
C’est au moment où nos rythmes se séparent que le ciel, en bon breton qui se respecte, décide de nous tomber sur la tête ! Par Toutatis ! Mais peu importe, je galope à 12 à l’heure avec d’excellentes sensations et même s’il tombe des cordes, mon débardeur me semble être la tenue idéale dans de telles circonstances C’est juste jubilatoire ce 2nd souffle à 4h du matin sous des trombes d’eau éclairées par le faisceau de ma frontale, des sentiments de plénitude et de puissance mêlés. Je subodore que les positions étaient plutôt bien établies à ce stade de la course, et je vais me faire une joie de les bouleverser quelque peu ! Les jambes sont donc en grande forme, et le cardio est à l’unisson, je remonte sur pas mal de coureurs, ce qui accroît encore ce sentiment de bienêtre ! Je suis chargé à mort d’endorphines Et j’en profite un max car je ne suis pas complètement naïf et je sais très bien que ce rythme euphorique n’aura qu’un temps, autant le mettre à profit pour parcourir le maximum de distance ! J’arrive donc pleine balle au stade de Sarzeau où je suis pointé 14ème après 120 km et un peu plus de 13 heures de course. Je refais très vite le plein de mes soft flasks et je repars illico, bien décidé à ne pas louper une minute de ces moments éphémères.
J’ai bien fait d’en profiter car ce départ marque la fin de cette parenthèse enchantée et le début de l’aube naissante, toujours sous une pluie plus ou moins soutenue. Je me remémore les paroles échangées avec Arnaud la veille au soir, et me dis que c’est réellement maintenant qu’il va falloir gérer au mieux cette décroissance qui s’annonce. Parmi les derniers coureurs que j’ai doublé il y en a un qui a fait un pit stop digne d’une écurie de formule 1 aidée par ce que je pense être sa compagne ; je décide donc de me faire un peu violence et de reprendre les quelques centaines de mètres qui nous séparent. Il s’appelle Vincent, et sans encore le savoir il va devenir mon nouveau compagnon de course pour les presque 60 km qu’il nous reste à parcourir jusqu’à Vannes. Le jour est maintenant bien levé, mais le soleil fait la grasse matinée et c’est la pluie qui nous tient compagnie ; les chaussures sont bien sûr détrempées, mais après avoir vécu le grand raid de la Réunion 2012, ces circonstances ne me posent plus aucun problème ;o). Je vois sur mon plan de marche que nous devrions trouver un point d’eau à St Armel, mais sans aucune trace de lui, nous supposons que l’organisation avait prévu de l’installer en cas de chaleur ; ce qui est (heureusement) très loin d’être le cas ! Mon esprit n’est pas des plus vifs en ces instants de course après avoir été secoué depuis +/- 15h de course, mais j’essaie néanmoins de faire une projection de notre temps final si nous parvenons à maintenir grosso modo ce rythme. Et je dois m’y reprendre plusieurs fois dans mes calculs mentaux quand j’arrive au résultat d’un moins de 20h… J’en fait part à Vincent qui me remet le doute (et qui finalement devait être aussi embrumé que moi) en me disant qu’il nous voit plutôt en 21h…
Bref, nous prenons tout de même le temps de discuter un peu, de nous accorder quelques moments de répit en marchant à la moindre bosselette, mais surtout de relancer le plus rapidement possible après lesdites bosselettes. De toute façon, nous nous rendons vite compte qu’il est de plus en plus difficile de recourir après ces courts moments marchés, alors autant les limiter à la portion congrue ! Durant cette partie de la course je pense fréquemment à Arnaud en espérant de tout cœur qu’il ait repris du poil de la bête et continue à se faire plaisir. Noyalo stade, 5 mn d’arrêt. Au programme : riz au lait délicieux et de la purée bien salée. Ça commence à sentir bon tout ça, nous en sommes à 140 km de course pour un peu plus de 15h et classés à ce stade 13 et 14ème. Le ciel est toujours totalement plombé et la pluie ne semble pas vouloir s’arrêter, mais j’essaie tout de même de profiter de ces beaux paysages avec en face de nous la presqu’île de Séné qui nous attend 15 km plus loin.
Bon sans vouloir être rabat-joie, cette portion manque singulièrement d’intérêt, serait-ce la fatigue qui met à mal ma capacité à m’émouvoir devant de nouveaux paysages ? Ça n’est pas impossible… et cette lassitude qui commence à s’installer me fait commettre une erreur dont je crains qu’elle ne se paie cash : au ravitaillement de Séné Le Derf, je m’alimente correctement en solide et liquide sous une pluie battante, mais je repars sans avoir rempli mes bidons qui sont quasi vides… Je m’en rends compte trop tard pour faire demi-tour et je commence à gamberger. Vincent me propose gentiment de me dépanner quand je serai à sec. Puis lorsque je vois sur mon bout de papier qu’il n’y a finalement que 10 km jusqu’au prochain ravito je respire, ça va le faire ! Cette presqu’île de Séné nous fait repasser juste en face de celle de Conleau où nous sommes passés la veille au km 4…
Arrive enfin ce dernier ravitaillement de Port Anna du km 165 pour tout juste moins de 18h de course où nous arrivons après avoir grappillé quelques petites places en 10 et 11ème position . Cette fois, plus la peine de se faire de nœuds au cerveau : il reste environ 12 km et moins de 2h pour les parcourir si vous voulons être sous les 20h, ça va être bon !!! et on commence déjà à se féliciter d’une telle marque. Sauf qu’on ne va pas mollir non plus, et nous continuons à imprimer un bon rythme en relançant sans cesse et en s’encourageant mutuellement à repartir le plus tôt possible après chaque portion marchée. Je n’avais pas imprimé la carte du parcours, et pas non plus apprise par cœur, et quand il s’est agi de repartir en sens inverse de l’arrivée alors que nous abordions la périphérie de la ville de Vannes j’ai pris un coup derrière les oreilles, pourtant je voyais bien à ma montre qu’il restait 8 km et que nous ne pouvions donc pas tirer tout droit vers le port… Damned je commence à en avoir marre !! Vincent qui connaît bien le coin pour y habiter m’explique quel va être notre cheminement pour rejoindre le port, et au détour d’un virage sur cette petit presqu’île, nous apercevons un coureur quelques centaines de mètres devant nous… Ni une ni deux, et sans même échanger un mot, nous accélérons progressivement, bien décidés à grignoter encore une place ! Et ô miracle, les jambes répondent encore favorablement à cette sollicitation, et nous doublons ce coureur autour des 12 km/h. Puis boum ! encore un coureur en vue. Même motif, même punition : accélération du rythme et c’est cette fois à 13 km/h que nous déposons littéralement ce concurrent à l’embouchure du port de Vannes. Il nous félicitera d’ailleurs à l’arrivée pour ce rythme infernal
Ce final ébouriffé se déroule sous la pluie et dans le plus grand anonymat ; sauf, et c’est bien là le plus important à mes yeux, que ma grande fille a chaussé les bottes en caoutchouc bretonnes de Mamie et m’attend avec son plus beau sourire, je l’attrape par la main et nous franchissons la ligne d’arrivée à 3 le sourire jusqu’aux oreilles.
La vache ! je suis hyper étonné et totalement heureux de ce résultat . Avec la neutralisation de la traversée en Zodiac ce n’est finalement pas en 8ème position ex-aequo que je termine mais une 10ème place qui se marie à merveille avec ce 10ème anniversaire !!! Mon temps final officiel est donc de 19h 18mn et 37s pour un peu plus de 177 km parcourus.
Je me suis penché sur les données collectées par mon Polar pendant la course et voici la courbe :
C’est amusant de constater 5 tendances cardiaques bien distinctes que j’ai matérialisé par les lignes vert fluo : la 1ère allant jusqu’à environ 3h30 de course et qui est clairement ascendante, puis une très nette décroissance jusqu’à la traversée en Zodiac, où il est vrai que j’avais l’impression que mon corps commençait à hiberner tellement mon cardio descendait de plus en plus bas (même sous les 100 bpm tout en courant…). Puis le net sursaut correspondant à la période euphorique de mon second souffle entre grosso modo 10h et 11h30 de course, suivi par une certaine régularité (moyenne) de la FC entre 12 et 17h de course, et enfin notre final tonitruant où vitesse et fréquence cardiaque exécute un joli duo croissant
Autre constatation post-course à laquelle je ne m’attendais pas : je suis en bien meilleur état qu’après un ultra montagnard (même de 60 km) => les pieds ne sont pas détruits et les quadriceps de sont pas explosés après des milliers de mètres de dénivelé négatif ; et malgré la distance et la proportion non négligeable de bitume, je me sens bien musculairement et au niveau articulaire. De fait il est encore un peu tôt pour tirer des conclusions, mais il semble que je sois nettement meilleur quand il s’agit de courir sur du plat, même sur du long ; plutôt que crapahuter dans des dénivelés impressionnants.
Sauf que j’adore parcourir la montagne, et voilà donc l’origine d’un nouveau tiraillement entre plat et dénivelé, je savais bien que le diable se cachait quelque part
13 commentaires
Commentaire de Zoup posté le 24-07-2014 à 23:01:54
Extra comme récit, j'ai bu chaque mot, (et pourtant il était long :) Tes filles peuvent être fières de toi!
Commentaire de ejouvin posté le 24-07-2014 à 23:22:53
Vraiment une superbe course.
Tu as pris du plaisir avec tes filles et ta famille
Tu as pris du plaisir en courant
Tu nous as donné du plaisir à te suivre
Et quel final... superbe résultat en tout cas.
Pour les légumes, je ne sais pas ce qui sera le plus difficile en fait. Faire faire des ultras ou manger les légumes ?
Commentaire de Stéphanos posté le 25-07-2014 à 00:43:16
super récit pour une pas moins superbe course !
Sincères félicitations!!! Dommage q'après le ravito d'Arzon, je n'ai pu suivre ton rythme... j'ai du alterner course marche, perdant une heure sur toi...
Comme toi j'ai eu du mal à compter, et j'ai eu une bonne surprise à l'arrivée, apprenant que j'étais en moins de 21h...
BRAVO !!!
Commentaire de RayaRun posté le 25-07-2014 à 00:45:53
Bravo et Quel temps ! Tenir une telle allure sur une telle distance : tu m étonneras toujours ! Vraiment bravo et merci pour ce CR !
Commentaire de calou posté le 25-07-2014 à 10:17:16
Un grand bravo Olivier pour cette superbe perf ! Un véritable plaisir que de lire ton récit. Effectivement Stéphane et toi n'avez pas le même gabarit mais vous êtes tous les deux incontestablement deux beaux champions !
Commentaire de Bert' posté le 25-07-2014 à 17:31:17
Encore Bravo Olivier !
Ton récit se délecte tout seul et réussir une telle course "chez soi" doit être extrêmement plaisant <=> ça ressemble à la course parfaite :-)
On aimerait juste arriver à te suivre pour partager ça...
Commentaire de arnauddetroyes posté le 25-07-2014 à 22:44:45
tellement bien raconté ce CR que ca pourrait en paraitre facile à courir; mais NON on parle la d une course de 177km !
Incroyable cette volonté et facilité!
FELICITATIONS
Commentaire de Arcelle posté le 29-07-2014 à 20:39:33
Merci Bikoon pour ce CR rempli d'émotion et remarquablement bien écrit, un vrai plaisir à lire !
Juste un bémol : à te lire, ça a l'air facile de courir 177 km (à 9,25 km/h !!!), tu as coupé les moments difficiles ou bien ... ?
Commentaire de Jean-Phi posté le 04-08-2014 à 10:13:11
Superbe perf ou tout semble parfaitement simple ! As-tu un secret ???
Bravo !
Commentaire de st ar posté le 11-08-2014 à 22:17:16
Quelle belle course Bikoon ! Un grand bravo...a bientôt sur Cham ...;-)
Soffian
Commentaire de patfinisher posté le 04-09-2014 à 16:22:08
Whaou... Quelle course.... un Cr kikouresque, une perf hors norme et toujours un grand plaisir de te lire et de te croiser en off ou en version officielle..... Bravo....ne change rien ;-)
Commentaire de Fa² posté le 22-06-2016 à 21:35:38
J'y retourne après demain et cette fois ci j’emmène ma chérie, ton compte rendu fait rêver :-)
Commentaire de augustin posté le 05-11-2019 à 16:30:41
Quel récit! quell perf! moi qui prepare cette course je me suis délecté de ton compte-rendu. Grand bravo!
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