L'auteur : Fufanerunner
La course : L'Ardéchois - 98 km
Date : 3/5/2014
Lieu : Desaignes (Ardèche)
Affichage : 2188 vues
Distance : 98km
Objectif : Terminer
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Samedi 3 mai, 1h45 (putain quelle heure t’as dit !!!)
Je sors doucement du gîte que je loue à Rochepaule pour me rendre au départ de l'Ultra Ardéchois 2014
Y’a 2 ans je m’étais fait sortir par la BH du 64ème km. Cette année je fini ! En rampant s’il le faut mais je fini (c’est pas de la motivation ça !!)
La météo est changeante et froide donc Maillot, manchette, coupe-vent, un buff, mon ¾ préféré, mes Cabrakan, le olmo5 sur le dos, la frontale sur la tête, les bâtons dans les mains et en avant.
Nous sommes environ 200 à tenter l’aventure de cet Ultra Ardéchois annoncé pour 98km et 4800D+.
Petit débriefing d’avant course.
Bonne nouvelle pour moi, Loulou (le gentil Organisateur de cette course depuis 20 ans) nous annonce qu’il n’y a plus qu’une seule BH au 48ème km. Je pars quand même pour arriver au 64ème avant les 13h de courses qui m’ont fait abandonner en 2012.
3h00 : c’est parti, un petit tour dans le village en formation serrée et les fauves sont lâchés. Je suis super motivé, super concentré, même pas peur. Enfin, si, un peu quand même, pour l’instant ma plus longue distance est de 75km (SaintéLyon 2013) Y’a juste un semi de plus à faire , sans compter le D+.
Etape 1 : Desaignes / St Jean Roure
Les premiers km se font cool sous une légère bruine. Comme d’hab, je suis parti dans les derniers. Une fois sortie du village on se dirige vers Sautereaux pour une première boucle de 34km. Le chemin est assez facile, pas trop technique. Mais ça grimpe quand même pas mal sur les 10 premiers km.
Sur mon GPS je n’ai fait afficher que la vitesse moyenne. Pour passer la BH il faut faire plus de 4,8 km/h
Le ravito arrive Je fais le plein des gourdes, gobe un peu de saucisson et de fromage et je repars.
Etape 2 : St Jean Roure / Sautereaux
Cette partie est plus facile, beaucoup de D-, quelques passages assez techniques quand même.
J’arrive à bien courir quand c’est plat ou que ça descend un peu, les bâtons m’aident bien dans les montées. Je m’éclate !!
Et là, c’est le drame, au moment de boire…y’a de la menthe dans les gourdes !!! Quelle m**** !
J’ai pas fait gaffe en les remplissant au ravito. Et je n’aime pas la menthe.
Je vais donc se dépêcher d’arriver au point d’eau d’après.
Ah non, pas la peine, je croise un ruisseau, vide les gourdes, remets de l’eau fraîche et en avant Guingamp !!
Jusqu’ici tout va bien
Etape 3 : Sautereaux / Rochebloine
C’est la BH à ne pas rater sinon bifurcation sur le 57km, du coup je ne relâche pas la pression mais je suis large, mon Garmin m’indique 6,2km/h de moyenne. Ce qui pour moi est déjà beaucoup
Le jour s’est levé (sur une étrange idée??!!), il ne pleut pas mais un petit vent traître et frais m’emmerde dès que je sors d’un sous-bois !!
Je n’ai fait ce parcours qu’une seule fois il y a 2 ans et je me rappelle trop bien des passages.
J’arrive confiant au ravito de Labatie-d’Andaure, km 45, juste en bas de la grosse montée de 3 km pour rejoindre RocheBloine et sa BH. Je suis large, j’ai faim, une bonne soupe de pâte et un peu de saucisson ça fait du bien, j’en avais un peu marre du sucré.
Après 10 bonnes minutes de pause, j’attaque la montée. Et quelle montée, c’est raide, il fait frais, le vent souffle en rafale et quand il arrive de face, j’ai parfois l’impression d’avoir un mur devant moi. La dernière partie est taillée à travers les genêts, la pente doit bien faire dans les 30%, c’est beau, c’est court, mais p***** que c’est dur.
J’arrive enfin au sommet, la vue à 360° est magnifique, je vois au loin des éoliennes, on était dessous y’a quelques heures.
Et surtout je vois arriver le 1er du 57km. Il vient de faire le même parcours que moi, on arrive presque en même temps au sommet…
Et il est parti 5h après moi.
Et en passant c’est lui qui m’encourage. Trop fort
Il est 11h45. Je passe avec 1h15 minutes d’avance sur la BH, tout va bien. Y’a 2 ans j’avais mis 30 minutes de plus pour faire ces 48km. Merci Denis !!
Etape 4 : Rochebloine / RochePaule
Maintenant je galope dans la descente vers Lafarre et son point d’eau (et ouais, encore presque à sec !!). Sauf qu’avant l’eau une belle montée me tend les bras. J’attaque tranquille avec les bâtons.
Les jambes commencent à être un peu fatiguées, mais je suis bien, pas de crampe, juste un peu les épaules qui commencent à souffrir à cause du sac.
Après 55km c’est pas mal, je suis plutôt content de ma course pour l’instant. Ma moyenne est tombée à 5,5km/h mais ça va passer.
Arrivée à Lafarre, km57, je refais le plein et repars confiant. Je sors du village par une grande descente, longe une rivière, passage de ponts, encore une rivière, et là, c’est parti.
Cette montée sur Rochepaule m’avait dégouté du trail. Maintenant je sais qu’elle n’a pas de fin.
Ça monte et ça monte encore et encore, c’est que le début d’accord, d’accord !!!
Je suis avec un autre galérien qui m’annonce qu’on vient de boucler le 1er km de montée en 18 minutes…
Même si y’a plus de BH ici, ça s’annonce limite quand même.
Je prends la rage et donne tout, tant pis pour la suite mais je veux passer avant 16h, question de principe.
J’avance avec la tête, je me remets en mode marche nordique, en avant, je m’occupe plus des jambes et des bras qui ne veulent plus et j’avance.
Je repars dans la montée, avec l’espoir de voir le sommet après chaque virage. Raté !! Pourtant je la connais cette grimpette de la mort, mais comme y’a 2 ans j’en ai marre !
Quand je débouche sur une route plate, c’est juste pour la traversée et me retaper une côte bien raide de l’autre côté !!!
Je n’en vois pas la fin…Et enfin si je la vois, j’arrive enfin au sommet, donc forcément, ça va descendre. Un coup d’œil sur la montre : ça peut encore passer
J’arrive enfin à RochePaule après 12h45 de course.
YES !!!!!
Ma p’tite femme est là avec mes 3 p’tits monstres, je prends une bonne dose de bizoux/câlins, une soupe de légume. Je me change.
Mais surtout je me calme, cette montée est horrible, pire que le raidillon pour monter au glacier de la 6000D, pire que la grimpette à la ferme du Cade sur le parcours des Templiers. C’est une tueuse !! Elle vous casse les pattes et le moral. Et à voir la tête des autres coureurs présents sur le ravito, je ne suis pas tout seul à penser ça !
Une fois calmé, je me remotive pour finir ce parcours de malade. Et je repars dans l’inconnu.
Etape 5 Rochepaule / Devesset / St Jeure d’Andaure
Je sais que je vais finir. Il reste encore 34km mais je sais que je vais finir !
Je redescends au fond de la vallée. Et là c’est comme d’hab. Dès que je me dis que tout va bien il m’arrive un truc.
Un caillou à la con se dérobe légèrement sous mon pied gauche qui décide de me montrer la semelle de ma chaussure.
Je n’entends pas de « crac » mais l’esprit y est !! Je sers les dents. Ce n’est pas une entorse qui va m’arrêter, pas maintenant !
Je me concentre sur le posé du pied, tant que c’est bien plat, ça passe, mais dès que ça vrille un peu j’ai beau être matinal, j’ai mal !!
Et j’attaque la dernière grosse grimpette en direction du plateau de Devesset et de son lac que je vais enfin voir.
Depuis Rochepaule, on était un groupe de 5 à se doubler, se croiser, se dépasser, se rattraper….Mais là, les 4 autres sont partis loin devant et je ne pense pas pouvoir les rejoindre.
J’arrive sur le plateau, la nuit commence à tomber, le vent est glacial. Je rattrape une coureuse qui ne se sent pas bien. On arrive au point de contrôle. On est les 2 derniers, et elle abandonne.
Du coup je pars faire le tour du lac avec les serre-files du moment. Ce n’est pas la première fois que je finirais dernier (ni la dernière !).
Une horreur ce tour du lac, il fait froid, une bonne petite brise glaciale me souffle dans les oreilles et ce n’est pas un sentier, c’est des marécages.
Plusieurs fois mes chaussures disparaissent dans l’eau glaciale.
Pour les appuis c’est génial, ma cheville me dit merci, mais je ne l’écoute pas !
Et ce n’est pas un petit lac. On récupère enfin un vrai sentier et on s’enfonce à nouveau dans un bois. Y’a moins de vent, j’ai les pieds trempés et encore presque 20km à faire. Et mon Garmin s’éteint… Tout va bien.
Mais je m’en fous je veux finir !!
On passe Malleval, une dernière grimpette et on arrive à St Jeure d’Andaure, dernier point d’eau. Je change de serre-files.
On repart à 4 pour la dernière étape dans la nuit noire, dans la nuit noire et obscure, je dirais même obscure et sombre !
(Spéciale Dédicace à André, sa femme et sa fille qui m’ont accompagné jusqu’au bout !)
Etape 6 St Jeure d’Andaure / Désaignes
Une énorme descente pour finir, avec 2 ou 3 petites bosses, mais négligeables.
A part la cheville tout va bien, je pensais finir bien plus à la ramasse que ça.
Et là, un zombie apparait dans la nuit, un lyonnais avec qui j’avais discuté un peu vers le milieu de l’aventure. Il a vraiment du mal, du coup on se retrouve à 5 pour finir.
22h30, on entend au loin le feu d’artifice mais on voit rien, on n’est pas encore du bon côté de la colline !!
Les kilomètres passent doucement. Très doucement
L’éternité c’est long, surtout vers la fin !!!
On voit un panneau annonçant « Trail arrivée »…Mais il nous faudra quand même plus d’une heure pour la rejoindre cette p***** d’arrivée.
Pour l’instant on avance, et là, plus de frontale…Pas grave, on débouche enfin sur la route de Désaignes après avoir fait des zigzags au bord du Doux (la rivière du coin), on sort de la nuit, merci les lampadaires.
Et là, il y a pleins de coureurs qui nous encourage, des gentils bénévoles qui ont tous un mot gentil pour les 2 éclopés qui arrivent enfin.
J’ai mal partout, je suis aux bords des larmes, j’ai froid. En gros, tout va bien !
Une dernière petite montée sur le goudron. J’ai quelques mètres d’avance sur mon camarade galérien. Ma puce fait son bip-bip final sous les applaudissements des quelques courageux restés jusqu'à cette heure tardive.
Parmi eux, Dawa Sherpa, qui vient nous féliciter tous les deux pour avoir bouclé ce parcours. Ça fait chaud au cœur ! Ce type est vraiment cool !
J’ai pris ma revanche sur l’édition 2012 !! Que du bonheur !
Un dernier petit effort pour monter jusqu'à la tente ravito, le cadeau finisher est une assiette en terre cuite avec dessus les ruines de Rochebonne. Trop fort !
Je n’ai même pas pensé à demander mon temps (Et oui, si vous avez suivi, j’ai plus de GPS depuis le 78ème km)
Je m’en fous un peu. (Je l’ai vu tout à l’heure sur le site de la course : 20h49’17’’ 149ème sur 150 arrivants)
Je viens de finir mon premier ultra Trail. Il va me falloir un petit moment pour digérer cette petite balade.
Maintenant, repos…
Fufanerunner
5 commentaires
Commentaire de nicou2000 posté le 05-05-2014 à 18:56:52
Bravo pour cette gestion de course et pour t'être accroché jusqu'au bout... malgré la pression des serre-files...
Nico
Commentaire de chris42-195 posté le 06-05-2014 à 10:35:22
BRAVO, je veut dire un grand bravo pour avoir fini. j'ai jeté l'éponge à Rochepaule, elle doit toujours y etre (l'éponge)!! aprés 13h07, je ne me sentais pas les forces de finir (force mentale et physique). mais j'ai aussi loupé le boeuf, snif.
Commentaire de Fufanerunner posté le 06-05-2014 à 11:18:38
Merci les gars
@Nico, y'a aucune pression de la part des serre-files! Ils sont là pour t'accompagner en cas de défaillance. Et après quelques longues heures de courses tout seul, ça fait du bien de parler à des gens.
Commentaire de philkikou posté le 06-05-2014 à 18:40:48
Le retour et la revanche de Fufanerunner !!! Bravo, au physique et surtout au mental!! D'après ce récit tu as pris ton pied, et même 2 !!! Bonne récup. et @ bientôt en Ardèche !!!
Commentaire de tortue01 posté le 07-05-2014 à 14:07:31
Bravo Warrior...!!je comprends ta motiv attitude...où les jambes ne suivent plus mais la tete te dit "avance"!!!Modestement inscrite sur le 36 j ai egalement bcq apprécié ce trail....et j ai aussi connu un serre-file sur mon 1er trail...
Place au repos et à la recup..
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