Récit de la course : Trail d'Ecouves - 61 km 2007, par Mustang

L'auteur : Mustang

La course : Trail d'Ecouves - 61 km

Date : 3/6/2007

Lieu : Radon (Orne)

Affichage : 4001 vues

Distance : 61km

Matos : GPS forrunner205

Objectif : Pas d'objectif

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Trail d'Ecouves et du pays d'Alençon

Quelle est verte, ma forêt !

 

Dimanche 3 juin, voilà c’est enfin le grand jour. Lever  6 heures. Pour  une fois, j’ai bien dormi une veille de course. Faut dire que je suis  à domicile, c’est  un avantage, je semble  plus zen. Combien de  fois n’ai-je pas dormi  une veille de course ? Les  préparatifs s’enchaînent mais je suis quand  même  un peu à la bourre. 6h 30, voilà le Grand Sylvain qui descend de sa  nuit étoilée  avec Zabou. Eh oui, Mireille et moi avons eu la bonté d’âme de les  héberger. 7h 15, on enfourne  les sacs dans la voiture de Sylvain et en route pour  Radon, la capitale du trail  normand ! Radon est  la direction que  je  prends chaque dimanche matin. C’est un petit village adossé au massif d’Ecouves, à  quelques  kilomètres au nord d’Alençon et c’est  le  point de départ de  nos équipées dominicales à travers  la forêt. Certaines fois, nous sommes près d’une vingtaine  à nous élancer ainsi sous  la houlette de Christian qui a  le don de  nous emmener sur des  pistes  improbables et    la durée fixée de  la sortie est toujours  largement dépassée !!! Mais ce  jour, Christian va se contenter de  nous accompagner en VTT comme il le fait depuis quelques semaines à cause d’une blessure tenace.

7 h 30, arrivée sur zone ! Sylvain et  moi, nous  nous précipitons  pour retirer  nos dossards. Le site est  impressionnant: Claude Rouillé, Gérard Bansard et Marc Le Suquet, les  organisateurs de ce trail, ont bien fait  les choses. Retour  à la voiture  pour s’équiper. Sylvain va  partir  avec un camel-back, je  préfère  prendre  un double porte-bidon. Le fait d’aspirer au tuyau me met en apnée trop longtemps et perturbe ainsi mon rythme respiratoire. Je préfère m’envoyer des giclées d’eau dans  la  bouche en appuyant sur le bidon. Je  me badigeonne  les jambes avec  un répulsif contre  les tiques qui infestent la forêt. Les  copains font de  même. La  journée s’annonce  belle, mais avec une chaleur un peu  lourde. Vers  le  mitan de  la journée, dans  les  parties dégagées, cette chaleur va faire des dégâts. Je  m’équipe  avec mon MP3 et nous  nous dirigeons vers  le départ. Toute  la bande est  là ! Ce sont de grands saluts !! De grands éclats de rire. Simone arbore de  magnifiques cuisses rouges: l’effet malencontreux d’un gel chauffant mais c’est  une bonne occasion de  mettre  en boîte  l’une des  meilleures traileuses de  la région. Le  Lutin a prévu également de  sonoriser sa course avec un Ipod. Il a accroché à son maillot noir et jaune le  logo d’un site web de course  à pied ! Enfin, pas tout  à fait  le  logo. Il l’a détourné d’une  manière  plus leste avec son goût certain  pour la gaudriole. Jean-Marie  prend également  le départ, 3 semaines seulement après les 109 km du  trail du Ventoux. Il va encore  y laisser    la  peau de ses  plantes de  pieds ! Gérard est déjà au  micro, sur  le  podium. Il annonce 124 coureurs au départ, bien  mieux que  les 55 de  l’an dernier ! C’est vrai, à la  même date, j’avais emmené une  partie de  la bande en terre  bretonne, autour du lac de Guerlédan. Il est  parfois difficile de faire des choix dans  un calendrier chargé et puis  j’aime bien changer de terrain de  jeu !!! Quoiqu’il en soit, Gégé et son équipe ne  peuvent qu’être  heureux avec plus de 600 coureurs engagés sur les trois distances.  Sur  la  ligne de départ, les coureurs se  massent. Ce sont encore des grands saluts. C’est aussi l’occasion de rencontrer enfin quelques coureurs croisés sur  les forums d’Internet. La casquette rouge de Kikourou nous sert de signe de  ralliement ! Gérard  lance  le décompte !! Euh, je ne suis  pas  prêt. Je  n’ai pas calé mon MP3 au début !!Pendant que j’effectue mes réglages, le  peloton s’élance  pour  un tour d’honneur ! Attendez-moi !!! Tant  pis, j’attaque tout de suite avec ma chanson fétiche, L’autre bout du  monde, que  j’écoutais  l’an dernier autour du  golfe du Morbihan, celle qui m’a emmené au cœur de  la nuit jusqu’à Port-Crouesty. Je  pars sans trop d’appréhension. Il est vrai que je cours  dans ma forêt où j’ai déjà parcouru des  milliers de  kilomètres. Je connais  le  parcours. J’ai même  participé à son élaboration en  proposant quelques  passages  particuliers. Les reconnaissances  avaient été faites en janvier, sous  la neige !

Nous  finissons  notre tour d’honneur et empruntons un chemin qui d’emblée, en quelques  lacets, nous conduit sur  des  pentes  recouvertes de taillis. Je  n’ai pas trop décidé de  ma stratégie de course. Il en a été  plus  ou moins comme  ça  pour les trails que j’ai courus cette année. Mais je sais que  les  premiers  kilomètres de course vont  me donner  le tempo. Voilà deux ans, j’étais  parti très lentement. Là, cela semble  aller. Bon, je vais essayer de tenir à une  moyenne de 10 km à l’heure. Au carrefour du champ de tir, Yannick, le  meilleur traileur du pays d’Alençon est  là sur son VTT, en compagnie de Joël.  Ils sont comme Christian, au repos forcé ! C’est rageant de  ne  pouvoir courir à cause d’une blessure ! De place en place, je vais  les retrouver tout au long de  la matinée. Nous traversons  la route  pour  nous  nous engager dans  une voie étroite et boueuse où des branches de  genêt encombrent  le passage. Puis c’est  un des  nombreux  ruisseaux du massif  forestier qu’il faut  franchir. Bientôt, au km 2, va arriver un bon mur qui va calmer les  plus hardis !! Pas  bien  long mais raide. Histoire de  mettre le cœur au bord de  l’explosion. Lorsqu’on émerge de cette ravine, l’impression est celle  d’un noyé remontant  à la surface. Il faut quelques mètres  pour se redresser et reprendre souffle. La  piste s’engage dans  une  partie forestière où les résineux disputent  leur place  aux  feuillus. Les fougères, en quelques semaines, ont envahi le sous-bois. Le chemin est  souple, les  pluies de  la semaine  passée  ne  l’ont  pas détrempé. Les  oiseaux font entendre leur chant. Déjà, la file de coureurs s’est étirée. A cinquante mètres devant  moi, j’aperçois  le Lutin. Etonnant, nous  n’en sommes qu’au troisième  kilomètre. D’habitude, je le rattrape qu’au bout  du  vingtième ou trentième. Serait-il devenu plus sage ? Il est en compagnie d’Eric et de Sylvie qui commence  à  pencher la tête, mauvais signe. Mais le Lutin finira  fumant, le capot ouvert, au 47e  km, au bord des étangs de Fontenai ! Plus  loin, c’est au tour d’Allain que je  passe. Il m’a reconnu en entendant  ma respiration et s’est retourné en souriant. Allain, c’est notre gourou à tous, c’est celui qui nous a entraînés ailleurs, celui qui nous a fait découvrir d’autres  horizons. C’est un coureur d’une rare élégance. Il va à son rythme, calme  mais déterminé. Il finira comme  il a fini toutes ses courses. Je continue  la  mienne  par ce long chemin paisible. Ce sera  bien le seul de tout  le parcours. Autant  en profiter. Le soleil est au-dessus de  la cime des  arbres et donne à ce  matin une magnifique lumière d’été. Les taillis succèdent  à des futaies  plus  majestueuses. Le terrain se fait  plus  ingrat. Au passage de route des Chauvières, je retrouve  mes amis vététistes. Puis, c’est  une piste  où les fougères se font  plus envahissantes. Depuis quelques temps, je cours en compagnie d’un coureur d’Evreux, Didier. On entame la conversation. Nous parlons de  nos expériences, de  la course  des Tourbières, courue  la semaine dernière en Belgique, à laquelle des  amis, normands et wallons, ont  participé. C’est en Belgique, lors de  la Translorraine en avril dernier que j’ai rencontré les Coureurs Célestes. Ils  m’ont  particulièrement  impressionné par  leur état d’esprit, leur façon de voir la course  à  pied.

Nouvelle traversée de  route et c’est ensuite  un plongeon vers  un petit vallon encaissé. La descente est assez raide et se termine  par  le franchissement d’un ruisseau. Une courte  montée nous ramène ensuite sur  une grande allée sableuse. Quelques centaines de  mètres où les  appuis ne seront  pas sollicités. Et c’est tant  mieux  pour  les chevilles car  la suite du  programme  n’est  pas en leur faveur !  Jusqu’à maintenant, le fléchage est parfait. De la rue-balise tous  les dix  mètres, des flèches à chaque changement de  direction. Hop, justement, dans cette  belle allée descendante, il faut  obliquer à droite et emprunter un chemin défoncé  par  le débardage. Les  ornières sont remplies d’eau. Je suis sur une des parties que j’ai reconnues cet hiver avec l’équipe organisatrice. Les copains avaient demandé que  le circuit ne soit pas en permanence en sous-bois mais qu’il puisse  passer  en  lisière afin de  s’aérer et avoir des vues sur  une campagne bien bucolique en cette saison. Je rejoins Jean-François, un excellent crossman. En avril dernier, il a fait  une bien belle course  lors du trail de  la vallée de La Vère. Nous sommes hors sentier et  longeons  le fossé qui sépare  la forêt domaniale des  bois  privés. A ce  moment, je file  à droite du fossé alors que le tracé est à sa  gauche. Cela  ne change pas grand-chose ! Nouveau virage sur la droite, dans  un bois de  sapins. Il faut enjamber les branches qui ont été élaguées par  les bûcherons pour arriver sur  la  lisière. J’en suis  à 50 mn de course au 9e  kilomètre. Impression de calme à la vue des champs et des  prés. Une  légère  brume estompe en bleu les collines à  l’horizon. Après  une ferme, on quitte le chemin pour s’enfoncer dans  une sapinière et ensuite, on entame une montée dans  une coulée étroite qui nous conduit dans  les bois du Bouillon. Les parcelles traversées sont différentes, elles révèlent  la qualité des terrains. Dans cette  partie, il n’y a pas vraiment de  belles  futaies de chênes et de  hêtres, mais  plutôt des taillis, entrecoupés de sapinières où le  tapis d’aiguilles rend la  piste bien  moelleuse. Mais c’est la forêt ! Les fougères se sont déployées. Celles-ci, je  les vois d’un mauvais œil, sachant qu’elles  abritent  les tiques. Un copain a attrapé la maladie de Lyme à cause d’elles ! Les digitales rompent le camaïeu vert avec leurs corolles  roses. Sous la chaleur, la  forêt commence  à exhaler tous ses  parfums. Je cours toujours en compagnie de quelques coureurs. Au km 13, nous débouchons sur  une route que  nous traversons pour dégringoler dans  un petit ravin où coule une petite rivière. Les signaleurs font bien leur boulot et organisent  le passage de cette difficulté. Nous entrons ensuite dans le parc animalier. Bon, pas  de  lion ni de tigre, mais de  paisibles ruminants. Enfin, l’ami Wihl de normandiecourseapied  peut faire des clichés exotiques de coureurs sur fond de chameaux. J’aperçois à 50 m devant moi Jean-Marie, tout de rouge vêtu. Toujours en compagnie de Didier, je traverse  le parc. A sa sortie, je retrouve  les copains sur leur VTT. Toujours plaisir de voir des amis pour vous encourager. Nous repassons en forêt. Depuis quelques temps, j’ai les  intestins qui font des  nœuds. J’entreprends  un arrêt bienfaisant pour calmer tout ça. Je repars tout ragaillardi. Je  m’alimente et je bois  régulièrement. J’ai embarqué de  la crème de  marron, du nougat, de  la  pâte de fruit – je ne vais pas  y toucher- et du dextrose pour les coups de fouet. Après  mon arrêt, les copains que  j’avais en  ligne de  mire ont  pris  le  large. Sur  une allée, j’aperçois un coureur  portant  le maillot rouge de  l’UTMB 2006, un gars de St-Grégoire, de  l’Ile-et-Vilaine. Il s’inquiète quand je  lui demande son numéro de dossard car il ne le porte pas ! Je le rassure. Plus  loin, au  km 17, c’est Emmanuel que  je rejoins. Il  porte également  le maillot rouge du Mont-Blanc  Décidément, ils sont quelques-uns à être venus en Ecouves. Il n’est pas en forme. Ses intestins font des  siennes, me confie-t-il. Pourtant, c’est un gars solide; en août, il sera  présent à Chamonix  pour son 4e UTMB. Je le revois dans Bovines en train de  me remorquer  alors que j’étais  à la ramasse. Je  l’encourage mais je sais que  le  moral en prend un coup quand  les copains  vous  passent.

La course s’engage sur  une  nouvelle section. Celle-ci est nettement  plus accidentée que la  précédente. De courtes  montées succèdent à des descentes  par des chemins très techniques, envahis  par  la boue. Les appuis sont délicats, voire très délicats dans ces chemins défoncés, ravinés, envahis de  pierres. J’ai rejoint Jean-François que  je suis à quelques  mètres. Il me croit devant ! Il ne  m’a pas vu m’arrêter. Je le suis dans ses  pas . Il a  une foulée particulière. Enfin, chacun de nous  a la sienne,  a une attitude  particulière en course. C’est notre signature. Aussi, de  loin, il est aisé de reconnaître chacun d’entre  nous. Avant d’avoir vu le visage, on sait  à qui on a faire ! C’est épuisant de courir sur ce sentier défoncé. A plusieurs reprises, je manque de  m’étaler dans la boue.. J’en suis au 20e  km en 1h 54. J’arrive  à tenir  ma  moyenne. Nous sommes sur  les contreforts  nord du massif d’Ecouves. Ce sont des terrains  pauvres, le couvert  boisé est à l’avenant !  Une  allée  sableuse  offre  un court répit. On oblique  à gauche sur  une  pente raide. Je marche, mains sur  les  hanches. Jean-François court, je suis admiratif. Non, finalement, il marche. On repart dans  une sapinière. Je reprends de  la vitesse. On revient sur  l’allée de tout à  l’heure. Je suis  à la  hauteur de Jean-François. Il est dans  le rouge. Il abandonnera dans quelques  kilomètres. Je  me rendais pas compte, mais  la verrerie du Gast est vraiment  loin. On dégringole à droite  par  un méchant chemin.. Je comprends que  les copains  pistards du club ne veulent pas s’aventurer sur ce genre de terrain.  Enfin, c’est une habitude. Les réflexes sont acquis. Je  m’étonne parfois de  la  précision avec laquelle  je  place  mes  pieds sur ce terrain chaotique. De même, le dimanche,  quand je suis les copains sur ce genre de terrain, il y a quelque chose de  prodigieux  à suivre  leur progression. Cela tient du funambulisme ! Je débouche  sur  un espace herbeux  pour contourner un  étang puis c’est  une remontée dans  un pré vers  la verrerie du Gast, enfin ! J’entends  l’eau couler dans  le déversoir.  L’impression est superbe à ce  moment. Ce n’est pas  un pré  mais  une  pelouse  bien tondue avec des  pommiers, sous  un soleil radieux. Il y a comme  ça des moments  magiques, celui-ci est en un ! La route  à traverser et c’est le ravitaillement au 27e  km,  à la grille de  l’ancienne verrerie, maintenant dédiée aux chevaux. Je rejoins Jean-Marie qui se restaure. Ses  pieds  vont bien  mais  il a  les cuisses grosses. Je repars rapidement, un  petit  orchestre fait  le bœuf dans  le  parc, moment sympa ! Puis  j’aperçois  à nouveau Wilh, le  photographe. Je suis étonné, il ne s’est pas encore perdu !! Enfin, il fait beau aujourd’hui, à la différence de  la semaine dernière où il s’est fait copieusement rincer  avant les 10 km d’Argentan. La  piste contourne  les  prés  où paissent quelques chevaux. Le cheval est  un animal magnifique, j’apprécie  moins ceux qui  grimpent dessus. C’est plus  ou moins  un conflit d’ailleurs qu’il y a entre  les traileurs et les cavaliers en Ecouves. A la différence d’autres forêts, ici, les cavaliers font ce qu’ils veulent ! Chacun doit avoir sa  place en forêt, les coureurs, les  promeneurs, les vététistes et les cavaliers. Près de  la forêt  où je vivais avant de venir sur Alençon,  les cavaliers avaient  obligation de cheminer  l’un derrière  l’autre et d’utiliser qu’un côté du chemin afin  de laisser  l’autre partie de  la voie en bon état  pour  les autres usagers. Ici, nos centaures  labourent consciencieusement  toute  la  largeur des chemins, les transformant en hiver en véritables bourbiers  infâmes. Enfin, bref,  je contourne  le pré  pour ensuite  me diriger vers  le Signal d’Ecouves, le  plus  haut sommet de  l’ouest avec ses 417 m.  En attendant, je retrouve Christian et son VTT  qu’il laisse traîner  par-terre. C’est bien tentant de  l’enfourcher !!!Non, ce n’est  pas  un run-and-bike ! Après le  point culminant de  la course, la voie se faufile dans des buissons  pour déboucher dans  une sablière. Puis, c’est  une belle futaie, mais de nouveau,  une  parcelle en régénération. Cette forêt est  un vrai  patchwork ! J’en suis  à 2 h 58 de course à mi-parcours. Après  une descente, nous  obliquons sur la gauche pour  prendre  une sommière. Sur  la gauche, une coupe  à blanc  a laissé  la place  à un véritable  champ de digitales. Je croise les randonneurs.. Piste à gauche,  tiens Fred en rando ? Je le traite de fainéant ! C’est un bon coureur de 800. Il a eu  la mauvaise  idée de  quitter  le club pour celui de Pré-en-Pail. Voilà  le km32,  c’est vraiment  à ce moment que j’entre sur  mon territoire. A partir de  là, je connais chaque mètre du parcours  à venir. Mais  les 20 km à venir sont  les  plus difficiles. Les randonneurs  applaudissent les coureurs. Effectivement,  vu l’effectif au départ, je ne cours  pas seul. C’est appréciable. Combien de  fois  j’ai couru des trails en solitaire !!! J’aborde  mon passage  favori, celui du mercredi, quelque soit la saison. C’est un long dévers  montant qui domine  un vallon qu’on regagne quelques centaines de  mètres plus  loin. Habitué  à cet endroit, je  note cependant qu’il n’y a plus de rue-balise. Curieux, alors que depuis  le départ, la  piste est balisée comme  un cross ! Des imbéciles sont  passés  par là ! C’est vraiment dans  cet endroit que  j’ai un sentiment de  plénitude. Courir au fond de ce vallon,  le  long  de ce ruisselet me transporte. Enfin l’esprit seulement, car le corps est  là et il sait qu’il y a  un long dévers  montant qu’il l’attend.  Alors qu’il y a  trois semaines, je  l’avais  gravi gaillardement,  là, j’alterne la marche et le trottinement ! Enfin en haut, je sais que j’ai environ un kilomètre  pour  me reprendre avant  la grosse difficulté du parcours. Je traverse Pierre-Chien, une zone de ronces et de  houx, je contourne  une barre rocheuse avant de  dévaler vers la Briante. Profil bas, c’est  moi qui  ai initié cette  partie du parcours. Après  la route  où Claude, le facteur,  fait son office de signaleur, il s’agit d’entamer une bonne  grimpette qui amène au pied d’une falaise. Les cuisses supplient et  le coeur s’emballe. C’est impressionnant  lorsqu’on est  au pied de cette grande  barre  rocheuse. Des  gens  se sont  installés pour  le spectacle ! Mais  il s’agit de  la franchir ! Là, sur  la gauche  une voie raide, très raide entre  les rochers. C’est une cheminée d’une dizaine de  mètres. Il faut  mettre  les  mains. C’est un véritable explose-cœur ! J’en émerge épuisé, le cœur en chamade. Ensuite, après avoir longé  la falaise, c’est une  long faux-plat qui conduit au deuxième ravitaillement  installé au carrefour du Chêne au Verdier. Ma  moyenne  a  plongé. Petit  moment de déprime. C’est le  moment du doute, des  interrogations. Je  me retourne, Jean-Marie est sur  mes talons. J’arrive au ravitaillement. Eau puis coca, abricot sec et pain d’épice. Karina est  là en reportage  pour Orne-Hebdo, un hebdomadaire  local dont  Jean-Marie est le rédacteur en chef.  Photo avec  le patron !!! Et ça repart. Mollement. Surtout qu’il faut  emprunter  un vague chemin encaissé, encombré de  troncs  et de branches. Les quelques  instants de repos  pris au ravito sont vite dilapidés dans ce coupe-jambes ! Je regagne enfin la sommière d’Ecouflard. Je suis en petite vitesse. Je compte sur  la  longue descente vers  les étangs de Fontenai pour  me refaire  une santé.  On remonte encore. Bon, les  organisateurs, taquins, au lieu de nous faire  prendre  le bord de route sur 300 mètres  nous envoient sur  une terre défrichée et labourée, histoire d’entretenir  la souplesse des chevilles. Enfin, c’est cette  grande descente tant attendue. Je suis en compagnie de Didier et de Jean-Marie. Bonne  petite foulée  mais je  me suis connu plus vaillant.  Il y a deux ans, j’ étais en  bien meilleur état au  même endroit. Il faut dire que  mes 190 km de trails courus en avril dernier  m’ont bien entamé. Je savais depuis quelques semaines que  j’étais en forme descendante. Mais ce n’est quand  même  pas  la Bérézina. Il me reste  à gérer les 18 km restants. J’attaque la seconde descente quand je vois  à une centaine de  mètres sur  le chemin, Loulou au ralenti !!!Tranquillement, je reviens sur  lui. J’arrive à sa  hauteur et  lui mets  la  main sur  l’épaule. J’ai  l’impression de  le réveiller ! Il repart, fouetté dans son orgueil !!! Comment, se faire rattraper par  le Mustang, jamais ! Je  longe les étangs. Il  n’y a  plus de rue-balise. Les  imbéciles  ont encore frappé ! Pas de  problème pour ceux qui connaissent  le parcours, malheureusement,  la tête de course va se  laisser  piéger  par  un balisage pirate ! Le classement se fera sur  le tapis vert ! Quel gâchis ! La  piste remonte  mais  la  pente permet de courir. Une  nouvelle sommière  pour quelques  mètres. Des  grumes  gisent  là, au bord du chemin, incongrues dans cet  univers de verticalités.  A la suite de Loulou, de Didier et de  Jean-Marie, je vire  à droite en sous-bois  pour  gravir un raidillon, en marchant ! Combien de fois, avons-nous emprunté ce chemin ? Me sachant sur  le retour, je  m’attendais à être  plus vaillant comme d’habitude. Je suis  un peu déçu. C’est la  piste des Arcis  puis  j’emprunte un long cheminement dans  les  petits taillis de St-Nicolas-des-Bois. Après  une  bonne descente  sévère  vers le Frou,  la dernière difficulté m’attend. C’est  une  longue  montée en paliers de 600 m qui ramène au carrefour du Chêne au Verdier. L’été dernier, elle  me servait d’entraînement pour  l’UTMB avec  les bâtons. Là, ça sera sans bâtons, calmement !  Arrivée au carrefour  pour  le dernier ravitaillement : coca, abricot et pain d’épice. J’ai  l’esprit  un peu vide. J’essaie d’estimer mon temps de course. Je révise  à la baisse  mes  prévisions ! Maintenant, c’est  une  longue ligne droite de  2 km qui s’offre à moi. En  principe, elle est  propice  pour se remettre en selle. C’est  plutôt  moyen ! J’arrive au Vignage. Les  organisateurs  ne  nous  ont  pas fait  passer comme prévu par  le haut. Dommage, j’adore cet endroit. En toute saison, quelque soit le temps, la vue est  magnifique depuis les rochers. J’aime  m’y arrêter. C’est ma Joconde  à  moi ! Je franchis  une passerelle au-dessus de  la Briante. Puis ce sont quelques  marches  à gravir. L’ami Claude, le  patron du club de Champfrémont,  me tend  une  main charitable  pour  me  hisser sur  la route. Il me reste  plus que quelques  kilomètres !!! Je reprends le dessus. La connaissance du parcours  m’aide beaucoup psychologiquement  car  l’état de fatigue n’est pas brillant ! Un petit  mamelon à passer  puis  je débouche sur un chemin. Je  m’élance  pour franchir  le  petit fossé. Mauvaise réception, toujours est-il qu’une crampe me bloque. Douleur fulgurante quelques secondes. Je  me décontracte. C’est bon, je repars  mais j’avise  le  poste de secours  à quelques  mètres de  là. Je  le rejoins  pour  me faire masser  par  précaution. Une bonne embrocation et ça repart ! Mon esprit s’allège. Je sais que  je vais finir  à l’arrache mais ça va le faire !  Des concurrents du 33  me  passent. Ils  me félicitent et  m’encouragent. Cela fait chaud au cœur ! Voilà,  je suis sur  le chemin au-dessus du terrain de camping, tout en  montée. Serge, un VH1 de Pré-en-Pail, à son tour  me passe. L’an dernier, il était en tête du 33 mais, à deux  kilomètres de  l’arrivée, il s’est  perdu !! Il était finalement arrivé 3e, rageant ! J’en suis  à 6h de course avec 56 km ! C’est dur mais  je trottine. Le chemin fait encore quelques détours, histoire d’épuiser  les dernières forces. Oui, ça serait ballot de  rester sur la crête alors qu’il est  plus  plaisant de  nous faire descendre dans  un vallon pour remonter ensuite ! On va faire ce  petit  manège deux fois de suite dans  les  trois derniers  kilomètres pour bien vider  la  machine. Enfin, voici le carrefour des Chênes  à la Taverne. Oui, mais  la  bière  n’est pas servie  là ! Il ne  reste  plus qu’une  longue descente. Enfin, je  me motive et repars à bon rythme. Plus que 1 500 m, je file à bonne allure, sentant cependant des amorces de crampes dans  les  jambes et les cuisses. Les derniers  lacets, ceux empruntés au départ. J’entends  le speaker. Je  ne cours  plus, je cavale ! C’est grisant, cette  impression. Je  l’ai dit  par ailleurs, ce dernier  kilomètre est  le  plus exaltant, c’est  le sublime  kilomètre. Je débouche sur  la  prairie.  Les spectateurs  m’applaudissent, dernière  ligne droite… franchir  l’arche. Mireille, les amis  m’attendent… souffrance et bonheur mélangés !

 

 

 

5 commentaires

Commentaire de JLW posté le 05-08-2007 à 16:44:00

Sympa ton récit Mustang. On sent bien que c est ton terrain à toi, là ou tu t entraines. Par mon experience cela peut être piègeant aussi de trop connaitre un coin de course mais visiblement tu as bien géré ce trail qui semble assez difficile.
Par contre, pitié pour nos petits yeux de V1 (tres biento V2) un peu d aeration ds ton texte sublimera encore plus ta prose.

Commentaire de zakkarri posté le 06-08-2007 à 11:04:00

Waouh quelle course Mustang, même sans photos on imagine bien la beauté des paysages ... merci !
Pas mal de courir en musique !

A bientot et passe une bonne journée d'anniversaire !

zak.

Commentaire de Say posté le 07-08-2007 à 23:44:00

Salut!!


Eh ben ça c'est du CR! J'ai été obligé de l'imprimer pour mieux le lire. Que de détails, de senteurs, de couleurs dans ta forêt!

Merci pour ce moment de lecture.

Coli

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 23-08-2007 à 19:43:00

Enfin, ton CR sur Kikouroù !
Bravo pour la prose abondante et ce circuit exhaustif.
Pour répondre à ton interrogation, le Lutin ne sera jamais sage !
Semper Lutin semper kamikaze !

Commentaire de val14 posté le 04-06-2008 à 07:56:00

bravo pour ta course a+ sur une prochaine course

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