Récit de la course : Le Grand Raid du Mercantour 2005, par La Tortue

L'auteur : La Tortue

La course : Le Grand Raid du Mercantour

Date : 18/6/2005

Lieu : St Martin- Vésubie (Alpes-Maritimes)

Affichage : 2977 vues

Distance : 102km

Objectif : Pas d'objectif

5 commentaires

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Que la montagne est belle !

Salutatou(te)s

Ca y est ! c’est fait ! le Mercantour est bouclé ! quelle aventure !

Voilà un moment déjà que me trottait dans la tête l’idée de faire un jour un truc de bargeots. Et à lire vos différents Crs sur des courses analogues, je me disais qu’après tout , pourquoi pas moi ? Le Mercantour me plaisait bien, d’autant que des bruits lancés par LTDB laissaient à penser que ce serait la dernière édition. Mon bulletin d’inscription était prêt depuis longtemps mais j’ai attendu de voir comment je passais le raid 28 pour l’envoyer. Le lendemain du raid 28, grâce à la confiance enregistrée au contact de mes copains, le bulletin partait, m’obligeant ainsi à ne plus pouvoir reculer. Restait à mettre en place une préparation adéquate.

Première chose : préparer la tête, pour ça j’ai mis en fond d’écran sur mon PC l’affiche de la course, comme ça tous les jours, j’étais dans l’ambiance. Ensuite, mettre en place une préparation physique adaptée à l’épreuve en sachant que dans mon pays nantais, le point culminant doit se situer à 50 m au dessus du niveau de la mer ! arf ! la préparation tournera autour de monter de marches d’escalier (en place de préparer les jambes, ça prépara aussi la tête parce que c’est psychologiquement usant de grimper et descendre ces put…s d’escalier pendant des heures…) ce seront donc les marches du pont SNCF de la Beaujoire qui seront mon terrain de jeu favori pendant plusieurs mois. En plus des escaliers, j’ai décidé d’augmenter mon kilométrage vélo et surtout de faire des sorties vélo plus dures. Sur la fin, l’achat d’un elliptique, me permettra de fignoler la préparation sans trop tirer sur la mécanique. Il faut rajouter à ce menu de base quelques extra. Tout d’abord, 1 semaine aux sports d’hiver en février avec quelques sorties nocturnes dans la montagne après la journée de ski et une sortie raquette avec les savoyards (toutou, gé, lapouneur) au cours de laquelle j’apprendrais beaucoup et notamment le fait qu’il ne faut pas calculer sa progression en fonction du kilométrage mais en fonction du dénivelé. En plus, quelques courses que j’ai abordé avec l’esprit de préparer le mercantour : les trails des 3 chapelles (42km, 850m D+), la randotrail des pèlerins (50km, 1600 m de D+), le trail des sangliers (55 km, 1000 m D+), plus le semi de la champenois et le marathon de Paris pour rigoler avec les zanimos et un ch’tit 10 km pour remuer les poumons. Pour ceux que ça intéressent, le détail de l’entraînement est sur le kikourou :
http://www.kikourou.net/entrainement/navigation.php?kikoureur=5http://www.kikourou.net/entrainement/navigation.php?kikoureur=5
J’ai eu quelques petits bobos par ci par là qui m’ont parfois obligé à lever le pied, ce qui ne fut pas forcément grave, au contraire car ça m’a permis de souffler de temps en temps car parallèlement à mon programme sportif, j’avais un emploi du temps professionnel démentiel !
Au sujet de la préparation, j’adresse un merci officiel au papy pour avoir su apporter quelques touches personnels qui me seront très utiles.
Troisième moment de la préparation et pas des plus négligeable : la préparation de la course elle-même. Pour le matériel, l’expérience tirée de mes précédentes « expéditions » me servira ainsi que les Crs détaillés notamment de l’électron et du bourrin sur leurs habitudes. J’ai également minutieusement préparer mon road-book. J’ai remarqué que sur des trails plus courts, ce qui m’enquiquine le plus est de ne pas trop savoir où j’en suis, surtout quand je suis pas bien. En clair, manquant totalement de repère, j’avais besoin de me rassurer en « planifiant » tout à l’avance et en ayant un support auquel me référer. Je me suis donc préparé un road book, très précis avec distance, dénivelé, et horaires de passage maxi à respecter.

Tout est prêt, aéroport de Nice-côte d’azur, 11h ce vendredi, je retrouve la souris, le troll et la libellule autour d’un pot en attendant le dingo ! pendant ce temps, le troll nous fait une démonstration de sa tente magique qui se monte en 2 secondes, en fait elle se déplie, plus qu’elle ne se monte. Le système est excessivement ingénieux mais nécessite un certaine apprentissage pour la replier !
Le dingo se fait attendre. A la vue de sa voiture, si cet objet roulant à 4 roues peut encore mériter le nom de voiture ;-)), une inquiétude naît rapidement : comment va-t-on rentre à 5 avec le bagages dans la dingomobile. Je repère le loueur de bagnole le plus proche en me disant qu’on peut toujours se rabattre sur un Espace chez Europcar, mais le dingo rassure tout le monde, se met à l’organisation du rangement et finalement au bout de longues minutes, tout le monde trouve sa place (la preuve en photo). En route vers St Martin de Vésubie. Arrêt pasta-party dans une charmant auberge au bord de la Vésubie, photo souvenirs et trempette des pieds. L’ambiance dans la bagnole est rigolote, tout le monde est content de se retrouver et « d’y aller », mais il plane une certaine angoisse ! non, ce n’est pas l’appréhension de la course, mais plutôt la dingomobile qui inquiète les passagers arrières et votre serviteur. Entre les cardans qui cliqettes, la vitre qui vibre, et le pot d’chap qui menace de rendre son tablier, il y a effectivelent de quoi être inquiet. Et ce n’est pas de la conduite, certes sure, mais un poil étourdie du dingo qui va rassurer les troupe. Je sens mon troll à la limite de l’explosion quand à la sortie d’un virage « coupé pour soulager la direction » comme dit le dingo, on se retrouve nez à nez avec un camion qui descend de façon « agressive ». Bon, j’exagère peut être un peu, mais à peine ! Pour résumer, la dingomobile n’a de la ferrari que la couleur et la nationalité, mais on a quand même été bien content de la trouver. Merci encore au dingo pour son co-voiturage.
Arrivée à st martin, le traditionnel parcours d’avant course, récupération du dossard, consultation du programme, ballade dans le patelin. On croise l’électron qui monte du camping et qui transpire déjà comme…un bœuf !
On part ensuite établir notre camp de base au camping st Joseph, excellente adresse que je recommande à tous ceux qui comptent aller par là bas, aussi bien pour son calme, son emplacement et la gentillesse et l’accueil de la taulière.
Evidemment le troll crée l’événement avec sa tente automatique ;-) le dingo nous sort une canadienne encore plus pourrie que sa bagnole (si c’est possible !), et je m’aperçois que le matelas pneumatique que je me suis fais suer à apporter fuit ;-(
Au camping, je fais la connaissance du Toro, qui m’a toujours impressionné dans ses écrits, dans les différentes causes qu’il défend, dans son engagement pour Franchir l’horizon et pour sa maxime qui clos ses messages. Ray et Gé sont là aussi, je ne savais pas qu’ils venaient, je suis super content de les revoir. Ils arrivent juste au moment où je prépare mon sac pour le lendemain, et un poil déconcentré, je mettrais un temps fou à le faire ! Gé me semble super en confiance, je n’ai même pas réussi à l’inquiéter quand à la composition de son sac ;-))
Doucement, mais sûrement, c’est l’heure de l’AAB du soir. On retrouve le papy et le festnoz. Encore un zanimal que je connaissais pas ! et un Breton en plus, une bien sympathique rencontre ! Le papy m’a l’air bien chaud. Repas sérieux (même pas une goutte de rouge), service un poil lent qui nous fera coucher un peu tard alors que tout le monde est fatigué.

3h du mat ! dring ! les sacs sont près depuis hier, il ne faut dons pas longtemps pour nous retrouver dans la zone de départ. Vérification du packetage, dernier brieffing de l’organisation et zou. 4h04, c’est parti, les 400 fous furieux sont lâchés. Depuis le côté du peloton, je regarde partir les premiers comme des avions ! hallucinant ! Une fois le gros de la troup passée, je me mets dans le flot et zou me voilà parti. Plus aucun zanimo en vue, tant pise ! allons-y… On sort du village, traverse la Vésubie et au détour d’un virage, je vois mon papynou complètement affolé qui vient de perdre le bouchon de son tuyau de camel. Je lui retrouve en 10 secondes, et vraoummmm, le papy repart ! pfiout, il m’a l’air pressé !

L’objectif est simple : finir, en passant les barrières horaires obligatoires surtout celle de 19h (km 57) qui me paraît la plus difficile à tenir. Je pars confiant, mais un poil inquiet, faut bien l’avouer. Comment va tenir la carapace sur une telle distance et surtout comment vais-je encaisser le dénivelé, moi qui n’ai jamais fait plus de 1500 m de D+ dans un même course ???

Les premiers km se font sur la route qui monte au village de Venanson qui surplombe la vallée de la Vésubie sur un piton rocheux. La pente est assez faible, mais je me focre à marcher calmement à un rythme régulier. Peut être un peu lent le rytme puisque je suis dans les dernières frontales et que j’atteind le village au bout de 40’ au lieu des 30 que j’avais prévues. Bof ! pas grave, je referais le point en haut du premier col. L’assencion du col du Colmiane (1710 m) ne présente pas de difficulté particulière. J’ai de bonnes jambes et ne force à aucun moment. Lorsque j’arrive au sommet au bout de 1h30, je suis même surpris d’être déjà arrivé. Je retrouve socrate et le toro, ce qui me rassure. La présence de Socrate qui est un sage et qui finit toujours me laisse à penser que je suis dans le bon tempo A ce moment là, j’ai déjà 30’ d’avance sur mon tableau de marche.

Une courte et roulante descente nous amène au village de st dalmas. Et nous attaquons la deuxième difficultés de la journée. L’ascension du col du Barn, via le col du Veillos. Je progresse lentement mais sûrement, l’usage des battons ne me posent pas trop de problème. Je mets bien ma dragonne dans la paume de la main comme me l’a appris le toutou et j’essaie de garder une cadence régulière. Accunamatata me reconnaît à mon t-shirt kikourou. Il est blessé et suivra la course de sa voiture, en faisant plein de photos pour tout le monde ! encore un type qui m’a l’air bien sympathique ! Je ne traine pas au ravito à mi-pente car le soleil n’est pas encore lever et il fait pas chaud chaud en plein vent. Je retrouve l’électron en délicatesse avec une ampoule. Un problème va alors se faire sentir : on est au dessus de 2000 m, j’ai la tête qui tourne, j’ai mal à la tête et j’ai envie de vomir ! j’en parle à un concurrent qui me double en s’inquiétant de mon sort car je fais de courtes mais fréquentes pauses. Pour lui, il s’agit du « mal des montagnes » ! peut-être ? on verra bien, je prends un doliprane et je continue ! le même phénomène se produira sur toutes les assencions au dessus de 2000m ! C’est curieux, quand je monte en télécabine pour faire du ski, j’ai pas ce problème ;-))). L’électron me reprend un peu avant le sommet (2457 m) et c’est un peu émoussé que je bascule vers la « vacherie du collet », toujours avec une bonne ½ heure d’avance sur mon tableau de marche.

Le début de la descente est très technique et je ne suis pas à l’aise du tout avec les bâtons, à tel point que je vais les ranger. Je suis hyper crispé dans cette descente, impossible de me décontracter. Je vois l’électron s’éloigner à vitesse grand V. Tout le monde me double et me distance très vite, ce qui me laisse à penser que je suis vraiment à la rue. A mi-pente, on rentre dans la forêt sur un sentier recouvert d’herbe grasse, un vrai tapis, un vrai bonheur aussi. Pour la première fois de la journée, je peux courir d’une foulée décontractée et cela va me faire beaucoup de bien, aux jambes mais aussi au moral car je reprends beaucoup de concurrents, même Socrate qui m’avait pourtant déposer dans la première partie de la descente. Au pied de la descente, j’ai un moral d’enfer ! je sais (où je crois savoir…) à quelle sauce je vais être mangé. En effet, j’ai escalader 2 cols et effectuer 1 longue descente. Je sais maintenant que mes estimations de progression sont larges et que si j’arrive à maintenir le rythme sans casse, je passerais les barrières sans problèmes.

J’effectue la courte ascension du col de Salèze (2032m) en papotant avec Socrate ! qu’est-ce que ces quelques km ont été agréable à faire en sa compagnie !. Au sommet, j’ai à nouveau la tête qui tourne et prend quelques minutes pour souffler et m’étirer. Ensuite, je reprends très rapidement Socrate dans la descente, où cette fois je suis complètement détendu, je m’éclate à trottiner sans effort dans cette pente difficile certes, mais qui n’est pas trop raide. Au bout de quelques km, on se retrouve sur une route goudronnée que je descends en courrant tranquillement pour arriver au deuxième ravito au village du Boréon avec 1 heure d’avance sur mon tableau de marche. A ce moment là de la course, sans m’enflammer, je décide toutefois de revoir mon tableau de marche à la hausse sans pour autant me mettre de temps en tête. Au ravito, je retrouve l’électron et….la souris ! Ben mince alors ! je la croyais pas devant l’animal ! La suite de la course me prouvera que la bestiole à de sacrés capacités en montée !

Jusqu’à présent, malgré mais maux de tête, je n’ai jamais vraiment été à la ramasse en montée, l’ascension du pas de Ladres (2448 m) sera une toute autre paire de manche ! 1000 m de D+ à se taper d’un coup en 7 km ! pfiout ! avec des passages très raides. Dès le début, ça grimpe sec, en plus dans la forêt il fait très chaud. Heureusement, dans cette montée, on croise ou on double beaucoup de promeneurs qui nous encouragent gentiment. Arrivé sur un plateau superbe avec un lac et une jolie petit île au milieu, je fait une pause et quelques photos et je regarde ce que je crois être le sommet ! il reste un bout de chemin à faire, mais ça me parait jouable ! hélas, arrivé à ce « sommet », je découvre le véritable col à franchir, ça se termine par un mur terrible dans lequel on voit les concurrents au loin dessiner les lacets courts et serrés ! je progresse très très lentement, pas après pas, mais tout le monde est à la même vitesse. On est accueilli au sommet par un tintement de cloche sympa. Stoooooop ! un petite pause m’est indispensable ! pour reprendre mon souffle et mes esprits. J’ai fait la montée en 2h30, soit du 380 m de D+ par heure. Je reste donc malgré la lenteur de ma progression dans les délais que je m’étais fixés et surtout j’ai maintenant près de 2 heures d’avance sur mon tableau de marche ! il reste une grosse assension jusqu’à la barrière de 19h, je sais que je vais la passer ! et c’est plein de confiance que je passe le col de fenestre (2474 m) avec des passages super techniques et des traversées de névés glissouillantes.

Dans la longue descente vers la madone de fenestre, je peux à nouveaux trottiner. Je me fais la réflexion d’être vachement bien quand je cours, comme si les montées même si elles sont très difficiles ne laissent quasiment pas de trace et que dès que la bascule s’effectue, la machine se remet en route. Les cuisses sont dures dans les descentes bien sur, mais ça se passe plutôt pas mal. Un peu avant le bas de la descente, je reprends l’électron qui m’a l’air pas mal.

Je repars assez vite du ravito. Je suis 200 m derrière l’électron dans la pente qui nous mène à la baisse des 5 lacs (2339m). A ce moment là, en pleine côte, coup de fil du blueb puis de charlotte ! j’ai le souffle un peu court et j’ai un peu de mal à causer, mais je leur dit que ça va pas trop mal et que je suis dans le timing. C’est la première fois que j’ai du réseau depuis ce matin, j’en profite donc pour essayer d’écouter ma messagerie car en plus du zoo que je sais présent derrière moi, j’ai envoyé un mail à pas mal de copains avant de partir en leur disant qu’un petit coup de pied au cul téléphonique ne pourrait sûrement pas me faire de mal pendant la course : « vous avez…13 nouveaux messages » ! chic ! hélas ! c’est quasiment inaudible et je n’aurais les messages finalement qu’à l’arrivée. Merci à tous ceux qui m’ont témoigné leur soutien. Je passe l’électron dans la montée vers la baisse des 5 lacs. Il a son traditionnel gros coup de pompe ! je commence à le connaître, ça ne m’inquiète pas trop, mais j’ai quand même un peu peur pour lui quand je vois ce qu’il reste encore à grimper. Dans la descente, je rejoins la souris qui n’est visiblement pas une descendeuse ;-) mais comment fait-elle pour être déjà là alors ??? la réponse, je vais l’avoir très vite, dès l’ascension de la baisse de Prals (2339 m). la bestiole grimpe comme un chamois, à petit pas, mais à un rythme régulier et cadencé. Elle double un paquet de concurrents dans les montées, c’est impressionnant ! En haut de la baisse de Prals, je ne traîne pas, car il y a le gros ravito en bas qui m’attend au bout d’une longue descente de 6 km. Je m’éclate encore dans la descente où je suis décidément de plus en plus à l’aise et c’est en plaisantant avec les bénévolles et les pompiers de service que j’arrive au relais des Merveilles, la fameuse barrière horaire de 19h qui m’a tant inquiété et qui m’a bien souvent empêché de dormir tranquillement et que je passe finalement à….17h , et presque en « pleine forme » !!! incroyable, non ?!

J’avais prévu un bon arrêt. Nous avons des sacs de rechange qui nous attendent. Ce ravito est géant ! Toilettes, lavabos, douches, soupe chaude avec des bonnes pâtes dedans. Je fais un brin de toilette, change de chaussette, m’étire, me masse les jambes avec un gel décontractant. Je n’hésite pas longtemps sur la tenue à prendre pour la nuit, ce sera t-shirt manche longue (kikourou bien sur) à la place du manche courte et un coupe-vent léger dans le sac. Je vise les 6 barres de céréales que j’ai trimballer jusque là pour rien pour n’en garder que 2 en qu’à d’urgence ! La souris arrive sur ces entre faits, elle descend vraiment pas vite, car je lui ai mis 20’ en 5 km. Elle m’a l’air en pleine forme et mon petit doigt me dit qu’on va faire un bout de chemin ensemble.

Au bout de 50’, je me décide à repartir ! j’ai mis le MP3 à fond dans les oreilles, bien décidé à m’attaquer à l’une des plus grosses difficultés de la journée (encore 900m de D+ à se taper en 6 km). Le début est bien cool sur route, mais très rapidement on grimpe sec, dans une pente très raide qu’EDF a d’ailleurs choisit pour faire descendre un conduit accélérateur d’eau pour ses turbines. Le soleil n’est pas encore couché et j’ai très chaud avec mon t-shirt manche longue. Comme toujours en côte, je me fais remonter par quelques concurrents, dont bien sur….la souris ! l’avantage de cette montée est que l’on ne voit le sommet que très tard et qu’en plus la dernière partie de l’ascension se fait en compagnie d’un chamois pas farouche pour 2 sous qui broute à 20 mètres du sentier ! sympa ! je finis cependant la montée à l’arrachée, je regarde mas montre, j’ai mis 2 heures pour monter ! j’ai du mal à croire que j’ai tenu du 400 m de D+ de l’heure sur une telle grimpette. En plus, à ce sommet du pas de l’Arpette (2514m), se dégage une vue magnifique sur les lacs et le refuge de la vallée des merveilles. Dommage qui j’y arrive un peu tard et que le soleil parti. Certes, il fait encore jour, mais les photos seront moins jolies. A l’attaque de la descente, pourtant pas très difficile, j’ai un coup de fatigue et les cuisses très dures. Je descends donc moins vite, mais suffisamment pour re-dépasser…qui ? ben oui !la souris ! fô suivre…cette fois la descente est assez courte et elle arrive très peu de temps après moi au ravito. Dans la descente nous croisons 3 concurrents qui remontent ?? quid ? ce sont des gars qui voulaient abandonner au ravito mais on leur a dit que c’était impossible à cet endroit et qu’il fallait retourner au relais des merveilles ;-( pas glop !

Il reste une grosse difficulté à se taper, la cime du diable (qui porte bien son nom, car j’y ai diablement souffert !), point culminant de la course (2685m) avec une fin terrible en lacet dans un pierrier infernal. La nuit commence à tomber, mais je me dit que je vais atteindre le sommet sans frontal. Mais ma progression est très lente, et la nuit tombe beaucoup plus vite que je le pensais. A 150 de D+ du sommet, je suis obligé de m’arrêter en pleine pente pour sortir la frontale et le coupe-vent ;-( Je suis pas bien à ce moment là, la souris est loin devant ! je croise un bénévolle qui descent et qui m’annonce encore 100 m de D+ ! allez camarade ! ho-hisse ! c’est à ce moment là que j’aillisse dans mon MP3, les encouragements enreigistrés par mes enfants par ma fille ! pétard, ça m’a fait du bien ! enfin, la cime du diable ! il fait nuit noire. J’aimerais bien souffler un peu, mais les bénévoles disent qu’il ne faut pas descendre seul car c’est assez dangereux. Il y a là 2 ou 3 concurrents qui m’ont doublé plus tôt mais je sais qu’après moi, il n’y a personne avant un moment car j’ai vu dans le mur final que j’étais le dernier. Je ne prends donc pas une seconde pour souffler et j’attaque tout de suite la descente !
Pour info, je ne regarde plus du tout mon tableau de marche à ce moment là car je sais que j’ai une marge super sur la prochaine barrière horaire. Il est 22h, j’ai maintenant 2h30 d’avance sur mon tableau de marche ! Y’a plus qu’à gérer me dis-je ! et le grand classique de la tortue qui sort de la course avant la fin se reproduit. Dans mon esprit, il ne reste « plus » que 30 bornes dont une descente de 12 bornes et deux côte de tafiottes à 350 et 400 m de D+ !
Et bien dans la course, je vais m’y remettre très vite car surement à cause d’un brin de déconcentration, je me loupe dans le début de la descente. Dans une pente très raide faite d’énormes blocs rocheux, mon pied bute sur l’eux d’eux ! je pars en vrille, mes pieds cherches désespérément des apuits ! je crie : « attention » car je me vois faire une strike sur Daniel, un sympathique italien que je croise et recroise depuis quelques heures. A ce moment là, j’arrive à retrouver un appui à peu près stable et en même temps Daniel arrive à me saisir au vol d’une main ferme . Me voilà enfin arrêté ! j’ai le cœur qui bat la chamade, Daniel est livide, moi aussi, je pense et j’ai eu la peur de ma vie ! Si je tombe à cet endroit là…ça peut faire du très très vilain ! du coup mon en-train dans les descentes va se calmer quelques km. De toutes façons, c’est tellement difficile et dangereux que je progresse très lentement. En plus de nuit et avec un balisage pas évident à suivre, j’y vais molo. Je pense à la souris qui aime pas les descentes et qui a toujours peur de se perdre ! la pauvre, elle doit être servit ! quelques minutes plus tard, je la rattrape accompagné de 3 autres gars qui descendent pas terrible. Je propose donc de faire la trace car avec ma lampe halogène je suis le mieux équipé de tous. La souris prend ma trace et nous commençons à prendre un petit rythme de croisière. Je descends très doucement, d’abord pour ne pas distancer la souris et aussi parce que le balisage est bien présent mais il faut y faire bien attention. Au fil des km, la pente devient moins raide et nous rejoignons une belle piste foerstière où nous pourrions courir sans problème, même frontale éteinte tant le chemin et facile à suivre et que la lune nous éclaire. Nous avons été rejoint par un concurrent qui trouve nitre rythme tout à fait à sa convenance et qui souhaite finir la descente avec nous et abandonner au prochain ravito. La souris papote avec lui, car il a aussi fait le marathon des sables au printemps, mais tout ces papotages font que le rythme s’est bigrement ralenti et que j’ai des fourmis dans les jambes. J’essaie bien de remettre mes 2 compagnons à trottiner mais je sens bien que le cœur n’y est pas et que la souris commence à être moins bien. Mais, hors de question de la laisser là toute seule. La descente n’en fini pas ! Il nous faudra finalement 4 heures pour rejoindre le dernier ravito.

En entrant dans la salle du ravito, j’ai un choc : je vois mon dingo et ma libellule, attablés et qui ont sorti le saucisson et la soupe (manque plus que le kil de rouge !). Ils ont l’air complètement explosé. Le dingo a la même tête qu’à la fin de la saintélyon et la libellule à le même air « à l’ouest » qu’au raid 28 ! M’enfin, qu’est ce qu’il font là ces 2 là ? Je les pensais beaucoup plus loin ou pire ayant abandonné, mais je ne pensais pas pouvoir revenir sur eux, car après 30 bornes, Accunamatata m’avait dit que le dingo avait 45’ d’avance sur moi ? En fait, ils étaient pas si loin devant ! A ce ravito, je suis partagé entre plusieurs sentiments. Personnellement je voudrais en finir au plus vite et ne m’arrêter que le temps de faire le plein de ma poche à eau qui est à sec depuis un bon moment car je ne pensais pas que l’on mettrait aussi longtemps à descendre, mais vu le regroupement de zanimal, je me dis que c’est pas sport de la jouer en solo. D’autant plus que les 3 compères ne sont pas au mieux. La souris montre des signes de fatigue évident et la libellule et le dingo ont bien l’intention de repartir mais coooool ! J’hésite, j’y vais, j’y vais pas ! Finalement je décide de les attendre. Avec le recul, je me rends compte que c’était une connerie. D’abord parce que cet arrêt prolongé m’a littéralement coupé dans mon effort. Ensuite parce que j’ai bousculé tout le monde pour repartir alors que le dingo et surtout la souris auraient bien mieux fait de se reposer un peu plus. Et ensuite parce que je n’ai pas du tout le même rythme de progression que mes 3 compagnons de route, eux sont assez régulier, moi je progresse par à coup : lent et avec des pauses en montée mais plus rapide en descente et sur le plat.

Il est 2 heures du mat environ et nous voilà reparti pour les 20 derniers km, sans grosses difficultés apparentes….mais apparente seulement ! Dès la sortie du village, je sens que je suis pas bien. Je suis froid, plus du tout dans le rythme, j’ai à nouveau mal à la tête et j’ai mal partout, j’ai des crampes et les tendons qui sont très durs ! Je retarde le groupe. J’ai beau leur demandé de ne pas m’attendre, je sens bien qu’il se retourne pour voir où j’en suis. Cela part d’un bon sentiment de leur part, mais ça m’agace d’être le boulet. A ce moment, coup de fil du papy qui m’apprend avoir abandonné, que le troll, le gé et le festnoz sont bien arrivés. Le festnoz me donnent quelques tuyaux sur la fin du parcours. Ce coup de fil m’a fait du bien et je suis à nouveau dans la course. Mais mes trois camarades de jeux sont toujours sur leur rythme pépère alors que j’ai à nouveau des fourmis dans les jambes. Mais maintenant, je ne me sens pas de partir seul. Le parcours jusqu’à Berthemont se fait en sous-bois sur un chemin escarpé, très casse-gueule et surtout très…chiant. Ce sera le seul passage que je n’aurais pas apprécié, mais la fatigue et la nuit y sont sûrement pour beaucoup. Enfin le village ! Il reste une dernière bosse de 400m de D+ à se taper. Je sais que je suis le plus lent donc je pars devant pendant que les 3 autres font une petite pause technique. 10 minutes plus tard, ils me reprennent et me déposent logiquement, d’autant que la pente devient très raide avec des lacets très serrés. Maintenant, je sais comment gérer ce genre de montée. Il faut que je fasse des petits pas réguliers et que je fasse des pauses fréquentes avant d’être trop essoufflé. Le jour se lève, j’éteins ma frontale pour la deuxième fois de la course, drôle de sensation ! J’arrive relativement frais au sommet, mais alors que je m’apprête à basculer dans la descente pour foncer retrouver mes 3 zanimos, je suis surpris de les voir encore assis à bouffer des pâtes de fruits ! M’enfin, c’est une manie ;-)
Mais cette fois, je ne veux pas faire l’erreur de tout à l’heure, et je m’élance tout de suite dans la descente : « qui m’aime me suive ! » me dis-je en moi-même. Je regarde rapidement les réactions, bof ! Pas un grand enthousiasme ! Tant pis, je fonce. Je n’ai qu’une hâte, c’est de rentrer. Le bénévole nous annonce 2 heures de route, il ne m’en faudra…qu’1 ! L’odeur de l’écurie sans doute ! J’ai quelques remords à laisser mes 3 compagnons, mais je sais que la souris est entre bonnes mains, et je ne veux pas finir en marchant. Et puis j’ai aussi besoin de vivre ces derniers moments seuls dans ma bulle. Autant j’adore courir en équipe, autant cette course là, j’avais besoin de me retrouver seul à ce moment là ! Difficile à expliquer comme ça ! Je fais donc la descente « à bloc », ce qui me laisse à penser que j’ai encore quelques réserves. A 500 m de l’arrivée, coup de fil du papy qui a du sentir le coup. Je lui dit qu’il peut prévenir les journalistes et que j’arrive ;-))) J’effectue les 100 derniers mètres de descente dans le village sur un nuage ! J’ai plus mal nul part. Je franchi la ligne en 27H20 à mon chrono, heu-reux !

Papy est là, pas rasé bien sur ;-) Le fest’noz aussi ! sympa les gars d’être là ! Merci à toi mon papynou pour tous tes bons conseils. Je me rappelle encore notre discussion pendant le raid 28, où lorsque je te demandais si tu pensais que j’étais capable de faire le Mercantour, tu me répondais franchement que ce ne serait pas si simple et qu’il faudrait avant tout que je gère ma course. Toujours à la limite des barrières horaires, sans me mettre trop de pression non plus. Tout un subtil dosage entre la vitesse de progression et la gestion de la fatigue. Et j’avais bien perçu cette délicate notion à la lecture de Crs sur des ultra du même type (je pense à l’UTMB du bourrin notamment).Une fois la ligne franchi, j’ai une boule au fond de la gorge qui m’empêche de dire « merci » au bénévole qui me donne ma polaire cadeau ! La joie est intense mais elle est interne. En fait, jamais je n’ai pensé que je n’y arriverais pas. Je suis juste content d’avoir concrétiser mon objectif ! Et ce résultat me paraît presque normal ! Attention, je ne voudrais pas que ces propos soient interpréter comme de la suffisance ou de la prétention, mais c’est juste le sentiment que j’ai eu à ce moment là. Et puis, il y a aussi le fait que ça fait déjà quelques heures que j’ai eu le temps de m’habituer à l’idée que j’allais finir ! Dans la zone d’arrivée, je suis assez « hystéro » ! Je m’en rend bien compte, mais impossible de m’empêcher de parler et de parler ;-)) Le papy et le fest’noz m’écoutent pourtant bien patiemment refaire la course ;-)) Le temps de mettre une tenue sèche et de me sustenter et j’assiste à l’arrivée main dans la main des 3 autres zanimos : vous étiez beaux ! bravo à vous ! Il ne manque plus que l’électron à l’appel. La dernière fois que je l’ai vu, c’était au relais des merveilles et il devait repartir avec un autre Ufo. Personne n’a de nouvelle, mais il ne figure pas sur la liste des abandons, donc attendons. Après une bonne platée de polenta et un p’tit verre de rouge (waouh ! ça faisait longtemps) je me sens bien rassasié, mais les jambes sont très très dures. J’attends, mais je n’ai qu’une seule envie, c’est d’aller me doucher. Il est 9h30, plus que 30’ avant la fermeture de la course, je décide donc d’attendre encore et qui voilà : « l’électron » qui arrive avec le serre-file ! je suis bien content pour lui, bravo camarade ! tu vois quand la tête veut, les genoux n’ont qu’à bien se tenir ;-)

Reste maintenant le plus difficile : descendre la pente qui va jusqu’au camping ;-) Les cuisses sont froide et ça fait très mal ! Une bonne douche et me voilà presque en pleine forme. Je commence mon petit rangement, papote avec l’électron qui est venu aux nouvelles et j’écoute enfin tranquillement tous les messages que j’ai reçu, merci encore à tous et tout à coup : extinction des feux ! je m’écroule dans ma tente ! 30’ plus tard je suis réveillé par des douleurs dans les cuisses, mais pas des crampes, des espèces de paresthésies, c’est bizarre, j’ai jamais eu ça ?! A mon réveil, le camp de base est en piteux états, la libellule et la souris sont explosés et dorment du sommeil du juste. Le troll a filé vers Paris car il avait un avion de bonne heure et on est sans nouvelles du dingo que l’on soupçonne s’être attardé à l’apéro qui suivait la remise des prix ;-)

Les meilleurs choses ont une fin, on remplit donc à nouveau la dingomobile. Le dingo montrant des signes de fatigues évident, je prends le volant pour finir le trajet. Ça a roupillé sec dans la voiture au retour ! encore quelques moments ensemble partagé autour d’un coca et d’une salade au quick et mon avion décolle ! au revoir les copains ! c’étaient bien…
Dans l’avion, je retrouve comme à l’aller, des concurrents, dont un qui m’a reconnu à mon t-shirt kikourou ! C’est plus facile de les différencier des autres passagers qu’à l’aller, surtout quand il s’agit de descendre la passerelle ;-) rigolo la démarche, penchée en avant, les mains bien en appui sur les rambardes ;-)) Ce sont des rennais, dommage, ça aurait pu me faire d’autres copains CAPiste sur Nantes.

Arrivée à la maison, juste à temps pour le repas dominical du soir : « bonne fête papa » ! ah oui, c’est vrai, c’était la fête des pères. J’ai droit à de jolis cadeaux, mais cette année, une fois n’est pas coutume, c’est moi qui me suis fait le plus beau !!!!

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Bien amicalement
La tortue
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PS : Les photos sont là :
http://www.djbabass.com/singapore-0.9.11/index.php?gallery=./espace

Dommage, pendant la nuit, avec la fatigue et le manque de lucidité, je n’ai plus pensé à sortir l’appareil photo. A l’arrivée non plus, j’ai complètement oublié, tellement euphorique ! Heureusement que le papy était là avec son appareil !
Normalement, le lien vous amène directement sur la page de mes photos. Si vous arrivez sur la page d’accueil et que l’on vous demande un mot de passe, vous pouvez quand même vous connecter via « log as guest ». Bonne lecture à tou(te)s.



5 commentaires

Commentaire de joy posté le 21-06-2005 à 08:04:00

Un grand bravo de la part de la JOY familia tiens et puis j en rajoute un autre ENCORE BRAVOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOO!!!
A+ et bon retablissement.
Salutations
JOY

Commentaire de joy posté le 21-06-2005 à 09:46:00

Et un grand merci pour tes fotosssssss avec des commentaires tres marrants MDR.
A bientot de faire connaisssance de + cette annee je suis inscrit sur l UTMB et ton cr me donne vraiment d y etre.
A+
Salutations
JOY

Commentaire de akunamatata posté le 23-06-2005 à 10:50:00

Super CR La tortue, j'ai vecu la course de l'exterieur (en tant que spectateur) et vu l'état des coureurs à chaque checkpoint accessible en voiture, c'etait vraiment une sacrée aventure!

Akunamatata

Commentaire de L'Dingo posté le 11-06-2009 à 10:35:00

Je viens de relire ce CR , 4 ans après.
Les photos ne fonctionnent pas , mais toutes les images de cette aventure ressurgissent avec facilité. Quel grand moment ce fut. Une des premières qui allait nous embarquer dans une suite de courses toujours plus folles. :-)))
Vivement le pélerinage aux sources dans 10j.
On prend les memes (presque car la Tortue fera du vélo à l'ardéchoise) et on recommence. La pression monte !!! Yessss!!!!

Commentaire de ouster posté le 10-08-2011 à 23:29:09

Quelques semaines avant mon UTMB ce récit est rassurant :-)

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