Récit de la course : Grand Raid du Golfe du Morbihan - 175 km 2022, par augustin

L'auteur : augustin

La course : Grand Raid du Golfe du Morbihan - 175 km

Date : 1/7/2022

Lieu : Vannes (Morbihan)

Affichage : 2012 vues

Distance : 175km

Matos : NB 890 V8

Objectif : Se défoncer

4 commentaires

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Grand Raid de l'Ultra Marin 2022: ça casse !

CR ULTRA MARIN 2022

VERSION GRAND RAID, 177 km

Vendredi 01/07

 

THE objectif de l’année !

Le but majeur de cette année 2022, pour couronner un premier semestre axé trail / course nature : l’Ecotrail de Paris en mars (80 km), le Périgord Grand Trail en mai (88 km), les 6h de Pontault-Combault (fin mai) puis enfin cet Ultra Marin début juillet.

Après la version « Trail » (60 km) en 2019, puis la version « Raid » (100 km) en 2021, il reste donc à cocher la case « Grand Raid » (177 km) pour vérifier l’adage « jamais deux sans trois ». Inscrit dès début novembre, à l’ouverture des inscriptions.

Ce sera accessoirement mon 1er « 100 miles » ! et c’est aussi le plus long trail de France…. Enorme enjeu, l’abandon n’est pas une option, il va falloir être fort, dans ses jambes et surtout dans sa tête, à moi de bien jouer les cartes que j’ai en main !!! Devenir « hundred miler » comme disent les Américains, ça se mérite…mine de rien il faudra enchaîner la bagatelle 4 marathons d’affilée et finir par un 10 km… ! et le tout sans assistance…

Je sais que c’est cette année que les planètes sont alignées, et je n’imagine même pas retenter un tel challenge l’an prochain voire même après, alors « failure is not an option » pour rester dans le lexique Ricain !

 

Un challenge carrément ambitieux au vu de cette distance délirante, en tout cas un pari osé pour venir à bout de ce gros morceau.

Ce serait ma plus grande course jamais faite, jusqu’à présent mon maxi était en course à pied le Raid de 100 km ici même l’an dernier (9h46) et en triathlon l’Ironman de Roth, en Allemagne (en 11h tout pile).

L’humilité sera le maitre mot pour aborder cette course, car il convient avant tout d’être finisher (taux de finishers de 50% les années précédentes, entre la distance et la météo, ça écrème sévère…), et en second temps de calibrer quel peut être le chrono pour viser une hypothétique place au scratch. L’allure moyenne sera anecdotique, gardons en tête que le but est de ne pas faire partie des 50% d’abandons récurrents, et inhérents à ce type de format.

 

Ce parcours, associé à un très faible dénivelé (1 430m de D+ répartis sur les 177 km !) rend la course délicate car il faut courir tout du long sur ce tracé roulant, et trouver l’allure cible s’avèrera être un vrai enjeu !!!

Avec des collègues de club (une quinzaine !) tout un groupe s’est formé, répartis sur les différentes distances proposées, et nous préparons ça dans la joie et la bonne humeur 😊

Plan d’entrainement sur 8 semaines, donc commençant début mai (en fait pile après le trail du Périgord). Finalement depuis mi-janvier je suis en prépa spécifique non-stop car il a fallu aligner les épreuves mentionnées au début de ce récit ! Par chance tout s’est bien passé et c’est sous les meilleurs auspices que j’aborde cette course. Rarement les planètes auront été aussi alignées !

Pour couronner le tout, l’appli LiveInfo nous communique les numéros de dossard ainsi que la liste des 30 favoris (issue des côtes indice de performance)…dans laquelle figure mon nom !  

Pas de blessure à déplorer, par chance.

On nous annonce 13 ravitos répartis sur le parcours et ce parcours donne droit à 5 points ITRA (devenus qualification UTMB 100 miles)

Le mercredi 29 juin, je commence le malto, suis encore au boulot, mais déjà dans ma bulle.

Un saut chez l’ostéo le matin pour remettre en place les éléments qui seront bientôt (sur)sollicités et mettre ainsi toutes les chances de mon côté : bien m’en a pris, j’avais une poche d’eau sous un genou et un déséquilibre de la jambe par la même occasion.

Le jeudi, direction le train dans la matinée, avec ma fille qui termine sa classe de 5ème (le collège étant centre d’examen, elle peut commencer ses grandes vacances en avance) et une de ses amies.

On enchaine avec le bus jusqu’à la maison, au bout de la presqu’île.

Mais retour à Vannes en fin de journée quand même : retrait du dossard sur le port le jeudi, créneau 18-20h. Et récup du « fameux » bracelet jaune, synonyme de la maxi distance. Je récupère mon pote Richard au passage, puis retour à la maison.

L’œil rivé aux prévisions météo : pas de canicule, mais de la fraîcheur (top !) et peut être même un peu de pluie. 13° le matin, 23-25° l’après-midi. Royal !!!

Le vendredi, c’est le d-day après une courte nuit. Sieste pas jouable. C’est dommage, je pars déjà avec un déficit de sommeil.

A 14h départ du Raid 100 km, on encourage nos collègues de club engagées sur cette distance, en y allant à vélo pour les applaudir.

On prend le bus pour rejoindre Vannes, sauf qu’au lieu d’une petite heure de trajet il mettra finalement 2 heures à cause d’un méga accident sur la route qui a tout bloqué. Coup de stress, nous arrivons à la gare super à la bourre, il faut trottiner jusqu’au port pour aller déposer nos sacs (sac de mi-course + sac d’arrivée) et le tout à l’arrache. On se serait bien passé de ce coup de stress !

Ai quand même pu ingurgiter mon demi-gatoport dans le bus

 

Départ de Vannes le vendredi à 18h, sur le port, notre futur lieu d’arrivée. Les relais partiront 15 minutes après nous. Nous sommes 1 275 alignés sur cette maxi-distance, à priori c’est un record.

Dans le premier sas, je retrouve le cousin d’une copine qui a grosso modo le même objectif, on fait connaissance

Objectif : rallier le point d’arrivée, Vannes, avant le dimanche 12h (donc < 42h).

Perso mon objectif sera carrément challenging, avec une arrivée rêvée à Vannes le samedi autour de 14h…donc 20h de course estimées (cela me ferait -sur le papier n’est-ce pas- une allure cible de >6’/km, qui font donc 18h30 de course, + 1h30 de pauses diverses et variées). Pas de dodo prévu dans le plan. Ma hantise : mon sens de l’orientation étant tellement inexistant, j’espère ne pas avoir à jardiner !!!

Au bilan de ce 1er semestre 2022 :

1 600 km de cap ; 1 500 km de vélo (+54h de HT) ; 30 km de natation ; 260h au total (divisé par 25 semaines, cela donne 10h hebdos en moyenne)

 

L’idée est de s’épauler avec Denis et JB pour se requinquer dans les -inévitables- moments de « moins bien » et s’accrocher. D’alterner marche et course pour préserver l’organisme à une loooooongue journée !!

C’est une épreuve qui se court aussi dans la tête, il va falloir être fort !

Je ne connais pas la première moitié du parcours, par contre je connais par cœur la seconde (de plus c’est le tracé du 100 km de l’an passé du Raid)

Ambiance ligne de départ, l’émotion…je pense à mon fils aîné qui ne peut être là car il finissait aujourd’hui son examen du Brevet des collèges, dommage il aurait aimé être là ce WE (j’avais fini le trail format 60km en 2019 avec lui)

Mais ma fille est là, en vacances anticipées, alors c’est chacun son tour !

SAS N°1, pour un temps déclaré de <24h, on se jauge les uns les autres…je retrouve Yann le Kikou avec qui nous pouvons papoter un peu, toujours un plaisir !

A 18h05 les fauves sont lâchés, on retrouve le parcours du marathon de Vannes (couru en 2018), avec passage le long du chantier naval (les multicoques présents sont incroyables !)

Presqu’île de Conleau vers le 4ème km, toujours aussi magique ! On voit en face Port Anna, où nous passerons demain, sur la fin du parcours…Arradon – Penboch (13,5ème km) et 1er ravito, on passe en 1h11 pour 1h15 de prévue. Pas d’arrêt prévu ici, j’ai assez d’eau pour attendre le second ravito. Il fait bien chaud quand même, ça va être ric-rac pour la réserve d’eau. 87ème au classement ici.

Par contre pas cool, ici il y a un passage inévitable avec les pieds dans l’eau. A la sortie de ce passage, première gamelle dans un petit escalier, ça commence c’est un genou qui morfle.

Puis c’est Toulindac, l’embarcadère pour l’île aux Moines. Paysages canons, parcours pas roulant alors concentration exigée !

Baden Port Blanc 26,5ème km et 2ème ravito, nous sommes à 2h24 de course (11min d’avance sur le plan). Assistance autorisée ici. 1ère barrière horaire (vendredi, minuit). Recharge des flasques en eau, un peu de solide, nous sommes toujours à 3 avec JB et Denis, un peu en avance par rapport au plan de marche. 72ème place ici.

Larmor-Baden. 3h et 32 km parcourus. Le joyeux trio s’en donne à cœur joie !

Pause pipi, la couleur de l’urine indique une hydratation insuffisante, malgré les 500mL ingurgités par heure, pas bon signe ça.

Baden – Toulvern au 38ème km & point d’eau. Passage ici en environ 3h45 de course (21h45 environ)

Passage au 1er marathon (réflexe de routier 😉) en 4h02.

La nuit tombe un peu avant 23h, donc après 5h de course, sommes bientôt au 50ème km.

Le Bono, toujours aussi joli (50,5ème km) avec déjà des soupes de proposées. 2ème B.H ici (samedi, 5am). Ici je passe en 4h50 de course, 10 min d’avance, et 50ème au classement. Mais la gêne au pied me fait consulter le poste de secours, et là surprise, une tige (bois ? métal ?) a transpercé ma semelle extérieure, la semelle intérieure, et un peu de mon talon. La poisse ! Du coup plus longue pause que prévu (15 minutes). Change de tee-shirt par la même occasion, avec manchettes et sortie de la frontale.

On continue notre bonhomme de chemin, direction Auray avec le vieux port de St Goustan, canon.

Crac’h tennis au 66ème km, ravito et 3ème BH (samedi, 8am). Ça y est, 6h54 de course sont déjà passées, il est 1h11 am 😊et désormais ce sont 20 min de retard par rapport au plan. On se relaie chacun notre tour tous les trois, concentrés, car courir à la frontale sur des sentiers piégeux nous rappelle que les gamelles sont vite arrivées. Je trébucherai plusieurs fois et finirai par me vautrer une deuxième fois (idem, c’est le genou qui prend).

Long détour via chemin et route avant d’arriver -enfin- à l’embarcadère, heureusement les lumières nous guident vers ce point de rendez-vous, encadré par des gentils bénévoles

Puis bip, à partir de maintenant le temps est mis en pause du chrono global.

Locmariaquer, km 80,5 et embarcadère. Point d’eau ici. 4ème BH (samedi, 11am). Il est 2 heures 45 du matin, cela fait 8h42 que je cours….

Embarcadère et Zodiac jusqu’à Port-Navalo après avoir enfilé l’incontournable brassière (une dizaine de minutes de traversée). Penser à lever les jambes car on se refroidit à la vitesse grand V et la reprise une fois de l’autre côté sera terrible. Le pilote du Zod me raconte que le Zod ayant embarqué le leader de la course individuelle et du relais s’est échoué sur le parc à huitres…obligeant les coureurs à changer de bateau pour rallier l’autre côté, ça craint !

Débarquement de l’autre côté, nous n’avons rien de G.Is’ ! 67ème au classement, puis marche active pour réchauffer les jambes après cette traversée.

A partir de là je connais par cœur, la maison est tout à côté ! Ça fait du bien de retrouver des repères connus, archi-connus même ! Pointage au check-point devant la capitainerie de Port-Navalo.

Par contre, c’est le milieu de la nuit, alors personne pour nous encourager…sauf mes parents, ma fille et son amie pour qui un réveil tôt (il est 3h du matin !) sont une occasion à ne pas manquer 😊

J’apprends par contre que pour mon pote Richard l’aventure s’est arrêtée au ravito du 50ème km, dos parti en vrille et douleurs aux jambes ne lui auront pas permis de continuer plus loin. Coup dur !

Direction le stade Yves Chapron, à 5 km de là, pour la base vie. On est au 85ème km. Assistance autorisée ici. 5ème BH (samedi 13h). J’arrive ici vers 3h30, récupération du sac de mi-parcours, et change complet : tee-shirt manches longues pour la nuit, short, chaussettes, chaussures (échange des NB890 noires contre les mêmes en blanches 😊). Un coup de Nok. Je recharge en barres et autres gels pour cette 2ème moitié grosso-modo.

Pause ravito (dont soupe !). Même la douche est possible ! ….mais pas forcément souhaitable : si on n’est pas parfaitement séché, l’humidité sera un champ propice aux frottements et autres irritations.

Au programme : recharge montre + téléphone avec le powerbank. Par contre patatras JB nous annonce qu’il bâche ici, pas de sensations et ko généralisé, pour lui l’aventure s’arrête là, ouille !

Et c’est reparti, on était bien au chaud ici mais plus on attend plus dure sera la reprise. Après 40 minutes ici (j’avais prévu 30 min initialement), Denis et moi nous élançons pour la suite. Il est 4h45, cela fait 9h23 que nous courrons. Je suis dans le dur, pas de sensations, la vitesse décroit vite.

Arzon Bilouris au 95ème km, passage à 5h30 du matin, 11h de course. 90ème au scratch. Pas de sensations, pas de plaisir. Pas cool ! Moulin de Pen-Castel, c’est beau et calme.

Puis Arzon Port Nèze au 99,8ème km (ravito liquide). 6ème BH (samedi 16h). Ici nous passons à 6h15, le jour est désormais levé, tant mieux cela sera moins usant que toute la nuit avec la frontale à rester concentrer alors que notre lucidité faiblit. Mais mes jambes abdiquent, je suis incapable de suivre Denis et le laisse filer. Lui est persuadé d’avoir un coup de bambou plus tard, on verra si jamais je retrouve un second souffle et peux le rattraper, sans garantie aucune.

Du coup je marche, longtemps, en m’hydratant et mangeant pour (tenter de) retrouver du jus.   

A partir de maintenant c’est la nouveauté 2022 de ce Grand Raid, on emprunte le parcours du Raid (100 km) de l’an passé avec ce crochet côté océan via St Gildas de Rhuys. Mais j’ai couru sur ce parcours l’an passé…de jour donc. Et là je marche, incapable de relancer la machine, cruelle désillusion !

St Gildas de Rhuys – Port aux Moines au 105ème km avec point d’eau.

On retrouve après le tracé historique le long du Golfe (GR34). Je me fais doubler régulièrement, et chaque tentative de recourir échoue lamentablement. Peu avant Sarzeau (salle Cosec) au km 118,3, je décide finalement, la mort dans l’âme, à abandonner. Cela fait 15h que je suis parti de Vannes la veille.

L’alternative est de marcher jusqu’à l’arrivée (60 km, un peu plus de 10h de marche), pour finir en environ 26h ? Je ne vois pas l’intérêt d’aller jusque là juste pour cocher la case « grand raid » et dire que je suis devenu finisher. Dans ces conditions, pas cohérent.

L’aventure s’arrête là pour moi, je suis dépité mais essaie de rester lucide, et tenter de digérer cette grosse contre-perf.

Cela fait partie des risques, il faut savoir l’accepter malgré la désillusion inévitable ! c’est la première fois que je dois abandonner en course à pied, dommage que ce soit sur une épreuve si extrême qui me tenait à cœur…

 

 

En conclusion…

Une épreuve exigeante, piégeuse avec ses racines, cailloux et autres escaliers. Il aurait fallu que je l’aborde sous un angle bien plus humble. J’ajouterai aussi un manque d’hydratation, une mauvaise gestion du sommeil en amont de la course. Conséquence, des chutes préjudiciables, en plus du côté « pas de bol » avec cette tige qui te perce le pied !

Je n’ai pas trop apprécié courir de nuit à slalomer entre les racines et les pierres, c’est mentalement assez usant. Une première partie de parcours piégeuse finalement aussi. Un grand bravo à toutes celles et tous ceux qui sont venus à bout de ce sacré morceau, respect !

A bientôt pour de nouvelles aventures ! (la MCC dans 7 semaines 😉)

4 commentaires

Commentaire de DavidSMFC posté le 04-07-2022 à 19:01:53

Dommage Augustin mais tu as déjà fait un sacré bout de chemin sur cette épreuve, ton record de distance sur une course à pied du coup !

Je n'ai pas bien compris à la lecture de ton récit à quel moment tu as eu cette tige qui t'est rentrée dans le talon... ?

En te lisant, je me dis qu'il ne restait "que" 60km à faire mais que c'est long avec l'incapacité de relancer et sans plaisir. Tu étais venu pour faire une belle perf, pas juste pour finir la course, effectivement. Tu auras d'autres beaux défis à relever par la suite !

Commentaire de augustin posté le 04-07-2022 à 22:21:58

merci David ;-) la tige ds le talon, c'est vers le 15ème km...ça fait un peu tôt quand même!

Commentaire de marathon-Yann posté le 05-07-2022 à 21:22:29

Merci pour ce récit sincère, et de partager ta déception. Je comprends que de voir ton nom dans la liste des favoris a du jouer dans ton approche de la course ! Bon repos et bon rebond. C'est quoi, la MCC ?

Commentaire de augustin posté le 07-07-2022 à 12:16:31

Merci Yann ;-) La MCC c'est une des course de l'UTMB, elle part de Martigny-Combe (SWI) et arrive à Chamonix. 40k & 2500m de D+. Et le soir ce sera madame qui s'élancera pour la TDS (145 km!) pffff

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