Récit de la course : Saintélyon 2010, par ThomasL

L'auteur : ThomasL

La course : Saintélyon

Date : 5/12/2010

Lieu : St étienne (Loire)

Affichage : 4250 vues

Distance : 68km

Objectif : Pas d'objectif

8 commentaires

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La Saintélyon 2010 ou l'histoire d'un ultra d'un an...

Cette histoire fait plus de 68 bornes, et j'espère qu'elle aidera d'autres Kikoureurs malheureux qui se blesseraient.

Retour sur 2009, où je boucle ma première Saintélyon, tout heureux de récupérer le point qualificatif permettant de s'inscrire à la mythique CCC à Chamonix 9 mois plus tard. J'en garde un souvenir magique avec des sensations inédites liées à la nuit et l'ultra. C'est plein d'enthousiasme que je me lance pour un premier CR sur Kikourou qui sera bien sûr suivi de pleins d'autres en 2011. 3 semaines après, à la fin d'une journée à Avoriaz avec mon compagnon de D+ et D- JC, sur le thème de ''à la recherche de la poudreuse ultime'', c'est la descente de trop dans les sapins. Saut de l'ange, atterrissage brutal sur une piste béton derrière les sapins et crac: douleur fulgurante dans le genou droit suivi d'un cri désespoir ''P**!? JC, je sens que c'est mort pour la CCC...''. Diagnostique au cabinet médical des Gets: ligaments croisés antérieurs rompus. Le médecin m'oriente vers une nouvelle procédure où via l'immobilisation complète du genou, les ligaments repoussent et cicatrisent naturellement. Cela a l'avantage d'éviter de passer sur le billard, mais ne marche qu'à 80% des cas. Partisan des solutions naturelles je tente le coup et JC me dit ''un seul objectif, recup pour qu'on soit ensemble sur la Saintélyon 2010''.


Le 28 décembre 2009 commence donc une course d'endurance qui s'est terminée ce dimanche 5 décembre 2010 sur la Saintélyon. 4 mois d'immobilisation du genou avec impossibilité de faire du sport, puis 2 mois vélo/piscine avec interdiction de courir. 6 MOIS SANS COURIR... Je re cite JC qui a décidément le bon mot pour tout ''après ça tu auras un mental de warrior pour l'ultra''. Moi je pense que c'est plutôt ma femme, Flo, qui a un mental de warrior pour avoir supporté un ours en cage pendant 6 mois... Le 14 août après 3 semaines dans le chalet familial du Praz de Lys (c'est là que se passe l'Ecotrail de Sommand), je m'attaque au trail des Hauts Forts à Avoriaz (je n'aime pas rester sur un mauvais souvenir), 24km, 1800D+ terminé mais me faisant découvrir le syndrôme de l'essuie glace (tendinite du fascia lata). Re arrêt de la course, annonce à JC que la Sainté c'était fini pour moi etc etc... Mon médecin du genou m'envoie me faire faire de semelles spéciales chez un podologue du sport, et je reprend la course petit à petit. Et ça marche, je commence à allonger les distances, refais de la côte (Buttes Chaumont et Montmartre à Paris...) pour enfin débuter la prépa de la Saintélyon 2010  début octobre. 

Après pas mal de stress sur mon genou et surtout beaucoup de bonheur de pouvoir recourir 30 bornes d'affilé avec JC en forêt de Montmorency, le week end précédent l'édition 2010 de la Saintélyon, je décide de calculer mes temps de passage prévisionnels. Sachant que j'avais mis 10h56 en 2009 avec un stop non contrôlé de 30' à Soucieu, je décide de rationaliser pour arriver sur un objectif de 10h15. Essayer de rester chaud (ah ah) pour repousser le plus loin possible les douleurs tendineuses et l'abandon qui pourrait en découler.

Mardi précédent la course, neige sur Paris... A partir de mercredi images aux infos de Lyon complètement enneigée, puis messages de Extra Sport annonçant que la neige tant espérée par nombre de coureurs sur la Saintélyon serait bien là. Mais les conditions seront froides trrrès frrrroides. Comme ça la neige c'est cool, mais ça va le faire comment en descente? Et le matos est il adapté (apparemment je n'etais pas le seul à me poser cette question, rupture de stock de guêtres raidlight sur Paris)? Bâtons or not bâtons? Et mon p*****n de genou qui me fait mal, somatisation? Etc etc Ah ben on n'est pas censé bien dormir avant la Sainté?

Samedi 4 décembre 2010 20h, nous arrivons donc à la gare de St Etienne au top de notre forme, JC avec un début d'état grippal et une journée bien chargée (voiture en rade etc etc), et moi même qui carbure à une moyenne de 5h de sommeil par nuit depuis 3 jours.  Mais avec la banane figée sur le visage! Après avoir avalé la dose réglementaire de tagliatelles bolo, direction le gymnase pour retirer les dossards et faire une petite sieste au milieu du bazar. Il fait déjà bien froid et ça fait bizarre de se dire qu'on va tomber la doudoune 3h plus tard. Arrivée au hall cocotte minute: 3/4 vide et bizarrement peu bruyant. Nous découvrons alors un second hall, pour retirer les dossards, et celui là est plein à craquer avec une queue digne de la sortie d'un nouvelle épisode de la Guerre des Etoiles. Une heure de queue pour récupérer ces sacrés dossards... Ca va être compliqué de se poser avant le départ, mais bon rien qu'en pensant à Athur Baldur et sa LyonSaintéLyon, on n'a l'impression de partir sur un semi marathon. Arthur et sa bande se sont fait la joie de la première trace dans la poudre depuis Lyon en off et repartiront quelques heures plus tard avec les 5600 participants du raid solo... Vues le conditions, GROS respect... Nous avons enfin nos dossards, et retournons dans notre hall cocotte minute préféré pour nous préparer: moi toujours à l'arrache et très méticuleux en ce qui concerne le nokage (tartinage de crème antifrottement) pour éviter les mésaventures de l'année précédente, et JC toujours aussi cool qui pense à se couper les ongles de pieds 1h avant le départ. Le tout avec le présentateur qui détend l'atmosphère: ''alors Dawa quel conseil donnes tu aux coureurs qui vont affronter les conditions exceptionnellement dures cette nuit? Maud, un petit truc pour arriver à survivre par -6 sur 68 bornes?''.
10' avant le départ nous voici en train d'essayer de déposer nos sacs de rechange avec des dizaines d'autres coureurs à l'arrache dans la navette les ramenant à Lyon, quand nous tombons sur le roi Arthur Baldur lui même, qui nous raconte rapidos sa LyonSainté de la journée que l'ont peut résumer ainsi: ''magnifique, congères au dessus de Ste Catherine, par contre dès que le soleil s'est couché ça pelait méchamment''. 
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Minuit, persuadé que je ne finirai jamais cette édition, le départ est lancé. Nous sommes au fond du peloton, si loin de la ligne de départ qu'on entend à peine le traditionnel morceau de U2. D'ailleurs quand on la franchit le morceau est déjà fini, mais en revanche le public est encore plus nombreux que l'année dernière et ça nous boost le diesel qui commence à chauffer sur les 7 km de bitumes de St Etienne. Nous en avons bien besoin, le thermomètre d'une pharmacie affiche -7°c. A Sorbier, fin du bitume et début du chemin de... neige qui monte vers St Christo.
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 La Saintélyon 2010 est un trail blanc! Je ne me sens plus mon genou, ni le froid, et là je réalise enfin: je suis avec mon poto JC sur la SaintéLyon après une année de galère... C'est le PIED, le spectacle des lumières est toujours superbe sur la Sainté, mais là c'est hallucinant: la réverbération des frontales sur la neige fait un serpent de lumière phosphorescent sur les Monts.
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La montée est un peu plus physique à cause des appuis plus fuyants, mais les premières descentes sont plutôt agréables au niveau de l'amorti.
Arrivés à St Christo, on décide de zapper le ravito, blindé, sachant que nous avons de quoi nous alimenter sur nous. En revanche, ma boisson énergétique est bien au frais, et lorsque sortons du village, je regrette un peu une boisson chaude, le vent me glaçant. ''T'inquiètes y a une belle côte qui arrive parfaite pour réactiver le chauffage central''. On avait pris les bâtons pour s'assurer en descente, ils se sont montrés super efficaces en montée, et on a commencé à gagner des places. Certes avec la côte on se réchauffe, mais avec le froid on pompe une énergie de dingue et je commence à avoir des fringales à répétition. Je me retrouve à grignoter de plus en plus, et ma boisson tourne au frozen hydrixir, et je sens le mal de ventre arriver. En haut de la côte besoin d'une pause, je laisse JC avancer, que je ne reverrai pas avant un moment. Quelques temps après arrive le ravito de Moreau avec des airs de marché de Noel, et trouve du thé chaud qui me requinque. Je repars plutôt en forme, et n'ai toujours pas de douleur dans le genou après 20 bornes.
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 Mais quelques kms après arrive la descente sur Ste Catherine, et un premier bouchon. Oui un bouchon comme sur l'autoroute: la descente est complètement verglacée et la majorité des coureurs sans bâton sont en pleine galère. Les premiers relais arrivent à fond (moins de km à courir = plus de vitesse), et
passent ''en forçant'' un peu. J'entends ''ce sont au moins des parigots!'': j'ai vraiment l'impression d'être sur l'A6 pendant les vacances de février...

Arrivée enfin à Ste Catherine dans un ravito très chauffé (heureusement pour les bénévoles). Je décide de vider ma poche pour y mettre de l'eau plus ''chaude''. Effectivement une partie du liquide a commencé à geler au niveau de la sortie vers le tuyau. Et là catastrophe le joint craque (avec le froid probablement), et le liquide se déverse sur mon sac. Change trempé, plus de poche à eau le moral chute dans les chaussettes mouillées. Heureusement une bonne âme me passe une petite bouteille d'Evian, et sachant que les ravitos sont toutes les 10 bornes environ, cela suffira. Cette plaisanterie + le temps de m'alimenter m'ont bien laissé le temps de m'habituer à la température ambiante et le retour à la réalité est dur. L'heure suivante est terrible avec un vrai coup de moins bien, avec en apothéose, la descente du bois d'Arfeuille, transformé en toboggan de verglas avec des cailloux dedans. J'ai une pensée pour Mamanpat, kikoureuse supersonique, qui a vu sa course stoppée à cet endroit  (km30) suite à une violente chute... A cet endroit précis, je me suis dit que le prochain ravito portait bien son nom (St Genoux), et qu'il était temps d'arrêter les conneries. Sauf que dans la montée de St Genoux, les voyants se sont remis au vert,  je suis passé en coup de vent au ravito, et me suis mis Team Ghost dans les oreilles. Et comme un an auparavant j'ai avalé la portion jusqu'à Soucieu porté par la musique en volant sur les lumières de Lyon au loin. En arrivant à Soucieu la tendinite du facia lata s'est réveillée et bien réveillée. Je me suis dit que j'avais fait les 45 plus beaux km, que je m'en sortait bien avec le genou, et que j'allais arrêter là, c'était bien suffisant pour 2010.

En rentrant dans le ravito de Soucieu, je tombe sur mon JC tout blanc assis sur une chaise. ''-ah bah mon poto kesstufouslà? -Me suis posé, les conditions sont vraiment hard core, suis laminé. -Pareil. Beaunant c'est à combien? -13 bornes... -Bon je mange un morceau, je m'étire et on voit si ça repart? -Ok.'' Ah la bonne blague, et 2 bouts du rouleau qui se remettent à courir 2. Passage du Garon bien verglacé, mais plus joli sous la neige, 1 côte mi glace mi boue 1 et 2 mecs qui n'arrivent plus à courir 2, et 1 passage de parc qui fait c***r 1, et 1 nouvelle portion avec des grosses marches pour achever les quadri 1. ''-J'ai une idée si on essayait de courir la dernière borne jusqu' à Beaunant sans marcher?-ok de toute façon ça descend''.

Arrivée à Beaunant en mode automatique. ''-tu sais quoi la prochaine navette c'est dans 2 heures... Parce que tu comptais abandonner à 10 bornes de l'arrivée? -hmmm...''  Ravito, puis JC me bouge les fesses, vue que ma tendance à traîner sur les ravitos est exponentielle avec le kilométrage. Le redémarrage est atroce, mais finalement l'abominable côte à 20% de Beaunant me réveille.  JC trottine les yeux mi clos, il est quasiment en train de dormir en courant l'animal! Mais 10 minutes après il relance et je me traîne derrière. L'arrivée dans Lyon n'est pas mal. On a retrouvé du jus et on doit bien courir 3 bornes à un bon petit rythme. Puis arrivent les quais... Verglas ou crapougnasse glissante, au choix.  Un bon petit vent de face, histoire de bien profiter du quartier des Confluents (je crois que ça s'appelle comme ça le nouveau quartier Lyonnais). Il y a aussi des passages avec des galets pour exploser les pieds si jamais le vent baissait.
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Finalement nous arrivons dans le parc de Gerland, heureux que le calvaire final se termine, et de ces 23 bornes passées ensemble à nous motiver l'un l'autre. On monte le rythme en arrivant à la salle des sports, on passe la ligne d'arrivée ensemble. A y est, nous sommes finishers de la Sainté 2010 en 11h17, édition qui restera dans les grands millésimes de la course... Pas la peine d'épiloguer sur mes prev à 10h15, je ne les aurai jamais tenues dans ces conditions.
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Aujourd'hui j'ai l'impression d'être le type le plus heureux du monde. J'ai mal partout sauf au genou. Pendant toute l'année je me suis accroché pour le récupérer et dans les coups de moins bien, Flo ma femme, mes enfants Lucie et Victor, ma famille, et mes amis m'ont soutenu. Et finalement ça  se termine comme JC me l'avait dit il y a 11 mois: ensemble sur la Sainté 2010. Pas sûr que je la refasse de ci tôt, je crois que je vais laisser l'histoire comme ça. En revanche dans 8 ans, mon fils Victor aura 15 ans, alors je reviendrai  avec lui sur le relais. Et puis comme il y a des chevaux sur le parcours , Lucie pourra nous suivre (bon il est temps que j'aille dormir là).
  
La superbe video de la course en direct par JC:

 
 

8 commentaires

Commentaire de Mamanpat posté le 07-12-2010 à 09:20:00

Tu peux te sentir le plus heureux du monde ! Sois fier, profite, exulte et surtout récupère bien !
Bravo d'être aller au bout, incroyable édition que cette STL 2010, c'était celle à finir !

Et merci pour ta p'tite pensée, mon coccys te remercie ! ;-)

Vivement 2011 !

Commentaire de ThomasL posté le 07-12-2010 à 10:39:00

Merci Mamanpat! oh que oui, vivement 2011!! Bon rétablissement.

Commentaire de arthurbaldur posté le 07-12-2010 à 14:06:00

Pffft, tu n'espères quand même pas que tu vas tenir 8 ans sans revenir dans les Monts du Lyonnais ! :)))
Allez hop, il y a moyen de faire mieux, c'est le roi Arthur qui te le dit ...
C'était sympa de vous avoir rencontré. :)

Commentaire de ThomasL posté le 07-12-2010 à 18:21:00

Ben ya eu plannification avec JC ce matin sur le programme 2011: ecotrail de Paris en mars(on habite là qd même), Maratrail de Faverge en juin, Triathlon de Paris en juillet, P'tit tour des Fiz en juillet, et... CCC en aout (si on est tirés au sort). On risque d'être un peu calmés en décembre... Bon le menu Saintélyon à côté de la gare de St Etienne nous manque déjà ;-)

Commentaire de Natou posté le 07-12-2010 à 18:27:00

Bravo Thomas ! Tu as mené cette course jusqu'au bout en arrivant entier surtout dans les conditions que nous avons connues ce we ;-)
Bonne récup !

Commentaire de ganzer posté le 07-12-2010 à 18:57:00

Jolie preuve de courage et de ténacité !!
Bravo !

Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 10-12-2010 à 09:01:00

Super ! Tu es un vrai miraculé après ces problèmes ! Bravo pour ton courage !

Commentaire de Byzance posté le 18-12-2010 à 19:25:00

Waouh : belle abnégation avec la blessure, la convalescence et le finish. T'as un sacré mental ... je pense !!!

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