L'auteur : Walden
La course : Trail d'Ecouves et du Pays d'Alençon - 61 km
Date : 5/6/2016
Lieu : Radon (Orne)
Affichage : 1984 vues
Distance : 61km
Objectif : Terminer
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Le contexte
Après trois participations au 35 km du Trail d'Écouves, j'ai décidé l'an dernier d'en courir la version longue en 2016 : un 61 km, l'année de mes 61 ans.
Seul souci, je n'ai jamais couru une telle distance, pas même un marathon. Le plus long trail que j'ai bouclé faisait 37 km, je suis loin du compte. Et pour avoir souffert de crampes lors de mes deux premières tentatives en Écouves – moi qui n'en ai habituellement jamais –, je sais combien le parcours y est difficile en comparaison de mes terrains de jeu tourangeaux. Écouves c'est du relief, du devers et de la boue à profusion.
Heureusement, je ne serai pas seul à tenter ce challenge. Nicolas, un ex-collègue resté un fidèle camarade de course à pied a relevé le défi. Il a près de trente ans de moins que moi, l'avantage de la jeunesse, mais lui non plus n'a pas d'expérience sur aussi long.
Arriver là... en bon état.
La préparation
J'ai misé sur la qualité de la préparation dès la sortie de l'hiver, après un été 2015 orienté endurance à vélo et une fin de saison régulièrement ponctuée de trails courts afin de retrouver un peu de punch.
Je ne fais jamais de vélo l'hiver et ce printemps 2016 venteux, froid et pluvieux m'a dissuadé de sortir mon beau Giant. Pas moyen d'alléger ma préparation par des sorties vélo. J'ai donc avalé les kilomètres en course à pied, mais avec pondération, car une fois j'ai dû déclarer forfait, à cause d'une grosse contracture, à deux semaines d'un objectif préparé avec trop de zèle.
Trois trails courts étaient au programme, de mars à début mai. Deux, de 26 et 28 km, courus en pure endurance, et un de 22 km couru au mieux afin de tester la forme du moment.
Pour conclure le plan et me rassurer sur ma capacité à affronter Écouves sur 61 km, je suis allé sur le terrain au mois de mai pour enchaîner trois jours consécutifs de rando-course et effectuer un total de 80 km avec 2000 m de D+.
À ce stade, j'ai le sentiment d'avoir mis toutes les chances de mon côté et m'estime bien préparé. Si ça ne se passe pas bien le jour de la course, ce ne sera pas faute d'avoir pris la chose au sérieux.
Enfin le grand jour
La veille de la course, je suis le premier à retirer mon dossard rouge du 61 km à l'ouverture du secrétariat, puis je croise deux participants venus chercher leur dossard bleu du 35 km. Déjà inquiet d'avoir en main ce dossard rouge, le regard quasi admiratif des deux dossards bleus et leurs commentaires sur le courage qu'il faut pour se lancer sur le 61 km achèvent de me persuader que je me suis lancé dans une aventure hors de ma portée.
Ya plus qu'à !
Réveil à 5 h 30 après une nuit agitée ; juste comme je commençais à bien dormir.
Arrivés à Radon à 7 h 30 avec Nicolas, nous peaufinons le laçage des chaussures, la purge du Camelback et le serrage de la ceinture contenant le ravito, dans l'attente du départ, à 8 heures. Nous nous répétons que le seul objectif est de terminer en bon état et qu'il convient de ne pas l'oublier, en particulier dans les premiers kilomètres.
Quand faut y aller...
Nous sommes 97 à entrer dans la forêt après avoir effectué deux fois le tour du site de rassemblement. Et dès le départ, ça monte. Nous ne nous sommes pas échauffés et ma carcasse vieillissante apprécie de moins en moins les grimpettes à froid. Au moins je ne risque pas de partir trop vite, d'ailleurs il y a fort peu de monde derrière moi.
Un autre V3, en qui je reconnais le Lutin d'Écouves, nous fait part de ses expériences sur cette distance et recommande une approche prudente des 30 premiers kilomètres. C'est bien dans mes intentions, je compte même être prudent plus longtemps encore.
Avec Nicolas, nous calquons notre allure sur celle d'un groupe mixte de coureurs locaux ayant tous déjà bouclé ce 61 km au moins une fois auparavant. Ils connaissent parfaitement le terrain et marchent à l'amorce d'une difficulté, puis reprennent la course dès que le profil s'y prête.
Nous grimpons au sommet du Vignage puis rejoignons les étangs de Fontenai par des sentiers que je connais bien pour les avoir parcourus lors de ma préparation de trois jours. Sans surprise, nous traversons de nombreuses portions boueuses ou collantes. Ayant peu serré mes chaussures, je suis souvent à la limite de les perdre. C'est très désagréable mais craignant pour mes tendons sensibles, je préfère éviter tout risque de cisaillement du coup de pied à cause de chaussures trop serrées.
Aux étangs, vers le quinzième kilomètre, je me retourne et ne vois plus qu'un coureur suivi de deux VTT. Le gars est souriant, il a l'air vraiment facile... Je comprends que c'est le serre-file et que je suis bon dernier, ce qu'il me confirme quand je lui pose la question. Effectivement, je suis parti prudemment...
Mais tout va bien, je recolle au petit groupe d'Écouviens. Nous reprenons quelquefois un concurrent et, revenus au pied du Vignage que nous devons escalader une seconde fois, nous doublons une première victime de douleurs musculaires.
Suivent une dizaine de kilomètres avec de fréquentes portions marchées. Dans une ascension nous sommes doublés par les coureurs du 16 km. Les gars sont à bloc et soufflent comme des bœufs car la pente est raide. Pas mal d'entre eux doivent, comme nous, marcher pour atteindre le sommet.
Nous nous dirigeons vers le ravitaillement de la Verrerie du Gast, au kilomètre 35. Avec Éric, l'un des Écouviens, Nicolas et moi nous détachons progressivement du reste du groupe. Au ravito je fais le plein du Camelback. J'ai préparé des doses d'Isostar dans des sachets congélation "empruntés" à mon épouse. Cela ne s'avère pas très pratique et un bénévole me voyant saupoudrer mes jambes plus que l'eau du sac vient à mon aide. L'organisation est toujours irréprochable sur ce trail et les nombreux bénévoles y sont fort sympathiques.
Alors que nous nous apprêtons à quitter le ravito, le groupe d'Écouviens y arrive. Je repars avec Nicolas, Éric restant avec le groupe. Je ne les reverrai pas. Merci à eux pour le train idéal mené sur la première partie de course.
Je surveille mon Gps et signale à Nicolas le passage au kilomètre 37. Ça y est, nous entrons dans l'inconnu. Encore un moment et j'annonce le km 42 : marathon ! Puis ce sera le tour du km 50, après le ravito et la traversée du Parc animalier, un petit zoo. Nous ne marchons que dans les côtes et le train est régulier. J'ai parfois l'impression d'être sur un nuage, je ne ressens pas la fatigue. Je ne regarde jamais le chrono, je ne trouve pas le temps long. Ce n'est plus le cas de Nicolas qui commence à souffrir d'un genou, se plaint de la longueur de la course et de l'état du chemin : trop de boue, trop de racines, trop de cailloux. Il a mal et s'en agace.
C'était pas goudronné !
Je tente de lui remonter le moral en expliquant qu'à ce stade de la course tout le monde a plus ou moins mal quelque part, que nous sommes au km 51 et que, comme sur le site web de la course le tracé Openrunner du 61 km affiche seulement 58,6 km, il doit rester moins de 8 km à effectuer, que la fin du parcours est en descente et que dans une heure il sera fier de toucher son tee-shirt "finisher 61".
Peine perdue, il commence à marcher sur le plat et souffre de crampes dès qu'il reprend la course. Quatre coureurs doublés un peu plus tôt nous reprennent. Une nouvelle crampe vient à bout de la bonne volonté de Nicolas qui décide de terminer à la marche. Je sais qu'il ira au bout, c'est un bon randonneur, alors je file devant. Pour l'heure c'est plat, le chemin est propre, je cours encore avec facilité et je repasse devant le groupe des quatre coureurs puis les distance.
Je suis isolé depuis un bon moment. De peur de me perdre, je me concentre sur la recherche des bandes de rubalise accrochées çà et là, les changements de direction étant clairement indiqués par des flèches rouges.
Je replonge dans la forêt et aperçois le maillot jaune d'un coureur de l'A3, le club d'athlé alençonnais. Je me rapproche et reconnais le Lutin. Nous échangeons quelques mots et comme s'amorce une belle descente, je dévale le sentier et creuse l'écart afin de ne pas m'exposer à un contre-poutrage lutinesque. Arrivé au fond du vallon je jette un coup d'œil derrière moi : personne en vue, je peux lever le pied. Façon de parler, car je commence à avoir du mal à les lever, mes pieds. La fin de course est en descente, mais pas totalement hélas, et à la moindre montée, mes quadriceps fatigués m'imposent de marcher.
De plus mon Gps affiche à présent plus de 58 km et je suis bien conscient que comme nous sommes toujours en pleine forêt, c'est que l'arrivée est encore loin. Je me souviens alors des propos du speaker au départ : cette année, le parcours a été modifié ; je comprends qu'il a été allongé...
Je rattrape encore un coureur ; nous discutons sur quelques centaines de mètres puis il doit me laisser le distancer. Une dernière descente achève le massacre des gros orteils au fond de mes chaussures. Pour ma prochaine course j'abandonnerai le système Quicklace des Salomon qui ne permet pas d'effectuer un serrage indépendant de l'avant de la chaussure afin d'éviter ce problème.
Enfin j'entends la sono de l'organisation et je reconnais le sentier qui mène à l'arrivée. Je sors de la forêt et entre dans la prairie, un dernier virage, une courte ligne droite et je stoppe mon chrono. 8 h 19' 34" de course, pourtant je n'ai pas vu le temps passer. Mon Gps affiche 61,27 km. Challenge accompli, le mois prochain je pourrai fêter dignement mon 61e anniversaire.
Je suis 58e, 84 coureurs finiront la course. Pas facile le trail d'Écouves !
Nicolas arrive 20 minutes plus tard et va récupérer son tee-shirt "finisher 61" ; il a retrouvé le sourire, il n'a plus mal...
Le Graal.
4 commentaires
Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 20-06-2016 à 15:47:05
Bravo pour ta course et pour avoir poutré de quatre minutes le Lutin sur ses terres. Je n'ai aucune excuse même si j'avais couru un marathon le dimanche précédent, en fait, j'ai fait le contraire de ce que j'ai préconisé aux autres : j'ai allumé pendant trente bornes et, bien sûr, je n'avais plus de carburant à la fin... Encore bravo pour ta bonne gestion de cette course pas si facile.
Commentaire de Walden posté le 20-06-2016 à 20:52:22
En revenant sur toi j'ai compris que tu avais dû "faire des folies de ton corps" dans la première partie du parcours. Peut-être une ardente poursuite de l'étonnante V3F Jacqueline D. dont la perf recadre tous les V3M de la course ?
Merci pour tes conseils venus renforcer ma conviction que je devais aborder la distance avec beaucoup d'humilité.
Commentaire de Mustang posté le 01-07-2016 à 16:30:35
Belle perf et surtout l'essentiel : avoir poutré le Lutin !!! Hi !!
Commentaire de Walden posté le 10-07-2016 à 20:52:33
Merci Mustang, mais attention, un Lutin poutré mute en Lutin revanchard aux forces décuplées.
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