Récit de la course : Saintélyon 2008, par kailasa

L'auteur : kailasa

La course : Saintélyon

Date : 7/12/2008

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 4214 vues

Distance : 69km

Objectif : Pas d'objectif

5 commentaires

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Le récit

 

« La Saintélyon ? Courir 70 bornes, dont 40 sur route, et de nuit qui plus est ? En décembre, en plus, au tout début de la saison de ski !!! Mais ça va pas, non ? »

Telle était à peu près ma réponse à la question : « tu fais la Saintélyon ? »

 

14/11/2008 : une collègue de boulot me dit qu’elle fait cette course. Ce doit-être la vingtième personne qui me dit y participer. Et pour la vingtième fois, j’assure qu’il est hors de question que j’y participe.

15/11/2008 : Je prépare le calendrier de ma saison 2009. CCC au programme, si je passe au tirage au sort. Une petit tour sur le site de l’UTMB. Et quoi !!! Que vois-je ? Il faut une course qualificative estampillée 2008 pour prétendre y participer ! Et je n’ai pas ce point ! Coup de tête, 10 minutes après, je suis inscrit à la STL. Il reste 3 semaines avant la course. Ne dit-on pas qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ? Bon, ben, me voilà rassuré…

 

Entrainement : 175 kilomètres en 9 jours, suivis bien entendu d’une bonne vieille douleur derrière le genou. Je lève le pied la semaine qui suit,  participe quand même au Festitrail à Autrans, et la dernière semaine, je ne fais qu’une petite sortie.

 

6/12/08, 22h : Parc des expositions de Saint-Etienne : je reviens de l’AAB, qui m’a permis de rencontrer quelques kikoureurs de différents horizons. Sympa. Je m’installe avec michael11 et ses collègues de club.

L’attente est longue, impossible de dormir, je n’ai pas vraiment envie de me poser, donc je me balade un peu dans le hall, discute, bref je m’occupe. Puis vient le temps des choix : et ça papote fringue : « et toi, tu mets quoi ?  Moi, je mets ça. Houlala, tu vas avoir trop chaud, mon gars ! T’es fou, ou quoi ? Tu vas avoir trop froid ! ».

Sur les conseils de l’un des collègues de Michael (merci à lui), j’opte finalement pour deux couches, un maillot technique ski de fond en première couche, et un windstopper (bon choix). Booster (satisfait, pas de crampes). Vieilles chaussures de route (une paire plus récente avec davantage d’amorti aurait été un bien meilleur choix). Porte bidon 2 gourdes, l’une avec produit énergétique, l’autre eau (bon choix). Bonnet. Frontale (et une de rechange). Pas de gant. 8 gels et deux barres de céréales (bien supportés). La couv’ de survie. Et mon téléphone portable.

Voilà le bonhomme prêt à affronter la nuit.

 

L’objectif, au départ, est de terminer. Etre en dessous des 7 heures me satisferait pleinement. Je veux éviter les bouchons, donc je me rends très tôt sur la ligne de départ. Et c’est reparti pour ¾ d’heure d’attente.

 

J’ai un peu peur de ce départ à froid, sans échauffement, au milieu de la nuit. Je pars assez vite quand même. Et je trouve très agréable ces premiers kilomètres, sur bitume courus à environ 14-15 km/h. Le peloton s’étire, la tête de course s’éloigne déjà au loin. Et puis, on sort des zones éclairées, on commence à trouver les chemins, on commence à monter.

Et je ressens alors tout le charme de cette course.

D’abord, la beauté de la nuit illuminée par des centaines de lucioles. Puis sur les  premières hauteurs, derrière nous, les lumières de Saint Etienne ; puis en fin de parcours, ce sera la vision féérique des lumières de Lyon.

Ensuite, courir de nuit, c’est courir dans sa bulle, il n’y a rien, on est face à soi même, face à sa souffrance, et c’est une sensation assez unique.

C’est aussi le « plaisir » de courir à la frontale, où l’espace se limite à ce seul halo de lumière dans lequel il faut décrypter les pièges du terrain : ornières, trous, racines, boue.

C’est la volonté de traverser la nuit.

C’est le plaisir de courir différemment, tout simplement.

 

La course en elle-même :

Les 8 premiers kilomètres sont avalés rapidement, sur bitume. Puis sur les premiers chemins, le but est de conserver un bon rythme en évitant de se  « faire » une cheville. Le premier ravito arrive très vite, j’y passe en 1h15 (j’entends au passage que les premiers sont passés en 1h02). Les sensations sont bonnes, je réévalue mon ambition à la hausse, les 6h30 semblent jouables. Jusqu’à Sainte Catherine, le terrain me convient plutôt bien, des chemins, plutôt glissants (une petite chute quand même, il aurait été dommage de s’en priver), avec des montées et des petites descentes, tout se passe en courant. Je suis toujours bien (trop peut-être). Je fais attention dans la descente de Sainte Catherine (j’ai lu dans des forums qu’elle était piégeuse, et effectivement, elle l’est). Je me fais doubler par plusieurs concurrents. Je suis 50eme au bas de la descente (kilomètre 28. Remarque : dans ce cr, tous les classements que je donne aux différents points de contrôle, je ne les connaîtrais qu’à la consultation des résultats, je n’en ai pas connaissance pendant la course).

La montée qui suit, je double quelques concurrents mais… je commence à fléchir. Une première longue descente vers le ravito de Saint genoux (kilomètre 36) réveille des douleurs derrière mon genou (normal vu  le nom du ravito ; facile, je sais) et surtout aux pieds (j’ai de vieilles chaussures, quelle erreur, ça tape fort à chaque foulée). Ca reste toutefois supportable.

Encore une montée, je me force à courir. Mais très vite, ça ne va plus du tout ; et dans le début de la grande descente  qui suit (presque 8 kilomètres, une grande partie  sur route), je n’avance plus, un petit 10 km/h, et encore. Je m’arrête  une trentaine de secondes pour… je ne sais pas en fait, mais fallait que je m’arrête. En repartant, ça va un petit peu mieux… Je me fais doubler par un petit groupe, et je m’oblige à m’accrocher à eux. Je savais qu’il y aurait des moments difficiles, qu’il faudrait les gérer… On y est… Je n’ai plus de jambes, j’ai les pieds très très douloureux.  Je m’accroche et serre les dents. 

Au 3eme point de contrôle à Soucieu en Jarrest (kilomètre 44), je suis 83eme en un peu moins de 4 heures. Les 6h20 nécessaires pour obtenir le titre honorifique de Saintélyon d’or sont jouables. Je me sens à nouveau un peu mieux. Je me fais même une dizaine de kilomètres un peu euphoriques, je double à nouveau quelques concurrents, je suis à l’attaque. Quelques bonnes montées encore, dont une bien boueuse, à la sortie d’un parc, et on rejoint le ravito de Beaunant (kilomètre 57). « Vous êtes dans les 100 premiers ». Durant la course, c’est la première fois que j'ai une info sur mon classement. Allez, faut que je reste dans le top 100 ! A ce ravito, certains ont vraiment l’air mal en point ; pour ma part, je ne m’attarde pas…

Plusieurs personnes m’avaient parlé de la dernière montée : « quand tu y seras, tu la reconnaitras ». Effectivement. Même pas envie d’essayer de courir. Des relais me doublent eux en courant. Dur pour le moral. Sur le haut, je me remets à courir, je ne vais pas bien vite, mais j'avance..

On est à moins de 10 kilomètres de l’arrivée, on bascule vers Lyon. Un concurrent me dit : « c’est fini, que de la descente et du plat ». Mon objectif temps est encore à la hausse, je vise maintenant moins de 6 heures.

Je passe le panneau d’entrée de « Lyon ». On descend vers le centre ville par des petites ruelles sinueuses. Et là, à moins de 6-7 kilomètres de l’arrivée, le MUR. D’un coup. Rien vu arrivé. Plus de jambes. Des nausées. La fatigue. Je passe le panneau « Arrivée 5 kilomètres » en 5h35. Du 12 km/h donc pour faire moins de 6 heures. Jouable mais…

 

Le paragraphe qui suit est, je préfère vous avertir, un petit peu « macho »…

Petite explication d’abord : ca fait à peu près un an et demi que je n’ai pas terminé une course derrière une féminine (la dernière fois, c’était derrière C.Favre lors du championnat du Canigou 2007). Donc, c’est un petit challenge perso… Et là… Alors que je suis au plus mal, à moins de 5 kilomètres de l’arrivée, je me fais doubler par une féminine. Réflexe : je m’accroche. Un contrôleur lui dit : « deuxième féminine ». Gloups. Elles sont donc deux devant moi… Houlala… Mon challenge est en train d’en prendre un sacré coup. Derniers soubresauts du mâle blessé : je m’accroche, je la dépasse, prends une dizaine de mètres d’avance et… J’explose !!! Je suis CUIT… J’ai un point de coté.  Le long des quais rejoignant Gerland, elle s’éloigne inexorablement, d’une foulée facile et élégante,  tandis que je m’effondre lamentablement, piochant et couinant à chaque pas.  Continuons dans le pathétique… Ces derniers kilomètres sont interminables, je me fais doubler encore et encore (heureusement, il y a quelques relais dans le tas). Et le dernier objectif des 6 heures s’envole alors que j’aperçois au loin le palais des sports.

Traversée du parc de Gerland, et c’est la dernière ligne droite, 100m, 75, 50, 25 (c’est long 100 mètres) et entrée dans la chaleur et le brouhaha du palais des sports. Content de terminer, en 06h03mn49s, 79eme place.

 

L’après course est à l’image de l’avant course : manger, attendre des connaissances qui en terminent, et quelques sympathiques rencontres.

 

Le bilan : assez paradoxal. J’étais venu pour terminer, pour faire moins de 7 heures, et j’explose ce chrono. Pourtant, je suis un peu déçu, descendre sous les 6 heures était largement jouable. Et quand je vois le temps que je perds dans les descentes sur route et dans le final, je me dis qu’il y a moyen de gagner facilement 15 minutes sur ce parcours.

J’ai de toute manière beaucoup appris en participant à cette course.

 

Un petit mot sur la course : rien à dire, super organisation. A faire. Plus adaptée selon moi aux routiers qu’aux trailers.

 

Et le plus important dans tout ça : mes deux petites princesses ont été fières de voir leur papa franchir la ligne d’arrivée dès leur réveil grâce aux vidéos de la course…

 

Une fois n’est pas coutume, quelques remerciements : d’abord pour les messages d’encouragement d’avant course. Puis un gros gros gros merci pour tous les petits messages de soutien pendant la course…

      



       

5 commentaires

Commentaire de patcap21 posté le 11-12-2008 à 23:47:00

Félicitations pour ta course et merci pour le Cr.

Bonne récup

@++ Pat

Commentaire de BOUK honte-du-sport posté le 12-12-2008 à 00:22:00

Salut Eric,
Quel récit, j'ai vraiment pris plaisir à te lire !
Nous avions prévu de courir la version en duo mais on a du déclarer forfait.
Une chose reste certaine, la version "solo" parait vraiment dure, très dure... qui plus est au rythme que tu as imprimé !
En tout cas félicitations, magnifique performance sur une course hors normes !!!

Commentaire de intuitiv posté le 12-12-2008 à 12:27:00

purée mais quandj'en serait a ce niveau. super bravo

Commentaire de agnès78 posté le 12-12-2008 à 12:29:00

très contente de t'avoir rencontré... msieur le macho ;-))))) Blague à part un grand bravo pour ta course au pied levé! Bonne récup maintenant.
A bientôt, bises
agnès

Commentaire de Matov posté le 18-12-2008 à 17:45:00

ma saintélyon ressemble beaucoup à la tienne. Je m'étais presque juré de ne pas faire cette course, puis mon frère qui allait y participer m'a finalement convaincu.
Je visais aussi 7h environ. Je suis parti très vite et j'ai flanché vers St Genoux. Par contre, la deuxième féminine m'a dépassé au ravito de Soucieux. Là aussi j'en ai pris un peu au moral. Finalement j'ai fait un chrono largement meilleur que celui escompté, en manquant cependant la sainté d'or de deux minutes. Moi aussi en modérant un peu mon rythme je pense que j'aurais pu gagner peut être 10 minutes.
Merci pour ton CR dans lequel je me retrouve bien...

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