L'auteur : Zeb
La course : L'Ultr'Ardèche
Date : 12/5/2012
Lieu : Alboussiere (Ardèche)
Affichage : 1162 vues
Distance : 212km
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
(crédit photo *)
Cette terre, l’Ardèche, devait sans doute être habitée par des géants dans des temps plus anciens ; des géants haut de six mètres avec des bottes de sept lieues pour parcourir cette contrée brutalement verte et sauvage, tour à tour silencieuse et assourdissante du chant de ces multiples cours d’eau , tour à tour hostile au milieu de la nuit, et accueillante au petit matin .
Oui, des géants, forcément, car qui pour aller poser quelques pierres sèches ici et là et former des hameaux isolés au milieu de nulle part, noyés de brume et caressés par la Burle ?
Des bottes de sept lieux, s’est bien dont j’aurais besoin pour parcourir ces 212 km et 4200m de dénivelée en moins de 36 heures, moi, simple petit poucet au milieu de tous ces « géants » au palmarès plus impressionnant les uns que les autres. Surtout que le petit Poucet en question, il est plutôt du genre tennnnndu et mou du genou en ce moment, du genre petit Poucet qui fait pas trop le malin, hein ? Près de 3 ans que je prends des claques sur de « l’ultra long » : abandon Spartathlon 2009, abandon 24 heures de Roche la Molière 2010 et abandon 24 heures St Fons 2012 5 semaines avant l’Ultr’Ardèche, bref, du petit Poucet de compét’ quoi.
Donc, le décor est posé, un environnement à la hauteur de l’évènement, un casting de dingue, et un petit Poucet (un peu) rongé par le doute, mais qui a quand même décidé de tout faire pour boucler la boucle.
C’est un vrai « root’s movie » qui s’annonce, d’abord conjugué à la première personne du singulier puis à la seconde du pluriel, le « je » se fondant en « nous » et « on ».
Ce récit se voulait un peu chronologique, mais il se peut que ma mémoire me fasse
défaut et que j'ai un peu mélangé les lieux, la chronologie des évenements voir prêté - à tort- des propos à certaines personnes, si c'est le cas, je m'en excuse.
***1ère partie***
Départ à 6 heures du camping d’Alboussière en queue de peloton, leeeeentement, très lentement. Un gros 8km/h, à peine, même pas.
Surtout prendre son temps, profiter, regarder, absorber comme une éponge, faire le plein d’images et de sensations, pour plus tard, pour se souvenir. A ce petit jeu, après quelques échanges avec Guilhen (le fameux Oslo), je me retrouve vite seul à l’arrière, et cela me va plutôt bien ; pour l’instant ça grimpouille gentiment (dès la moindre bosse, je marche, bien évidement).
(au sommet du premier col, jusque là tout va bien!)
Je zappe le premier ravitaillement de Guiloc car je suis parti avec la poche à eau remplie d’1.5l (avec de l’Effinov menthe), et je liquiderais tout cela en 2h45 avant le second ravitaillement de Lamastre.
Justement Lamastre, je repars du ravito avec 2 L, (j’ai pas fais gaffe à la contenance de la bouteille que le bénévole à vidé dans ma poche à eau, c’est pas grave, je ne manquerais pas de liquide et je crois que sur cette course j’ai battu mon record perso « d’ arrêt-pissouille ») : on quitte le bitume pendant près de 30 km de faux plat montant jusqu’à St Martin ; cela a un petit côté trail qui me plait bien : vrai, il y a quelques cailloux, mais rien de bien méchant, le décor est somptueux, de nombreux ponts sont jetés ici ou là entre ces écrins de verdure .
(début de la voie ferrée désaffectée, on passe en mode "trail roulant", j'adore !!)
Je commence à remonter quelques coureurs qui n’ont pas l’air d’apprécier la nature du terrain et je fais un peu le « yoyo » avec quelques uns dont certains seront mes futurs compagnons de route jusqu’à l’arrivée, mais cela, nous ne le savons pas encore.
(sur un des nombreux ponts de la voie ferrée)
- Au ravito de Nonieres, on traverse un long tunnel, je ferais le trajet avec Mathieu (dossard 19), on, partagera notre loupiote dans ce puits d’obscurité puis c’est « Nicolas (gasgas) » qui nous rattrape (c’est un bénévole qui tient le ravito N°19 au km182) il fait les 114 premiers km en courant, mais un peu trop vite à mon goût et après avoir un peu discuté (de triathlon notamment et d’Embrun en particulier), je les laisse filer.
- Ravito du Cheylard : je passe assez rapidement, j’ai encore du liquide, question solide, aujourd’hui, je suis un vrai « canard » ou « cochon » , je boulotte de tout, du fromage, du saucisson, des chips en passant par des bonbons Haribo, le tout pas forcément dans cet ordre : tout est bon (dans le cochon) pour me faire avancer.
Je repars seul, il commence à faire bien chaud et lourd mais une bonne averse arrive à point nommé pour me rafraîchir la caboche (malheureusement assez courte), ce sont les derniers km sur la voie désaffectée, le chemin commence à s’élever, doucement mais surement.
(la Tot's connection : merci Mesdames !!)
- Ravito de St Martin : (remière barrière horaire – km 54)
Ici, je prends le temps de bien faire le plein car on va attaquer le début des hostilités avec le col de l’Ardéchoise (10 km de montée en direction de Borée) . Je fais le plein de la poche à eau et d’Effinov, et je mets de la poudre de perlimpinpin partout (elle est stockée dans des petits sacs ziploc, c’est pratique à transporter, mais un vrai been’s à transvaser dans la poche à eau) : une accompagnatrice a un peu pitié de moi et viens gentiment me donner un coup de main (c’est Alex, la femme de Tot, qui, je ne le sais pas encore, va bien m’aider dans les futurs km). Je prends le temps de manger des pâtes Bolino : à noter que sur chaque ravito, c’est un véritable banquet qui attend les coureurs et les accompagnateurs, jamais vu un truc pareil sur aucune autre course !
Pressé d’en découdre avec le premier vrai col, j’en oublie ma casquette au ravito, je m’en aperçois moins d’un km après le départ du ravito, mais j’ai vraiment la flemme de faire demi-tour, tant pis, il me reste mon buff pour me protéger du soleil qui est au zénith en ce moment et ça cogne un peu.
(bien sympa les panneaux tous les km)
Sur les premiers km d’ascension, je rattrape Manu Da Cunha, qui a l’air d’avoir un peu chaud, je suis un peu dans ma bulle, je passe mon chemin, je suis bientôt rejoins et déposé par un le dossard 90 (Domnin), qui, avec ses bâtons, court quasiment dans l’intégralité de la pente, il me fait halluciner ; à coté, j’ai l’impression de me traîner, seulement, il passe plus de temps que moi aux ravitos, donc je fini toujours par le rejoindre.
J’aime beaucoup cette montée du col de l’Ardéchoise, le temps passe très vite – non pas que je m’ennuie-, au grès des panneaux indiquant chaque km restant avant le sommet et le % de pente du km suivant : 3.3 % impecc’, je peux courir un peu, 5.5%, ça me va tout aussi bien, j’vais pouvoir largement marcher…
Le paysage se fait plus montagneux au fur et à mesure de la grimpette, à un moment donné, je crois que c’est peu après le ravito de bois Lantal, on traverse une petite forêt de sapins, dont la cime se rejoint au-dessus de la route : j’ai eu l’impression d’entrer dans une cathédrale, une cathédrale de verdure, j’ai trouvé tout cela très impressionnant, car j’étais seul à ce moment-là.
Le sommet du col de l’Ardéchoise (1184 m d’altitude) est là, j’ai quelques « flashs » qui me reviennent en mémoire, une roulotte rouge vif au milieu d’un champ, une maison sur la droite que l’on dirait toute droite issue de la « beat generation »…
Maintenant, du plat (un peu) et de la descente jusqu’à Borée. Et là, la descente me fait (déjà) mal aux cuisses, je ne la fait pas d’une traite, alternant course et marche, il reste encore plus de 140 km, donc prudence.
***2ème partie***
(Borée, la descente me fera bien mal aux cuissots)
- Ravito de Borée : je retrouve Katell Corn et Marc Heurtault ainsi que Fred (TOT) et Jean-Pierre (JP), les deux premiers repartent bien avant nous. Dans la descente qui suit le ravito, je laisse les 2 seconds (TOT et JP sont ensemble depuis le départ) me rattraper pour faire un bout avec eux ; en fait nous ne nous quitterons plus jusqu’à l’arrivée.
On se met alors à bavasser comme des pies, on parle de tout de rien, de la course, de la nuit, je ne vois plus le temps s’écouler, j’en oublierai même de boire et manger, j’en oublie mes premières douleurs aux cuisses ; à peine le temps d’y penser et le ravito du col de Clède est là.
La route s’élève encore, direction le pied du Mont Gerbier des Joncs, point culminant de notre balade ardéchoise, sur cette portion nous recroisons Manu Da Cunha , et Charles Payen qui apparemment, souffre de crampes (il vient de finir second à l’Ultra Trace de St Jacques derrière JJ.MOROS).
(point culminant de notre ballade)
La brume s’invite à proximité du Mont Gerbier (que nous ne verrons donc pas), ainsi que le froid. Au ravito, je récupère mon sac avec mes affaires……pour la nuit ; j’ai mal estimé ma progression et j’ai 2 heures d’avance sur mes prévisions qui étaient sans doute trèèèèès prudentes. Tot et Alex me proposent de prendre mes affaires dans leur véhicule, c’est bien sympa de leur part, et implicitement cela signifie aussi que je veux rester avec eux.
On ne s’attarde pas trop sur le ravito (je me souviens d’un cake au fruit fait maison ici, une « tuerie »), il fait vraiment froid, cependant, je n’enfile pas ma veste, car le profil qui suit est descendant et je vais vite me réchauffer.
Nous entamons notre descente, refaisons le « yoyo » avec la paire Katell Corne/Marc Heurtault et sommes rattrapés par un avion fluo, il s’agit de Philippe Favreau que connaissent bien Tot et JP, et hop, le groupe de « 4 » est formé ; bon c’est pas les 4 fantastiques, mais on avance pas mal, en faisant du « Cyrano » improvisé (« au muret, on marche, ? Ok….Hop, on recourt ? Ok….).
(l'occasion pour moi de souligner le balisage : discret, mais efficace pour peu qu'on léve la tête )
- Au ravito de Burzet (ravitaillement N°11), nous atteignons les 100km de course, en 12h45 de mémoire (à ce propos, aucun, mais alors aucun souvenir du ravito N°10) : avec Philippe, nous trinquons à la Heineken que je fais passer avec des Haribos (un vrai canard, j’vous dis).
A ce point, notre petit groupe de 4 va se renforcer avec le retour de Domnin (vous savez « l’avion » avec ses bâtons dans le col de l’Ardéchoise), et c’est donc un peloton de 5 coureurs qui amorce la longue descente vers St Pierre, prochaine barrière horaire, et véritable « départ » de la course.
Nous sommes en fin d’après- midi, au fur et à mesure que nous redescendons, la température remonte,
Nous descendons bien, sans doute un peu trop vite (entre 10 et 11 km/heure parfois), malgré tout (le vrai) Xavier Bertrand nous dépose dans la descente (lui aussi avec des bâtons) .
(on descend bien, sans doute un poil trop vite, mais bon....)
(ravito avant St Pierre : quelle galère ces rechargements de "poudre"...)
Cela fini par taper dans l’estomac de Tot, qui, discrètement (je ne m’en suis même pas aperçu), ira poser une petite pizza dans la nature. Nous allons donc un peu ralentir, il n’y a pas le feu au lac, hein ? (quelque chose comme 3 heures d’avance sur la barrière horaire), on est bien là, Tintin, non ? Ça me fait penser un peu à la Grèce, les odeurs de vigne en moins.
- Ravito de St Pierre – Km 114 : ( 2 ème barrière horaire) : il doit être 20h15
Nous sommes donc laaaargement dans les clous pour finir dans les 36 heures (qui est l’objectif de notre groupe). Nous prenons notre temps pour profiter du bon plat de pâtes concocté par Michel Codet et son épouse. Le ravito est à l’abri dans une petite salle, je mange puis me change pour la nuit (veste fluo + frontale). On fait le point sur la situation : ma foi, je nous trouve plutôt gaillard, et c’est tant mieux car, il nous reste moins de 2 heures de jour et les montagnes russes sont au programme pour la nuit.
Après pas loin d’une demi-heure de pose, hop, c’est reparti en marche active (on récupère au passage la doublette Katell/Marc partis dans la mauvaise direction après le ravito) en direction de Juvinas, la nuit nous cueillera dans la montée et avec elle, c’est le silence qui s’installe dans notre petit groupe. Et avec la nuit, un nouvel invité pointe le bout de son nez : le vent, qui s’appelle ici la Burle. Tout d’abord, léger, caresseur, joueur, il se fait plus insistant et mordant à mesure que nous remontant vers le nord. D’ailleurs, au ravito de Juvinas, Isa l’épouse de Laurent, nous avertis que le gaillard souffle fort du côté d’Antraigues et nous conseil de bien nous habiller.
Et bien, nous ne serons pas déçu, jamais je n’aurais imaginé ces conditions le matin avant de partir (quand je pense que j’ai failli ne pas prendre ma veste !!) Nous sommes équipés comme pour une sortie en hiver : veste, gants, buff, bonnet, collant long (sauf bibi qui n’a pas prévu le coup - et qui est toujours avec son petit boxer raidlight....)
Entre Antraigues (et sa jolie place où nous serons accueilli par le Maire d’Alboussière) et St Julien, j’ai de nombreux « trous » : c’est simple entre 2 ravitos, on monte, puis on redescend, l’obscurité gomme le paysage et le temps.
Je revois notre groupe progressant souvent à la queue leleu luttant contre la Burle telle une cordée, le faisceau lumineux de nos frontales nous reliant les uns aux autres.
Pendant cette période, J’ai comptabilisé au moins 3 passages à « vide » où j’ai eu l’impression de m’endormir debout, tout en marchant, comme hypnotisé par le hallo de ma frontale : je suis quasiment sûr d’être passé par des phases de micro-sommeil.
Cela n’a jamais duré bien longtemps quelques minutes tout au plus, « la vie du groupe » me tirant de ma torpeur. A un ravito, je ne sais plus trop lequel, Tot me dis de les laisser qu’ils nous retardent, c’est vrai que parfois avec Domnin, on est un peu devant. Je réfléchis, pas longtemps, comme dirait mon fils ainé « genreeee, ça se fait trop pas !!! » Non, bien sûr, cela fait trop longtemps que nous sommes ensemble, mieux vaut rester ensemble et se serrer les coudes ; il reste quelques heures de nuit, après se sera gagné.
Au ravito de St Julien (km 150), on retrouve Hervé (Bec) qui jette l’éponge, frigorifié ; je lui propose de repartir avec notre petit groupe, mais sa décision est prise. Alex, me propose un corsaire, car avec mon petit boxer, je commence à peler sérieusement des cuissots, je commence par refuser (bien fait pour toi, tu n’avais qu’à prévoir) et puis, bon, de toute façon, il est là ce corsaire, il ne sert à personne, alors autant le faire voyager sur le bonhomme plutôt que dans la voiture.
C’est reparti, direction St Pierreville, et sa barrière horaire : ce tronçon est mortel : mortelle la montée car les fameux pourcentages en côtes que nous attendions jusque-là, et bien, ils arrivent, mortel le vent toujours aussi fort et qui nous scotche littéralement à la route , mortelle la descente qui suit et nous fracasse les cuisses tant et si bien que nous la feront en marchant, mortel car Domnin, si à l’aise jusqu’à présent décide d’arrêter au prochain ravito pour cause de quadris explosés et de chevilles qui commencent à partir en sucette .
- Ravitaillement de St Pierreville, km 161, quelque chose comme 23h30 de course. Une petite maison accueillante, l’impression d’entrer dans un véritable refuge, dont le gardien serait le Millepattes (Alain Corgier) égal à lui-même, chaleureux et aux petits soins pour les pèlerins que nous sommes.
Une petite cuisine, des bols de soupes fumants sur une nappe cirée (euh, non on n’est pas dans Boucle d’Or et les trois ours). Une petite chambre avec des coureurs qui se reposent (dont Maria qui dort comme un bébé et qui reviendra ensuite à fond les ballons et nous coller une mine après Vernoux). On y resterait bien au chaud, mais la chaleur commence à nous engourdir les guiboles.
Hop, c’est reparti en petites foulées car cela redescend. Hop, demi-tour à grandes enjambées, j’ai oublié mon buff sur la table…Tiens, non, mon buff n’a pas quitté mon poignet, …. hop je repars au galop (enfin, hum, bref, pas si vite quand même, hein).
5H15 ou 5h30 le soleil se lève enfin, près de 4 heures d’avance sur la barrière horaire : il nous reste plus de 12 heures pour faire les derniers 50 km : on est laaaaaaaaaaaaaaaarge on vous dit.
Le vent qui nous avait laissé un peu souffler après le col de Fayolle nous remet une claque derrière l’oreille dans la montée de Gluiras . A ce ravito (comme à tous ceux tenus durant cette nuit venteuse), j’admire le dévouement des bénévoles qui doivent aussi lutter contre le froid et le vent.
Hop, c’est reparti, descente vers Chervil, le soleil commence à bien nous réchauffer, ouais, mais bon, ce n’est pas qu’on trouve le temps long, mais on aimerait bien sentir un peu l’écurie, donc on relance la machine en descente en faisant de bons « Cyrano » (du genre 9’ course/1 ‘ marche). Pendant la descente, je commence à faire des calculs sur notre heure d’arrivée probable, vers 15h00 (soit 33 heures), je sors souvent ma « feuille de route » pour regarder le profil et les km restants, et je commence à me dire que l’on pourrait même arriver pour le café vers 14h00.
Mais nous n’en sommes pas là, le ravito de Chervil se fait attendre, il n’est pas là où je pensais, il se situe au pied du col de Chalencon sur un pont en pierre. Nicolas(gasgas) nous accueil tout sourire, nous annonçant 7km de montée jusqu’au prochain ravito.
Il est 9 heures (ou pas loin), un semblant de petit déj’ s’impose : petit thé, pain d’épice et en avant pour la dernière grosse bosse. Le soleil commence à donner, je tombe la veste et le corsaire en route (merci la Tot’s family), la montée est agréable, je suis étonné d’en avoir encore bien sous le pied (j’arrive à courir sur certaines portions de la montée au grès de mes arrêts "pissouilles" et vestimentaire pour rattraper mes acolytes).
Et puis vint le moment, en arrivant à l’avant dernier ravitaillement de Chalencon, où je glisse à mes camarades la perspective de la « médaille d’argent », les « moins de 32 heures », c’est pas un « top –là » général (même si Tot avoue y avoir songé), mais cela permet à tous de se fixer un autre objectif afin de ne pas trop trainer sur la fin de parcours : il nous reste plus de 3 heures pour faire 22 km, c’est laaaaaaaaarge, non ? Oui, mais pour autant nous repartons du dernier ravito, vite, bien trop vite, enfin à +/- 10 km/h pendant 40 minutes jusqu’au pied de Vernoux où nous finirons par marcher avec Maria qui nous a rattrapé (elle est en pleine peau d’ailleurs) ; on discute tous ensemble, elle nous parle un peu de cette partie qu’elle connaît (Vernoux est le village de Fiona Porte), et devinez qui est de retour et qui ne nous lachera définitivement plus ? La Burle….
(200km de course et pas loin de 4000m D+ en moins de 30 heures, je nous trouve plutôt pas mal ? Non ? et c'est pas fini)
A Vernoux sur le dernier ravito, nous faisons des photos tous ensemble avec Maria, ça sourit, ça rigole, là cela sent l’écurie, et puis le dernier bénévole nous dit : « allez, plus que 13 km », là c’est la douche froide, comment cela 13 ? C’est pas 11 km ??? Et non, erreur de ma part, non pas de calcul, mais de lecture (après vérification, mon graphique était bon, mentalement, j’ai juste un peu raccourci le trajet).
Et c’est au même moment que mon corps se rappelle à mon bon souvenir, notre belle cavalcade dans la descente de Vernoux aura sonné le glas de ma cuisse gauche (pas le quadri mais le vaste interne),.
(j'adore cette photo!! C'est pourtant la partie la plus chiante de la course;-))
Quel dommage car le reste de la machine est nickel, je sens bien quelques ampoules, ici ou là mais bof, rien de bien méchant, l’état de fatigue est supportable, après l’arrêt au dernier ravito, je n’arrive plus à prendre appui sur ma jambe gauche, la contraction du vaste interne est trop douloureuse, je dois me résigner à marcher : 13 km, misère cela va durer des heures !!! Et avec la Burle en pleine poire, autant dire que c’est fichu pour les moins de 32 heures, car évidement, le quatuor ne veut pas se séparer (merci les gars !).
Nous nous faisons une raison, et je suis un peu gêné car c’est moi qui est piqué la mouche du coche et c’est moi maintenant qui traîne la patte, cependant j’arrive à marcher parfois d’un bon pas. La portion entre Vernoux et Boffres est non seulement la moins glamour du parcours, et même un peu dangereuse avec les voitures de sorties à l’heure de l’apéro (l'Ardéchois aime bien roulé vite, non ?) . Bon, on est en mode « 100% marche maintenant, et ironie du sort, la Burle a beau soufflé, cela n’empêche pas le soleil de nous buriner la couenne.
Un dernier avion viendra nous déposer, c’est Marc Heurtault qui est parti pour un final de folie, lui qui semblait un peu à la peine en fin d’après-midi à St Pierre, et bien il finit sur des chapeaux de roue, ces "V3" sont extraordinaires (il fera moins de 11 heures aux 100 km de Chavagne 1 semaine plus tard (sic)).
Le panneau Alboussière, enfin, nous y sommes avant 14h00 (donc moins de 32 heures), mais il reste plus d’un km avant le camping, cela veut dire qu’en fait, même avec l’erreur de calcul nous aurions pu décrocher cette médaille d’argent en chocolat (pour 4 minutes au final) si on en avait pris conscience.
Mais au fond, tous les quatre, on s’en balance : sur la route qui descend gentiment jusqu’au camping, nous voyons et entendons le comité d’accueil, les longs coups de sifflet sont comme des appels à accélérer le pas, voir même à trottiner. Mais non, on se sert tous la palluche, on se remercie, calmement, presque pudiquement, simplement heureux du sort qui nous à jeter les uns avec les autres sur ces routes ardéchoises, et profitons de ces derniers instants d’un pas qui me semblait léger.
A 14h04 nous franchissons l’arrivée tous les quatre, alignés comme un rang d’oignons, personne ne voulant se mettre en avant, et garder le plus longtemps cette unité que nous avons conservé pendant tous ces kilomètres.
Bon, ça fait un peu guimauve tout cela, hein, mais, quand même, la course aurait-elle-été sans doute tout à fait différente si nous avions voulu faire notre chemin séparément. Pas certain que je serais allé plus vite, ou même terminé, seul, qui sait ? Et puis l’union fait la force, c’est bien connu, j’imagine que chacun a tiré un peu de force du petit groupe que nous avons formé pendant ces quelques heures et j'espére que, comme moi, chacun a pris plaisir à partager ces moments uniques finalement, non ?
Voilà, Laurent et une partie de son équipe nous accueillent les bras ouverts (et avec une HK ;-)), moment privilégié pour le remercier encore de nous avoir offert une si belle et rude épreuve. La fatigue me tombe dessus comme la pluie sur un jour sans pain et je ne traine pas trop avant d’aller me doucher et me reposer dans ma tente.
***Epilogue***
Qu’est-ce que c’est vachement bien un repas de fin d’une telle course !!!! (Surtout quand tu la termine, ben oui) - J’ai encore en mémoire l’après-course du Spartahlon où j’étais malheureux comme les pierres - , enfin repas, je devrais plutôt dire « banquet-remise de récompenses ». Coincé entre JP, Alex, et Tot , le (très) grand Phil (Warembourg) et son épouse, c’est une vague de « standing-ovation » pour Laurent, Isabelle et leur équipe de bénévoles qui nous fera lever plusieurs fois, l’émotion est palpable, et bien réelle ; mais la décompression aussi est au rendez-vous et entre Tot, JP qui balancent des vannes je pique souvent des fous rire (un peu « abruti » par la fatigue….et le rosé sans doute;-))
(malgrès la Burle, j'aurais pris des couleurs en Ardèche ;-)
Nous monterons tous sur le podium pour aller rechercher notre « Ardoise » de finisseur de cette première édition, Laurent a un mot pour chacune et chacun d’entre nous, personnellement, ma « Revanche » est prise sur le Spartathlon.
D'ailleurs, pourquoi parler de "Revanche", des multi-finisseurs du Spartathlon ont butté sur l'Ultr'ardéche, cela-en change-t-il leur valeur ? Non bien sûr. Doivent-ils avoir un sentiment de revanche ? Je ne sais pas. Des lieux différents, des pays différents, des courses différentes, mais bien souvent les mêmes hommes.
Est-ce que je reviendrai faire cette course ? Je ne sais pas, d’ailleurs, il y aura-til une seconde édition ? J’ai envie de rester sur ces très bons souvenirs (et ne pas les "pervertir" par une autre édition qui n'aurait forcément pas le même goût), et laisser ma place à d’autres, qui n’auraient pas eu la chance d’être de la première.
Merci, à Laurent, Isa et toute leur équipe de bénévoles. Ce fût un WE monnnnstrueux !!
Merci à mes compagnons de voyages : Alex, Tot, JP, Philippe (les gars, je remets cela avec vous quand vous voulez !!) et Domnin et tous ceux croisés sur ces routes ardéchoises.
Merci à mon épouse et à mes garçons, premiers et fidèles supporters, sans qui tout cela n’aurait pas de sens.
J'ai également une pensée pour Jean-Luc qui vient de nous quitter, rencontré pour la première fois en 2007 dans le gymnase du Perray en Yvelines lors de ma première O'rigole et que j'ai croisé ensuite de nombreuses fois comme beaucoup d'amoureux de l'ultra : bon voyage Jean-Luc...
(* : toutes les photos sont tirées des albums ici et là merci aux photographes !)
4 commentaires
Commentaire de philkikou posté le 30-05-2012 à 21:31:42
Bravo et merci pour ce récit qui m'a donné une petite idée de l'Ultra long version Ardèche et Laurent Bruyère.
Belle solidarité pour arriver à passer ses hauts et ses bas tant sur le plan dénivelée, physique, ou mental... Quoique sur ces 2 derniers points t'as l'air, en lisant ton récit, d'avoir sacrément bien géré !!!
Chapeau bonne récup.. en vue de tes prochaines courses... et au plaisir de te relire..;-)
Commentaire de grandware posté le 31-05-2012 à 10:45:41
La putain de sa race, joli coup !!!
Poum-Tchak
Commentaire de Karllieb posté le 31-05-2012 à 13:08:43
Vu comme ça, ça a l'air facile... Mais on sait ce qu'il en est ! Bravo Seb. Beau "come back".
Commentaire de Zeb posté le 31-05-2012 à 14:18:00
Merci les gars, ouaip, ca paraît toujours un peu facile quand cela ce passe relativement bien (et c'était le cas), mais parfois (comme ce WE sur la Maxirace) c'est la p'tain de misére de sa race à vomir partout (3 fois sur les 16 derniers km)...
...Poum-Poum-Tchak (à quand le boeuf ?)
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.