Récit de la course : Le Grand Raid des Pyrénées 2010, par TomTrailRunner

L'auteur : TomTrailRunner

La course : Le Grand Raid des Pyrénées

Date : 27/8/2010

Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)

Affichage : 4837 vues

Distance : 160km

Matos : Mizuno Kabrakan (2 paires)
Sac Salomon 5l XT West
Baton Leki Carbon Traveller
Lampes Petzl

Objectif : Terminer

8 commentaires

Partager :

L'ultra GRP : ma découverte du très long

26 & 27 août : L’ultra Grand Raid des Pyrénées

Jeudi après midi

Pour moi, cette course est 
l’Objectif et la concrétisation de l’aboutissement d’un planning décidé il y à un an et jalonné d’étapes intermédiaires (Origole 2009, Aventuriers du bout de la Drôme, Aravis). La préparation terminale a été bonne avec un gros mois de juillet ponctuée par les 37Km du Bugul Noz en Bretagne (où j’ai été un peu en deçà de mon ambitieux objectif), le mois d’août tout en vacances et rempli d’activités diverses et quelques belles sorties jumelée à une diététique plaisir
 
Objectif n°1 : Terminer. Objectif n°2 : entre 40h & 42h.

Stratégie simple: s’économiser tout au long de la première journée en visant la base vie de Villelongue au soir ; Tenir la nuit en montant puis maintenir la cadence la plus rapide sur la deuxième journée. Ne pas faire attention au chrono et gérer step by step uniquement avec l’altimètre et le profil de la course.

ultragrp2010_bandedekikous.jpgArrivée à Vielle Aure sous une chaleur de plomb (presque 40°C) à la suite directe des vacances. Retrait des dossards, dépose des sacs pour les bases vie, briefing complet, rencontres avec plein de kikous et d’UFO : c’est la mise dans l’ambiance de mon tout premier ultra au format 160Km. On décide de faire la course ensemble avec Bottle ; on échange un peu ; on dîne en famille avec Ouster & Mme sur la place centrale du village dans une ambiance totalement dédiée au truc
 
 
 


1ère journée : Vielle-Aure – Villelongue

Vendredi 5h02 – Vielle-Aure

Une nuit étouffante où la chaleur et un peu d’appréhension m’ont tenu longtemps éveillé : 3h de sommeil et un petit déj rapide. Arrivée sur la ligne de départ avec les 669 autres partants sous une température des plus clémentes 
(20°C) : quelques photos, les encouragements d’Ampoule31, dernier briefing pour nous annoncer la météo (très chaud et beaucoup de vent en altitude avec des risques de ne pouvoir monter au Pic du Midi de Bigorre), un sourire d’Hélène comme dernier viatique et c’est parti.

ultragrp2010_monteeavantespiaube.jpgOn est en plein milieu du paquet pour trottiner jusqu’à Vignec où la pente commence de suite : pas de presse, le long ruban de frontales s’allume et la longue montée est enclenchée sur un ry
thme qui nous paraît raisonnable avec Christian. Quelques passages d’échelles pour franchir des clôtures, un terrain sec, du sous bois et on arrive rapidement à Espiaube où débute une grande montée sur les pistes de ski avec une pente très raide qui commence déjà à scinder le peloton alors qu’au loin les frontales des premier semblent presque être déjà au col du Portet. Le jour se lève et la magie des lumières de l’aurore opère comme toujours.

ultragrp2010_colportet.jpg
 
Nous voilà au col du Portet en un peu moins de 2h20 avec une vitesse moyenne de montée de plus de 600m/h soit déjà 30mn d’avance sur nos plannings. On bascule dans la réserve de Néouvielle plein vent de face pour descendre au premier ravito. Ca souffle très fort et nous sommes presque stoppés par moment dans les rafales : ca fait bizarre.
 
 
 
 
Vendredi 7h26 – Restaurant Merlans – 270ème position sur 654 en course – 163ème temps partiel depuis le départ parmi les 347 Finishers 

ultragrp2010_ravitomerlans.jpg1er pointage, petit coup de fil à Hélène qui se re-réveille après m’avoir accompagné au départ, ravito express et on repart en compagnie de JC Duss avec l’intention de ne plus prendre d’avance sur les plannings prévisionnels car c’est maintenant que se gère la suite. Une montée sèche mais assez courte sous un téléski et nous enroulons ensuite le GR10 sur une portion légèrement descendante pour nous retrouver au dessus du lac de l’Oule qui affiche un niveau d’eau assez faible : on ne prend pas trop le temps d’admirer le paysage toutefois alors que le vent souffle toujours fort.


ultragrp2010_lacbastan.jpgOn arrive rapidement au magnifique enchainement des lacs de Bastan : on contourne le lac inférieur, on passe rapidement au refuge en négligeant le point d’eau mais en profitant de quelques encouragements, on monte au lac supérieur puis on grimpe sérieusement au col de Bastanet dans un sentier à travers les rochers sur lequel il n’est pas possible de courir. Arrivée en haut au premier sommet (2507m d’altitude) avec un cumul direct de plus de 1900m de D+ depuis le départ (pour seulement 200m de D-) : pause photo obligatoire et premier retour sur les paysages superbes qui s’enroulent à nos pieds. Je resserre un peu les chaussures et hop va pour la descente.

ultragrp2010_sousgrezioles.jpg1ère descente : ce n’est surtout pas le moment de s’exploser les quadriceps car la route est encore très longue. On progresse toutefois assez vite vers le refuge de Campana à la faveur d’un terrain propice. La suite est beaucoup plus technique avec de nombreux passages sur blocs rochers jusqu’au barrage de Gréziolles : attention aux appuis et souplesse des chevilles avant tout alors que l’on passe au soleil et que la température monte rapidement (c’est l’heure de sortir la casquette saharienne)

ultragrp2010_descenteartigues.jpgAprès le barrage, le parcours plonge vers Artigues pour un petit 1000m de D- : fidèle à mon idée, je choisis d’aller en douceur et ralentis Christian alors que JCDuss nous lâche irrémédiablement : on se fait pas mal doublé mais je me dis que nous les reverrons plus tard. On croise nos premiers moutons, on aperçoit pour la 1ère fois le pic du midi qui apparaît franchement haut : le téléphérique fonctionne donc a priori il n’y aura pas trop de vent pour annuler la montée complète. Pas mal de randonneur puis beaucoup de spectateurs en arrivant à Artigues après une fin de descente en sous-bois
 

Vendredi 10h27 – Artigues – 301ème position sur 648 en course – 202ème temps partiel sur la descente parmi les 347 Finishers 

2ème pointage : le « coup de frein » est réel car on a cessé de gagner du temps sur les plannings. Ambiance étuve au ravito dans une maison surchauffée - Ravito copieux et remplissage complet en liquide 
(3l y. compris bouteille complémentaire dans le dos) : la suite du programme est copieuse et nous propose rien moins que 1700m de D+ en 11Km de distance avec des températures déjà au-delà des 25°C et très peu de passage à couvert.

ultragrp2010_lepicdumididepuisartigues.jpgOn s’attarde un peu, je ressors les bâtons et c’est reparti pour une très belle montée : au début sous les arbres puis dans un fond de vallon sans vent puis à flanc et enfin de plus en plus raide jusqu’au col de Sencours. A priori, on est encore en mode « économique » mais en fait on double beaucoup de monde : pas si simple de se ralentir durant des heures. Il fait chaud : on change de flanc de vallon sur le pont des Vaques et c’est l’occasion de tremper la casquette abondamment, l’hydratation régulière n’est surtout pas à négliger. Le pic se dresse devant nous telle une muraille alors que des troupeaux de vaches nous regardent passer. La montagne est belle et j’en profite…
 


ultragrp2010_lepicdumidi.jpgOn arrive au col du Sencours qui n’est qu’une étape de cette très longue montée : Hélène et les filles sont montées à pied depuis la route descendante du Tourmalet et arbore une énorme banderole de soutien pendant que Claire porte fièrement ma casquette Kikourou. Petit ravito nutritionnel 
(les filles me font le plein comme à la station service) mais énorme ravito mental donc. On enclenche rapidement la montée finale au pic du midi et les filles ne peuvent suivre au bout de quelques dizaines de mètres. C’est une piste très roulante qui monte d’abord et sur laquelle on voit dévaler en sens inverse ce qui sont devant nous au classement : on avance vite puis on enchaine de suite sur les quelques lacets à flanc de montagne sur lesquels il est délicat de s’économiser. Univers minéral mais quelques lamas sont tranquilles au bord du chemin et font la joie des photographes. Un premier gel énergétique et les 498m de D+ sont avalés en 50mn pour atteindre les 2876m d’altitude qui marqueront le point culminant de la course.


Vendredi 13h33 – Pic du midi de Bigorre – 254ème position sur 614 en course – 141ème temps partiel sur la montée parmi les 347 Finishers 

ultragrp2010_depuislepicdumidi_light.jpgSoleil radieux, vision panoramique, le paysage est à la hauteur des espérances : tout le monde profite un peu au milieu de quelques applaudissements des visiteurs montés en téléphérique : photo, petit point sur facebook, partage d’un petit ravito assis sur un rocher avec Christian… mais il ne fait pas chaud. Je pars en éclaireur pour la descente pendant que Christian reçoit les toutes premières infos sur notre classement par SMS d’un copain. Je descends assez rapidement la pente en prodiguant des encouragements à tous ceux qui montent puis j’arrive à l’hôtellerie des Laquets où m’attend Hélène qui m’accompagne joyeusement dans la descente de la piste et prend même du plaisir à courir pour la première fois depuis longtemps
:-) - on croise supersteph avec son éternel sourire - on rejoins vite les filles restées à mi-hauteur et Claire et Valentine m’accompagne jusqu’à Sencours alors que Christian nous rattrape.

De nouveau ravito à Sencours où l’on s’attarde un peu : je croise Gaëtan qui monte que je ne savais pas sur la course 
(il m’a l’air pas trop mal), les filles me font le plein, Hélène les photos, Christian dévore et me donne les premières infos sur notre classement (301ème position). Après consultation de nos plannings, on a re-gagné du temps dans la montée donc on re-décide de s’économiser pour la portion suivante que j’ai noté comme juge de paix de cette première journée avec un enchainement de descentes-montées-descentes :
 
ultragrp2010_lacplusbonida.jpg178 D- pour le lac d’Oncet puis 102 D+ pour le col de la Bonida : après l’agitation et le monde au col de Sencours, on retombe dans une ambiance plus feutrée et intimiste entre coureurs alors que les écarts se creusent et que le plafond nuageux se densifie : quelques belles fleurs, des passages assez roulants mais il reste du chemin.
 
 

ultragrp2010_pierrierducold_aoube.jpg94 D- pour le lac d’Aouda puis 161 D+ pour le col d’Aoube : pas mal de pierriers et une montée sèche qui semble bien plus haute vue d’en bas : on maintien notre rythme.
 
 
 
 
 
 
 
 

ultragrp2010_findejournee.jpg419 D- pour le lac Bleu puis 288 D+ pour le col de Bareilles : on rentre dans la purée de pois, le terrain devient humide, la visibilité moyenne et la température baisse : petit moment de lassitude dans la descente qui me paraît longue après l’agitation mais le balisage nécessite un peu d’attention même si c’est le plus souvent Christian qui mène dans les descentes. Toujours des animaux en liberté et qques fleurs transparaissent dans le brouillard. Le lac Bleu est parait-il très beau mais nous n’en aurions qu’une vision fantasmagorique (à refaire pour de meilleures photos :-) ). La montée sur Bareilles est plus délicate et s’enchaîne sans temps mort en lacet alors que la pluie fine à cessée.
 
 571 D- pour le lac d’Ourrec puis 205 D+ pour la Hourquette d’Ouscouaou : brrr fait pas chaud à Bareilles, on plonge de suite pour faire une petite pause à l’abri relatif du vent quelques centaines de m plus bas. Cet enchainement commence à peser un peu dans la tête mais la dernière montée se profile dans le brouillard et s’avale finalement assez facilement.
 
ultragrp2010_creteavanthautacam.jpg257 D- pour atteindre laborieusement le ravito d’Hautacam en descendant à flanc de coteaux : plus tellement le moment d’observer le paysage et les yeux rivés sur l’altimètre pour savoir quand on arrive alors que quelques spectateurs nous annoncent des distances pas toujours des plus justes. Un dernier effort pour remonter quelques marches et nous y voilà.


 
 
 
Vendredi 18h23 – Hautacam – 259ème position sur 604 en course – 204ème temps partiel depuis le pic du midi parmi les 347 Finishers 

Suis un peu vidé par cette longue portion du parcours alors que se profile une longue descente pour atteindre la base vie de Villelongue. J’ai besoin de rechargé les batteries en salé et en chaud 
(1ère soupe) alors que Christian me semble plus en forme et pressé de repartir. Je constate les premiers abandons, on ne s’attarde pas trop, on remercie encore une fois les bénévoles et hop c’est reparti. Pas si facile que ca en fait car il faut remettre en route sur une légère montée avant de basculer pour les 11Km de descente.

ultragrp2010_arriveevillelongue_light.jpgUn chouïa pentue eu début puis sur piste forestière que je choisis de passer en souplesse : on est encore en avance sur les plannings et ce n’est vraiment pas le moment de s’envoyer dans la descente. L’altimètre descend doucement 
(il y à plus de 1100 D- tout de même). On se fait un peu dépassés sur les premiers kms mais on n’y prête pas vraiment attention tellement le classement n’est pas une question à ce stade de la course.

 
 
ultragrp2010_villelongue.jpgLa suite de la descente est verdoyante et très agréable alors que le soleil réapparait (hop vite une photo et un SMS à Insigma qui m’encourage régulièrement). Une dernière cavalcade en sous-bois puis on arrive sur une partie goudronnée qui nous conduit à la base vie alors que le soleil se couche / se cache derrière les montagnes. Dernier virage, sourire au photographe, pointage,…. PAUSE 
 
 
 
 
Vendredi 20h09 – 1ère base Vie de Villelongue – 261ème position à la sortie sur 487 en course – 201ème temps partiel depuis Hautacam & 289ème plus long « stop » parmi les 347 Finishers 

On a décidé de prendre 1h avec Christian pour bien préparer la nuit. Beaucoup de monde – trop chaud dedans, on s’installe tranquille dehors après récup des sacs et de chaises. Aération des pieds pas si abimés, changement de tenue et de frontale 
(on passe au gros modèle), passage un peu long auprès des pompiers pour un élasto dans le dos (frottements obliges), coup de fil, discussion avec un concurrent qui arrête et qui attend la navette, alimentation (copieuse pour moi, plus léger pour Christian à qui j’en fais la remarque mais qui n’a pas trop faim). Au final, une grosse heure de pause qui nous fait repartir sur un planning 39h et l’info que nous sommes en début de 2nde moitié du peloton (donc seulement 7 places de perdus depuis le Pic du midi, en partie grâce aux abandons :-) )
 
 
 
 
 
La nuit : Villelongue – Luz St Sauveur

Vendredi 21h16

La nuit sera clairement le moment de vérité pour mon baptême du feu sur très long : selon moi, une arrivée à Luz au matin garantirait presque, sauf incident, de pouvoir boucler la boucle. Dans ma tête, le découpage est très simple : une montée-descente pour Cauterets ; une autre pour Luz. Là encore, je ne me préoccupe absolument pas des distances en kilomètres mais uniquement des altitudes à atteindre. 

Toujours en compagnie de Christian 
(encore merci pour cette ballade ensemble), on repart donc comme neufs de la base vie à la nuit presque tombée avec les frontales allumées : 1 Km sur bitume pour sortir de Villelongue permet de reprendre rapidement le rythme. Une très courte mais très sèche montée en haut d’une conduite forcée précède une descente pour aboutir à Pierrefitte qui marque le début de l’ascension. On apprend que l’UTMB est annulé et que la CCC est interrompue et on discute avec quelques concurrents de la chance d’être là.

On entame tranquillement en petit groupe la montée très progressive par la route. Une grimpette en sous bois et nous voilà sur des bons chemins montant progressivement : la nuit est belle, la lune est quasi pleine et joue à cache-cache avec les montagnes, le ciel est clair et étoilé
 (vision étonnante de la grande ourse à moitié masquée et dont n’apparait que les 3 étoiles de « la queue » juste au dessus d’une ligne de crête plus sombre que le ciel). Quelques derniers SMS du soir échangés aèrent un peu la tête alors que je me sens assez léger. Le ravito se profile au loin mais une dernière partie « off track » est un peu délicate à négocier alors qu’il commence à faire frisquet.


Vendredi minuit – Turon de Bene – 241ème position sur 484 en course – 178ème temps partiel depuis la base vie parmi les 347 Finishers 

2 tentes, 3 véhicules, un pompier pour l’accueil, un feu de bois qui s’allume dans la nuit, des coureurs avides de soupe chaude et d’autres de leur classement, des bénévoles toujours aux petits soins : c’est le ravito de Turon de Bene qui symbolise le passage à mi-course. Je suis assez rapidement prêt mais Christian un peu moins ; je sens de suite le froid prendre et donc vais discuter 2mn au coin du feu qui réchauffe puis on repart.

Reste tout de même presque 600 D+ de pente assez progressive et notre rythme n’est pas très rapide : nous ne faisons un peu dépassés car Christian subit un coup de moins bien. Mais, comme souvent, la dynamique revient et nous ré-avancons un peu mieux vers le chemin ponctué de petits groupes de frontales vers le col de Contente qui parait encore très loin devant alors que je viens de dépasser mon plus long temps de course 
(petit clin d’œil en souvenir de Crest). Christian subit un 2ème coup de mou et me dis de filer car il a vraiment sommeil et souhaite prendre un petit repos au prochain ravilo de Cauterets : A regret nous nous séparons et je suis même un peu inquiet pour lui. Je pars donc seul devant dans la nuit sur un terrain pas si roulant ponctué de petits passages à gué et de petits rochers : je fais attention à ne pas m’emballer mais à la faveur de la fraicheur accumulée en début de montée (ca fait plus de 4h de montée déjà), je re-dépasse plusieurs petits groupes de concurrents. Un dernier petit raidillon et nous voilà au col balayé par un petit vent frais et où un bénévole seul à quelques dizaines de sa tente m’encourage et m’aiguille vers la descente.

Cauterets est visible dès le début de la descente mais semble très loin en dessous 
(1200 D-) un petit encas, 2-3 mots partagés avec un concurrents qui fait un mini-break et hop on plonge : Des grands lacets sinueux assez roulants (me semble bien avoir vu une frontale dans la nuit en couper un ou deux mais bon chacun fait comme il croit être juste :!: ) sur lesquels j’avance bien et me sens assez léger : la nuit est belle et la température plus douce, les jambes répondent bien, la tête bien fraiche et je profite tout simplement. Soudain, une vache en travers du chemin puis une autre et encore une : un peu l’impression de déranger mais suffit de contourner les obstacles :-). L’altimètre ne baisse pas très vite et Cauterets ne semble pas se rapprocher. Ensuite, je franchis un ruisseau, je change de flanc de montagne, je continue sur une piste un peu plus large sur laquelle, je bascule en sous bois sur des sentiers plus raides et finis par atteindre les premières maisons: je double quelques concurrents qui m’ont l’air un peu en perdition avec qui j’échange quelques encouragements même si l’un ou l’autre me semblent moralement fatigués. Cette portion de bitume m’a semblé assez longue avant d’atteindre le ravito auquel je tente de me préparer mentalement pour ne pas trop m’attarder.
 
 
Samedi 3h53 – Cauterets – 232ème position sur 460 en course – 189ème temps partiel depuis Turon de Bene sur 347 Finishers 
 
Ambiance un peu glauque à ce ravito : bcp de monde couché sur les lits de camps, des coureurs hagards sur des chaises, de l’attente aux soins, des discussions pas toutes positives sur le timing des navettes ou la longueur de la dernière descente. Je décide de rester dans ma bulle, m’alimente avec un peu de difficulté (mauvais choix la soupe à la tomate :-(( ), fais le plein de liquide, entends un bénévole annoncer son classement à un coureur pointé en 239ème position (j’ai donc regagné des places mais peu importe au regard des sensations), hésite un peu sur la tenue et choisis de repartir sereinement. 
 
Moi, on le sait, j’ai des grandes jambes et j’aime bien les montées : celle-ci va confirmer le truc. Dès le début, je rattrape du monde et sympathise avec un concurrent (Pascal même si je ne le saurai que dans une dizaine d’heure) qui prend ma foulée et on monte ensemble sur un bon ryhtme. Bien que j’ai l’impression de ne pas trop forcer, on double beaucoup de monde tout en discutant (on s’apercevra que nous pratiquons tous deux dans tous les sens la forêt de Montmorency en région parisienne) et en pensant à nous alimenter. Sous-bois ou pâturages, pentes douces ou plus raides, ciel clair ou brume sommitale : on passe un peu moins de 2h pour avaler les 1020 D+ : inutile de dire que tout va bien donc.

Col de riou, brrr , pas grand monde, peu de vue ….on ne s’attarde pas et direction le ravito d’Aulian situé un peu plus loin alors que le jour se pointe.


Samedi 6h50 – Aulian– 178ème position sur 416 en course – 89ème temps partiel depuis Cauterets sur 347 Finishers 

Ravito très spacieux et quasi personne sur place, ambiance très sympa : on prend un peu de temps pour digérer notre montée ; petit bout d’élasto pour Pascal, remise à niveau, rangement des frontales, discussion sur les premiers qui ne sont toujours pas arrivés (déjà 26h) ainsi que sur le temps de descente pour la base vie qu’on nous annonce entre 2h & 2h30 pour la grosse dizaine de Km : ca nous semble peu mais paraît que le chemin n’est pas facile.

Pour du chemin pas facile, c’est du chemin pas facile : humide, en devers, hors trace, herbes hautes, branches basses (failli perdre le dossard), glissant et j’en passe. Franchement ca rigole pas et c’est même un peu galère (une pensée pour ceux qui ont dû passer de nuit / n’avaient pas qu’à aller aussi vite avant non ?). Faut une attention de tous les instants et on ne peut même pas jeter un œil au paysage
:-)
 Ca grogne dans les rangs car personne ne voit l’intérêt de ce passage où bien peu de monde aura pu courir je pense. Inutile de dire que l’altimètre ne bouge quasiment pas. On atteint enfin une piste au moment même où j’ai un petit coup de lassitude : marche rapide, petit gel, une gorgée de coca pour se réveiller, discussion & photos et ca repart. 

On voit Luz en bas sous les nuages et c’est l’occasion de faire un premier vrai point sur la course, l’avancée & ce qu’il reste à franchir, l’état physique mais aussi et surtout psychique du Tom : le bilan est bon, les signaux aux vert et la possibilité d’achever mon premier « très long » favorable. Il faut d’abord finir cette descente pour pouvoir faire le 2ème break base vie ; et cette descente est longue, agrémentée d’une petite bosse puis d’une partie terminale dans Luz qui se réveille et qui semble nous ramener « un peu » à la civilisation après cette nuit à gambader dans la montagne.


Samedi 9h19 –1ère base Vie de Luz St Sauveur – 181ème position à l’entrée sur 405 en course –129ème temps partiel depuis Aulian parmi les 347 Finishers 

Ambiance plus tranquille qu’à Villelongue (faut dire qu’il reste beaucoup beaucoup de sac et donc du monde derrière) : passage au contrôle technique avec les podologues (2 mini-ampoules), toilette fraicheur, alimentation, ravito, petit coup de fil, rapide discussion sur le timing des premiers pour rejoindre l’arrivée (8h pour faire les 40km:!: ) qui insinue un léger doute, t-shirt manches courtes, changement de baskets : 1h de pause mais parfaitement d’attaque pour « commencer » la course. 


 
 
 
 
2ème journée : Luz St Sauveur - Vielle-Aure 

Samedi env 10h15 

La motivation est au beau fixe pour attaquer les 20km montants à suivre 
(1600 D+) et je dis d’entrée à Pascal que ca va le faire. On ressort de la base vie pour traverser Luz entre passages piétons et terrasses de café : quelques regards curieux, beaucoup d’encouragements et nous attaquons tout de suite la très longue section de montée (20Km) qui nous amènera au col de Barèges : une sente raide et nous voici au dessus de Luz pour remonter la vallée progressivement sous un soleil de plomb et une absence de vent qui laissent supposer une journée très chaude. Peu de coureurs en vue à part nous, sentiers, petites routes, chemins, le terrain est assez roulant mais l’altimètre ne progresse que par à-coup.

ultragrp2010_avanttournaboup.jpgOn profite de chaque fontaine pour se rafraichir et je fais quelques calculs sur ma consommation d’eau et notre vitesse d’ascension de progression pour conclure que mes 2,5l de capacité devraient suffire grâce au point d’eau qui sera situé à la cabane d’Aygues-Cluses où l’organisation a fait monter 1l d’eau (rationné) par concurrent via hélicoptère. En attendant, une grimpette nous amène au point de Saint Justin où nous partons sur un sentier de promenade relativement plat voire descendant sur lequel nous décidons de trottiner d’un bon rythme 
(ca rigole pas tout de même :-) ) pour rejoindre Barèges qu’il faut traverser en cherchant chaque coin d’ombre (il est midi) avant de rallier un peu plus loin le ravito de Tournaboup. On rattrape et dépasse quelques coureurs sur la route que dévalent des cyclistes descendants du Tourmalet que l’on aperçoit dans le fond.


Samedi 12h51 –Tournaboup – 168ème position à l’entrée sur 384 en course –149ème temps partiel depuis l’entrée de la base vie de Luz parmi les 347 Finishers 

Le ravito marque la jonction avec la version Grand du GRP 
(80Km et 5000D+ / J’envoie un SMS à Andrew pour lui dire que je suis en avance au point de jonction ) : pas mal de monde à ce ravito et une dynamique de tête de course (aux alentours de la 26ème place) parmi des participants pressés au ravito : on se sent assez frais donc la pause est courte. Reste plus de 1000m de dénivelé jusqu’au col, mais on vient déjà d’en faire 800m alors que les participants du ‘Grand’ viennent de dévaler du Pic du Midi (1400 D-) : il est évident que nous ne sommes pas sur les mêmes vitesses de montée mais chacun nous presque tous nous doubleront avec un mot d’encouragement. On voit Nico Darmaillacq (le vainqueur 2009 en VTT qui soutient des amis apparemment). Pas mal de monde, de spectateurs, de randonneurs qui font un contraste avec le calme de la section précédente. La montée est assez progressive mais il fait vraiment chaud maintenant.

Le lieu-dit Pountou marque un changement radical de terrain : fini le sentier tranquille où il n’était pas nécessaire de regarder ses pieds ; maintenant, c’est du rocher et du bloc : déséquilibre, appuis sur les bâtons, pas irréguliers, blocs qui bougent, balisage pas toujours évident – altitude qui monte par palier à peine ponctués de quelques passages où on peut dérouler quelques foulées aux bords de points d’eau. Inutile de dire que la progression est lente alors même que je n’ose trop lever les yeux pour voir la beauté du paysage 
(avec le mérite de ne pas visualiser la distance qui nous sépare du col :-) ). Néanmoins, la forme est là et c’est au sein d’un petit groupe que nous arrivons au point d’eau.

Je suis chaud et c’est donc ravito express 
(je re-remercie les bénévoles). J’ai décidé d’envoyer du gros pour les derniers 300 D+ qui sont assez raides : Pascal me dis de partir devant mais il suit sans craquer (il m’avouera avoir eu un peu de mal en haut), on redouble du monde (Ultra & Grand) et un petit gel aidant j’arrive au col en 30mn en me sentant assez fort. Un pointage, une minipause discussion avec les bénévoles qui nous détaillent la suite du programme, le sentiment de repasser du bon côté de la montagne en vue de l’arrivée (même si il reste une bosse) et il faut aborder la descente.

ultragrp2010_depuiscolbarreges.jpgL’objectif suivant est le lac de L’oule et se méritera. Il faut d’abord atteindre un premier petit lac alors que l’on fait route en petit groupe avec 2 concurrents Bordelais déjà croisés et recroisés 
(dossards 457 & 458 :-) ) : j’ai un peu de mal à suivre mais la conversation évite de se lamenter sur un sort que l’on a consciemment choisi. Alors que les participants du ‘Grand’ affichent leur fraicheur et leur vitesse de descente, on atteint les Laquets de Coste Queillere en retraversant une zone de bloc. Puis s’en suit la traversée d’une longue portion en forêt parsemée de racines et de grosses marches ainsi que des gués : Un chouïa de lassitude, plus de batteries dans le téléphone pour partager ou prendre des photos mais je connais le chemin pour l’avoir parcouru en vacances et sais que le lac de l’Oule ne se dévoilera qu’au dernier moment. Juste avant le bas de la descente, nous voici rattrapés par Ampoule31 qui est sur le ‘Grand’ aux environs de la 60ème place : tout en discutant 5mn des nouvelles des Kikous et de nos courses, on atteint le lac et on tourne immédiatement dans la pente sans même passer au bord de l’eau.

C’est la dernière montée qui nous ramènera dans la vallée d’Aure : encore une fois, on décide d’enclencher la marche avant et nous montons à 3 sur un rythme rapide en surplombant le lac de l’Oule puis en bifurquant vers le col de Portet à mi-hauteur duquel nous attend le dernier ravito. Le changement météo est brutale en passant sous les nuages puisque l’on se retrouve avec un fort vent de face : sans hésiter, on ressort les coupe-vents en 2 temps 3 mouvements car la fatigue aidant, le froid nous saisis très vite. Mais le restaurant Merlans apparaît déjà dans les nuages.


Samedi 17h17 –Restaurant Merlans – 155ème position à l’entrée sur 376 en course –92ème temps partiel depuis Tournaboup parmi les 347 Finishers 

Dernier ravito : pause un peu plus longue que prévue du fait de l’accueil chaleureux, de discussion au sein d’un petit groupe de participants sur les possibilités de terminer avant la nuit et le profil de la fin du parcours 
(et surtout du nettoyage rapide du litre de coca que l’on m’a renversé dessus :-) ). On repart avec Pascal pour un dernier bout de montée un peu laborieux dans le brouillard et vent de face vers le col du Portet. On voit à peine le col au niveau du parking où quelques valeureux accompagnateurs attendent leurs héros dans la purée de pois : le temps de trouver les 2 premières balises (au passage bravo pour le balisage à l’orga) et nous décidons de partir en trottinant parmi les 2-3-4 traces parallèles et entrecroisées qui courent le long de la ligne de crête : visibilité réduite, pente réduite, terrain souple, quelques vaches sur le chemin, on avance ainsi en courant un long moment en se disant que les kms défilent mais que l’altitude ne baisse pas bien vite. Je sens un peu que les quadriceps souffrent un peu mais moins qu’en marchant ; ceux de Pascal semblent plus douloureux et il me dit de partir devant pour s’attendre autour d’une bière. J’aimerais bien finir ensemble mais il insiste un peu et je file.

Je me retrouve seul alors même que nous atteignons la fin de cette première partie de la descente. Je sais qu’il faut plonger d’un coup après le franchissement d’une barrière pour atteindre des chemins avant Soulan. Il est environ 19h05 et je me dis que je peux finir avant 20h 
(ce qui ferait moins de 40h et serait sympa) ; je me sens bien et décide de « tout envoyer ». S’en suivent 30mn de plaisirs purs : moi qui suis piètre descendeur, je trouve le ‘bon’ geste, ne sens plus aucune douleur et dévalent chemins, pistes, traversée de Soulan, lacets à toute vitesse vers Vignec en dépassant une bonne quinzaine de concurrents. Je me rends compte que je vais finir cette course et me laisse transporter en ayant l’impression de courir jusqu’à l’émotion….

Vignec, la route avalée à toute vitesse 
(au moins du 15 à l’heure je pense) et au loin Valentine qui fait le guet ; un rond-point et voici Hélène et les filles ; un immense sourire et me voici accompagné ; seul Claire en basket arrive à me suivre sur les quelques 500m qui reste ; je déboule dans Vielle-Aure et franchit la ligne avec l’ambiance en plus….


Samedi 19h35 – Vielle-Aure – 147ème Finisher –121ème temps partiel depuis Merlans parmi les 347 Finishers malgré la longue pause au ravito 

Christian est là pour me féliciter avec un immense sourire. Hélène et les filles sont là pour partager ce moment. Karine me donne des news d’Andrew, je suis pris dans le tourbillon de l’arrivée 
(en ratant l’arrivée de Pascal). Un passage au PC pour avoir mon temps final et je me rends compte que je me suis trompé dans mes derniers calculs (38h33 et non pas 39h33 !!!). Et hop direction la terrasse du resto (réservation à 19h30 – un peu en retard :-) )

ultragrp2010_vielle-aure.jpg



Mardi – Paris 

Pas facile d’atterrir, la tête encore pleine d’images, ni courbatures ni bobos, l’impression d’être un peu décalé par rapport à mon environnement pro, la tête dans les forums et quelques calculs de temps intermédiaires et résultats pour voir que j’ai fait presque une course en ‘negativ split’ en ne faisant que gagner des places depuis la 1ère base vie… 



Mini-bilan
  • Une course superbe, des paysages magnifiques
  • Une organisation sans faille, une ambiance à la hauteur
  • Un traileur heureux


Et un grand merci à l’organisation et toute l’équipe des bénévoles
 
Photos : bottle, Ouster,  JCDuss, Vetchar14, Francis31 Tom
 
ultragrp2010_fanclubthomas.jpg 
 

8 commentaires

Commentaire de la panthère posté le 11-10-2010 à 12:28:00

merci pour ce récit! j'ai surtout lu avec beaucoup d'attention ce qui concerne la portion entre le pic du midi et Tournaboup, des fois que.......bravo!

Commentaire de Land Kikour posté le 11-10-2010 à 17:36:00

Merci Thomas pour ce superbe récit ou l'on prends toute la mesure de l'effort accompli et du résultat d'un entrainement rigoureux. Respect mais je ne suis pas étonné, bonne continuation ...

Commentaire de LutetienND posté le 12-10-2010 à 00:48:00

On s'est croisé au Bugul Noz. Superbe gestion de course pour toi sur le GRP Ultra pour une première expérience sur la distance. Je suis admiratif. Peut être à mon tour pour l'an prochain...

A+ sur un trail en région parisienne.

Commentaire de Tonton Traileur posté le 12-10-2010 à 10:02:00

Bravo Tom, et merci pour ce superbe récit, qui donne vraiment envie d'aller faire ce GRP !...
à bientôt ... sur d'autres reliefs ...
JL

Commentaire de matos posté le 22-10-2010 à 12:27:00

Vraiment super, ton récit, Thomas. On s'y croirait ! Je me sens maintenant tout petit, avec mes 24 heures de Grenoble, façe à ton exploit lors de cet ultra et ta fantastique remontée ! Au moins une chose que je partage avec toi, c'est la capacité de finir très fort !

Jean-Patrick, Alias Matos...

Commentaire de Astro(phytum) posté le 23-10-2010 à 23:20:00

Quel récit et quelle course Tom !!! et toujours dans le timing .
Belle entrée dans l'ultra grand format .
A bientôt

Commentaire de olafmax posté le 30-10-2010 à 23:24:00

Bravo Tom et merci pour ce superbe récit....
Je t'avais "suivi" derrière mon écran au mois d'août, c était déjà sympa mais là ça l est encore plus... A bientôt. Olaf

Commentaire de caro.s91 posté le 12-12-2010 à 12:03:00

Un superbe récit au travers duquel j'étais passé sans le voir!
Bravo pour ta perf!

Bises,
Caro

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Accueil - Haut de page - Aide - Contact - Mentions légales - Version grand écran - 0.04 sec