L'auteur : Bourdonski
La course : Le Tour des Glaciers de la Vanoise
Date : 1/7/2007
Lieu : Pralognan La Vanoise (Savoie)
Affichage : 2847 vues
Distance : 72km
Objectif : Pas d'objectif
Partager : Tweet
Le TGV, un acronyme archi-connu qui désigne également un trail de toute beauté avec tout ce qu'on aime : ça monte beaucoup et haut, ça descend itou, des chemins variés, c'est long avec, cerise sur le gâteau, de belles et vraies montagnes, des glaciers et même de la neige sous nos pied. Je connais le coin, à part le col de Chavière, pour l'avoir parcouru quelques années en arrière à pied et à ski de rando. Je garde le souvenir d'un tour relativement facile, si fait en plusieurs étapes, avec une grosse montée vers le col de la Vanoise puis du relativement plat avant de remonter sur Chavière et finir. Souvenirs trompeurs car ça grimpe bien plus que ça mais comme d'hab, on oublie vite ce qui est dur pour ne garder que le bon côté de l'aventure.
J'aborde donc ce TGV relativement confiant malgré mon échec au Mercantour 15 jours plus tôt vaincu par des problèmes d'alimentation. Confiant car mon abandon n'était pas lié à un problème physique, bien au contraire car j'avais encore de bonnes jambes. Je me sens en forme après une semaine de repos et une semaine très tranquille (3 * 40 minutes cool). Je suis relativement optimiste mais pas trop : prudence cette fois, j'ai l'intention de partir tranquille et de bien veiller à m'alimenter régulièrement. Contrairement au Mercantour, je n'ai pas fait de prépa diététique particulière : pack UTMB de Authentic à commencer 15 jours avant. Les 2 fois où je l'ai utilisé, UTMB 2006 et Mercantour 2007, j'ai connu en course des problèmes digestifs avec écœurement au sucré et même à toute alimentation me contraignant à l'abandon. Rien de tel aux Templiers et Ardéchois avec une prépa classique : régime hyperglucidique + recharge glucidique comme sur un marathon. Donc j'abandonne les potions "magiques" pour ce TGV et j'adopte la boisson marathon de Fenioux en prépa et en course. Je partirais avec la poche à eau en Fenioux gout neutre. Je n’utiliserais pas de gels en systématique, type toutes les heures, mais uniquement en cas de coup de pompe ou avant une difficulté. J’aimerais bien finir en 14 h !
Le briefing refroidit un tout petit peu l'ambiance : trail dur, pas de balisage, vous serez livré à vous même pour résumer. Ca semble un peu exagéré mais il est bon de rappeler que ce trail se déroule très haut, loin des voies de circulation avec des passages hautes montagnes. D'ailleurs, des CRS de montagne sont prévus aux points clés du trail. Par contre, je ne retiens pas la suggestion de Delachenal de partir sans bâtons. Je préfère les emmener quitte à les mettre dans le sac s'ils sont vraiment inutiles. Les montées sont longues et je risque d'avoir besoin des bâtons sur la dernière au col de Chavière (1000 m D+). De plus les barrières horaires sont assez justes : 7h15 virtuel à la Vanoise au 7 eme km, 9h30 à l'Arpont au 21 eme km : il ne va pas falloir lambiner en route.Court départ tranquille dans les rues de Pralognan avant d'attaquer la montée vers le refuge Félix Faure du nom d'un ancien président monté jusque là. Je suis bien, beaucoup mieux qu'au Mercantour. Les jambes sont légères, je ne sens pas le poids du sac et je suis capable de relancer sans difficulté. Pas de bâtons pour le début de la montée, le chemin n'est pas large et nous sommes nombreux.
Tout à fait par hasard, je fais la rencontre de notre fameuse Agnès. J'avais repéré depuis quelques minutes cette belle jeune femme qui parlait avec gouaille tout en montant facilement. Son léger accent inspirait immédiatement la sympathie et lorsque j'ai entendu quelqu'un l'appeler par son prénom, aussitôt j'ai tilté : "Bonjour, tu est Agnès Haribo ?". Oui, c'était bien elle, que le monde est petit car le peloton comptait quand même 540 traileurs et c'est un coup de bol. La vraie Agnès est, je vous le jure, encore mieux que l'Agnès du forum. Le genre de personne que l'on est heureux de rencontrer : vive Kikourou !
La Grande Casse se profile à l'horizon, le refuge n'est plus très loin où j'arrive en 1h45.
J'avais prévu 2 h de montée, je suis allé un peu plus vite mais sans plus. Rapide ravito en liquide : beurk quelle saloperie cette vichy énergétique ! Ca sera la fausse note de l'organisation. Pourquoi n'avoir pas prévu tout simplement de la Vichy nature ?
Je pensais avoir lâché notre Agnès mais après avoir traversé un névé descendant, je me retourne pour prendre la photo et j’aila surprise de la voir concentrée dans sa descente. J’avais pourtant l’impression d’avoir bien carburé sur cette portion plutôt plate et elle est juste derrière moi ! Elle a la caisse notre Agnès !
Heureusement la descente arrive et je retrouve mes jambes. Je recommence à doubler du monde. A un embranchement, alors que je consulte les panneaux indicateurs et ma montre, le toubib de la course, assis au bord du chemin me rassure : « c’est bon, tu est dans les temps ». Après cette bonne descente, la remontée vers Plan Sec se déroule tranquillement même si elle n’est pas du gout de tout le monde, beaucoup râlent sur ce refuge qui n’arrive pas ! Pourtant, il est bien la au bout du chemin vers 11h55 : j’ai maintenu et même augmenté mon avance sur les barrières horaires (13h00).
Heureusement la vue est magnifique sur les 2 barrages aux eaux turquoises. La montée du col se fait très lentement mais surement puisque j’arrive quand même au col sans trop de dégât horaire.
La pluie commence à tomber : elle rafraichira un peu l’atmosphère dans cette dernière montée redoutée. L’Orgère est une zone critique pour le moral des pas en forme à ce moment là. La navette est juste à côté et des concurrents qui ont abandonné, attendent le départ. Ca me rappelle de mauvais souvenirs (UTMB et Mercantour). Je compatis mais je préfère me concentrer sur mon ravito. J’avale une soupe avec des Tucs et un morceau de fromage, pas mauvais. Je ne bois pas trop car j’ai peur d’un trop plein vomitif. Je fais le plein de ma poche : il reste environ 250 ml sur 1750 ml au départ. Je ne met que 500 ml car après le col, c’est fini.
Je sors la veste car la pluie tombe drue maintenant et attaque la 1ere partie de la montée de 1000 m. C’est en effet très raide et j’avance difficilement malgré les encouragements des randonneurs qui descendent. Je trouve une frontale Tikka, un randonneur me dit qu’il l’a vu tomber du sac d’un concurrent devant. Malheureusement, aucune description et vu mon rythme, je ne risque pas de le rattraper ! Je laisserais la frontale à l’arrivée au speaker. J’avance lentement et je me fais doubler par des concurrents. Les bâtons sont d’une aide précieuse car ils permettent de limiter l’effort de poussée sur les jambes. Le dénivelé défile mais pas assez vite. Je ne suis pas bien mais je m’accroche. J’applique alors ma technique de base quand ça coince vraiment en montée. A défaut de MP3, je baisse les yeux, tant pis pour le paysage, et je compte chaque pas jusqu’à 200 avant de relever la tête pour voir ce que j’ai fait !J’arrive enfin sur la partie plate au bout de laquelle se profile le col de Chavière. J’arrive à distinguer les coureurs sur le névé final, il ne doit donc pas être trop loin : si !
Un gel m’a redonné le punch car maintenant, je marche à grandes enjambées et je remonte des coureurs qui m’avaient dépassé plus bas. D’ailleurs, à partir de là plus personne ne me dépassera jusqu’au col.
Le col se passe bien finalement, les appuis sont bien assurés dans la neige et une corde est là pour les moins sûrs. Je ne me rappelle pas de mon temps mais j’ai été agréablement surpris. La descente de l’autre côté est plus périlleuse que la montée. La fatigue aidant, je préfère utiliser la corde pour passer rapidement ce tronçon. Nouveau et dernier gel pour affronter la descente.
Pas de balisage ensuite et il faut chercher son chemin au milieu des multiples traces de pas dans la neige mais la direction générale permet de se retrouver sur le chemin menant à Péclet Polset. Les jambes sont à nouveau là et je dévale la descente vers le refuge en enrhumant au passage quelques randonneurs et concurrents. Accueil très sympa sous la pluie (La Souris ?), j’essaie d’avaler quelque chose mais ça passe moyen, je préfère ne pas insister et de toute façon l’arrivée est proche. Même HS, je ne peux que finir. Je me lance dans la descente sous la pluie vers 17h25 et je décide de jouer mon va tout. Je n’ai rien à perdre car je finirais, sauf accident.J’allonge la foulée, les sensations sont là et je dévale la pente malgré les pièges du chemin. Je me rapproche des moyens et ceux-ci ont donc le même niveau que moi, je rattrapes donc moins de monde. Mon souffle est court car je descend vraiment vite et j’ai conscience que je grille mes dernières réserves. Je me dit que si je ralentissais, il n’est pas sûr que j’économise suffisamment d’énergie pour finir plus tôt. J’en profite donc pour me faire plaisir et lâcher les bourrins : qui vivra verra ! En effet dès que la pente s’adoucit, ça devient plus difficile et le rythme baisse. Je rejoins un concurrent aux Salomon rouges et maillot blanc et je décide de rester dans son sillage pour assurer. Nous sommes croisés plusieurs fois depuis le départ, il montait plus vite et je le rattrapais en descente. Nous continuons ensemble à un petit rythme régulier jusqu’aux Prioux. J’ai fait l’impasse sur les 14 h, mon but est d’arriver en moins de 15 h maintenant.
Bien après le village, une bénévole nous annonce encore 3 km à parcourir, mon moral en prend un coup car je pensais qu’avec ma descente, j’avais parcouru une bonne partie des 12 kms. De plus une dernière petite côte se profile où je coince, mon compagnon de chemin me propose de m’attendre mais je lui dis de continuer sans moi. Je profite de cette pause pour enlever la veste et boire un coup. Tant pis pour les moins de 15 h mais il faut absolument que je finisse en 15 h. Sur le point de démarrer, un concurrent me rattrape et m’annonce : « on est bon pour les 14 h » ! Quel con, j’ai fait mes calculs persuadé que nous étions partis à 4 h du matin (la fatigue sans doute) ! Mon moral se regonfle à bloc et nous voila parti sur la piste. Les kms défilent plus vite, je lache le concurrent, je traverse le camping et me voila à l’entrée de Pralognan. Ma foulée est rapide et je franchis la ligne en 13 h 53.
Objectif TGV atteint et transformé. Il me reste de belles images d’un trail magnifique et un peu spécial : pas de balisage et une bonne partie du parcours (57 km sur les 72) à plus de 2000 m. De belles rencontres comme toujours et des bénévoles tout à notre disposition : un grand merci à vous tous qui nous permettez d’aller au bout de notre passion. Pas de doute, j’inscris le TGV sur mon planning 2008.
10 commentaires
Commentaire de akunamatata posté le 08-07-2007 à 18:24:00
Belle revanche sur le Mercantour, on revit bien la course au travers ton récit. Bien aussi de voir que les kikoureurs se reconnaissent entre eux.
Commentaire de vboys74 posté le 08-07-2007 à 19:03:00
Bon ben après avoir lu un paquet de CR de la course 2007 et en particulier le tiens, je l'inscris a mon planning 2008!
Pleins d'émotions, de paysages et de Kikous! Merci pour ton CR et bravo!
seb
Commentaire de LtBlueb posté le 08-07-2007 à 21:11:00
Salut,
bravo pour ta course et ton récit
dommage qu'on se soit loupé à plusieurs reprises ces derniers temps (saintélyon, ardéchois, tgv) d'autant plus qu'on a l'air d'être pas trop loin l'un de l'autre ; la prochaine fois essayons de faire un peu de chemin ensemble, on se racontera nos trucs lié à l'aimentation et l'hydratation en ultra ;-)))
bon courage pour l'UTMB
L'Blueb
Commentaire de JLW posté le 08-07-2007 à 22:15:00
Bravo bourdonski pour ce récit qui rend très bien compte de la difficulté du parcours et de ta volonté de finir. Tout l'esprit du trail en somme.
Commentaire de Philippe8474 posté le 08-07-2007 à 22:21:00
Pas mal le coup de compter 200 pas avant de relever la tête pour voir sa progression... De mon côté j'utilise la technique les yeux dans la visière de la casquette... Mais quand même c'est tellement mieux quand tout va bien et qu'on peut profiter du paysage et de tt le reste!!!
En tout cas bravo pour ta course
Philippe
Commentaire de Khanardô posté le 09-07-2007 à 21:46:00
Bravo à toi, et merci pour ton récit !
Je te verrai donc en 2008, si on n'a pas eu l'occasion de faire connaissance auparavant, car avec tous vos récits, vous me donnez tous bien envie d'y aller, sur ce fameux TGV !
Alors à bientôt, au plaisir de te rencontrer !
Alain
Commentaire de timoca posté le 10-07-2007 à 13:03:00
félicitations pour ta course et ton récit superbement illustré qui donne bien envie d'aller y faire un tour
Commentaire de jongieulan posté le 11-07-2007 à 15:14:00
bravo pour ta course et ton superbe cr illustré!!...
Commentaire de philkikou posté le 12-05-2008 à 14:49:00
C.R. très intéressant et instructif sur ce qui m'attend pour la vanoise 2008..merci
Commentaire de agnès78 posté le 21-05-2008 à 12:49:00
oups oups et reoups... heureusement que le spleen du trail me fait me replonger dans cette merveilleuse course car cela me permet de lire ce magnifique récit agrémenté de photos non moins splendides... Ma seule excuse, une semaine après le TGV toutes mes pensées étaient tournées vers un bel ostéo que je venais de rencontrer... mais je m'égare... Mille excuses msieur. sincèrement... merci de nous avoir fait partagé tes émotions et tes sentiments tout au long de ces 72 kils de bonheur. Et un grand BRAVO! Tu y retrournes cette année? Encore désolée et à très bientôt, j'espère
grosses bises
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.