L'auteur : Papy
La course : Grand Raid du Golfe du Morbihan - 175 km
Date : 28/6/2024
Lieu : Vannes (Morbihan)
Affichage : 637 vues
Distance : 175km
Objectif : Pas d'objectif
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Jamais 2 sans 3, cette phrase expression trouverait probablement ses origines au XIIIe siècle. A l'époque, on employait « tierce fois, c'est droit » pour indiquer qu'un acte devait être entrepris trois fois pour être réussi. Il s'agit bien évidemment d'une légende sans réelle preuve, à laquelle on croit ou pas.
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Pour une réussite, c'est une belle réussite que j'ai mise 3 fois à parfaire !
Enfin presque, car il y a encore quelques finitions à terminer.
Me voici de nouveau au départ de l'UltraMarin, le tour du golfe du Morbihan, que j'attaque donc pour la 3ème fois, après 2 arrêts aux stands au 120ème puis au 90ème km.
Cette année la préparation fut loin d'être idéale car perturbée par la qualification tardive à l'Ironman du lac d'Annecy, l'Alpsman, et un temps pourri ne permettant pas de sortir le vélo.
Je vous emmène donc, à la poursuite du Saint Graal qui est de faire la fête sur la ligne d'arrivée avec mes 2 potes speakers, les "Benoits", Blanchard et Phalippou qui donnent un maximum d'énergie au micro durant ce week-end !
Comme d'habitude vous pourrez surfez de chapitres en chapitres en cliquant sur la table des matières ci dessous.
A la fin de chaque chapitre vous pourrez revenir à cette table des matière en cliquant sur Retour table des matières
PLANIFICATION, COURSES PRÉPARATOIRES ET BILAN AVANT DÉPART
Ayant commencé une préparation exclusivement en CAP au début de l'année, j'ai donc dû bifurquer en février quand j'ai reçu l'avis de l'organisateur l'Alpsman m'indiquant que j'avais 48h pour valider mon inscription et sortir de la liste d'attente.
Heureusement que des copains du club de Triathlon de Redon étaient déjà inscrits, logistique déjà planifiée. J'ai pu donc en profiter car mon équipe et ma famille avaient déjà mis une croix sur ma participation.
J'ai donc bien les courses de préparation prévues initialement au mois de novembre avec 3 mois de retard d'entraînement spécifique en triathlon.
Comme il faut s'inscrire tôt aujourd'hui dans les courses populaires, me voilà donc embarqué dans le 50km du Tiken mi-Avril, le 65km de Guerlédan mi-Mai, l'Alpsman (triathlon distance Ironman au Semnoz/Annecy) et l'UltraMarin qui représente l'objectif principal.
Heureusement que le trail des 3 chapelles de Bains sur Oust était complet sinon j'étais aussi au départ du long.
Me voilà donc dans une préparation mode "bloc", avec des parties conviviales qui devraient remédier au manque drastique d'entraînement, si je n'explose pas avant.
En effet, j'ai des tests à faire suite aux arrêts des années précédentes et certains laisseront peut-être des impacts.
Petit rappel :
UltraMarin 2022, je pars tranquille, c'est mon retour aux affaires sur l'UltraTrail car c'est à côté de ma nouvelle maison.
Le tour est dans le sens contraire des aiguilles d'une montre
Je fais 80km de rêve, bien hydraté, bien dosé en maltodextrine pure, je me promène et, en plus, je suis largement en avance sur mes prévisions.
Malgré de gros soucis de balisage, qui semble la marque de cet ultra, je profite des moments de ligne droite ou je peux avancer en toute sérénité. Passé le 80ème, je recharge avec de la nouvelle poudre que malencontreusement je surdose. En effet, en plus d'arriver en retard au départ à cause des embouteillages vannetais (comme un touriste) je n'ai préparé mon sac que quelques heures avant en confondant de la maltodextrine avec le produit de décathlon Iso+ qu'il faut notoirement moins dosé. La machine s'est mise à se dérégler.
Je fais la traversée du Golfe mais je ne suis pas bien. Je commence à avoir des fourmis dans les jambes, une sensation qui augure du début de déshydratation.
Je passe Arzon, bien aidée par ma femme et ma fille, mais arrivé au 120ème, à Sarzeau, j'ai les larmes qui me viennent. Une fois assis, je n'arrive plus à me lever. Sous les encouragements et avec l'aide de mes proches, j'arrive à me changer. Mais un rapide passage chez le médecin me stoppe avec une tension à 9, malgré une glycémie de 0,99gr/l.
Le lendemain j'irais faire la Randonnée de la Chapelle Gaceline (16km) tout en recourant le mardi suivant, avec un peu d'amertume.
UltraMarin 2023, fort de l'expérience de l'année précédente, je pars avec des ambitions derrière Stéphanie Gicquel (sur 100m !), puis règle mon allure.
J'ai bien préparé mes bidons et surveille mon hydratation. Je me prends au jeu avec une place de leader dans ma catégorie et m'enflamme.
Malheureusement, la pluie et le froid viennent contrarier mon avancée et je souffre beaucoup sur le sable de St Gildas. Trempé, j'en oublie de m'hydrater et je commence une hyperventilation psychogène.
Bien évidemment, les soucis de balisage que nous connaissons à StGildas, se répètent. J'ai peut-être fait trop de plage et de sable fin destructeurs. Le fait est qu'arrivant au 90ème km d'Arzon, je donne mon sac à remplir à mon ami Lionel, des Coureurs de l'Aff, et m'assoit bien fatigué.
Qu'ai je fait ?
Tout s'est mis à tourner, des fourmis dans les jambes, dans les mains, des nausées, une fatigue soudaine, un mal-être, je fais un beau malaise.
Je file à l'arrière-salle m'allonger mais je n'ai plus de lucidité.
Pourtant j'ai une tension autour de 10 et une glycémie à 1,15gr/l. L’année d'avant, 2h après, j'avais récupéré et j'aurais pu terminer cet UltraMarin si j'en avais eu la motivation, cette année, c'est catastrophique. 2h après je ne tiens toujours pas debout. 4h après je ne vais toujours pas mieux, nous décidons de rentrer et de chercher ce qui m'arrive.
Le lendemain j'irais encore faire la randonnée de la Chapelle Gaceline tout en recourant le mardi suivant, avec encore plus d'amertume. 😒
J'ai donc, pendant plusieurs mois, fait des investigations médicales pour trouver l'origine de mes soucis et si j'avais la capacité de pousser le bouchon plus loin en cas d'alertes similaires. Vous imaginez bien l'inquiétude de mes proches qui n'ont pas envie que je mette ma santé en l'air.
Dopplers, IRMs, tests audios et équilibres, j'en ai passé des examens pour m'entendre dire que si je n'avais pas été sportif, je serais dans un état pathologique. Mais comme je suis sportif, toutes les incongruités trouvées sont "normales" car une adaptation continue du corps à l'effort. Tous les éléments sont favorables et je ne reçois que des éloges sur mon état physique.
Fort de ce feu vert, je fais mes 50km du Tiken trail ou, hormis les crampes d'arrivées, je me balade en faisant mon RP. Je suis content, même si mon faible entraînement vélo commence à me peser.
Je file dans les Pyrénées pour augmenter mon faible kilométrage vélo ou je décide une stratégie "casse de fibres musculaires" en grimpant Soulor, Spandelles, Cauterets, Pont d'Espagne et Luz Ardiden en 36x21/23 avec le 25 sur quelques centaines de mètres seulement. Merci aux copains du CNP Redon de m'y avoir emmené.
Je file au trail de Guerlédan ou je décide de pousser le bouchon. J'ai souffert, car pas assez récupéré de mon travail à vélo, avec des séquelles au genou droit qui m'empêcheront de m'entraîner une dizaine de jours. Mais j'ai acté quelques faits importants, consignés ici :
https://www.kikourou.net/recits/recit-22269-trail_de_guerledan_-_65_km-2024-par-papy.html
Là-dessus, sous entraîné à vélo avec seulement 1000km de fait la veille du départ, je file faire l'Ironman de l'Alpsman.
Mon dernier Triathlon similaire, l'Altriman, remonte à 2012, j'ai donc bien vu que les années étaient passées et que mes "blocs" m'avaient éprouvé. J'ai consigné cette aventure ici :
https://www.kikourou.net/recits/recit-22283-alpsman_xtrem_triathlon-2024-par-papy.html
J'avais donc quelques voyants à l'orange avant le départ, mais rien d'alarmant vu mon niveau d'entraînement.
J'allais donc sûrement souffrir à l'UltraMarin, tout en maîtrise, du moins je l'espérais.
Le jeudi je vais chercher mon dossard, embrasse Le Benoit de l'Altriman mais loupe le Benoit du Stade de Rennes. Je me note de faire un selfie le lendemain avec ces 2 énergumènes, excellents speakers, rencontrés dans des situations particulières, et qui donne une énergie énorme. J'ai le rêve de faire une arrivée d'enfer avec eux 2 depuis 2 ans, vais-je y arriver ? En tout cas j'ai les accessoires pour cela !!!
Il n'y a pas le photomaton cette année, je n'aurais pas ma photo familiale du départ, c'est un signe que cette année cela ne sera pas pareil...
JOUR J
Je ne suis pas un spécialiste des grandes préparations de matériel, aujourd'hui c'est particulier, je suis prêt à l'heure.
Ma sérénité vient peut-être du fait d'avoir ma chérie et ma benjamine se sentant intégrées et actives du projet. L'aventure à l'Alpsman avec mon troisième fils, Théotime, y est sûrement pour quelque chose. Je ne cours pas seul !
Dans tout projet, quand l'équipe est motivée et trouve un sens à sa démarche, cela va toujours mieux, donner du sens...
Nous prenons la route et Waze nous indique un chemin nous approchant de l'arrivée pour 17h30'. Cela suffira pour me permettre d'être au départ et rechercher mes complices aux micros.
Les embouteillages en décideront autrement. Je n'ai plus l'habitude des villes, profitant de la qualité d'une vie "presque" rurale. J'ai du mal à imaginer que tous les jours des personnes perdent leur temps dans ces embouteillages à rallonge. C'est souvent la contrainte obligatoire pour travailler ou, parfois, partir en vacances.
Nous sommes bloqués. 😡
La pression monte un peu et nous changeons de point d'arrivée car je veux éviter de commencer la course 10' avant starter avec l'angoisse de manquer le départ.
Nous arrivons finalement au port où je suis déposé à 1km du départ, 15' avant. Merci ma chérie. 👍
Je me rapproche rapidement du départ en me relâchant au maximum. La concentration et la motivation sont au maximum, les balises du projet sont définies, à moi de les respecter et de les valider une à une.
Ma première balise est le selfie avec les Benoits !
J'arrive à les choper dans l'animation du départ, je peux faire quelques clichés.
Ils sont sur le gril, le départ est imminent.
Je me cache du soleil sous une tente des médias et un athlète vient me rejoindre.
Plein d'ambition et sûr de ses forces, il m'annonce vouloir faire 14h et m'explique sa préparation.
Je suis impressionné par ses 250km/semaine qui me rappellent les équipes marignanaises des années 80 qui faisaient ce kilométrage pour être champion d'Europe de cross par équipe. Autant d'entraînement semble pathologique et je ne connais pas d'athlète qui ne l'ait pas payé de quelques séquelles physiques. Dans la littérature médicale des années 50 post-seconde guerre mondiale, des médecins s'alarmant de la sédentarisation de la société rappelaient que le français marchait entre 40 et 60 bornes par jour. Marcher et non courir, qui nécessite un emploi différent du corps.
Je note, quand même, "la jeunesse" de certains de ses propos qui doivent se polir à l'expérience des courses. Ainsi je lui demande s'il a passé de la crème solaire sur ses épaules nues ? 🤔
La grosse problématique du départ est la chaleur et le soleil qui cogne encore. Il me répond que cela ne sera pas un problème pour lui. Je n'ose lui expliquer que la tenue short/débardeur noir n'est pas non plus adapté à la chaleur qui nous attend, je croise les doigts pour qu'il n'en ressente pas les effets.
Il faut savoir, parfois, taire ses impressions de mentaliste. Il fera une magnifique première partie de course.
Il a un gros potentiel avec un mental issu des sports de combat, nous le retrouverons devant dans beaucoup de courses.
J'ai du mal à sortir de la tente car il fait vraiment chaud
Je travaille ma respiration et cela sera un leitmotiv tout au long de la course.
Se déstresser, se détendre, penser à boire, je rentre et sors de la tente sous l'œil amusé des Benoits et de la Mère Mingolla, qui a remplacé sa fille au micro cette année.
La tension monte, les speakers tentent de nous faire la vague classique de départ mais cela foire un peu, le décompte est parti...
DÉPART ET TECHNIQUE DE RESPIRATION
Le maire de Vannes nous lâche dans ses rues. Déjà l'an dernier nous avions eu droit à un tour dans la ville, cette année on rallonge ce tour pour aller chercher du dénivelé !
Cela part extrêmement vite, je me cale sur les côtés pour laisser passer la meute. Malgré cela je suis à un bon 12km/h. Il faut que je me rentre dans la tête que cette allure c'était "avant", sur 100km et qu'aujourd'hui c'est plutôt 10km/h qu'il faudrait suivre. Je mets en place mes premiers axes stratégiques qui sont de marcher jusqu'à 1' maximum toutes les 15' et d'utiliser la respiration nasale indiquée par le médecin du Trail de Guerlédan (ancien du Tour de France) pour éviter l'hyperventilation psychogène qui m'annihile toute lucidité.
Je note rapidement qu'en utilisant cet outil, mon allure se régule sur un tempo plus lent qui me permet de me concentrer sur ma fréquence de foulée que je tente de maintenir autour de 180Fpm. Je note aussi que cardiaquement, en respiration nasale, je ne grimpe pas très haut et me maintiens dans les zones d'endurance, du blablarun sans bavardage.
Nous entamons tranquillement les premiers kilomètres et je pense à viser des parties ombragées pour marcher car, comme prévu, même à 18h, le soleil est bien présent. Il sera, pour mon cas, un long compagnon de voyage et causera sûrement de nombreux abandons.
Je tente de boire, comme je le conseille mais, nous le verrons, je serais encore là-dessus en dessous de la vérité. C'est fou d'avoir autant étudié la problématique de l'hydratation, d'en avoir écrit des pages, fait des dossiers sur Kikourou, Onlinetri et autres réseaux sociaux pour ne pas en suivre les conclusions. En vieillissant, mon corps s'adaptant, je sue énormément. Je dois donc recharger hydriquement de manière continue !
Les seules courses où j'ai réussi à avoir la lucidité de la boisson sont celles ou j'ai réellement performé. Une fois encore la maxime "Mal au ventre tu as, hydratation tu feras" se révélera exacte. Pourquoi ai-je besoin de ressentir cette douleur pour me réveiller et boire à nouveau ? Mystère... J'ai même 2 flasques ventrales aujourd'hui pour estimer plus parfaitement ma consommation. Las, je suis toujours en dessous. Nous y reviendrons.
J'ai le grand plaisir de me faire héler par mes chéries, je les sens impliquées, nous allons faire du bon travail. Le peloton est encore important à ce niveau et les chemins vont se rétrécir.
Je n'arrête pas de me faire doubler et cela va aussi être une habitude à prendre. Tout d'abord par les coureurs voulant faire moins de 16h, puis moins de 18h voire 20h, puis les relais, puis les meilleurs des relais solidaires et enfin les coureurs du 56km. J'ai aussi doublé, l'évolution de mon classement le montre, mais peu par rapport aux autres courses. Peu de coureurs ont l'expérience pour doubler proprement. L'ayant beaucoup fait dans les premiers trails du siècle dernier qui partaient sur des chemins remplis de randonneurs, je sais klaxonner et indiquer ou je vais passer à des personnes plus lentes devant moi. Elles ne savent pas où je suis. Celui qui est derrière doit décider quand et où doubler, en le signalant. Celui qui est devant n'a pas des yeux derrière la tête. J'ai doublé des centaines de fois ainsi et quand nous sommes sur les singles de l'UltraMarin, ne pas communiquer avec le coureur doublé peut réellement le stresser. J'ai coupé un virage pendant qu'un coureur tentait d'y passer. Il a goûté aux arbustes. Je me suis excusé et j'espère qu'il a compris que son mutisme risquait de lui coûter d'autres soucis en doublant sans prévenir.
Nous avançons rapidement et j'ai le grand plaisir de voir les Champenois Fanny et Richard m'encourager sur le bord de la route. Belle surprise de les voir avec ma support team. Un fossé me sépare d'eux, je ne pourrais pas aller les embrasser, le cœur y était pourtant. Richard a résisté à l'envie de me suivre. 😂
Me voilà arrivé au premier ravitaillement, signalé au km 14. Je suis étonné d'y être si rapidement. Certains coureurs diront que la distance n'y était pas. Pas grave, je me le passe en marchant, complétant en eau ce que j'avais déjà bu, baissant drastiquement la concentration. À l'évaluation c'est entre 500ml et 750ml que j'aurais bu, dans les temps pour 1h16' de course. Tout va bien pour l'instant, je vous laisse, nous nous retrouverons au ravitaillement de Séné Cousteau.
LE TABLEAU FANTÔME
C'est le moment parfait pour vous décrire le tableau fantôme. En effet la flânerie de Séné est sympathique et peu difficile, profitons-en pour regarder cet outil qui me maintiendra en vie longtemps.
Sur le direct de breizhchrono vous avez un outil qui s'appelle le tableau fantôme que vous pouvez voir à cette adresse :
https://ultramarin-breizhchrono.livetrail.run/tableauFantome.php
En saisissant le numéro de dossard, le tableau va chercher votre cote Itra et vous mettra les temps de passages conformes avec la vitesse qui ralentit au fil des kilomètres. C'est ainsi que j'ai obtenu les images suivantes.
Il m'apparait, quand même que ce calcul est un peu optimiste par rapport à mes capacités actuelles. J'ai donc mis l'objectif sur 24h ci dessous.
J'ai noté les temps de passage sur papier et mis cela dans le sac à dos avec l'ambition de ne le regarder qu'à Sarzeau. J'y résisterais car je pensais sincèrement être en retard par rapport à ce tableau de marche dont les premières heures m'ont apparu trop rapides.
C'est un outil intéressant dont je recommande l'utilisation.
J'espère de nouveau pouvoir m'en servir, merci breizhchrono !
Je regarde... Oui, c'est bon j'arrive sur le ravitaillement de Séné Cousteau, nous pouvons reprendre le fil de la course.
Je rentre dans le hall où l'on me demande si j'ai une assistance. J'opine du chef et me voilà dirigé dans une salle où je tente d'apercevoir... Oui elle me fait de grands signes, Nathalie est fidèle au poste !
Je lui pose mon sac et mes préconisations et me repose un peu. Je peux vous assurer que d'avoir sa chérie en assistance, cela vous change une course ! De souvenir, elle aurait rempli pas loin d'un litre entre ma poche à eau et mes 2 gourdes. Note à moi-même pour la prochaine course, faire une répétition de transition comme en triathlon. Cela évitera des inquiétudes à ma belle assistante.
Je repars serein et commence à apprécier la course. Bien évidemment nous n'en sommes qu'au début, rien n'est fait. D'ailleurs avec la ferveur populaire, le risque de s'enflammer est important. J'espère que de l'autre côté du Golfe je retrouverais autant de monde pour m'encourager.
Je ressens bien quelques douleurs musculaires. Avec le printemps que j'ai réalisé, c'était peut-être inévitable, mais le moteur ronronne parfaitement, croisons les doigts que cela continue ! 🤞
Je n'ai pas du les croiser suffisamment fort car au fil des kilomètres, dans un paysage parfois marécageux, j’éprouve des douleurs d'inconfort aux cuisses, mollet et surtout hanches.
Cela m'inquiète un peu, sans plus, je continue mon bonhomme de chemin et de me faire doubler. Ceci sans incidence sur le classement car ce sont les relais qui passent.
La réflexion sur la frontale arrive. Je n'ai jamais changé les piles de celle-ci malgré plusieurs Raid28 et je ne sais pas comment le module signale qu'il faut le faire. Je n'ai pas fait de préventif et tarde à le faire. J'imagine arriver au Hézo avant la nuit et profiter de la salle de ravitaillement pour changer les piles si jamais il y a des signes de faiblesse. J'en ai une de rechange, à la main et 2 autres avec l'assistance. En plus d'être en soutien en cas de panne, les supplémentaires ont des capacités de clignotement qui me permettront de souligner ma joie à l'arrivée.
Le début de la fatigue arrive, c'est la première fois que je trouve long l'attente pour le ravitaillement suivant. Mes hanches et mes cuisses m'indiquent une destruction musculaire trop avancée pour le kilométrage, je me rassure avec un moteur qui ronronne toujours aussi bien. Je vois quelques villas et demande à un passant le nom du village. J'apprends avec joie que c'est le Hézo, la pause n'est pas loin. Il y a de plus en plus de monde, j'aperçois le stand de ravitaillement et m'y dirige avec plaisir.
L'assistance n'étant pas autorisée sur ce poste, je n'ai pas la force de me battre avec ma poudre, alors je complète ma flasque d'énergie avec coca+StYorre (ce qui réduit le volume) et me refais une flasque de St Yorre. Depuis le départ j'en suis approximativement à 2 l de boisson, ce qui pour moi est le minimum. Il y a environ 4 heures et 15 minutes depuis le début de la course, le soleil va bientôt se coucher, je salue mes fidèles supportrices et je quitte le ravitaillement.
DÉBUT DE LA NUIT
La douceur de la nuit vient nous envelopper et c'est de manière diffuse que j'admire encore les vues sur l'intérieur du Golfe. Quelques passages marécageux se chargent de parer mes belles chaussures "presque" neuves de leurs couleurs sombres. Je me sens vraiment confortable dedans et même si nous n'avons pas encore attaqué les parties les plus éprouvantes, je n'ai pas d'ampoule qui s'annonce. Ce sont vraiment des chaussons.
Je ne sais pas encore qu'elles vont devenir l'élément principal de la dramaturgie naissante.
Je sens de plus en plus que musculairement cela risque de ne pas le faire. Cela me mine un petit peu car je suis d'une rare lucidité rarement à ce stade de la course et mon moteur cardiaque, grâce à la respiration nasale, se porte comme un charme. Mon pari des blocs ne fonctionnerait que partiellement ou ai-je été trop loin dans mes courses de préparation ? La question restera en suspens.
Ma lucidité vient peut-être aussi du fait que j'ai l'impression de me "traîner". Je n'ai pas regardé la projection des temps pour 24h, je me retiens toujours, et je me vois avec pas mal de retard.
Les douleurs musculaires peuvent être à l'origine de ces sensations de lenteur. Dès que je sens mon pas lourd, je me recentre sur ma respiration nasale, tente d'augmenter ma fréquence de foulée, me penche en avant, coup de coudes en arrière et immédiatement mon corps se relâche. C'est impressionnant comme le corps fatigué peut se mettre en crispation et position antinomique avec une foulée lourde et traumatisante.
J'ai oublié de m'occuper de ma frontale alors je marche et la sort car la pénombre m'empêche de voir les racines qu'un tendon d'Achille ne supporte pas. Etonnante cette douleur que je n'ai jamais, ou presque jamais, éprouvé. Pourquoi cela se met à couiner sur les racines ?
Je commence aussi à m'impatienter de voir les postes suivant, ce n'est pas bon signe.
Alors je m'attarde au paysage que je traverse pour tenter de sortir de cette spirale négative
Sarzeau, 58èmekm, Je vois mes chéries mais elles n'ont pas le droit de m'assister.
L'an dernier c'est à partir de ce moment-là que j'ai commencé à souffrir. Aujourd'hui c'est mieux mais je ne me sens plus aussi bien qu'au Hézo et je commets l'erreur de ne pas boire assez. Je commence à avoir mal au ventre et mets cela sur une surconcentration, alors je prends une flasque d'eau pure et je remplis l'autre d'électrolyte. Je dois être à 2,5l depuis le départ, cela commence à être limite.
Je vois aussi tout l'intérêt d'une bonne assistance. J'ère dans le gymnase comme une âme en peine au lieu de me focaliser sur ce moment de récupération. Spécialiste des distances "courtes"(40/70km), j'optimise toujours les postes ravitaillements en gardant de l'intensité. Au dessus de 80km, il faut en profiter pour baisser fortement dans les tours.
Il est autour de minuit et 6h de course. Nous nous approchons de la partie qui, pour moi, est la plus compliquée du parcours alors je me risque à regarder mon retard sur les projections de temps de passage.
J'ai une grosse surprise, j'ai une petite demi-heure d'avance, incroyable !
Cela me relance et me fait repartir (trop ?) vite.
Changement de stratégie alimentaire cette année, j'ai mangé rapidement. Est-ce que mon estomac appréciera ? Habituellement, je fais une grande partie du parcours sur l'énergie liquide. Est-ce que cela causera un surdosage ? Aujourd'hui je pense que l'effet fut marginal sur mon avancée. Peut-être ai-je moins bu à cause de cela ?
La nuit est assez sombre malgré un ciel découvert car c'est le dernier 1/8ème de lune que nous avons. J'attends avec une certaine crainte notre arrivée sur la côte atlantique car les longs passages sur plage de sable fin ainsi que les erreurs de balisages y sont fréquents. Avec le niveau de fatigue inhérent au kilométrage effectué, ces éléments peuvent vous causer des dommages irréparables.
J'entends les vagues et je débouche sur la plage. Il va falloir être très relâché, petits pas, pour économiser au maximum ce qui reste d'énergie. Musculairement cela tient et les douleurs vont et viennent de manière sinusoïdale. Je suis toujours doublé par les relais, plus frais, qui passent les plages avec beaucoup plus de dextérité que moi. Le pire est lorsque nous arrivons dans les rochers, je note que je commence à avoir du mal à plier les genoux. Surtout le droit ou après le tendon d'Achille, c'est le mollet qui devient douloureux. C'est de plus en plus curieux, je n'ai jamais connu cet enchaînement de douleur autrement que marginale qui disparaît en quelques kilomètres.
Les rochers ? C'est bien quand une flèche nous y dirige et que derrière plus aucune balise ne nous indique ou aller. Je laisse la direction aux coureurs du relais plus frais et nous sommes une bonne dizaine à crapahuter dans ces rochers avant de voir que le chemin des douaniers est au-dessus. Avec ma fatigue ces moments dans les rochers furent un supplice et je perdis rapidement le peloton. En me retournant je vis que le gros peloton de lumière, derrière nous, s'engageait sur la même erreur de parcours. Je l'ai eu encore cette année mon erreur du côté de StGildas, j'ai respecté la règle.
Clopin-clopant j'arrive sur le poste du Port aux moines de StGildas et vois avec plaisir mes femmes. Cela doit aussi commencer à être difficile pour elles, nous approchons de 2h du matin et je suis toujours en avance sur la projection. Cela me tient car la fatigue est vraiment présente et, en plus, je ne bois plus assez. Nathalie commence à se gendarmer à ce sujet, je balaie les arguments d'un revers de main et reste sur le surdosage avec le solide avalé. En analysant aujourd'hui à froid, j'en suis seulement à 3 litres pour presque 8h de course. Je risque une nouvelle déshydratation à ce rythme.
Apparaît L'inquiétude de ce difficile passage le long de l'Atlantique jusqu'à Arzon. Je mettrais sur ce compte les différentes alertes que le corps m'envoie. En particulier mes fameuses fourmis qui arrivent sur les mains. Pourquoi n’ai-je pas le réflexe de boire dès ces premiers signaux ? Pourquoi je ne m'oblige pas à prendre plusieurs gorgées comme j'oblige mes athlètes à le faire ? Je sais pertinemment qu'il faut se forcer à boire une boisson bien dosée dès que le dégoût ou le mal au ventre apparaît. D'ailleurs, dès que je le fais, le mal au ventre disparaît quelques centaines de mètres plus loin.
Il est compliqué d'aller à l'encontre de ses réflexes primaires.
Je repars en ayant simplement rempli à nouveau une flasque d'électrolyte et un combo Coca/StYorre.
J'ai (trop !) économisé ma poche à eau d'énergie bien dosée, je pense que je vais y taper dedans maintenant.
De jour, il y a 2 ans, même si ce fut un passage difficile, la beauté des paysages aidait. De nuit, c'est lugubre et froid. L'an dernier ce fut catastrophique avec la pluie et le vent glacial. J'y ai laissé ma "peau". Là c'est très lassant car même s'il semble que les portions de plages aient été réduites, c'est quand même très cassant. Et je m'enfonce de plus en plus dans les difficultés. Même si ma lucidité est moins atteinte que l'an dernier, les fourmis reviennent vite et parfois j'en ai même dans les jambes. Je laisse aux différents pelotons le soin de nous diriger car le balisage est parfois inexistant. Chaque année, sur cette portion, nous sommes nombreux à nous perdre par ici, alors je fais confiance à ceux qui s'engagent de manière assurée, pensant sincèrement être sur le bon chemin.
C'est ainsi que nous nous retrouvons devant une camionnette avec un bénévole. Ceux-ci étant peu nombreux pour sécuriser certains passages compliqués, nous sommes heureux de le voir. D'ailleurs la tête du groupe va le voir et discuter avec lui. Le temps que j'arrive sur place, j'apprends avec effroi que nous sommes perdus. Pire, le bénévole ne sait même pas ou il est et cherche désespérément ou il doit se placer en scrutant une carte à la lumière de sa camionnette. Devant son incapacité à nous diriger les relais rebroussent chemin. Avec ceux du Grand Raid, la fatigue nous l'interdit et nous tentons de nous diriger vers la rive, tentant de réduire au maximum le rajout de parcours effectué. Bien évidemment il n'y a pas de chemin clairement détaillé et durant de longues minutes nous nous demandons si vraiment nous allons retrouver le parcours. À chaque carrefour nous tentons de savoir où nous sommes. Il y avait bien quelqu'un qui avait la trace sur sa montre, mais il n'arrivait pas à comprendre ou il fallait aller.
Finalement, au bout d'une dizaine de minutes d'errance, nous apercevons au loin des lumières sautillantes. Nous imaginons des coureurs et fonçons droit dessus.
Ce n'était pas des coureurs mais les lumières d'un port. Nous cherchons ou les coureurs ont pu passer et finalement une balise apparaît. Nous scrutons pour voir si des coureurs apparaissent et au détour d'un restaurant nous apercevons une lumière rouge clignotante. Cela nous rassure et je laisse partir ceux qui sont plus frais.
La route est longue jusqu'à Arzon et le passage au Fogéo difficile. J'ai du mal à me situer, je souffre et m'inquiète de plus en plus. Nous rentrons régulièrement dans des coins habités, donnant l'espoir de s'approcher du ravitaillement, pour s'en éloigner rapidement. J'ai le plaisir de voir un bénévole à qui je demande si c'est loin. Il me répond par l'affirmative dans un grand éclat de rire. Je me renfrogne et repars dans l'obscurité.
Je cherche tout aussi désespérément l'hôtel Thalasso du Port Crouesty ou j'ai eu la chance d'une invitation dans une autre vie. Je le cherchais à gauche, alors qu'il était à droite. Je ne l'ai pas trouvé rajoutant à ma langueur. Pour la boisson, je ne vous ferais pas de tableau précis, mal au ventre, dégoût et fourmis, j'avais la totale de la déshydratation sans m'en préoccuper.
L'objectif de cette année étant de terminer, je commence à me dire que cela va être long d'aller jusqu'à Vannes si je décline ainsi. J'en oublie la projection et table sur une fin en marchant !
En plus quand je regarde l'heure, j'ai l'impression d'être affreusement en retard. Le calcul horaire classique me laisse à penser que je devrais être depuis longtemps au ravitaillement d'Arzon. Cela en rajoute une couche. Mon projet semble ne pas respecter ses balises.
Enfin nous apercevons le stade Chapron d'Arzon et ma fille Emilie. Elle m'assure que Maman est dans la salle pendant qu'elle prend froid dehors. Je rentre et vois ma compagne parlementer avec le bénévole gardien de l'entrée pour me rejoindre.
ARZON ET SES FOURMIS + Temps passage comparatif
Même si je suis rincé, je suis en bien moins mauvais état que l'an dernier, alors l'espoir d'aller au bout n'est pas complètement éteint. Je suis plus lucide, le moteur marche vraiment bien, je gère les douleurs musculaires, Achille et le mollet droit semblent tenir (sauf sur racine ou pierre), il n'y a que ma classique déshydratation qu'il me faut m'occuper.
Là je vais prendre toute la mesure d'une assistance sur mesure. Je m'enlève le sac, explique qu'il me faut rempoter la poche à eau de boisson énergétique ainsi qu'une flasque et remplir l'autre d'électrolyte. Ainsi, je peux me consacrer entièrement à la récupération. C'est royal ! Merci à ma chérie !
L'expérience de Guerlédan me laisse à penser que je peux y arriver. Je me fais gentiment réprimander par Nathalie qui me demande de manger et de boire. Je m'acharne, au contraire, à retrouver mes esprits par sieste flash tout en prenant un smoothie et quelques gorgées d'eau pétillante de-ci de-là.
Les premières minutes sont compliquées puis j'atteins un stade ou je peux me relever et faire un tour au ravitaillement. Je reviens et refais quelques sommeils flashs. Je repars piquer quelques carrées de chocolat, qui passent toujours très bien, ainsi que quelques chips. Mon sac est prêt, mais pas moi.
Nathalie me propose de me masser avec les produits Olisma (ex SOS AROMA) de l'ami Yann Renou. Dubitatif, je me laisse finalement faire. Je prends ma fiche horaire pour constater mon retard et... Surprise, je peux encore siester 15' ! J'avais presque 45' d'avance ! J'en profite et me relève 3' avant, mets mon sac, prends une rondelle de saucisson, et repars.
Les premiers mètres sont compliqués je marche vite puis, avec la respiration nasale, je relance petites foulées. Je crache la rondelle de saucisson bien mâchée et la machine repart !!! Je suis impressionné de ma vitesse de déplacement. Mon avance sur la projection en valide les sensations, je gagnerais encore du temps.
À ce sujet, le temps que j'arrive au port pour prendre le bateau nous avons le temps de faire un comparatif avec les années précédentes.
En 2022, tout frais, tout rose pour mon retour sur Ultra, je fais 80km de rêve avant de tomber en déshydratation à cause d'un surdosage de boisson dû à une préparation en urgence me faisant confondre Maltodextrine et Iso+. Le médecin m'arrête au 120èmekm
En 2023, motivé par l'analyse de l'année précédente, je pars (trop ?) vite et le mauvais temps à raison de moi. Déshydratation excessive, au 87ème km en m'asseyant j'ai une crise de vertige, je ne tiens plus debout, malaise vagal et souci pour ma santé. 2h après je suis toujours mal en point.
2024, après une année d'investigation cardiaque, me voilà arrivé au même endroit qu'en 2023, fatigué, déshydraté mais en maîtrise.
2022 13km/1h18' - 27km/2h39' - 51km/5h20' - 66km/7h14' - 79km/8h51' - 88km/9h41' - 95km/10h32' - 122km/14h18'
2023 14km/1h21' - 29km/2h44' - 43km/4h10' - 58km/5h59' - 70km/7h51' - 88km/10h17'
2024 14km/1h16' - 29km/2h41' - 43km/4h13' - 58km/6h03' - 71km/7h52' - 88km/10h17' - 95km/11h19' - 105km/12h32' - 120km/14h52' - 137km/18h03'
À l'analyse des chiffres, il apparaît que même si le parcours a changé de sens, la bonne hydratation des 80 premiers km de 2022 en montre bien toute l'importance. Pas de solide, maltodextrine dosée entre 80gr et 100gr/l, électrolytes avec Picolite, cela a bien marché.
Nous voyons également que c'est le mauvais temps climatique en 2022 qui me fait croire que je suis parti trop vite. La fatigue et un parcours sablonneux terrible m'auront usé plus que de raison et le froid m'a fait oublié de m'hydrater.
Cette année je suis finalement parti relativement vite même si mon classement montre bien un décalage par rapport aux années précédentes. Autour de la 60ème place en 2022 (surtout grâce à un passage marée haute, fait sans enlever les chaussures, qui m'a fait gagner 50 places) c'est autour de la 130ème place en 2023 et 200ème en 2024. J'ai quand même l'intention de remonter au fil des kilomètres si je fais gaffe à mon hydratation.
Le quai de débarquement n'est plus très loin, revenons à la course. Je constate que le balisage est très incohérent car il manquait de nombreuses balises à StGildas, et là, dans un virage goudronné du village, il y avait 4 balises espacées de 10m chacune sur le mur d'enceinte. Ils se sont fait plaisir ou chaque baliseur a voulu laisser Sa balise ?!?!?
Qu'en sera-t-il de l'autre côté du Golfe ? Nous allons le voir...
L'AUBE SUR LA TRAVERSÉE DU GOLFE
Je passe la barrière électronique et prends le poncho que me tend un marin. Avec le vent c'est une gymnastique pas facile qui s'annonce et chacun rit de bon cœur des difficultés de son voisin.
Je monte dans le bateau et m'assieds à côté d'un joyeux drille qui lance la conversation. J'ai le plaisir d'être à côté d'un ancien vainqueur issu de la fratrie des Dilmi, grands coureurs d'ultra que j'ai connu sur 24h. C'est Ludovic que j'ai rencontré sur différents championnats quand je suivais mes athlètes. J'ai même aidé Momo Magroun à le battre quand celui-ci prenait la tête des France et que Momo était complètement déshydraté. Après plusieurs tentatives, Momo a accepté mon protocole de réhydratation, s'est remis à marcher et 15 minutes plus tard, a pu courir normalement et reprendre la première place.
Là c'est Christian que j'ai à ma gauche. Il m'annonce avoir gagné l'UltraMarin en 17h il y a quelques années et nous dissertons sur nos souvenirs d'anciens combattants. Il a un magnifique palmarès et ne court aujourd'hui plus que pour le plaisir. Il finira en 22h, premier de sa catégorie.
Je suis bien, réhydraté, beaucoup mieux que lors de mon passage en 2022 dans l'autre sens. Le soleil se lève, c'est magnifique. J'ai le temps d'admirer ce paysage que l'obscurité de la nuit m'avait caché il y a 2 ans. Je n'ai aucun doute à ce moment sur la suite de la journée. J'ai passé le bateau, nous allons décrémenter les kilomètres, je me sens bien, il va me suffire d'être attentif à mon hydratation.
Nous voilà proches de débarquer, nous nous souhaitons bonne chance et recommençons la bagarre du poncho, pour l'enlever cette fois-ci ! Je jette la protection dans la poubelle et avise une tente pour me rhabiller au chaud. Un bénévole m'annonce que le chronomètre est reparti bien que je n'ai pas franchi la ligne. Il me précise que la RFID prend à distance. Je ronchonne et repars clopin-clopant en m'habillant tout en marchant. Cela me perturbe un peu car j'espérai prendre le temps de vérifier toute ma panoplie.
Nous voilà parti pour la seconde partie de la course, le retour sur Vannes !
JE VOLE + TOPO OLISMA
Nous sommes à Locmariaquer Le Guilvin, et cela commence par quelques routes de village ou je règle à nouveau ma vitesse.
Je vais connaître un moment de plénitude sur les kilomètres suivants.
Le jour se lève, il fait frais, je me sens bien, les voyants sont au vert, soyons attentifs et tout va bien rouler. Que c'est agréable d'avoir ces moments de bien être ou rien ne semble pouvoir vous arriver. Les kilomètres s'effacent rapidement, comme dans un programme bien huilé, sans surprise.
À quel niveau le spray articulation muscle de chez Olisma m'a fait du bien ?
Je ne saurais me prononcer. Après avoir dénié le droit de me masser à ma femme, je me suis laissé faire à Arzon et depuis, je n'ai plus mal aux jambes. J'ai bien Achille qui me titille et remonte le mollet droit. Cela semble des douleurs marginales non conséquentes de courbatures, ce qui m'inquiète un peu. Sinon, cuisses, hanches qui étaient sensibles avant de traverser le Golfe, semblent avoir trouvé une seconde jeunesse.
Merci Yann, ici avec ses filles championnes de natation, pour ce produit miracle à ce moment là..
J'ai donc immédiatement pensé à en remettre une couche lors de mon arrivée sur Crac'h.
Crac'h et son Espace les Chênes ou j'espère y voir mes femmes.
En effet, si moi je n'ai eu "que" 10km à faire pour rejoindre cet espace, mes assistantes ont eu 50km à faire pour contourner l'embouchure du Golfe. Non pas que faire 50km en voiture soit difficile, mais le faire à 5h du matin après une nuit blanche, n'est pas de tout repos. C'est pourquoi avant de franchir l'entrée de l'Espace Les Chênes, j'ai une petite appréhension. Seront elles la ?
Youpeee, elles sont là, arrivées depuis peu me semble-t-il car derrière la barrière. Pas grave, je prends une chaise et m'assieds en face d'elle. Je ne réalise pas que je ne refais pas les niveaux comme il faut et que depuis la traversée je n'ai presque rien bu. L'euphorie du spectacle du Golfe, des rencontres et de ma forme passagère m'ont fait oublier l'essentiel. Je suis tellement heureux de me voir en avance, d'être bien, de voir mes femmes que hormis un nouveau massage avec les produits de l'ami Yann, je n’effectuerais pas la "bonne révision" des 100km.
Par contre je papote !
Je repars quand même avec quelques gorgées volées à la table des ravitaillements et me dis que Vannes n'est plus très loin avec son final de fête. 🥳
LE MOTEUR A DES RATÉS
Vu le titre du chapitre, vous vous attendez aux pétarades du pot d'échappement ? Que nenni, tout va bien, je repars sabre au clair, transporté par la certitude de finir cet UltraMarin dans un temps correct. Je me vois déjà à l'arrivée, fêtant l'évènement quand une pointe me vient à l'estomac ⁉ 😳
J'ai bien Achille qui m'oblige à marcher régulièrement, mais comme l'a protocolisé "Cyrano" Jean Marc Dewelle, ses pauses me permettent de conserver un bon rythme.
Par contre je ne comprends pas cette pointe inquiétante dans l'estomac. Je tente de boire, me rendant compte que j'avais encore plein de réserves (Sic), mais j'ai des débuts de nausée. Pas grave, je vais boire et cela disparaîtra.
C'est effectivement le cas et je bois à chaque retour de douleur stomacale. Celles-ci reviennent de plus en plus forte à chaque fois et je n'analyse pas qu'il me faut boire davantage. C'est impressionnant comme parfois, malgré une expérience longue comme un jour sans pain, ou une maîtrise reconnu dans le milieu, il est quand même possible de perdre sa lucidité en course. C'est d'ailleurs un point qu'il me faudra préciser avec mon assistance et que j'applique quand je suis de l'autre coté de la barrière.
Ce n'est pas au coureur de décider quoi boire et quand boire lors de l'assistance, c'est à l'assistance de le faire. J'ai bien entendu ma femme sur le plan alimentaire et j'aurais peut-être trop mangé mais absolument pas sur le plan hydrique ou l'orgueil peut parfois faire croire que "l'on marche sur l'eau" alors que la chute est proche. Je n'ai donc pas écouté mon ange gardien me répétant que je ne buvais pas assez, mais les douleurs de mon estomac et sa (mauvaise) réaction primaire m'empêchant de boire.
Quand le corps est mis à rude épreuve, le mental doit assurer. Malheureusement, la lucidité quitte rapidement l'athlète et c'est l'instinct qui prend le gouvernail. Celui ci est nourri par les plaisirs procurés par des entrainements et des compétitions réussis. Il est aussi nourri par les images négatives des entrainements dit "difficiles" ou quand l'épuisement ou l'usure nerveuse ne sont pas loin, il ne reste que l'envie de tout arréter. C'est dans ces moments ou l'instinct ne prends pas la bonne décision qu'il faut avoir le sursaut d'écouter son assistance.
J'ai d'ailleurs eu une attitude déplorable quand mon assistance a tenté de mettre un peu de piment dans la course en se déguisant pour m'encourager.
Riche idée 💡, que je valide à 100%. Pourtant mon manque d'ouverture d'esprit à ce moment, m'a empêché d'en profiter et de faire de cette action un extraordinaire moment de partage. A l'avenir il me faudra faire ce que je demande aux athlètes, écouter et profiter à fond de mon assistance qui est bien plus lucide que moi.
Je recommence donc à avoir des fourmis dans les mains puis dans les jambes et c'est quand je commence à m'impatienter de ne pas voir le ravitaillement du Bono que je me rends compte de mes pertes hydriques. Je tente d'y remédier en buvant goulûment et me rends compte que je n'ai pas réclamé de mise à niveau complète à Crac'h. Je ferais avec, d’autant plus qu'Achille ne semble pas apprécier le parcours.
En effet le parcours reprenant le bord du Golfe, il y a souvent des racines qui dépassent. Achille ne les supporte vraiment pas et c'est mon mollet qui trinque. Déficit hydrique plus douleur jambe droite, je passe de l'euphorie à l'inquiétude d'un finish long en marchant. C'était moins dans mes projets et quand je passe le pont de Saint Goustan, je note que les pavés me font horriblement souffrir. Malgré mes douleurs, je peux toujours courir. Mais, ça m'inquiète de commencer à boiter. Même si j'essaie de ne pas compenser en me relâchant, je finis quand même par sérieusement claudiquer. Avec plus de 50km à faire encore, j'ai largement de quoi me blesser sérieusement.
Je chasse mes idées noires et profite du retour vers le Bono, dont mes souvenirs replacent ces passages de nuit. Je peux donc admirer de jour ce paysage agréable et cela me met un peu de baume au cœur. Je m'impatiente quand même de voir le pont me permettant de retrouver le ravitaillement ou je pourrais faire une pause. Je me sens las, surtout car j'imagine finir en marchant, cela va être long.
Je suis dans les arbres et ne vois pas ce pont libérateur. Je me fais de nouveau doubler ce qui n'arrange pas mon moral. Les marcheurs m'encouragent et m'indiquent un ravitaillement proche. Il me faut écarquiller les yeux pour apercevoir entre les feuilles le pont tant attendu.
Je le traverse en marchant, descends vers le ravitaillement et j'ai la joie de voir Emilie puis Nathalie m'encourager. Je souris faiblement car je suis "fatigué".
Je rejoins rapidement le point ravitaillement quelques dizaines de mètres plus loin. Je regarde le chronomètre et j'ai encore 30' d'avance sur la prévision. Je passe rapidement sur le stand, estomac en vrac et au lieu de boire, je décide de m'allonger sur un lit de camp, espérant la même réussite qu'à Arzon. Comme je ne bois pas, les 15' de pause n'auront pas le même résultat. A aucun moment je n'ai l'impression d'une quelconque récupération.
Je repars donc du Bono en marchant et n'arrivant que peu à courir. Je tente de faire bonne figure devant Nathalie, Emilie m'accompagne un peu. Je suis désolé car à cette vitesse, leur attente va devenir longue. De plus avec les kilomètres qui passent, les séquences de course se raccourcissent de plus en plus. Cerise sur le gâteau, nous allons emprunter le parcours du 56km avec les premiers qui nous rattrapent déjà. Je vais avoir des dizaines voire centaines de coureurs qui vont me dépasser. Autant sur un large chemin c'est agréable d'avoir du monde, autant dans les "singles" ou il est difficile de doubler, je suis désolé de bloquer les coureurs. Cela ne sera pas une partie de plaisir.
FANNY SUR LE 56KM
Je n'ai pas saisi de suite que c'était le 56 qui nous doublait. Quand je l'ai appris, je me suis dit que si le parcours était commun jusqu'au bout, j'aurais peut-être la chance de voir Fanny avant qu'ils ne repartent sur Dormans.
Les passages dans les singles m'obligent à courir tout du long, sauf quand je trouve un recoin pour me garer et laisser passer le troupeau qui s'est amassé derrière moi. À aucun moment un coureur n'a râlé d'être bloqué. Autant, lors de différents trails, j'ai pu entendre certains coureurs mécontents d'avoir quelqu'un qui fait bouchon, autant là je n'ai eu que des encouragements et aucun passage en force. Et lorsque je m'excusais de bloquer, la réponse a toujours fusé comme quoi je pouvais prendre mon temps, que je le méritais, qu'ils n'étaient point pressés, etc... J'ai ressenti une énorme bienveillance de tous les participants du 56km. Merci à eux.
Comme parfois nos chemins se séparaient, j'ai pensé que Fanny était finalement passée et que je ne la verrais pas.
La douleur jambe droite, après avoir attaqué le tendon d'Achille puis le mollet, s'en prend à mon genou. J'ai du mal à descendre les escaliers, cela retarde d'autant plus mon heure d'arrivée. J'ai un gros coup de moins bien, car je ne bois toujours pas assez. Un vertige m'oblige à m'asseoir sur un muret et je ferme les yeux, le moral est au plus bas.
Cela fait quelques secondes que je suis là quand j'entends la voix familière de Fanny. J'ouvre les yeux et j'ai la joie de la voir arriver, sourire aux lèvres.
Je sens un regain d'énergie et durant de longues minutes Fanny me fera le plaisir de m'accompagner. Malheureusement la réalité revient vite, je suis incapable de l'accompagner honorablement. Nous sommes 2 maintenant à faire le bouchon.
Elle m'a quand même permis de passer plus facilement quelques kilomètres me redonnant, passagèrement, l'espoir de finir.
Un grand merci à elle qu'il me faudra pousser pour qu'elle reparte vers son objectif qu'elle a brillamment réussi.
Je prends de nouveau un coup derrière le casque après son départ mais en buvant je retrouve des sensations. Mon estomac est toujours en vrac et les éclairs de lucidité me font passer outre les écœurements pour retrouver un peu mes esprits. J'arrive même à voir un robinet de ravitaillement "sauvage" installé "à la va vite" par l'organisation. J'ai du mal à passer le fossé pour y aller et je m'y rafraîchirai.
J'ai un peu le "seum" comme disent les jeunes, car mes fourmis disparaissent sans que je puisse recourir. De longues portions de goudron ou j'aurais pu gagner du temps se finissent à même pas 5km/h. Les douleurs sont de plus en plus vives et pour couronner le tout, je ne sais même pas pourquoi cela m'arrive aujourd'hui. Pas de choc, ni de foulée déséquilibrée et encore moins de chute traumatisante. Je ne suis tombé qu'une fois, sur terrain mou, sans aucune séquelle apparente, même pas une éraflure.
J'arrive dans Larmor Baden, le ravitaillement n'est plus très loin et je marche de plus en plus difficilement. Je commence à imaginer que je ne pourrais pas terminer cet UltraMarin. Je suis maudit sur cette course. J'avance de plus en plus lentement au prix de grandes souffrances. La peur de me blesser durablement m'angoisse. Est-ce que cela vaut le coup de tenter de finir ? Il reste moins de 40km, ce qui n'est pas énorme, vais-je le tenter ?
En passant la ligne à 12h26', encore dans les temps malgré ma marche, je n'y croyais plus trop mais en voyant mes chéries m'attendant sous la tente avec les ravitaillements, je me suis dit "alors, peut être ?"©Patrick Montel.
Quand j'ai voulu m'asseoir, le doute, avec les douleurs, m'a assailli et je n'y ai plus cru. Emilie et Nathalie m'ont indiqué qu'il y avait des élèves ostéopathes, un filet d'espoir est apparu, allons les voir, sait-on jamais ?
LE GRAIN DE SABLE DANS UNE BELLE MÉCANIQUE
Claudiquant je me dirige vers la salle et patiente avec Emilie. Elle est très attentionnée et fait le lien avec sa mère pour me ravitailler durant l'attente. Vient mon tour et je m'installe pour l'interrogatoire habituel.
Rien de particulier, je lui signale mes maux et rapidement viens la question des chaussures.
Je lui réponds que ce sont des chaussons, que je n'ai pas une ampoule, que j'ai acheté cette paire il y a peu et que j'en suis entièrement satisfait. Il n'y a pas de débat avec elles.
N'y arrivant pas tout seul, Emilie m'aide à les enlever et je souffre pour retirer la droite.
Etonnant alors que j'y suis bien dedans, non ?
Je m'allonge et quand la jeune fille me manipule les chevilles, je ressens une douleur très vive sur ma malléole interne droite. Je suis choqué car avant d'enlever la chaussure, je ne ressentais aucune douleur à cet endroit. Je regarde ma cheville, elle fait le double de volume de la gauche qui, avec les kilomètres, a aussi quelques œdèmes. Que s'est-il passé ?
Il est clair qu'à ce moment-là il n'est plus question de continuer, je n'arriverais pas à remettre ma chaussure correctement. Que s'est-il passé ? (bis)
On me demande si j'ai chuté ? Si je me suis fait une entorse ? Un choc important à la malléole ? Rien de tout cela !?!?!
À la fin de la séance, il m'est demandé de consulter rapidement un médecin pour suspicion de fracture.
Mon orgueil (Sic) m'empêchant de me déjuger sur la qualité de mes chaussures, je n'avouerai pas l'idée qui me trotte dans la tête depuis la douleur de la malléole.
Me voilà obligé de rendre mon dossard.
Pour un grain de sable passé inaperçu au milieu d'une bonne préparation, ce fut un magnifique grain de sable qui m'empêchera d'aller au bout de cet UltraMarin.
En effet, j'ai acheté ces chaussures pour l'Alpsman fait 3 semaines auparavant. Elles étaient quasiment neuves. Il ne fallait donc pas les utiliser, n'est ce pas ? J'ai quand même jugé que je ne prenais pas un gros risque et qu'au pire, je finirais en marchant car l'objectif, sur cet Ironman, était sur les 25 premiers km avec la cloche du tournant.
Cela s'est très bien passé et je n'ai rien trouvé à redire sur l'utilisation de ces chaussures. Fort de cet enseignement, je les ai choisies pour l'UltraMarin.
En voiture, sur la route de Vannes pour aller au départ avec les chaussures au pied, j'ai bien senti une légère gêne sur malléole interne droite, signe d'un entourage de chausson trop haut. Je n'y ai pas pris garde me référent à la réussite de mon marathon.
La, tout s'éclaire... La répétition des petits chocs sur la malléole sur autant de kilomètres a créé une inflammation, des œdèmes, un déséquilibre, douleurs au tendon d'Achille, mollet et genou.
En prime, j'avais même une paire de chaussures de rechange à mi-parcours que je n'ai pas voulu utiliser quand ma compagne me l'a proposé. C'est fou comme les choses ne fonctionnent pas parfois...
J'étais loin de me douter que cette petite gêne dans la voiture allait être la cause de ma perte sur cet UltraMarin. Je n'ai pas pu recourir pendant 10 jours, conservant l'œdème 8 jours malgré chaussettes de contention et pansements américains d'alcool. Je ne suis presque jamais bloqué ainsi après une compétition. Que ce soit sur ultra ou Ironman, depuis 2001 et mon crash aux 24h de Saint Fons (198km), j'ai toujours repris la marche le lendemain et la course à pied, normalement, 2 ou 3 jours après.
Je me suis inquiété car les douleurs ne s'évanouissaient pas avec les jours qui passaient. Comme l'inactivité n'est pas bonne, nous avons marché en Normandie plus de 40km sur un week-end prolongé, visitant, entre autres, les plages du débarquement. Miracle, après ces 4 jours, les douleurs avec pratiquement disparues.
Que déduire de cette aventure ?
CONCLUSION
Vous êtes là ?
Jamais 2 sans 3... 3ème fois que j'abdique sur ce parcours apparemment "facile" de l'UltraMarin. Troisième fois que je mets le genou à terre et que je ne peux arriver au bout. Je m'étais pourtant promis de finir coûte que coûte, comme Hélène et Yann l'avaient admirablement fait l'an dernier.
Impossible... Même si la tête le voulait, la jambe droite s'y refusait.
J'ai encore pas mal appris sur ces quelques heures autour du Golfe. La bonne surprise fut l'apport immense de Nathalie et Emilie en assistance. J'ai eu la chance d'avoir mon fils Théotime en "support team" à l'Alpsman, la configuration n'était pas la même mais je regrette, p.e., de ne pas l'avoir plus impliqué sur les ravitaillements vélos.
Beaucoup me diront que je connais par cœur cette fonction, je leur répondrais que si j'ai toujours fait de l'assistance, cela fait longtemps que pour moi, je n'en avais eu d'aussi présente !
J'ai, entre autre, de belles réussites avec les Zanimoss, des records et des podiums avec assistance performante. Depuis 10 ans, avec le retour sur des courses "courtes", je me suis auto-assisté, oubliant les avantages d'être accompagné.
C'est un plus de s'appuyer sur une assistance, j'en suis conscient. Lorsque je le suis, après avoir fixé les règles avec l'athlète, c'est moi qui lui impose les ravitaillements, les habits et la stratégie. Cette année, j'ai eu du mal à m'y soumettre par manque d'habitude, je le ferais volontiers une fois prochaine, c'est tellement rassurant.
De nouveau, j'ai manqué mon rendez-vous d'arrivée avec les Benoits. Si jamais, un jour, je finis, "Z'avez intérêt" à être présent sur la ligne mes bons messieurs, car j'ai du retard dans les franchissements de ligne en vainqueur. En vérité, cette année, en dehors du Tiken, j'ai eu peu de satisfaction à l'arrivée même quand je gagne ma catégorie. J'ai donc beaucoup appris !
Il va me falloir quand même transformer en réussite toute cette expérience que j'amasse !
ET DEMAIN ?
Comment la transformer ?
Durant les jours de douleurs j'ai dit et répéter "c'est fini, plus d'ultra, je laisse cela aux jeunes". Les douleurs parties, le cerveau oublie et l'accumulation d'expérience donne envie d'y retourner.
Chuuut, c'est entre nous, car j'ai promis à ma chérie de mettre un peu entre parenthèses l'accumulation de ces compétitions. En théorie elle ne viendra pas lire ici, alors je peux vous confier que l'envie est de retour... Envie de quoi ? Pas ou plus vraiment de souffrir. Plutôt envie de maîtriser bien mieux, de préparer avec plus de pertinence et moins de temps. Gérer au mieux mon calendrier, ne pas faire dans l'urgence, simplement... M'occuper de moi comme je m'occupe de mes athlètes !
Gérer mes objectifs comme je gère un projet classique, y incorporant les envies de chaque composante, avec des balises bien précises. Cette année, je voulais pousser le bouchon assez loin physiquement pour savoir si je pouvais outrepasser ces baisses de tensions sans séquelles apparentes. Objectif réussi !
J'ai vu, j'ai testé et cela m'a grandement fatigué. Avec plus de maîtrise et moins de fatigue, ces balises seraient sûrement mieux passées. À la rentrée j'ai déjà un triathlon L à faire en cote d'Armor et peut-être un Rallye WRC(*) aux Jambes d'Allaires, idée iconoclaste de l'ami Yannos. Il va me falloir reprendre natation et vélo. Justement, le vélo est une clé importante, quand nous prenons de l'âge, pour faire des intensités non traumatisantes avec récupération facilité. Si je double mon kilométrage, notamment avec le HTV connecté, je gagnerai en temps et en puissance.
Merci à tous, tout d'abord lecteur d'être arrivé ici, suiveurs sur les réseaux sociaux de toute origine, famille, Zanimoss, Coureurs de l'Aff, CNP Redon, copains/copines et rencontres faites au fil de la course. Bien évidemment un petit clin d'œil à mes parents et remerciements appuyés à ma chérie Nathalie et ma fille Emilie avec qui l'équipe avait fière allure (Merci pour les photos et les films qui peuplent ce CR)
A bientôt, sur les routes, chemins ou réseaux !
L'Papy
(*)https://youtu.be/RN-3XHi-XcA 65km avec 10 spéciales !
https://www.traildesjambesallaire.fr/les-courses/wrca.html
EDIT : Si vous êtes encore là, voici un complément d'information sur mes relations avec ces chaussures Scott Kinabalu RC. Cela fait 15 jours que j'ai repris normalement l'entrainement, courant en minimaliste.
Pour une reconnaissance en forêt de Brocéliande, à la poursuite des légendes Arthuriennes, j'ai remis ces chaussures avec un supplément en Sorbothane sous le talon. Ainsi, je pensais surélevé ma malléole et eviter le "grain de sable".
Las... Au bout de 8km le tendon s'est mis à couiner puis le mollet et le genou au bout de 13km.
Il n'y a que la Malléole qui n'a pas souffert. J'ai donc un souci personnel particulier avec cette chaussure.
Est ce le drop ? 🤷♂️
Il va me falloir faire quelques tests supplémentaires pour affiner mon diagnostique.
Cela me navre car le confort était exceptionnel !
10 commentaires
Commentaire de PhilippeG-638 posté le 28-07-2024 à 17:16:06
Merci Papy pour cet édifiant récit, décidemment...
Dommage mais 2 choses m'interpellent:
Tu l'écris bien au début: "J'avais donc quelques voyants à l'orange avant le départ" ce que je n'arrive pas à comprendre c'est que malgré ta grande expérience tu tentes quand même cette course très difficile alors qu'à mon humble avis on ne doit en prendre le départ qu'à la condition d'y être parfaitement bien préparé ?
Ensuite, 2e point, encore à mon avis, tes courses de préparation ne sont pas assez longues, une distance d'environ 100km et sur du plat, deux mois avant, me semble indispensable, c'est du moins ce que j'envisagerai pour ma part.
Dernier point, tu le relèves: "Gérer au mieux mon calendrier, ne pas faire dans l'urgence..." c'est exactement cela, un calendrier se planifie sérieusement, on n'aligne pas des course comme on enfile des perles, et en plus tu dois le conseiller pour les athlètes que tu entraînes, d'autant plus qu'en avançant dans les catégories il faut prendre encore plus attentivement soin de sa préparation ;-)
Sinon encore bravo et félicitations de cette nouvelle tentative et récit, j'espère que cela sera instructif pour tous car de réussir est un véritable plaisir et moteur :-)
Partie remise ? Bonne poursuite dans tes prochains défis et compétitions !
Au plaisir:
Philippe
Commentaire de Papy posté le 30-07-2024 à 17:20:44
Merci de ton retour et de tes questions.
*Préparé ?
J'avais un objectif en rapport avec ma préparation et sans ce grain de sable, j'aurais terminé. Je n'avais aucune ambition au classement comme les années précédentes, juste être finisher le mieux possible.
*Faire un 100km avant ?
Pourquoi pas... L'Alpsman me permettait d'avoir des heures cardiaques moins éprouvantes qu'en CAP. Et comme le Guerlédan m'avait déjà couté 10h, ce n'est pas de ce coté là, AMHA, que le bat à blessé.
*Calendrier
C'est l'évidence quand cela est possible. Dans ma situation actuelle, j'ai plusieurs vie, je cours après le temps. Si la retraite me rattrape, je pourrais surement mieux planifier mon année et avoir plus de temps pour mes proches.
Dans tous les cas, depuis que je te connais, tu maintiens une qualité sportive que je suis loin d'avoir. J'encourage ce qui ne te connaissent pas à aller sur ta fiche et voir ton palmarès. Un jour, quand je serais grand, je serais un PhilippeG-XXX (il faudra que tu m'expliques les changements de chiffre, c'est le nombre de course ?)
Commentaire de PhilippeG-638 posté le 30-07-2024 à 19:19:17
C'est vraiment étonnant ce choix de chaussures qui ne sont pas adaptées ? Et pourtant tu les avais testées pendant 25km...
Sinon, pour moi, l'entraînement sur ce genre de distance ne peux se faire qu'en pratiquant beaucoup de cap et en plus sur terrain similaire.
Ok le triathlon te permet de faire du cardiaque mais pas la répétition des chocs de la course.
Passer de 10h au double, il y a une grosse marche manquante. Je ne dis pas que ce n'est pas faisable mais une grosse galère à envisager.
C'est ma façon de voir les choses bien sûr ;-)
Non, merci mais faut pas me copier :-) J'essaye d'être très prudent pour ne jamais abandonner (jusqu'à présent) et conserver beaucoup de plaisirs, surtout grâce à la récupération et la préparation.
(Bravo Papy, à chaque course c'est +1, donc la prochaine du 4 août devrait être la 63xe... Si tout va bien)
Commentaire de Papy posté le 24-08-2024 à 20:02:25
Pour les chaussures j'ai l'impression que ma cheville droite ne supporte plus les drop supérieur à 4mm.
Comme je prends de l'amorti en trail (et minimaliste sur route/marathon) j'ai souvent du 4mm en Kiprun ou 0 de drop en Altra. J'ai tenté 8mm en Scott sur 2 modèles, les 2 me font mal 😰
Pour un "One Shot" il n'y a pas besoin de beaucoup répéter pour réaliser une perf correcte avec un moteur de base. J'ai ainsi eu des athlètes ne pouvant faire plus de 45' de CAP sans grosse douleur au genou, réussissant l'UTMB avec un entrainement adapté.
Le Lieutenant Blueberry est aussi dans ce cas, il a bouclé l'UTMB avec une arthrose du genou (ménisque en moins) et, si je me souviens bien, grâce au triathlon et au entrainements croisés. Pas de longue sortie en CAP.
Commentaire de La Tortue posté le 19-08-2024 à 18:28:24
papy, j'ai tout lu
ce qui me frape le plus dans ton récit est le nombre de questi9n que tu te poses tout en courant. je te l'ai déjà dit et je te le redit une énième fo8s ,= arrête de te poser tant de questions, tu te fatigues inutilement. regarde le paysage, appréciae le moment présent, ne te projette pas trop loin dans la course et ça ira beaucoup mieux.
les dosages de boisson, la respiration nasale, le matériel.., tout ça, ce sont des conneries. en ultra le mental et le plaisir sont les 2 seules choses qui permettent d'aller au bout
pense y pour 2025 et ça va passer crème surtout avec ta super assistance.
ho hisse mon papynou
Commentaire de Papy posté le 24-08-2024 à 19:47:18
Pour être simplement finisher, c'est effectivement la bonne méthode et tu l'as bien démontré depuis le premier Mercantour en gérant les barrières horaires.
Mais il est vrai que j'ai toujours voulu optimisé mon pauvre 53 de VO2max pour aller plus vite. Et, comme tu l'as remarqué à l'Altriman, nous vieillissons. Ceci écrit, j'admire quand même le paysage et tous les détails de courses ne sont pas des PDT, juste une bonne mémoire avec une réflexion d'écriture durant la course 😂
Commentaire de laulau posté le 20-08-2024 à 09:05:16
Je viens de lire ton récit de course...quel dommage de devoir t'arrêter avant la fin encore une fois !
Peut-être, comme le dit La Tortue, tu réfléchis trop ! Mais ça passera en 2025 !
Commentaire de Papy posté le 24-08-2024 à 19:48:34
Merci Laulau.
Je ne réfléchis pas trop, je suis un "mentaliste wikipédia" d'après Fabien Olicard 😅
Commentaire de LtBlueb posté le 21-08-2024 à 15:18:23
C'est long ton récit mon papy !!
Je ne vais pas reprendre les idées / commentaires que j'ai vu passer sur whatsapp , et auxquels j'adhère en grande partie .
Par contre, juste une suggestion et si tu y retournais en 2025 pour FINIR et non plus PERFORMER (donc MOINS VITE) . Tu te cales sur les barrières (avec une marge), tu bois et tu vas au bout : tu as la chance à ton âge d'avoir un sacré physique / cardio alors si tu diminues la zone de pression psy avec un objectif "facile" , à mon avis ca doit passer crème...
Je pense que ton approche hyper optimisée de compétiteur ne laisse pas beaucoup de marge aux erreurs ou aléas
Commentaire de Papy posté le 24-08-2024 à 19:55:37
C'est long, c'est pourquoi il y a du chapitrage avec renvoi.
Ne te souviens tu pas de mes écrits au début du siècle ?
Je n'ai pas vraiment un sacré cardio/physique au grand dam des différents médecins qui m'ont testé et qui croyait avoir un gros moteur avec mes résultats. J'ai juste 53 VO2max...
J'avoue avoir du mal à penser finir autour de 40h, il faut un sacré mental que je ne penses pas avoir. C'est pourquoi je préfère tenter d'abréger.
J'ai également à résoudre le souci de malléole car depuis l'Ultramarin, hormis en minimaliste, je ne peux plus faire plus de 10km sans avoir ma cheville droite qui me titille.
Or je cours surtout sur terrain de trail et j'ai besoin d'amorti dans les descentes. Je vais revendre mes Scott et tenter les Kiprun 4mm...
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