Récit de la course : Ultra Boucle des Ballons 2024, par Zaille

L'auteur : Zaille

La course : Ultra Boucle des Ballons

Date : 13/7/2024

Lieu : Munster (Haut-Rhin)

Affichage : 359 vues

Distance : 208km

Objectif : Terminer

3 commentaires

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Premier 200k

L’U2B, l’Ultra Boucle des Ballons, je connais ! Du moins je connais le tracé sur lequel je me suis promené en solitaire 3 jours durant en octobre dernier. 3 jours d’été indien, de bières en terrasse et de km de bitume. J’avais adoré cette expérience de course à étape mais loin de moi encore l’idée d’avaler ce plat de titan d’une seule traite !

 

Mon plus grand défi de coureur

L’ami Joseph, inscrit depuis bien longtemps, a tout fait pour me convaincre. Ce n’était pas tâche facile pour lui car même après une reconnaissance organisée par le maître de cérémonie, MC Christophe, plutôt bien exécutée/digérée, je doute et redoute.

Mais voilà, le jour arrive ou finalement je clique et j’ e-poste ma volonté de me lancer dans mon plus grand défi de coureur à pied. Avec ces 208km et 5000m de D+, je ne trouve pas d’équivalent dans mon CV. Je peux au mieux me référer aux 2x78km de ma LyonSaintéLyon pour avoir une approximation de ce que je vais endurer mais est-ce vraiment comparable ? Ici pas de pause de mi-course de plusieurs heures mais une barrière horaire de 36 heures !

 

30 heures

Très vite je me fixe un objectif de temps. Non pas pour jouer un chrono mais plutôt pour avoir une colonne vertébrale, certes très théorique mais qui va me rassurer et aussi m’empêcher de faire n’importe quoi sur un format que je ne connais pas. A grand renfort de spéculation à base Garmin Pace Pro et de tableau Excel, j’échafaude ma stratégie et fixe, un peu au doigt mouillé quand-même, une arrivée en 30 heures. Ok, ça, c’est dit !

Les dernières semaines, mon entrainement se borne à borner mais sans excès juste à coup de 10 ou 20km en endurance fondamentale. Je compte sur la mémoire de ma veille carcasse pour qu’au moment opportun elle se souvienne que l’ultra c’est du déjà vu, j’espère juste qu’elle ne me tiendra pas rigueur de mon arrondi kilométrique à la centaine supérieure.

 

Du beau monde

12 juillet fin après-midi, je me rends en train à Munster pour y retrouver une partie de l’organisation et récupérer mon dossard. Mon voyage en train a été sans surprise jonché de retards et de correspondances ratées mais tout cela devient tellement anecdotique une fois sur place. En plus du dossard, Christophe a confectionné son traditionnel trophée en bois pyrogravé : « U2B #4 ». 4ème édition et j’en suis, je commence à réaliser.

Une nuit courte et pas franchement sereine me fait arriver avec Joseph au lieu de départ encore un peu dans le coltard. Il n’est pas 6h du mat mais il y a déjà du beau monde prêt pour cette ultra-folie. Je reconnais quelques gloires de l’ultra et me sens incroyablement chanceux de partager une course avec ces champions : Christian, Jean-Louis, Jean-Louis (oui ils sont deux et pas des moindres), Julia, Bob, … j’en oublie mais je ne les connais pas tous, pas encore.

 

Prudence

Le départ est donné au parc de la Fecht à Munster devant la statue de Poséidon. Ce dernier nous ignore divinement mais demande cependant qu’une fois la tâche accomplie, son pied soit baisé afin de valider notre épopée. Nous espérons tous avoir cet incroyable honneur et c’est après quelques mots de notre gentil organisateur que la cohorte d’ultra-fêlés (24 solos et 3 duos) déroule ses premières foulées pour s’extirper de Munster.

Premiers km avec Joseph. Il pense qu’on va trop vite malgré notre micro-foulée et le passage à la marche au moindre faux-plat. Il me demande de ne surtout pas me forcer à me caler sur son allure mais j’ai opté pour la prudence et mes temps de passage programmés sont plutôt confortables, on restera ensemble, à la marche, quasi toute la montée de plus de 10km vers le col du linge.

 

On est bien là !

Première descente, je trottine, je suis seul mais rejoins rapidement les deux Jean-Louis (JCV2) en plein discussion. Je m’incruste, ça parle Spartathlon, ça m’intéresse et squatte un peu la conversation avec mes questions de newbie. L’ultra me fascine et là je suis au bon endroit pour avoir réponse à tout. Les premiers km passent très vite ainsi et c’est avec un peu d’avance sur les 3h prévues que j’arrive au CP1, km19, le ravito du Lac Noir.

J’ai découvert les ravitos et les cantiniers made in U2B lors de la reconnaissance d’il y a 6 semaines et il n’y a aucune commune mesure avec ce que j’ai connu par ailleurs. Le choix et les produits proposés sont exceptionnels mais pas tant que ces bénévoles qui sacrifient leur week-end pour nous, pour moi. Je trouve ça hallucinant voire touchant. J’adore mais, car il y a un « mais », la conséquence est que j’ai souvent du mal à repartir. Peu importe, je suis en avance et malgré l’ambiance venteuse, je m’attarde un peu, je papote, je saucisson-coke ... On est bien là !

 

Km totalement indolores

Je pars dans les 3-4 derniers de ce premier ravito mais je n’ai aucun stress mis à part gastrique qui me fait me cacher derrière un arbre en forêt avant de repartir d’un pas plus léger mais toujours prudent vers le CP2 22km plus loin. Je vois Joseph et Jessie au loin et les rejoins au bout de quelques km. Je m’incruste une fois de plus et fais connaissance de ce petit bout de violoniste avec qui j’accroche très vite sur la vision de la course à pied et de l’ultra. On passe ainsi un bon morceau de crêtes vosgiennes ensemble avec des km totalement indolores.

Bientôt le Hohneck et ses lacets pour atteindre le CP2 au km42. Je gravis la difficulté avec l’un des Jean-Louis, Crocsman, un personnage des plus original. Rituellement flanqué de ses Crocs (0% carbone), une chemise colorée et un chapeau de paille, il est le plus reconnaissable de nous tous. On discute un peu de tout, des Kikourous (je porte la casquette) et d’ultra évidemment ! On arrive ensemble à la table d’orientation du Hohneck ou une boîte en fer cache un dossard à notre numéro à déposer au ravito en contre-bas pour preuve de point culminant atteint.

 

L’étape la plus longue

CP2, Il n’est pas loin de midi et j’ai plus d’une demi-heure d’avance. J’en profite pour m’installer confortablement sur une chaise et prendre un petit apéro suivi de mini-sandwichs. Un Yabon en guise de dessert me calera définitivement pour repartir tranquillement en descente dans les lacets d’avant. La route commence à être chargée, nous sommes samedi, il fait beau et le touriste veut lui aussi profiter des monts et ballons.

Le prochain CP est à 24km, à Kruth, l’arrivée de la reconnaissance, c’est l’étape la plus longue. Je commence à connaître ce tronçon, encore quelques kilomètres avant de bifurquer dans une longue descente en lacets avec beaucoup moins de circulation. J’y rejoint à nouveau Joseph et tous les deux nous décidons sagement de ne pas tout courir mais de faire quelques hectomètres de marche de temps en temps par instinct de préservation, de survie.

 

Hâte de me coltiner la prochaine difficulté

CP3, km65, j’arrive avec 25 minutes d’avance. Une fois de plus je m’installe, je prends mon temps et bois ma première Tourtel citron, quel bonheur et en plus elle est fraîche ! Il fait chaud mais on a la chance d’avoir un parcours majoritairement ombragé. J’envoie quelques nouvelles à des amis et à la famille : « Plus que 143km ». Je suis bien et j’ai hâte de me coltiner la prochaine difficulté, le Col de L’Oderen.

Lors de mon OFF sur 3 jours j’étais logé à Kruth et j’avais démarré la journée avec le col de l’Oderen, j’ai donc quelques souvenirs sur ce beau morceau de 8km suivi du petit col du Page. La montée est longue et les voitures/motos un peu trop présentes. La chaleur est elle aussi beaucoup plus présente à cause de portions pauvres en ombre. Je suis seul et décide d’écouter un premier podcast. Au loin, Joseph qui était une fois de plus parti plus tôt du ravitaillement. Je vais le rejoindre en-haut du col.

 

Le Ballon d’Alsace est juste là à nous attendre malicieusement

Dans le col du Page on rejoint Fred en duo avec Victor mais il se plaint de douleurs et connait un mauvais jour. On reste quelques minutes avec lui avant de descendre sur Bussang puis Saint-Maurice-sur-Moselle. Dans la première partie bien descendante on dépasse l’autre Jean-Louis, VIDAL. De loin on avait l’impression qu’il penchait mais tout va bien pour lui et c’est tant mieux.

Avant le CP4, km87, on dépasse un autre duettiste sur la longue voie verte où l’ombre se fait parfois timide. Il semble très affaibli et profitera du CP pour s’allonger sur un banc. Je suis également très content de pouvoir m’installer un peu et papoter avec Nathalie & Cie une Tourtel à la main. On est à l’ombre et le premier ballon, le Ballon d’Alsace, est juste là à nous attendre malicieusement. 9km de montée suivis d’autant de descente sont au programme. Je m’extirpe de ma chaise avec 25 minutes d’avance, RAS.

 

100 !!!

Les premiers lacets sont totalement à découvert, la chaleur est pesante pourtant il est quasi 19h00. Les km sont indiqués un à un par un panneau en bord route indiquant le pourcentage de 7% … Oui, ça monte. Au loin, je revois Joseph parti comme à son habitude plus rapidement que moi du ravito, je vais le rejoindre un peu avant le sommet. On peste un peu tous les deux contres les motards qui ne nous font pas toujours sentir en sécurité sur cette route.

Il est environ 19h30 une fois en haut et on profite d’une vue magnifique et d’une circulation enfin apaisée. On s’approche des 100km et ça nous met un peu de baume au cœur. Dans la descente on fait le décompte : encore 3, plus que 2 …. 100 !!! Je lève les bras, cent bornes ça se fête ! L’objectif maintenant c’est le CP suivant, là où j’ai laissé mon premier sac de délestage avec des affaires pour me changer de la tête aux pieds. J’y ai également prévu une pose prolongée pour me masser un peu, me faire du bien en tout bien tout honneur.

 

Le flow

CP5, km105, la mi-chemin et le jour se fait timide. Nos anges gardiens commencent à se les peler, les pauvres ! Je m’installe comme prévu en prenant mon drop bag et commence à étaler mon bazard. J’ai même prévu un petit entonnoir pour qu’on puisse me remplir les flasques avec ma poudre ISO (Merci Martial). Je change de chaussettes, de tour de cou et de maillot. J’ai même la serviette pour m’essuyer, c’est royal. Je me sens tout neuf à présent.

Frontale sanglée sur la tête, je pars rejoindre la nuit avec toujours cette petite demi-heure d’avance. J’ai d’abord froid malgré mon Odlo à manches longues, je grelotte en courant, mais très vite je me sens mieux, bien puis très bien. Je reconnais cette belle descente vers Masevaux, pentue juste ce qu’il faut, enclavée dans les monts vosgiens. Le moment de grâce, c’est maintenant. Le flow comme certains l’appellent, le moment où tout va bien et où une forme anormale te fait dérouler à des allures jusqu’ici oubliées. Je vais peut-être en payer le prix plus tard mais je ne veux pas bouder mon plaisir.

10km durant je « fonce » aux alentours des 6:00 au kilo. Je m’arrête juste une minute pour marcher avec un coureur dans le dur (Pierre ?) pour repartir à bon rythme. Je suis à présent sur une voie verte en léger faux-plat descendant. Je croise des promeneurs et revois un éclairage de frontale au loin, c’est Joseph, encore !

 

1h d’avance

Avant le CP6 je sais qu’il y aura une bonne montée, pas longue mais costaud, ça sera l’occasion de remarcher un peu. Je traverse Masevaux et sa fête du 14 juillet, bientôt ça sera l’heure du feu d’artifice, il est 22h et je bifurque à gauche pour embrayer la fameuse montée vers le ravito du km123. Soudain, dans mon dos, le bruit d’un coureur à bonne allure. Sans me retourner je devine que c’est Victor qui a pris le relais de Fred. Il est en pleine forme. On échange 2-3 mots et le voilà reparti.

CP6, je m’installe 10-15 minutes, j’ai quasiment 1h d’avance, je ne sais pas si c’est bien raisonnable d’autant que je commence à avoir des petits problèmes d’alimentation. Rien de me fait envie et je suis obligé de me forcer à avaler quelques tartines de pain/fromage. Je commence aussi à avoir froid et décide donc de repartir fissa dans le col de l’Hundsruck pour achever la montée avant la descente sur Thann.

 

L’idée d’être finisseur

Mes côtes me font mal, je ne supporte plus les flasques dans mon gilet. Ce gilet expérimenté pour la première fois (je sais ...), je pense que je l’ai mal réglé, pas assez serré et les micro-impacts sur mon torse des flasques mal ajustées ne passent plus. J’ai beau resserrer au maximum, c’est trop tard, le mal est là. Je porterai donc à présent mes flasques à la main, j’en ai un peu l’habitude, ce n’est pas si grave.

La pénombre nocturne offre une ambiance particulière. Il n’y a plus de circulation sur les routes et le seul bruit que l’on entend parfois et celui des animaux détallant à mon passage. A travers quelques arbres, une lumière plus diffuse me fait deviner quelques feux d’artifices dans la vallée où les gens, les gens normaux, festoient la nation comme il se doit. Mais je suis bien là, je crois que je commence à me faire à l’idée d’être finisseur ou finisher, c’est selon 😉

 

Les yeux rivés sur la montre et la trace

Descente sur Thann, je suis toujours seul mais à l’approche de la première agglomération depuis le col, des LEDs lumineuses clignotantes au loin, je crois que c’est re-Joseph, décidément ! Effectivement et nous re-voilà en binôme sur une grosse partie bien chiante. Du plat légèrement descendant sur voie verte ou en zone urbaine. Le balisage, parfait de journée, est ici invisible et c’est les yeux rivés sur la montre et la trace qu’on avance jusqu’au pied de ce vieil Armand.

CP7, km145, il est 2h du mat’ et presque 1 heure d’avance. On a remonté 2 coureurs dont Luc et en arrivant, Nicolas est attablé et pas en super forme. Moi ça va mais Joseph et nauséeux alors que jusqu’ici tout allait tellement bien pour lui. On prend le temps, un petit massage des cuisses me ferait du bien, les quadris font la gueule mais c’est moi le patron, la ferme !

 

La légende helvète

Je laisse partir toute la tablée avant moi et termine ma tartine. Je vais remonter sur Joseph assez rapidement. Il va mieux, un pas devant l’autre. Je continue à mon rythme jusqu’à Nicolas avec qui je vais faire un peu connaissance avant qu’il ne décide de se coucher un peu dans l’herbe. Je remonte Luc avec joseph qui a repris du poil de la bête. Cette première portion de montée va faire 11km avant une petite descente et le boss de fin niveau intermédiaire, le Grand Ballon.

Mais avant, une surprise de taille et totalement inespérée se manifeste par le halo d’une frontale. Joseph avait effectivement repéré sur l’appli Solustop qu’un coureur était à notre portée et pas des moindres. Le stakhanoviste de l’ultra, la légende helvète, Christian ! Incroyable, qu’est-ce qu’il fiche là ! On arrive à sa hauteur, il est aussi surpris que nous. Il souffre une fois de plus de ses pieds mais ne lâche rien. Il court dans la montée à la vitesse où nous marchons tout en nous questionnant sur les positions de l’un ou l’autre concurrent. Tout en force il avance en serrant les dents, une machine !!

 

Comme un caillou dans la chaussure

Très vite nous arrivons sur la petite descente qui nous emmènera au début de l’ascension finale vers les 1400m du Grand. On lâche Christian, d’abord ce sont ses pas que l’on n’entend plus puis c’est au tour de sa frontale de disparaître. On se rend compte que l’on sera dans le TOP 10 à la 7ème et 8ème place. Oui, maintenant on se projette sérieusement au pied du chérubin de Cronos. Un début de luminosité nous fait deviner le morceau qui nous attend, il fera probablement jour au moment de la bascule et j’ai hâte de voir le spectacle du lever de soleil.

A une intersection, un panneau nous indique « Grand Ballon 7km ». Pour moi qui avais 9km en tête c’est plutôt une bonne nouvelle. La mauvaise nouvelle est que je sens une gêne sous le pied d’abord identifiée comme un caillou dans la chaussure mais c’est bel et bien un début d’ampoule. Petit à petit la gêne se transforme en douleur plus ou moins aigüe. J’espère juste que Delphine, cantinière/podologue sera du prochain ravito. En plus c’est le CP où j’ai prévu mon 2ème drop bag avec changement de chaussettes.

 

Un Compeed, un peu de vaseline mais il faudra serrer les dents

Je monte un peu plus vite que Joseph mais je pense uniquement mettre mon avance à profit pour me faire soigner. Le jour se lève tout doucement et c’est chouette. J’éteins ma frontale, une sacrée étape de passée. J’ai un demi-lacet d’avance sur mon binôme à qui je jette un coup d’œil à chaque virage. Mais il n’y a pas que Joseph que je vois, Christian revient, incroyable mais tellement prévisible, il ne lâche rien, un vrai compétiteur.

CP8, km164, Delphine est là, je parle d’ampoule et elle arrive de suite avec sa trousse de secours. Mon diagnostic était bien le bon, une grosse ampoule qui se prolonge entre les orteils. Un Compeed, un peu de vaseline mais il faudra serrer les dents, c’est tout. Pendant mes soins, Joseph arrive suivi à quelques minutes par Christian qui va juste prendre le temps de découper au canif ses chaussures pour repartir illico. Je ne stresse pas, je suis sûr de le rattraper dans la prochaine descente.

Je repars, soigné et rhabillé, j’ai même mis ma veste, il faisait vraiment froid là-haut. J’ai du mal, je cours un peu sur les talons, mes ampoules me font vraiment souffrir. Il reste un marathon à courir et pas un des plus facile, je vais en chier. J’ai aussi le releveur droit qui se manifeste, une première pour moi, une première pour lui aussi ces 165km. On s’était d’ailleurs fait la réflexion avec Joseph qu’on aura fait une belle marque sur 24h avec ces 164km et 4000m de D+.

 

Deuil du sub30

Il y aura une longue descente vers le CP9 mais avant cela une séquence de montée et descente via le Markstein. Je rejoins Joseph qui m’apprends qu’à la vue de l’appli, Christian est en train de progresser à 1 km/h plus rapide que nous. Le vieux lion sort ses crocs. Je me rends également compte que le temps alloué sur mon programme pour le dernier tronçon est largement sous-estimé. Petit à petit nous faisons le deuil du sub30. Aucune importance, je veux finir mon premier 200k et je vais le faire, maintenant c’est certain, tout le reste …

On a vraiment du mal, on ne court plus beaucoup, ça va être long. Le ciel est vierge de tout nuage et j’ai l’impression qu’à 7h du mat’ il tape déjà fort. Le prochain CP est en-bas d’une longue descente et je redoute cette pente qui va martyriser mes ampoules et mes quadris. La marche me va bien mais bon, plus on est lent, plus ça va être long. On se force à trottiner mais ça ne dure jamais très longtemps que ce soit pour Joseph ou pour moi.

 

Km par km, mètre par mètre presque

Enfin la descente ! Mais c’est compliqué ! On a mis une technique en place pour avancer quand-même et faire passer les km. On marche 300m et on se force à courir 700m. Durant les 700m de course je fais le décompte à haute voix : 400m, 300m, 250m, 150m, 80m, 50m, c’est bon ! Et on repasse à la marche, grimaçant. On avancera comme ça jusqu’en bas, km par km, mètre par mètre presque.

CP9, km187, pile dans les temps du sub30 mais, on le sait, on n’arrivera pas à tenir l’allure indiquée pour la montée du Petit Ballon et sa descente sur Munster. On reste un petit moment avec les ravitailleurs qui nous motivent pour le « sprint » final. Une dernière Tourtel et on repart ensemble cette fois-ci. On a même décidé de faire une arrivée commune, on ne s’est quasiment pas quitté depuis le début, c’est, selon moi, la seule bonne manière de terminer cette course, cette aventure.

 

1h35 pour atteindre notre objectif 

9km de montée, on marche aux alentours des 12:00/km, ça devrait suffire pour notre nouvelle objectif d’un sub31. Là ce sont les km de trop, on est extenué mais je viens d’avoir Laetitia au téléphone, elle arrive sur Munster et va courir vers nous pour nous rejoindre. Une nouvelle qui fait du bien dans ce moment difficile.

1h50 de montée plus tard, nous voilà arrivés. Il est environ 11h00, il fait beau, les touristes cherchent des places en terrasse. La vue est magnifique comme souvent quand la météo est de la partie sur les monts vosgiens. Il reste 11km de descente, on va essayer de gérer comme la fois d’avant, km par km. On a 1h35 pour atteindre notre objectif, c’est largement faisable, enfin, c’est faisable on va dire.

 

Bicentbornard

Je scrute au loin la route, je vois un piéton, c’est elle … Non ! La descente est juste comme il faut, on arrive même à courir sans compter les mètres. Ah, Laetitia, la voilà ! Elle est étonnée de voir aussi frais et pimpants … Si elle savait ! Mais effectivement l’odeur de l’écurie nous redonne des ailes (petites, les ailes). Joseph regarde la montre, bientôt 200km, on se force à garder la foulée avant de s’autoriser encore un peu de marche. On se check pour célébrer notre statut de bicentbornard, plus que 8 !

Laetitia nous fait un petit rythme et on descend km par km toujours entrecoupé de marche. Un cycliste nous croise, un patrouilleur à vélo, et nous confirme l’arrivée proche et … juste une petite bosse avant de descendre dans le village avant Munster … Mouais … Effectivement, un virage à droite et la « petite » bosse est bien là. Notre meneuse d’allure monte en courant alors que je suis quasi stoppé net. Avec Joseph, nos pensées « amicales » vont vers Christophe et son esprit machiavélique.

 

L’accolade au dieu des mers

Cette surprise du chef passée, voilà enfin la redescente puis les premières maisons où Florine nous attend pour également nous accompagner sur les 2-3 restants. On entre dans Munster, je scrute les lieux pour voir si je reconnais la rue. Oh ! Là-bas ! L’entrée du parc de la Fecht, on traverse la route prudemment et sous un arbre un petit attroupement, c’est là. Comme convenu avec Joseph, on arrive ensemble, on joint nos mains pour bien signifier notre souhait d’une place partagée au classement.

30h50 ! 8ème ex aequo, je l’ai fait, on l’a fait ! 208km ! J’ai du mal à réaliser. On est accueilli par Maître Christophe et quelques cantiniers. Quelques coureurs, dont Christian ici depuis plus d’1h40, sont là aussi. Et comme l’U2B ne peut se terminer que par l’accolade au dieu des mers, je m’exécute avec l’aide de Nathalie, mes ampoules ne me permettent qu’une démarche approximative sur le petit muret au bord de l’étang.

 

Après la douche à la piscine municipale et une mini-sieste, on termine cette journée en ferme auberge où un brunch gargantuesque nous attend après la remise des récompenses aux premiers (21h23 !!!). Une ambiance des plus chaleureuses une bière à la main, que du bonheur pour clore l’épisode de mon premier 200k. Merci Christophe !

3 commentaires

Commentaire de CROCS-MAN posté le 19-07-2024 à 17:28:56

Félicitations, tu as été Ultra.
Je te conseille le prochain: l'USO, à Monbazillac chez l'Ami Popol, Philippe Polesel

Commentaire de marathon-Yann posté le 19-07-2024 à 17:42:15

Félicitations pour ta superbe course, et merci pour ce récit ! On s'y croirait !

Commentaire de CROCS-MAN posté le 19-07-2024 à 18:31:00

Félicitations, tu as été Ultra.
Je te conseille le prochain: l'USO, à Monbazillac chez l'Ami Popol, Philippe Polesel

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