L'auteur : les machine-gônes
La course : L'Etoile des Saisies
Date : 25/3/2012
Lieu : Le Col Des Saisies (Savoie)
Affichage : 1680 vues
Distance : 42.195km
Matos : Des brosses crins et nylon, de la base, du HF et de la poudre. Du sang et de la sueur...
Objectif : Objectif majeur
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C’est la lutte finale ! Oh oui ! Car bien que sans diplôme FFS aucun, demain, la 3e étoile, ce sera peut-être la musaraigne elle-même, si elle finit en flèche. Elle aura l’occasion de graver son surnom au fronton du Hall of Fame des fondeuses. Elle y laissera peut-être son étrange empreinte à 5 griffes à condition, répétons-le, qu’elle ne manque pas la marche. L’Etoile des Saisies s’érige ainsi en juge de paix du Grand Prix des courses longue-distance 2012 et les machine-gônes, après avoir sillonné la France d’Est en Ouest, après avoir affronté la neige, le brouillard, les vents violents et le froid, la pluie, le blizzard et les saucisses pas cuites, les fartages ratés, l’adversité et les coups tordus de la concurrence, sont maintenant au pied de la Palette, pour tenter sur la fameuse double boucle chère à Raphael Poirée de préserver leur bien si durement acquis : une place d’honneur sur le podium !
La musaraigne s'emploie pour préserver son accessit !
A la veille de ce grand évènement, il faut réviser le parcours : départ depuis le stade de Biathlon, montée vers la Palette en mixant des passages de l’Explorer, de la Grande Aventure et de la Poirée. Beaucoup de forêt et surtout beaucoup de dénivelé. Là haut, petite virée pour admirer le Mont Blanc et redescente avec de multiples relances avant d’inaugurer un nouveau tracé sous la station en partant vers Bisanne, où il faudra manifester une bonne dextérité en pas tournants. Hummm. Une fois sous la station, on repique vers la rue principale, enneigée pour l’occasion, qu’on remonte jusqu’au col des Saisies, avant de rejoindre la porte du domaine nordique puis le stade qu’on regagne avant de repartir pour un second tour. Verredo accompagne les MG : dans sa tenue de Flash-Gordon, il pète la forme. Il a d’ailleurs lui aussi son projet secret : se payer la peau du muscardin pour se venger de toutes les humiliations subies au fil des courses. Hélas, Papy-cool-runner manque à l’appel : la saison a été un peu longue pour un fondeur de son expérience (c’est-à-dire de son âge) et après une transjurassienne pendant laquelle il a beaucoup donné, il aspire à un repos bien légitime.
En conséquence, le Team Zim a été sollicité en renfort pour faire office de coach sportif, coach mental et maître-paraffineur, tout à la fois, afin d’aider la musaraigne à conserver sa place au soleil.
Pour se faire une place au soleil, rien de tel que le Team Zim'
La journée du samedi est laborieuse et appliquée dans le chalet de fartage. Roland du team Zim ne laissant rien passer au Muscardin et à Verredo dans la préparation des planches. Ça brosse, ça racle, ça crayonne, ça fond, ça lisse et ça mélange les cires, ça soupoudre et ça re-brosse encore. Verredo a la lourde responsabilité de passer la dernière couche sous les skis de Musa. Tout ça, sous les coups de fouets, les réprimandes et les coups de gueule de l’impitoyable Roland. On attend désespérément Patrice (élément charismatique du team Zim), qui doit débarquer avec une structureuse professionnelle achetée pour l’occasion. Las, il arrivera trop tard ; on se débrouille donc avec les moyens du bord.
Lui, c'est le Wax Wizard de La Feclaz : les MG comptent sur lui !!!
Au soir, on divulgue la Start List : Coupat (1re) et Goley-Gaymond (2e) sont bien inscrites chez les femmes, mais apparemment pas Bernadette Roche (4e) ni Gaetane Perret (5e). Musa (3e) conservera-elle son accessit sans avoir à combattre ? Les autres filles accusent en effet trop de retard au classement général pour revenir sur elle… difficile d’imaginer un tel dénouement pourtant ! D’autant qu’il y a aussi une ombre au tableau côté MG : lors de la reconnaissance, la musaraigne a eu la confirmation qu’elle souffrait d’une contracture au niveau de l’adducteur et qu’elle ne pourrait pas forcer. Or la course, il faudra quand même la finir.
Les MG, perplexes, décident de se préparer sans rien changer à leur plan de course. Et la nuit s’écoule entre doutes et expectative.
Dimanche matin s’ouvre sur un grand ciel bleu et des températures clémentes. Il se pourrait que les MG aient farté un peu froid par rapport aux conditions du jour. C’est en tous cas ce que tout le monde se plaît à leur répéter pour essayer de leur saper le moral. Les clubs de toutes la France ont installé leur camionnette sur le parking du col et descendent par sections entière dans la cuvette du stade olympique pour s’installer derrière les lignes. Musa et Musca ont chacun la leur.
Le départ est brutal. Ça attaque très fort d’entrée pour bien négocier un goulot d’étranglement et la forte montée qui s’en suit. Le rétrécissement inaugural provoque cohue et confusion, laquelle sépare d’emblée les deux rongeurs.
Le MG se trouve ainsi totalement coupé de sa bienaimée et isolé de ses camarades. Après tout, c’est l’occasion de tout donner. Il décide de s’accrocher au wagon devant lui.
Pour lui, jamais une course n’aura semblé passer aussi vite. Pendant deux heures, son cœur de rongeur ne redescendra pas. Quelques encouragements au col pour l’avertir qu’il a Pat’ en ligne de mire, quelques instants dans une descente pour boire deux rasades et avaler une pâte d’amande. Le 2e tour à touche-touche avec Hervé Solignac, éminente figure des championnats du monde Masters. Une seule petite erreur sur les trottoirs à la neige poisseuse de l’avenue des JO, où il s’emmêle les pinceaux avec ses cannes, mais se rétablit bien. Une dernière montée de la colline avec le pouls qui s’emballe comme un métronome devenu fou. Et enfin un sprint titanesque sur le dernier faux-plat montant. 2h05 ! Le muscardin voit des étoiles. Maintenant il faut attendre.
Sur les trottoirs surchauffés, la neige tassée tourne mélasse, hélas...
Un truc le chiffonne en y repensant : dans la grande montée de l’Explorer, il y a une fille aux cheveux ondulés qui l’a déposé comme qui rigole. Ça serait pas Bernadette Roche par hasard ? La rivale la plus dangereuse de Musa, qui n’était pas sensée être là !!! Renseignements pris, c’est elle en effet ! Oubliée sur le listing mais bel et bien 4e de l’épreuve après Aurélie Dabudyk (Equipe de France), Elizabeth Coupat et Florence Golay-Geymond. La 5e et la 6e sont déjà arrivées elles aussi. La 7e se présente en 2h10. A peine le temps de faire des calculs : Musa conserve sa place sur le podium si elle finit moins de 10 positions derrière Bernadette, donc 13e au pire. Or la 8e et la 9e en terminent respectivement en 2h12 et 2h13.
Verredo est cul par dessus tête. Faut dire que la veille, il n'a pas tourné qu'à la compote bio... C'est pas en s'entraînant comme ça qu'il pourra se refaire une écharpe en poils de muscardin !
Thierry du Team Zim et Verredo se pointent presque en même temps. « Musa, elle est où ? Vous l’avez vu ? ». Ils disent qu’il y a eu un problème au départ. Quoi ? Une blessure ? Une chute ? La contracture devenue déchirure ? Réponse évasive : « elle est sûrement pas loin derrière ». Sam, un copain, arrive en 2h19, accompagnant la 10e féminine. Alors, et Musa ? « Blessée dès le départ, qu’il répond ! » Le muscardin s’étouffe ! « Commmmennnnnt çaaaaaaa ? ». « Elle a pris un coup de bâton dans le visage, qu’il explique, mais elle s’est relevée ! » « Ouf », fait le muscardin, tellement il est soulagé. Mais Sam reprend : « elle a le visage en sang ! ça lui a attrapé la lèvre comme un hameçon… elle avait pas l’air bien ! pas bien du tout ! ». Sur ce, voilà la 11e : c’est Stéphanie Robert des Crêtes du Forez en 2h23…
Pour la musaraigne : vue du départ au ras du sol...
Dès le début de la course, la musaraigne a senti que ce serait une journée difficile. A froid, la douleur dans la cuisse se fait déjà cruellement ressentir. A côté d’elle, Bernadette Roche qui est venue lui adresser quelques paroles amicales, le lui fait un peu oublier. Mais depuis sa 1ère ligne, elle le voit tout proche le goulet au bout du virage et sent dans sa nuque les furieux qui s’apprêtent à lui marcher dessus. Le coup de feu du départ précède de très peu le coup de cannes qui la renverse et lui fait voir son sang dans la neige. Elle a même l’impression que le choc lui a cassé une dent. Autour d’elles, se sont 36 chandelles. Elle se redresse péniblement, mais ne sait plus trop dans quel sens il faut aller. Tout près, ça braille et ça chahute. Comme un petit robot, elle redémarre. Fait ce qu’elle a appris à faire, suit celui qui est devant. Un pied après l’autre, un bâton dans la neige après l’autre, harponne, pousse et avance. Soulève un ski, glisse, puis soulève l’autre. Et quand il est temps de descendre, on laisse glisser. La douleur dans la cuisse, le feu laissé par la pointe en carbure dans la gencive, la fatigue et la lassitude qui l’étreignent. Tout cela prend fin en voyant la ligne d’arrivée. Le muscardin est là qui lève les bras au ciel. Il chante l’internationale. C’est fini. C’est tout bon. C’est gagné. A peine le temps de confier ses tourments, déjà on l’appelle sur le podium ! Même pas le temps d’enlever son dossard. Même pas le temps de remettre les skis à l’endroit. Et les douleurs qui s’évanouissent. Musa qui raconte le bonheur qu’elle a d’être là. Pour un peu, elle ferait un discours : « Sauvez les baleines ! Arrêtez le nucléaire ! Taxez les revenus du capital ! ».
On ne lui laisse pas en dire le quart du tiers ; seulement qu’elle est heureuse, que le GP s’écrit pour elle en lettres majuscules, et qu’elle voudrait ne rien faire d’autre dans la vie que du ski de fond. Puis arrivent Florence, Elizabeth, les bises, les podiums, les lauriers. Les flashs qui crépitent (ce qui est absurde vu le soleil qu’il y a).
Voilà, tu l'as réussie ta 3e étoile !
Sam fait remarquer qu'ils vont être contents au Risoux Club de Chaux Neuve. Z'ont bien fait finalement de prendre les belettes dans le Jura
Ensuite, c’est la fête ! Honneur Suprême : elle est portée en triomphe par le Team Zim ! C’est encore meilleur que d’être décorée par le Ché !!!
Kikoureurs et Team Zim' fraternisent. C'est aussi ça le team Zim' (c'est surtout ça, même).
Ah la la, et si c'est pas ça le Valhalla !!!
Musa : la première insectivore à inscrire son nom au palmares du GP !
5 commentaires
Commentaire de Arclusaz posté le 22-10-2012 à 20:43:40
Tout est bien qui finit bien !!!!
mais quel suspens, quel dénouement : le lecteur aura tremblé tout le long du récit se révoltant contre la cruelle injustice qui a frappé l'insectivorette.
Elle conserve, certes sa place sur le podium , mais surtout son joli sourire : et c'est bien là, l'essentiel !
Commentaire de Jean-Phi posté le 23-10-2012 à 08:58:57
Comment ? y a eu un problème ? Musa a perdu ? Meuhh non, elle termine superbement bien, avec le sourire (et une dent cassée ?) !
Quel sourire et quel talent (et de skieurs et de narrateurs) que ces MG ! Chapeau !
Commentaire de Byzance posté le 23-10-2012 à 20:34:42
Ben pour le coup, je trouve que ça manque un peu de spectaculaire ! Un grand Z fait au rouge à lèvre, au ketchup des saucisses pas cuites, ou au fart rouge ... sur la joue de la musaraigne aurait été un bon trucage en appui à cet excellent scénario.
Sinon, Raphaël Poirée, c'est Vassieux et pas les Saisies !!!
BRAVO
Commentaire de marat 3h00 ? posté le 24-10-2012 à 10:12:10
Ouf ! le dénouement arrive avant les premières neiges. Bravo pour les perf. plus qu'à faire la même chose en trail !
et merci pour les photos avant des vrais gros plans dedans !
Commentaire de yves_cool_runner posté le 27-10-2012 à 14:59:19
ELLE L'A FAIT
Les MG sont jeunes, beaux, forts et GRANDS PAR LE TALENT.
RESPECT
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