L'auteur : Mustang
La course : UFO Ultra Méga Toff - Sées-La Bazoge
Date : 19/4/2008
Lieu : Sees (Orne)
Affichage : 1526 vues
Distance : 75km
Objectif : Pas d'objectif
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GGO veut que je fasse un compte-rendu marrant, comme celui d’Auffargis. Tu parles ! Non, ça sera sérieux, question d’état d’esprit. Bon, on y est, vendredi 18 avril. Déjà plus de 6 mois que je me suis proposé pour effectuer un relais pour le Méga Off d’UFO sans savoir ni la date, ni le lieu. Après quelques inquiétudes concernant la date, je suis fixé : ce sera le 19 avril, départ 0h00 à Sées pour rejoindre La Bazoge, au nord du Mans. Il me reste à tracer ma route ! Je m’y emploie avec les cartes IGN du secteur. Comme le relais se déroulera de nuit, je pense qu’il est plus simple de n’emprunter que des routes. Je choisis de passer par la forêt d’Ecouves, Alençon, Arconnay, Oisseau-le-Petit, Fyé, Assé-le-Riboul, St-Jean-d’Assé et La Bazoge. En Sarthe, ce ne seront que de toutes petites routes très tranquilles sauf une portion d’une départementale.
Je suis épaté par l’énergie que déploie Runner14 pour mettre en place les différents relais en Normandie. Il organise tout cela de main de maître et va donner beaucoup de lui-même. Une autre chose qui m’a beaucoup plu dans cette aventure, ce sont les copains qui se sont mobilisés afin que je ne sois pas seul à courir au milieu de la nuit dans la campagne sarthoise. Ce sont donc cinq coureurs qui vont m’accompagner sur tout ou partie du périple UFO. J’ai mis à profit le dimanche précédent pour effectuer une reconnaissance du parcours en voiture. Les cartes seront nécessaires car les petites routes sont nombreuses au sud de Fyé.
22h15, ce vendredi, Allain, Sylvain, Emmanuel et Laurent arrivent à la maison. C’est mon épouse qui va nous conduire au départ à Sées. L’ambiance est décontractée. Cependant, j’ai pris la météo locale, la nuit ne va pas être terrible, pas froid mais un peu de vent et des pluies intermittentes. Les copains ont mis des collants, je tente le coup avec un running ! Un coup de fil de GGO précise son arrivée vers 23h30.
Nous arrivons peu avant 23h, nous arrivons à Sées. Sans l’avoir recherché, je me gare près d’une Fiat qui arbore l’écusson UFO ! C’est Zabou qui attend au chaud ! Nous prenons quelques photos du groupe.
La Mouette, Zabou,Mustang, Riah50, Laurent et Loulou
Un dernier coup de fil de GGO annonce son approche de Sées. Nous partons à sa rencontre sur la route de Gâprée. A la sortie de Sées, deux lueurs fluo s’avancent sur la chaussée ! Le futur ex-aiglon est accompagné par un copain. Même si la bonne humeur est de rigueur, ce moment est émouvant. Nous rejoignons la place de la cathédrale en croisant des jeunes, essoufflés par un petit sprint. S’ils savaient ! Le téléphone sonne, c’est Runner 14 qui s’assure que tout se passe bien. Voilà, c’est le moment ! Nous nous plaçons sur les marches de la cathédrale pour effectuer le passage du fanion.
Les flashs crépitent. A quelques mètres, une voiture de la gendarmerie passe au ralenti sur la place sans s’arrêter. Avant de partir, GGO propose une part de clafouti et une bière ! Va seulement pour le gâteau ! Il est 23h44, Allain, Emmanuel, Sylvain, Laurent et moi, nous nous élançons dans les rues de Sées.
Rapidement, nous gagnons la sortie de la ville, traversons la nationale et prenons la route du Bouillon. Voilà, c’est vraiment parti ! Nous sommes dans la campagne que seules nos frontales éclairent. Je trouve l’allure soutenue, nous sommes entre 10 et 11 au kilo et même souvent au-dessus de 11 ! Heu, on va tenir comment ça pendant 75 km ??? Dans un pré, un cheval hennit à notre passage, à mon passage? Sur la petite route du Bouillon, quelques voitures nous croisent au ralenti. A l’entrée du village, nous sortons la carte pour prendre la direction de la forêt d’Ecouves. Une petite descente et nous entrons dans la forêt. C’est une longue montée de plus d‘un km qui nous emmène au point haut du parcours à 332m d’altitude ! Et certains la montent gaillardement. Je reste en arrière avec Emmanuel. Je tiens à me ménager ! Cette forêt, nous la connaissons par cœur ! Tous les chemins que nous croisons, nous les arpentons le dimanche !
J’espérais apercevoir quelques animaux dans le faisceau de nos lampes. Je suis déçu. Aucun ne se montrera. Nous avons plus de chance lors de sorties dominicales. Cette traversée forestière se déroule tranquillement. Soudain, peu avant de sortir de la forêt, des phares derrière nous annoncent l’arrivée d’un véhicule. Il est 1h 30 du matin ! Le groupe est étiré sur plus de 200m le long de la route forestière. Avec Emmanuel, Je ferme la marche, enfin façon de parler ! Le véhicule arrive au ralenti à ma hauteur. C’est un fourgon de la gendarmerie ! Il remonte tous le groupe. A notre grand étonnement, les pandores ne nous demandent rien ! Effectivement, rien de plus normal que de croiser des coureurs à pied au milieu de la nuit en forêt ! Nous continuons notre route mais revoilà le véhicule gendarmesque dans l’autre sens. Même manège ! Nous quittons la forêt pour gagner la route qui nous mène vers Alençon, celle-là même qui conduit, dans l’autre sens, les coureurs vers Médavy lors de la grande course Alençon-Médavy. Et pour la troisième fois, la maréchaussée revient et passe le groupe cette fois-ci rapidement pour disparaître dans la nuit ! A voir courir les copains avec nos équipements réfléchissants et nos lampes, c’est très impressionnant, c’est une vraie vision fantomatique qui a de quoi intriguer. Vers 2h00 du matin, un appel de Raymond qui veut savoir où on en est. Raymond est au repos forcé depuis quelques semaines et il ronge son frein ! Il aurait bien voulu être de la partie ! Peu après, aux abords de Damigny, il arrive en voiture. Un bon moment sympa. Il file ensuite vers Alençon. A l’entrée d’Alençon, une silhouette lumineuse vient à notre rencontre. C’est Yannick qui rejoint le groupe ! Il va aller jusqu’à La Bazoge. Soudain, à un carrefour, des cris fusent ! C’est ma fille accompagnée d’une copine qui est venue m’encourager !
Bon, il est presque 2h30 du matin, mais à cet âge-là, il paraît que c’est normal d’être encore debout, aussi normal que de voir son coureur de père aller au Mans à pied ! Je suis très ému. Place Foch, devant la mairie d’Alençon, nous retrouvons Raymond. Quelques photos et nous repartons dans les rues alençonnaises désertes. Au Bas de Montsort, km25, Allain nous quitte, son contrat est rempli. Merci beaucoup !
Laurent,Mustang, Yannick, La Mouette, Loulou et Riah50
Nous sortons d’Alençon en empruntant la grande route du Mans jusqu’à Arconnay. Sur la place du village, nouvel arrêt. En effet, Laurent à son tour quitte le groupe. Il est très heureux d’avoir effectué ces 30 km en notre compagnie, le plaisir est réciproque. Cependant, Emmanuel m’annonce qu’il va arrêter également. Ce n’était pas prévu. Mais il a une douleur au mollet et il ne veut pas prendre de risque. Il va profiter de la voiture de Laurent pour rentrer. Dommage mais c’est une décision sage. Merci à toi aussi.
C’est un groupe restreint qui continue donc le périple en terre sarthoise : Yannick qui prépare le trail d’Ecouves, Sylvain qui prépare l’UTMB et moi. Nous sommes au cœur de la nuit. Le rythme s’est stabilisé autour de 10-11km/h. Cependant, les pentes nous ralentissent. Les côtes, nous ne les voyons pas, seuls nos pieds nous l’indiquent ! C’est troublant comme sensation. Une voiture nous double et rentre dans une ferme. Son propriétaire s’est posté à l’entrée et nous regarde passer sans plus d’étonnement que ça. Nous échangeons des bonjours. Après avoir traversé les carrières des Noés, nous arrivons à Oisseau-le-petit. Nous passons devant le fanum romain. J’en profite pour sortir ma science et donne un bref cours d’histoire gallo-romaine pendant qu’un automobiliste passe auprès de nous, l’air ahuri. Bon, ce n’est pas tout ça, nous repartons vers Fyé. Notre chemin est parallèle à la grande route sur laquelle filent les camions et les motards. Dans le ciel sarthois, le laser du dancing de La Hutte projette des lueurs étranges. De temps en temps, nous sortons les cartes. Depuis quelques temps, Loulou est à la peine. Je l’entends à sa respiration. Les carrefours où nous cherchons notre direction sont propices à des haltes bienfaitrices ! Je craignais des rencontres inopportunes avec des chiens. J’avais même pris un flacon de poivre au cas où. Finalement, si on a bien réveillé et fait gueuler quelques chiens, les portails étaient bien fermés ! Les averses se succèdent. Dans la plaine, le vent se fait sentir et nous refroidit. Nous courons groupés. De temps en temps, nous échangeons quelques propos. L’impression est étrange. Courir la nuit est vraiment déconcertant. Je touche le fanion qui est accroché à mon sac. Je suis le 158e à le porter. Je pense à tous mes prédécesseurs, j’en connais certains. Cela donne un peu le vertige de savoir que tous ont porté ce fanion symbolique qui ne représente que l’envie de courir, courir loin, courir longtemps, courir avec les amis.
La pluie a fait sortir les escargots. Enfin, on voit des animaux sauvages ! Et ils sont nombreux. Nous tachons de les éviter sur la route. Oh ! Non pas qu’ils vont plus vite que nous, il ne faut pas exagérer, simplement, ils traversent la route. Ce sont des petits gris mais aussi de superbes Bourgogne. Comme autres animaux sauvages, nous apercevrons simplement un renard et croiserons sur le bord de la route un hérisson. Quelques oiseaux non identifiés vont nous survoler. A un carrefour, un four à chanvre se dresse. A nouveau, je donne un cours, cette fois c’est donc sur la culture du chanvre au XIXe et XXe siècle dans le nord sarthois, sur le traitement du chanvre afin d’obtenir une fibre prête à être tissée pour des toiles ou tressée pour faire des cordages de marine. J’explique en particulier l’usage de ces fours qui ressemblent à de petits moulins destinés à sécher les fibres qui ont roui auparavant dans des cours d’eau ou des mares pour être ensuite brayées, peignées. Maintenant la culture du chanvre de la région est principalement faite pour obtenir une pâte destinée à devenir du papier à cigarette, pour le compte d’une multinationale nord-américaine ! Tout ceci nous amène au Gué Lian, pratiquement au km 50.
Cette fois-ci, nous sommes sur une route importante, et à 5h30 du matin, nous risquons de croiser des automobilistes rentrant de boîte ! Cette route nous paraît bien longue. A plusieurs reprises, nous consultons la carte pour savoir quand prendre une route sur la droite. Bientôt 6h00, Loulou et moi sortons les téléphones pour appeler des copains. Ceux-là sont levés, car on est à 10 mn du départ de l’Ultra Trans-Aubrac, une aimable plaisanterie de 100 km à travers l’Aubrac par des chemins particulièrement boueux et pentus. Finalement, j’obtiens Mireille, une teigneuse ! Elle a fait l’an dernier le CCC et le GRR. Le moral des troupes est bon. Enfin, je préfère être là où je suis que là où ils sont ! Des véhicules arrivent face à nous. Nous nous tenons sur la gauche de la chaussée comme le prescrit le code de la route. Nous nous méfions de leur réaction. Il doit être assez déconcertant pour un automobiliste d’apercevoir des lumières incertaines, clignotantes, sur le bas-côté de la route. Le plus souvent, ils se remettent en plein phare et nous passent en s’écartant à peine, sans ralentir ! Nous redoutons encore plus lorsque deux voitures se suivent, la deuxième ne nous voyant certainement pas. Enfin, nous trouvons notre petite route à droite, après un moulin dont on entend l’eau s’écouler sur la roue. C’est une petite montée sévère qui permet à chacun de se reposer un peu. Après un arrêt, il est difficile pour ne pas dire douloureux de repartir !!! Mais une fois fait, nous trottinons à un petit 10 à l’heure. Il est 6h00, une voiture arrive dans notre dos, ralentit à notre hauteur. A l’arrière, sont accrochés deux vélos de course. Le conducteur a baissé sa vitre et nous salue en nous encourageant. Ce sera bien le seul ! Enfin, on se comprend entre sportifs.
Le jour se lève. C’est un moment magique. Nous arrivons à Assé-le-Riboul, km 60. Mon portable retentit. C’est Runner14 qui vient prendre des nouvelles ! Toujours sur la brèche ! Il est un peu surpris de nous savoir seulement à 15 km de l’arrivée. Sentant le terme proche, le rythme de la course s’est légèrement accéléré. Nous traversons Saint-Jean d’Assé. Seule une boulangerie est ouverte. Loulou a la tentation de s’arrêter pour acheter des viennoiseries. Mais je suis déjà reparti ! Je suis intraitable ! Les croissants, c’est à l’arrivée, pas avant ! Après une petite côte, nous passons devant une petite chapelle. A la différence de son environnement délaissé, celle-ci a du caractère. Loulou semble avoir repris du poil de la bête. Les kms parcourus nous rapprochent du but. La dernière colline qui se dresse devant nous doit être enfin le dernier obstacle. Bientôt 8h00, j’appelle mon épouse pour savoir où elle en est. Heu, là, elle est dans la salle de bain ! C’est bien compromis pour venir à pied à notre rencontre pour les derniers kilomètres. C’est Loulou qui est bien déçu. Moi aussi. Elle aussi, étonnée que nous soyons si proche de l’arrivée à cette heure. GGO aussi quand il nous appelle quelques minutes plus tard et que je lui annonce que nous sommes à moins de 2 km de l’arrivée. Il est déjà sur le pied de guerre car il m’annonce qu’il va courir avec Zabou le trail du Perche, cet après-midi, à 15h00. Effectivement, je les y retrouverai l’après-midi où je serai en reportage photographique pour normandiecourseapied. Je dormirai plus tard !! La dernière côte ! Un panneau nous indique sagement de ralentir !!
Voilà, La Bazoge est en vue. Sentiment étrange. La fatigue est là mais l’envie de continuer demeure. Au terme de 8h45 de course, nous arrivons à la Bazoge, il est 8h30 du matin ! Les piles de mon appareil photo sont vides. Aussi, c’est avec le portable que nous immortalisons le moment : devant le panneau d’entrée du bourg, au km 75, Yannick nous photographie. Cela permet en outre d’envoyer immédiatement la preuve de notre arrivée aux copains.
Nous nous réfugions au bar PMU du bourg. Notre entrée est pour le moins remarquée par les consommateurs-parieurs. Mon épouse arrivera plus tard avec les croissants.
Yannick repart avec un ami. J’écris sur le carnet de liaison quelques mots. C’est vers 11h00 que Runner 14 et son équipe féminine vont arriver. Là encore moment émouvant pour la passation du fanion et les filles s’élancent pour leur relais. Bon vent ! Bon vent !
11 commentaires
Commentaire de JLW posté le 21-04-2008 à 18:03:00
70 bornes, comme ca, en pleine nuit, à te lire cela parait facile. Bravo pour ce relais avec frontale. uUe chose m'intrigue. Pourrais-tu nous expliquer, à l'occasion, comment tu procèdes avec un "flacon de poivre" devant un quadrupède féroce en pleine charge ... ??
Commentaire de fanfan59 posté le 21-04-2008 à 19:05:00
Chtigrincheuse décidemment encore plus fan du Mustang ! Quelle magnifique photo avec ta fille, on sent bien là l'émotion. Bravo pour ces 70 km de partage, de passion et d'amour de la nature. Françoise
Commentaire de fabzh posté le 21-04-2008 à 20:38:00
Merci Mustang pour ce beau récit
Bravo à toi et tes potes de virée. A te lire,vous paraissez dérouler pendant 70 kms de nuit et là chapeau bas.
Commentaire de Jerome_I posté le 21-04-2008 à 21:02:00
et le fanion continue son avancée inutile mais solidaire... Bravo Mustang pour ton relais et longue course au fanion...
Jérome
Commentaire de la panthère posté le 21-04-2008 à 21:54:00
infatigable mustang, merci pour ton récit, et à Athis!
Commentaire de claude41 posté le 21-04-2008 à 22:34:00
superbe ton récit! J'ai particulièrement apprécié le cours sur le chanvre! Originaire du sud de la Sarthe, j'ai connu mon arrière grand père (né en 1860! mort en 1956) qui en cultivait pour fabriquer des draps!
Commentaire de gdraid posté le 21-04-2008 à 23:18:00
Très belle histoire, très belle course !
70 km d'aventure partagée, pour la beauté du geste.
Merci Mustang
JC
Commentaire de hagendaz posté le 22-04-2008 à 09:52:00
allez acontinuez comme ça
bravo
Commentaire de -loulou- posté le 22-04-2008 à 19:32:00
Bravo Mustang pour ton récit, toujours d’une précision exemplaire, merci pour cette balade Normandie Maine avec un cours sur la culture et l’utilisation du chanvre sarthois
à dimanche loulou
Commentaire de chtigrincheux posté le 23-04-2008 à 16:37:00
Ouha il est drôlement chargé en émotion ton récit .Une pure merveille de fraternité dans un monde ou parfois l’essentiel est mis de coté pour laisser place au superflu .
J’aurai aimé participer au délire ,qui sait peu être que dans un futur proche ce rêve deviendra réalité
Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 27-04-2008 à 00:57:00
Quand je pense que ce fainéant de Lutin partait en vacances ce matin-là et qu'il ne t'a pas accompagné ! Il y a des coups de pied au derrière qui se perdent ! Bravo pour ton courage cher Mustang conquérant de l'indispensable inutile !
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