L'auteur : courotaf
La course : L'Echappée Belle - Intégrale - 145 km
Date : 25/8/2017
Lieu : Vizille (Isère)
Affichage : 3511 vues
Distance : 144km
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
Partir 3 jours… en Belledonne
ATTENTION EN HAUT! POUSSEZ VOUS SUR LE CÔTÉ: ON ARRIVE!
On est à quelques mètres de la Brèche de Roche Fendue (2480m), il est 18:06, on avance à la vitesse Belledonniène d'1.37km/h et on annonce aux bénévoles du poste montagne en place au col que notre passage va être fulgurant…
Dans cette épique ballade, on c'est:
C'est vendredi soir, ça fait un peu plus de 12 heures que nous crapahutons, arrivant à pied par la Chine de Vizille (286m), avec un dossard de L'Échappée Belle, version longue. On a un moral en inox: nous sommes la D É T E R M I N A T I O N.
Rémi. On se sera croisé un peu depuis cette hiver, on aura beaucoup échangé et parlé de cette course aussi difficile que magnifique (et vice versa), on est sur un même rythme à la montée, un peu moins à la descente. Je prévoyais de cheminer avec lui jusqu'à la Croix de Belledonne (2926m), puis d'aviser à Jean Collet (1945m) une fois que la 1ère terrible descente serait passée. Nous passerons la ligne d'arrivée ensemble dimanche, un peu avant 11h.
Antoine38. Je ne le connaissais que de pseudo, je l'ai raté sur ses terres au Trail des 3 couvents et pour cause: on ne joue pas dans la même cour, c'est clairement la fusée de l'équipe, il partira avec une table de marche bien trop rapide pour nous.
Bref, contre toute attente, notre trio se sera formé dès le départ, naturellement et sans concertation. Nous savons tous les 3 que pour arriver à l'extrémité nord de Belledonne avant dimanche midi un mental en titane sera précieux… voire nécessaire. Alors pour chasser la trouille ont utilise une technique naturelle & efficace pour laquelle nous avons tous les 3 un certain talent: débiter des conneries.
Ça commence dès le départ avec la Team Kikou, enfin à peine le départ donné, on perd déjà les avions partis en 1ère ligne: Vik, Jano, Xian & Phildar. Reste avec nous la Ze Brignais Team représenté par Spir & Franck de Brignais et la Team Banzaï-Niktout constituée de JuCB & Elnuma[x] qui ont fait leur échauffement en arrivant à pied par la Chine d'Aiguebelle, la bonne idée. Pourquoi se contenter de 11000m de D+ quand ont peut en faire 22000m? ;-D
Bon, si à ce stade du récit tu espères, cher lecteur, avoir des détails sur les-dites conneries et autres friandises paillardes braillées dans les montées, laisse tomber: What happens in Belledone, stay in Belledonne…
Revenons en au parcours.
J'arrive en terrain (re)connu. Cette année je n'aurai pas eu le temps, mais il y à un an c'est ici que j'ai commencé mon poste d'ouvreur à 2:30. J'ai hâte de profiter du paysage en plein jour.
À partir du Lac Achard (2000m) nous quittons pour un bon bout de temps la forêt, les arbres reviendront timidement après Le Cul De La Vieille (1860m). D'ici là, à part au passage du Pas de la Coche (1990m) on ne redescendra pas sous la ligne des 2000m. À mes yeux c'est le tronçon majeur du parcours: minéral, isolé, panoramique, sauvage, mais aussi très exigeant. S'inscrire à l'ÉB sans avoir reconnu et/ou étudié sérieusement ce tronçon, est une cause objective d'abandon. À bon entendeur…
Le parcours à commencé à être vraiment montagnard depuis la montée au Lac David (2220m), ça n'est pas l'itinéraire le plus direct pour le Col de La Pra (2170m), mais le crochet en vaut la peine.
J'ai fais la section précédente avec la Ze Brignais Team et ils partent rapidement avec un Franck pas dedans et une Biscotte Grillée. De mon côté je reste, profitant encore un peu de la Team Banzaï-Niktout qui temporisent plus que ces feignasses de Lyonnais qui on choisi de ne faire qu'un aller simple :-D
Je crois que c'est ici qu'il est décidé que l'on boirait une bière dans chaque ravito contenant le nom Collet. On ne plaisante pas avec la stratégie (pour l'instant et par ce qu'on est encore frais: après on fera quand même vachement moins les malins). Et pour la 17ème fois depuis le départ, la parole du Sage de Montceau se rappelle à nouveau à moi:
Si tu veux à Aiguebelle arriver, derrière Franck de Brignais il te faudra rester!
Je ne suis pas superstitieux (ça porte malheur), mais comme j'étais devant lui depuis les Lacs Roberts (2000m) et que j'ai décidé de mettre toutes les chances de mon côté, je préfère le laisser partir et remonter dans le train Isérois à 12:48 (barrière horaire - BH à 14:00) dans lequel c'est glissé un Kikou-Voisin-Villard aka FranckL12 que l'on distancera petit à petit après avoir passé le Lac du Grand Doménon (2400m).
On à la caisse, on est fort, on est beau et bruyant, Rémi dégaine soudain l'arme ultime dans cette montée de La Croix: chanter du Boby Lapointe: on reprend plusieurs concurents tous plus silencieux et concentrés les uns que les autres. Antoine38 fait mine de ne pas supporter notre bruyante bonne humeur mais ne nous laissera pas en plan alors qu'il en à clairement les moyens… On sera tout de même plus silencieux aux abords du toujours aussi mystérieux Cimetière des sans-éthique.
Mais, non d'une pipe en caillasse, cette montée va passer comme une lettre au centre de tri de La Verpillère!
Bisou à la Croix, selfie, rangeage de bâtons, déconne avec un bénévole (qui dit savoir que je suis déjà venu ici?!?) et banzaï! Je lâche mes 2 équipiers, j'ai besoin de laisser les jambes se délier, c'est quand même roulane jusqu'au Col de Freydane (2645m), alors faut en profiter! Je croise Julie (rencontrée début août lors de la reco Férices de l'orga dans la partie commune montée/descente, elle est inquiète pour la barrière, on échange quelques mots et je repars. Je la recroiserai au Pleynet avec Frédéric croqués tous les deux par la BH. Rendez-vous l'année prochaine ;-)
(bisousss live en arrière plan :-D)
J’appréhendais la descente après le col et finalement je trouverai le sentier bien mieux marqué et moins désagréable que l'année dernière. À la réflexion, et après avoir vu les segments Strava il semble surtout que j'ai vachement progressé depuis: j'ai fais des PR sur la quasi-totalité des segments jusqu'au Habert… Entrainez-vous qu'ils disaient!
Salut, t'étais pas ouvreur l'année dernière?
Pffff, trop sympa de se faire reconnaître par une des (charmantes) bénévoles du ravito!
Je croise Sae (rencontrée début août lors de la reco Férices de l'orga, elle est inquiète: inscrite en duo, son binôme n'est plus en état de repartir elle attends de savoir si la direction de course l'autorise à repartir en solo. La bonne nouvelle arrive quelques minutes plus tard, je la recroiserai à Aiguebelle douchée, changée et visiblement contente: elle aura fini en tout juste 46h… La Team Banzaï-Niktout et la Ze Brignais Team sont encore là. Les Lyonnais ont même eu le droit à leur assistance perso! Dans un endroit pareil, ça fait chaud au cœur de croiser des supporters. Rémi & Antoine38 arriveront un peu après. Je décide de rester avec eux: m'octroyer des pauses un peu plus longue sera certainement plus profitable que de repartir plus tôt sans eux (et les autres concurrents n'ont vraiment pas le même sens de l'humour).
Comme on ne rigole pas avec la stratégie: ont sort donc les caouettes et Rémi paye sa tournée de La Bière des Grimpeurs (que je vous recommande). Certains concurents émettent des doutes sur la pertinence de l'alcool à ce stade de la course. On ne s'en rend peut être pas encore compte, ce moment convivial continue de maintenir à un haut niveau notre moral et à souder notre équipe. De toute façon vu le chantier qu'il reste à parcourir et en maintenant un haut niveau d'hydratation (de flotte par contre), c'est pas une p'tite blanche qui va nous couper les pattes…
BH 18:30, on est pas mal dans le timing JALBHAC-2 et à 16:50 on file pour aller marcher sur les pompes du Sommet Collomb: Le Col de la Mine de Fer (2400m) & La Brèche de Roche Fendue (2480m). Ça chante, ça déconne, ça dégaze comme un pétrolier Libérien en Mer Du Nord, bref: on à toujours un moral en carbure de tungstène!
La pluie s'invite pour nous rafraîchir juste ce qu'il faut. Une vraie chance la météo du jour, les 2 précédentes éditions ont été copieusement bombardées par le roi soleil et on ne se plaindra pas d'être épargné. C'est certainement la raison qui explique le fort taux de finisher cette année: 50%, une première… On aura même eu le droit à quelques nuages dans la montée de La Croix. Je commence aussi à percuter tout doucement que je suis en train de péter les chrono faits l'année dernière sur ce tronçon. C'est d'excellent augure pour la suite, parce que pour l'instant je n'ai pas du tout l'impression d'être dans le dur.
Je cherche Jean-Claude pour le remercier pour son coup de main de l'année dernière, on profite des WC pour faire un pit-stop complet. Se rappelle à moi la bonne vieille formule: transpiration + moule-burne synthétique = feu au cul. Rien de pénalisant (j'ai un tube de lanoline), mais c'est tout de même un peu tôt pour les bobos, même petits.
BH 22:00, départ à 20:09, putain: on est bon dans le timing bordel!
En chemin pour le Col de l'Aigleton (2300m), il est temps de sortir la frontale et le portable, ont grappille toujours quelques concurrents à la montée (c'est bon ça!). Antoine38 donne des news à sa femme au tel… merde mais on dirait bien qu'il se fait engueuler parce qu'il est en retard sur sa table de marche! Ah bah on peut pas trainer avec les 2Be3 et faire péter le chrono :-D
Moi j'avais promis d'allumer le tel après le Habert: mais non d'un kairn… j'ai reçu une douzaine de SMS!!! C'est bon pour le moral ça! Du coup pause au col pour répondre:
2114: Col de l'Aigleton, on est en groupe avec Rémi & Antoine, on déconne, on rigole, on a un super moral. On tient le rythme à H-2 des BH. On est la DÉTERMINATION.
Les compères n'ont pas fait de pause, je les retrouverais dans le dernier raidar du Col de la Vache (2556m). Devant moi les frontales tracent le chemin dans le noir, la nuit est fraîche sans être froide, toujours pas de coup de barre et on continue à gratter quelques concurrents par ci par là. En revanche on croise de plus en plus de coureurs posés, à des niveaux de cuisson variable… J'ai un souvenir d'une demie-douzaine de gars en sitting dans les caillasses à une centaine de mètre sous le col discutant BH, abandon, base vie, etc. Une vacherie de se choper un coup de moins bien ici… Pour booster notre karma je beugle alors un:
LA VACHE EST CE QUE TU M'ENTENDS???
pour entendre un «Mais ta gueule!» de la part de la team du cul posé derrière moi… ambiance :-D
22:25, au col Rémi file pendant qu'avec Antoine38 on fait une pause saucisson/admiration du panorama avec une bénévole visiblement contente d'avoir d'autres sujet de discutions que:
C'est encore loin?
Y'a combien de D- ?
Elle est dure la descente?
etc.
On dira ce que l'on veut mais cette course (sauf si t'es titulaire d'un doctorat ès caillasse et/ou si t'es capable de rester à 10h des BH) sans reco du parcours: autant y aller à cloche pied…
Rémi en chie vachement dans la descente, on à du mal à rester ensemble, Antoine38 me dit qu'il va rester avec lui et que je peu filer. À ce moment j'ai toujours la forme, les cannes déroulent bien: OK je file. Je me sens un peu merdeux de laisser Rémi dans un moment difficile, d'un autre côté c'est pas non plus un coup de mou et il n'est pas seul… La route est encore longue jusqu'au ravito et de toute façon j'y ferais une longue pause, sans doute jusqu'à 3:00.
La traversée des 7 Laux est vraiment agréable à trottiner après toute cette pavasse! Je rattrape un paquet de zombies sur le chemin, je me dis qu'on aura bien respecté le désormais classique briefing de Florent Hubert:
Gestion. Gestion. Gestion!
Pouvoir trottiner confortablement à 6km/h après plus de 17h de course est non seulement agréable, mais très encourageant pour la suite. Arriver relativement frais au Pleynet, c'est une bonne étape pour devenir finisher.
À chaque personne doublée, je prend tout de même le temps de: ralentir, demander comment ça va, si la suite du parcours est connue… La plupart sont à l'ouest et disent ne pas connaître le parcours (putain, j'suis content de pas être à leur place!) et après un rapide descriptif, je file. Bref ça passe vite jusqu'à la descente de La Vielle où je double encore (youpi!), je pète un bâton (mordel de berde!) et je fini par rejoindre Miniping et ses copines au Chalet du Gleyzin de La Ferrière (1610m). Je suis bien content de participer (un peu) à la Kikousphère, ça fait du monde à croiser sur le parcours, c'est vraiment bonnard. Reste la boucle pour rejoindre enfin la base vie, ça bouchonne un peu dans le single, pas grave, y'a le temps. Je ne l'avais pas reconnu celui là et c'est une belle saleté comme annoncé dans tous les CR!
BH 4:00, départ 3:20 : j'ai l'impression d'avoir trop brassé et perdu mon temps: j'aurai voulu caser 1/4h de sieste et partir 1/4h plus tôt. Pas facile en solo pour une 1ère expérience du genre… En plus je sais pas ce que j'ai branlé mais j'ai raté le départ de Rémi et Chirov… Merde! L'orage gronde et je pars seul sous les premières gouttes. Allez, il était pas annoncé cet orage, c'est un petit local, on croise les doigts, par ce que sinon la nuit va être longue jusqu'au Lac du Léat (1720m).
Pause pipi, une… deux… trois fois! Pause flotte à la fontaine de la Martinette. Je rattrape Michèle qui dormait sous des boites aux lettre pour attendre la fin de l'orage, elle à l'air de brasser ses affaires autant que moi. Ah on est beau à presque 24h de course au milieu de la nuit… Pause caca dans les toilettes sèches du pont de La Valloire. Les 2h d'arrêt au Pleynet on relancé l'activité des boyaux ont dirait. J'ai l'impression de passer mon temps à l'arrêt, galère! La montée de la Valloire arrive enfin, je ne sais pas combien j'ai de retard sur Rémi et Chirov, sans doute pas plus de 15 min, j'ai l'impression de m'être arrêté un million de fois depuis Le Pleynet et là je n'ai pas envie de rester seul. Cette 1ère journée passée toujours accompagné était tellement géniale il faut à tout prix que je raccroche! C'est décidé, je sors une cartouche dans la montée pour tenter de les reprendre (en espérant ne pas faire péter le joint de culasse)…
1… 2… 4… 5… 7 concurrents. Encore 2 pauses pipi, c'est bon, j'ai encore des cannes, merci le kiné! Le moral remonte, c'est bon! J'ai peut être perdu Rémi mais maintenant y'a du monde derrière et visiblement je suis bien en forme par rapport au peloton. Il y a encore des frontales au dessus, on voit un feu, en vue un ravito non-officiel: Banzaï!
Je repasse Antoine, qui tentait un recharge en eau sous le pont:
Tombe pas dans le torrent, y'a une fontaine au chalet!
Et ça y est, le Premier Chalet de la Grande Valloire (1840m) est là! Et qui est attablé avec les bénévoles? Yes! Rémi et Chirov! Je suis trop content! Les bénévoles-pirates nous proposent du thé ou du café, parfait! T'es connais beaucoup des courses où des mecs et des nanas posent un ravito pirate au milieu de la nuit et de la montagne? Fou!
7min de pause et ça repart. Je fais connaissance avec Chirov, il parle de sa vie de pacer avec Vik, LOL! Quand tout à coup, on retrouve notre Antoine38 posé derrière un rocher, avec Yann son pacer: la fine équipe est à nouveau réunie :-D
La descente sur Gleyzin est l'occaz de se séparer à nouveau, et comme la plupart des accès aux ravito sur cette course, il est conforme aux précédents: infâme! Un chemin forestier raide comme la justice, je capitule, même la marche est difficile.
C'est officiel: je suis éclaté. Le lever du jour a aidé à rester éveiller, mais là je sens que je suis au bout… Je pense à mon plumard, mais il est trop loin… À nouveau la Team Banzaï-Niktout est dans la place, Antoine aussi est au fond du trou, il me confira que c'est grâce à Elnuma[x] qu'il est repartit. La Ze Brignais Team commence aussi à prendre le large, on ne verra que l’assistance sur le départ. Au fond de la bergerie (oui, le ravito est dans la bergerie), il y a Daniel, le boss du parcours et du balisage, on c'était croisé au Pays Magigue (où il m'a fumé dans la Verticale des Fréaux) et à la reco Férices de l'orga. Je croise aussi Fred, ami de ma binôme rencontré quelques semaines plus tôt à la fiesta des bénévoles. Il a l'air bien, il attends son compagnon de route qui pique un roupillon à l'étage de l'étable. Un roupillon? Justement! Rémi est arrivé, il a sans doute la même sale gueule que moi et on opte pour aller ronfler un peu au Refuge de L'Oule (1840m), ici ça à l'air de brasser et ça risque d'empirer avec l'arrivée de la tête de course de La Traversée Nord. En plus: ça coupe en deux la montée vers Le Morétan. Vendu!
BH 10:00, départ 8:08 : c'est dur mais on reste toujours bon dans le timing, pas de panique, ça laisse de la marge pour le dodow (© Vik). La Team Banzaï-Niktout nous repasse 1km plus loin tout comme le 1er dossard vert: il est facile, il a une grosse avance sur ses suiveurs. Je me fais aussi déposer par Émmanuel qui dormait également au Refuge de l'Oule lors de ma reco entre Prapoutel & La Rochette. La montée m'est vraiment difficile, je tombe littéralement de fatigue, je ne pense qu'à la couchette de l'Oule! Finalement Rémi se ravise, il se sent de repousser encore la pause dodow (© Vik), la descente du Morétan l'inquiète aussi: elle sera longue…
9:37, enfin! Camille m'accueille avec le sourire, je suis seul dans le dortoir je m'effondre pour 40 min!
11:08, c'est plein de petits hommes verts devant le refuge! Il fait bon, j'ai pris le temps de rassembler mes esprits, checker la douzaine de power-SMS des potes qui suivent le live à distance et qui m'invitent chaleureusement à ne faire qu'une bouchée du tas de cailloux qui trône un peu plus haut. Ainsi soit-il. Je repars donc remonté comme une pendule Jurassienne avec 2 Colmariens du Ried: Fred & David (avec qui j'ai descendu Freydane la veille), ça ne durera pas, il font un pause plus haut. Je comprend que ce roupillon aura été profitable: la forme est là et il est temps de ranger les bâtons pour bouffer du Morétan avec les doigts! La montée passe bien, j'arrive même à gratter quelques concurrents du 85!
Au col j'hallucine un peu sur la tente plantée par les bénévoles et puis c'est partit pour un moment de «vie ma vie de chamois». Pas de névé cette année? Pas grave, il suffit de sauter de cailloux en rochers, en visant les plus gros. De toute façon le plus chiant dans cette descente c'est la moraine glissante à souhait… Je reste surpris par le nombre de personnes qui s'encombrent de bâtons dans un terrain aussi casse-gueule. Le passage reste aussi panoramique que splendide et à partir du Lac Morétan Inférieur (1945m) on peu laisser les jambes se dérouler jusqu'au septième ravito paumé au milieu de l'alpage.
Petite pause le temps de lire la nouvelle livraison de power-SMS qui me félicitent d'avoir passé le Morétan, encore merci à toutes & tous, sur ce coup là j'étais à 2 doigts de verser ma petite larme!
13:42 : je repars accompagné d'un sudiste (dont je ne me souviens plus du nom, ni du dossard), la forme est toujours là, je n'en reviens pas du bien que m'aura fait la sieste à l'Oule… on papote, on rattrape Michèle et on profite des derniers ruisseaux avant d'attaquer la tristement fameuse Montée de la Pierre du Carre (dite la Sxxxxe).
Si on a lu ne serait ce qu'un seul CR, on ne peut pas ne pas être au courant. Ce maigre demi-kilomètre vertical insignifiant sur le road-book a fait coulé autant d'encre que le col de la Vache et de Morétan réuni… bon, j'exagère à peine. Avec sa pente raide comme la justice et son toit décapotable c'est le concentré d'un casse-patte et d'un casse-moral offrant aux crânes des laborieux concurrents du fond de classement un rôtissage à point en cette seconde après midi de course où le soleil darde ses rayons brulant et où le narrateur, fatigué, fait des phrases trop longues.
Pour ma part, l'ayant parcourue 2 fois en reco le programme était simple: faire du jus sur la piste forestière en amont et garder un bon rythme sans s'arrêter pour que ça ne s'éternise pas. Job done!
D'ailleurs, pour en revenir aux reco, j'ai pas mal insisté sur le voisinage de Super Collet (5 sorties dont 2 de nuit) en misant sur le fait que la bonne connaissance du secteur serait profitable à mon moral en se début de dernier tiers de course. Je recommande cette stratégie!
J'ai bien trottiné sur l'accès au ravito. Dommage qu'une fois de plus l'orga ai shunté La Crête de l'Évèque! Pour une fois qu'un accès de ravito était dans l'Esprit Belledonne… J'arrive donc un peu euphorique à cette base vie, galvanisé par le dodow (© Vik), le passage du Morétan, les power-SMS et la présence annoncée de ma Femme (-:
Je retrouverai aussi la Team Banzaï-Niktout décidément jamais bien loin devant, Rémi & Chirov et pour changer Antoine38 & Yann. Presque aussi bien fréquenté que les réceptions de l'ambassadeur ces ravito… On se met d'accord sur l'heure de départ 17:30/35 et je file rejoindre ma Femme. Elle m'annonce que contrairement à ce qui était prévu elle est motivée pour passer une NDM (Nuit De Merde) et m'attendre sur les 2 derniers ravito (pour me botter le cul si besoin). En voilà une bonne nouvelle! L'heure passe vite et une fois de plus on se rate pour le départ avec les copains… En fait l'euphorie apparente compense assez peu la fatigue et le manque de lucidité. Vivement que ça se termine quand même parce que la seconde nuit s'annonce moins rigolote que la première.
BH 18:00, départ 17:37 : 40 min de piste de ski pour revenir dans Belledonne, je pose une nouvelle cartouche pour rattrapper l'équipe avant le Pont du Bens (1410m), ce qui sera chose faite. 5 min de pause au poste montagne de Pré Nouveau (1430m) et on attaque la dernière difficulté objective du parcours: la montée vers la Crête des Férices (2250m) avec sa trace qui fait le yoyo, mais là faut reconnaître que l'on est plus du tout au meilleurs de nous même et puis la nuit à finit par tomber. En passant le Refuge des Férices (1910m), avec toujours autant de surprise, on tombe à nouveau sur notre Chartrousin préféré aka Antoine38, toujours accompagné de Yann son pacer. La progression est lente, mais on est toujours bon dans le timing: la BH de Val Pelouse ne nous fais plus peur. Arrivé enfin au Refuge de la Perrière (1840m): la boucle d'accès au ravito se faisait attendre pour dérouler encore une fois les jambes.
Enfin moi je percute pas du tout l'ambiance d'hôpital de campagne en cette 2nde nuit de course: je suis content de revoir ma Femme, c'est elle qui me racontera le lendemain: les coureurs chancelant, errant, titubant et vomissant. Je n'ai pas très envie de manger, mais je dégomme tranquillement la salade de pâtes qu'elle me propose… en fait je pète la dalle et je remarque que j'aurai assez peu mangé dans cette 2ème journée. Elle me demande ce que l'on a prévu comme timing: Rémi et Chirov repartiront dans la foulée et moi je veux profiter du délai pour dormir encore 30 min. Je suis passablement à l'ouest. Elle me bouscule pour que je tienne le timing annoncé. Merci!
BH 2:00, départ 1:15: il fait bon, le dodow (© Vik) à une fois de plus fait un grand bien, et je file d'abord sur la crête de la Grande Montagne d'Arvillard (2020m), puis sur la sympathique moraine qui serpente jusqu'aux Sources du Gargotton (1615m), point à partir duquel mes reco se seront arrêtées. La montée au Col de la Perche (1980m) passera lentement mais sûrement. La suite est parfaite au regard de mon état physique: pas de caillou et une faible pente pour accéder au Grand Chat (1992m) au panorama fort agréable à une paire d'heures du lever de soleil. J'aurai partagé ce bout de chemin avec Marie-Line une Québecoise venue d'outre-Atlantique rien que pour la course… Chapeau!
Bon si quelqu'un est encore en train de lire ce CR fleuve notamment en vue de s'inscrire à la course, la suite ne vends pas du rêve sur le road-book et encore moins sur le terrain. J'aurai eu pour seul plaisir dans cette descente que de croiser un renard…
Arrivé au Gelon (848m) je me les gèles pour de bon. J'ai rattrapé Chirov qui a un genou qui coince et qui stoppera sa mission de pacer au moment ou Rémi & moi arrivons enfin à l'ultime ravito.
Toujours aussi content de voir ma Femme, mais je ne suis pas bien, je n'ai pas envie de m'arrêter ici: ça caille trop, je sais que je ne tiens debout uniquement parce que mon corps à fabriqué plein de substances magique. Je sais aussi que ça ne durera pas, que tôt où tard il faudra payer la dette de sommeil: j'ai peur du moment ou je m'effondrerai. Je voudrais profiter du soleil levant pour torcher au mieux cette dernière côte et en finir au plus vite. Rémi tente un dodow (© Vik) dans une yourte, mais il ne fera qu'un changement de fringues. La Team Banzaï-Niktout sort de leurs véhicules respectif: ils auront profité à fond des BH pour dormir. Les cochons: ils vont le plier cet aller-retour!
BH 8:00, départ 7:06 : Une dernière montée… une dernière traversée de crête… La dernière descente, interminable, à peine trottiné. Rémi me dit:
Hors de question de courir dans le parc, je veux savourer cette arrivée!
Ça y est… Je l'ai faite… On l'a faite cette traversée! Sonner la cloche… Retrouver nos Femmes… les copains… Revenir sur terre…
À l'Organisation exemplaire, aux Bénévoles, les officiels comme les pirates qui en plus de tenir la course le font dans une super ambiance, à ma Femme qui pour sa 1ère assistance aura assuré grave, aux amis & famille qui ont suivi en live et envoyé des tonnes de power-SMS, aux concurrent(e)s croisés (les nommés et ceux que j'ai oubliés), aux Kikou sur place, aux Kikou en ligne et ceux dont j'ai dévoré les CR pour me préparer. Merci à Antoine38 & petitmerou_ pour les photo.
Merci Rémi & Antoine38 pour cette traversée!
22 commentaires
Commentaire de JuCB posté le 12-09-2017 à 16:10:36
Vous m'avez fait rêver tous les 3 avec votre banane collée en travers de la gueule pendant 3 jours.
Une très belle prépa pour un magnifique ultra !!
Commentaire de chantrail posté le 12-09-2017 à 16:19:49
Bravo pour cette traversée tout en déconnade, belle manière de torcher la boucle, ça paraît même facile quand on te lit !!
Commentaire de courotaf posté le 12-09-2017 à 21:46:17
Relit à partir [i]des Férices[/i] alors :mrgreen:
Commentaire de Antoine_974 posté le 12-09-2017 à 16:21:16
Super ce récit, on pourrait croire que tu l'as vraiment faite !! ;-) par contre, y sont moches tes pieds après!!!
Commentaire de Vik posté le 12-09-2017 à 19:00:14
oh le beau récit wikipédien !
c'est vrai qu'il était vachement bien accompagné le petit miniping... :-D
on veut savoir le surnom d'antoine38 !!!
vous avez du bien vous marrer quand même... bien content de vous avoir choppé à l'arrivée !
vous l'avez fait !
Commentaire de jano posté le 12-09-2017 à 19:03:30
super génial, mais tu as placé la barre assez haute quand même, ce qui m'inquiète pour mon CR à peine démarré, surtout que moi, ça rigole pas...
par contre, j'ai déjà fait la même réflexion que toi : en plus de gestion, gestion, gestion, on pourrait ajouter reco, reco, reco.
Commentaire de Vik posté le 12-09-2017 à 19:34:19
je suis d'accord, les 2 recos que j'ai faites avant de me lancer sur l'intégrale cette année m'ont bien aidées !
Commentaire de jano posté le 12-09-2017 à 19:48:04
oui mais toi tu es le contre-exemple de tout : gestion, reco, faire du jus, progressivité, diététique...
Commentaire de courotaf posté le 12-09-2017 à 21:50:47
Ouais le seul truc pas trop risqué à prendre en exemple chez Vik c'est le dodow (© Vik) :-D
Commentaire de Vik posté le 12-09-2017 à 22:36:50
t'as aussi pris la bière ;-)
Commentaire de Vik posté le 12-09-2017 à 22:36:28
ah non mais j'étais sérieux hein ! ça m'a vraiment aidé pour ma gestion au feeling !
Commentaire de Mazouth posté le 12-09-2017 à 19:04:45
Top récit j'adore ! Et bravo d'avoir supporté ces furieux pendant autant d'heures (heureusement que tu as fait des pauses dodow (© Vik)) ;-)
Commentaire de Cheville de Miel posté le 12-09-2017 à 21:00:58
C'etais deja une sacrée aventure a la base, mais il c'est passé un truc qui l'a transformé en un parcours initiatique ou chacun a trouvé sa place naturellement. Y'a pas dire c'etais vraiment ULTRA !
Commentaire de Benman posté le 12-09-2017 à 21:15:44
Tiens, j'ai 3 enfants... je devrais donc pouvoir dépasser le Pleynet! A méditer...
Commentaire de courotaf posté le 12-09-2017 à 21:51:36
Yapukakliker!
Commentaire de Lécureuil posté le 12-09-2017 à 21:59:55
Bravo pour cette belle course d'équipe
Au plaisir de vous croiser rémi et toi
Je finirais bien par connaître le surnom d'Antoine ;-)
En revanche impressionné par tes pieds apres seulement 48h, çà te l'a déjà fait avant sur même distance ?
Commentaire de courotaf posté le 12-09-2017 à 22:25:14
On ne parle pas de distance en montagne, c'est mauvais pour le Karma!
Mais plus sérieusement, c'était ma première expérience à plus de 15h d'affilé. J'avais fais aussi 2 x 12h avec nuit en refuge aussi, les pieds sont toujours un peu gonflé ensuite, mais là c'était quand même impressionnant (mais pas douloureux).
Commentaire de Vik posté le 12-09-2017 à 22:40:28
j'ai exactement la même chose avec les pieds, avec "seulement 41h"
Commentaire de fildar posté le 13-09-2017 à 07:01:51
Super le CR pour ton objectif de l'année parfaitement maitrisé
et belle course d'équipe.
Commentaire de Gilles45 posté le 13-09-2017 à 13:46:46
Et merde, j'étais un poil devant vous...j'ai loupé la méthode "une binouze" à chaque ravito contenant le mot Collet !!!
Un super CR en tout cas, ravi de t'avoir croisé brièvement avec Rémi dans la file d'attente au retrait des dossard
A bientôt pour de nouvelles aventures
Commentaire de anthodelb posté le 13-09-2017 à 15:26:54
Super récit, super course, super performance !!! Bravo.
Tu me donnerais presque envie de la refaire en 2018.
Commentaire de franck de Brignais posté le 13-09-2017 à 22:19:41
Au top ce récit !! Comme pour la course, t'as tout mis !
Merci pour votre bonne humeur, on était bien chiant à côté, mais de bons spectateurs, amateurs du show. Bravo à votre équipe, faire ce 144 en équipage c'est plutôt une bonne idée je crois... en tous cas ça m'a aussi réussi !... A très vite !
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.