L'auteur : ejouvin
La course : Trail Volodalen - Le Tour du Lac de Vouglans - 71 km
Date : 27/7/2013
Lieu : Moirans En Montagne (Jura)
Affichage : 2764 vues
Distance : 71km
Matos : Porte bidon double
Cuissard
Manchon mollet
Brooks cascadia
Tee shirt SpeedTrail Lafuma
Objectif : Pas d'objectif
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Finalement, je ferrai bien un tour de lac cette année. Ce ne sera pas celui d’Annecy mais dans le Jura sur la base Nautique de Bellecin. Autant le dire, je prends ce trail pour une première approche de dénivelé supérieur à 2000m. Je n’ai pas autant de pression que pour Annecy, mais je ne suis pas confiant pour autant. Il est annoncé très très chaud, et je me plonge dans l’inconnu. La distance devrait aller, mais alors les montées … Je n’en ai aucune idée.
Pendant plusieurs semaines, je vais regarder les résultats de l’année dernière et me disant que le niveau était très fort. Donc dans ma tête je pars pour une longue course avec les 50% comme objectif. Je scrute la liste des inscrits pour comparer les performances passées, ceux qui rempilent, par rapport à ce que j’ai pu faire cette année. Plus le temps avance et plus je me dis que les 50% vont être une vrai bataille pour moi.
De plus, la semaine a été légère avec uniquement deux séances de fractionné qui m’auront confirmé que je n’ai aucune vitesse. Donc, je ne suis absolument pas confiant et je me raccroche à mon précédent résultat, en me disant que j’ai l’endurance mais pas la vitesse.
La course étant le samedi matin, je vais prendre une journée de RTT pour faire le voyage avec mon coach et un de ses potes, que j’ai rencontré sur des courses. Et donc les amis de mes amis sont mes amis. Ils viennent me chercher en temps et en heure au bas de mon immeuble. Un petit repas à Nogent Sur Marne, avec un troisième ami (ça en fait du monde) et nous voila parti. Quelques bouchons et nous ne sommes plus vraiment dans les temps.
La fatigue de la semaine aidant, me voilà en train de dormir dans la voiture pendant tout le trajet. Je ne vois donc pas le temps passer. Nous prévenons l’organisation de notre arrivée un peu tardive pour la pasta party, mais ça devrait le faire.
19h50, nous voilà arrivés. Juste à temps pour récupérer mon dossard et effectuer les deux inscriptions. Direction la salle de repas. Première surprise, il y a toute une équipe de grands costauds. Des armoires à glace… Sommes-nous arrivés sur un lieu de tournage de publicités pour les caleçons Sloggy ??? Après prise d’information, c’est l’équipe de France d’Aviron en stage terminal pour les championnats du monde. Aviron ??? Mais à qui dois je penser à ce moment là ? Je me disais bien que c’est bras et ces cuissots me rappelaient quelque chose. Mais oui bien sur, l’esprit MamanPat est bien présent. Punaise, même à Hawaï, elle arrive à me rappeler qu’elle n’est pas loin de moi pour me botter le cul à la moindre défaillance. Je profite d’ailleurs qu’elle soit en vacance pour dire des conneries, peu de chance qu’elle lise ce CR.
Une bénévole s’approche de nous pour nous demander si tout se passe bien. Nous en profitons pour nous renseigner où il serait possible de dormir. Coup de chance, une chambre est encore disponible sur la base. C’est juste parfait, nous serons à 1 minute de la ligne de départ. Par contre, nous sommes dans le bâtiment de l’équipe de France. Pfff, vraiment MamanPat, elle me poursuit. J’espère qu’elle n’a pas épousé un mec qui a fait de l’aviron non plus, car vu le gabarit des mecs, je ne voudrai pas me prendre son pied dans les fesses, et une mandale de la part de son homme.
Présence du coach oblige, je ne fais pas tout à l’arrache. Les ravitos sont annoncés à 16, 32, 53 (avec 3 belles côtes) et 62. Donc, le porte (2) bidons est préparé avec deux mini gourdes supplémentaires pour après le deuxième ravito. De nombreux points d’eau sont annoncés, mais nous n’en connaissons pas encore les emplacements.
Réveil tranquille à 5h30, une bonne douche et départ pour le petit déjeuner. Pas de pates, pas de jambon cette fois ci. Je me mets en tenue et début de l’échauffement. Bah oui, nous avons reconnus le début du parcours, et ça monte direct. Pas très pentu, mais il ne faudra pas être totalement froid, sous peine de le payer cash.
Une fois sur l’aire de départ, nous croisons l’organisateur qui va accompagner les premiers avec son VTT. Il connait le parcours sur le bout des doigts et nous indique qu’ils ont rajouté un ravito au km 43 et qu’il y a un point d’eau entre chaque ravito. Donc finalement, possibilité de remplir les gourdes au km 16, 32, 43, 53 et 62 avec des points intermédiaires. Et là les questions importantes se posent. Gourdes supplémentaires nécessaires pour moi ? Gourde à la main pour mon coach ? Je vais virer mes fioles, et finalement mon coach garde son cameback après les conseils de l’ouvreur.
Comme prévu, nous commençons par 100m de plat et op ça monte. Nous passerons devant notre bâtiment et il n’est pas encore question de mettre le clignotant. Je pars tranquille, au cardio comme d’habitude. D’ailleurs, il est marrant de noter que sur le long, j’arrive à être discipliné. Au détour d’un virage, mon coach se moque de moi en me demandant ce que je fous. Mais je suis déjà à 145 pulses, et ce n’est que le début. Je lui indique donc que je suis dans le rythme et advienne que pourra. Bien entendu, je me fais dépasser de tous les côtés. Je commence à être habitué, et puis vu mes prévisions, tout va bien.
Ca monte donc tranquille dans la forêt dans un joli petit single, ce qui sera la majorité du parcours. Il y a des racines de partout, des pierres et il faut bien faire attention. Encore heureux, ce n’est que le début et nous n’avons pas de mal à échapper aux pièges.
Un petit passage par le bitume nous fait passer au dessus de lac. L’eau et le point de vue sont magnifiques. C’est bien agréable. Par contre, aucun nuage dans le ciel, annonçant de grosse chaleur pour la journée.
Une fois sur l’autre rive, après une petite montée, un joli point de vue sur le lac s’offre à nous. Le concurrent devant moi s’émerveille devant ce spectacle. Mais une racine le rappelle à l’ordre, et le voici par terre.
Le premier ravito arrive et heureusement. J’ai les gourdes qui se sont asséchées et il est déjà temps de faire le plein.
Ca commence par une petite montée, pas trop longue mais qui commence à chauffer les jambes. Et à partir de maintenant je vais commencer à reprendre les autres concurrents. Certains se laissent doubler, d’autre résistent. J’en repère un, le premier que je vois avec les bâtons, qui ne se laisse vraiment pas faire. Devant lui deux autres concurrents. Il faut absolument que j’arrive à le doubler, mais ce n’est pas si simple. Les montées se font en single et il faut être vigilent dans les descentes.
Nous avons également rejoins les derniers partant du 37 km. Le serre file en vélo, un petit garçon, s’écartent et me laisse passer, merci bonhomme. Au profit d’une montée, je double le gars aux bâtons et le dépose après avoir également repris les deux autres devant. Pour le moment tout va bien, même si la chaleur commence à se faire sentir.
Au km 22, je reprends enfin la première féminine que je n’avais pu suivre au départ. Ayant fait 8h30 (8h38 en fait) l’année précédente, je me dis que c’est tout bon pour moi.
S’en suit quelques légères montées, mais c’est globalement plat. Mais je ne m’emballe pas, la route est encore longue et il faut surveiller le cardio qui est plus proche des 160, que des 150 prévu. Au 31ème km, c’est la bascule vers le barrage. Là, j’essaye d’envoyer autant que possible, mais cela n’ira pas en dessous des 5 minutes au kilo. Comme quoi… on a l’impression de se mettre carpette et pourtant c’est un rythme pépère.
Enfin nous n’arrivons sur le barrage, goudron et plein soleil. Il y a beaucoup de monde de l’autre côté pour prendre des photos et encourager. Ca fait plaisir et redonne de la motivation. J’adore ces moments en fait, tout le monde encourage tout le monde, on tape dans les mains des enfants. J’arrive au ravito et je commence à prendre de très mauvaises habitudes. Je dégaine mes bidons, les ouvre et les pose sur la table en attendant qu’un bénévole les remplisse. Par contre, je les remercie, c’est la moindre des choses. Pendant ce temps j’enfile les verres, je m’arrose la tête et mange un peu de tout.
Mais ne perdons pas trop de temps, il faut repartir assez rapidement pour rester dans le rythme. D’après le profile, nous devons affronter une jolie montée juste après ce ravito.
Je repars donc du ravito en prenant le train de coureurs. Je prends direct à droite sur le bitume. Ca remonte le long du lac qui est de toute beauté avec ce soleil. La montée ne se passe pas trop mal, tout en courant. Passage par un parking pour ensuite nous engouffrer dans la forêt de nouveau. Ca continue de monter, je continue de courir. Ca me réconforte, j’arrive à courir et je continue de passer les concurrents du 37.
Puis d’un coup je vois le balisage indiquant de prendre sur la droite avec l’inscription « 37 km ». Je m’arrête net, si la distance est indiquée, c’est qu’il y a un autre panneau pour le 71. Je regarde à droite, à gauche, rien … Je dis à voix haute « Merde, c’est où le 71 ? ». Une concurrente me répond toute peinée que je me suis trompé au niveau du barrage, qu’il fallait partir sur la gauche.
Demi tour et je redescends. Dès que je vois un dossard avec un numéro inférieur à 100, je lui demande s’il est sur le 71, histoire de ne pas poursuivre sur cette voie. Finalement, je retrouve des têtes connues, des personnes que j’avais doublées quelques temps auparavant. Je leur indique que ce n’est pas bon, mais il ne me confirme pas mon impression. Rebelote je repars en me disant que j’ai loupé quelque chose, mais je me jure de continuer sur le 37 et d’abandonner à l’arrivée si ce n’est toujours pas bon. De nouveau sur le parking, un conducteur nous confirme que nous ne sommes pas dans la bonne direction. Aller, je me fais violence, et je redescends au barrage. Je repasse par la case ravito, tant qu’à faire, mais la tête n’y est plus. La course est « terminée » pour moi et je vais passer en mode rando / course d’entraînement.
C’est donc en trottinant que je prends le bon chemin. Effectivement à la sortie du ravito, le marquage au sol indiquait les directions. Mais celui-ci était masqué par des supporters, enfin c’est l’excuse que je trouve sur le moment. J’estime à 25 minutes et 4 km ce petit détour… Ca va m’aider pour trouver les prochains ravitos. En fait, cela ferra un détour de 3km et 20 minutes environ.
Après la légère descente, nous tombons dans un village où il y a une fontaine à eau, dans laquelle jouent des enfants. Je traverse la route, en faisant attention aux voitures bien sur, et plonge la tête entière dedans. L’eau est fraiche et ça fait du bien.
Et finalement, la montée après le barrage est beaucoup réaliste par rapport au profile. Ca monte plus sec et il m’est impossible de courir. J’aperçois une jupette que je vais doubler en marchant. Ce n’est pas la première féminine. Mince alors, j’ai vraiment perdu beaucoup de place dans l’histoire.
Arrive un point d’eau où deux gentilles petites filles me proposent eau / coca / sucre. N’étant plus dans la course, je m’y arrête sans remord et discute un petit peu. Mon numéro de dossard est pointé et j’explique ma mésaventure. Preuve que je n’y suis plus du tout, je claque la bise aux bénévoles. Par acquis de conscience je demande une estimation du classement et elles m’indiquent, sans certitude, que je suis dans les 30. Autant dire que je suis surpris.
Dans une montée, un gars redescend pour abandonner. Je lui dis qu’il est surement mieux d’atteindre le prochain ravito annoncé au km 43. Il n’était pas au courant de celui-ci. Je ne sais pas ce qu’il aura fait, mais j’espère vraiment qu’il ne m’aura pas écouté.
Km 46 à la montre, je devrais bientôt arriver au troisième ravito, je continue de bien boire.
Km 47 rien
Km 48, je reprends de nouveau la première féminine. Elle a repris son mari qui était en délicatesse avec son intestin. Je lui propose de faire un bout de chemin avec elle, et nous discutons un peu. Elle m’annonce que c’est dur, que la chaleur fait mal. Je joue un peu le yoyo avec elle, envie de partir, mais comme la course est finie je me laisse prendre au jeu de la papote.
Finalement, je vais m’éloigner dans une descente. KM 49 toujours rien, mais mince il est où le ravito ???
Km 50 rien, 51 non plus.
Enfin dans une descente, je vois un garçon en VTT qui fait demi-tour, et crie mon numéro de dossard. Ca sent le ravito tout ça. Bingo et il y a un concurrent qui y est arrêté. Il était temps, mes gourdes sont vides et j’ai soif. Comme d’habitude, remplissage, boire, prendre des provisions et repartir. Et voilà que je gratte de nouveau une place.
Alors à ce moment, j’ai 51.9km à la montre. Si on dit que j’ai 4km de rab, ça fait 47.9 au lieu des 43 annoncé… Soit presque 5km de plus, avec mes 4 de détour, je me dis que je suis parti pour un 80km. Ouch, il va falloir être fort dans la tête.
Un peu plus loin, je tire tout droit et tombe sur un ruisseau. Oups, le chemin tournait légèrement sur la droite, je me suis encore trompé. J’en profite pour m’asperger et me rappelant le récit du vainqueur de la Montagn’Hard 60. L’eau est fraîche et ça fait un bien fou.
Je sais qu’il y a encore deux montées à se taper. Mais en fait, j’ai l’impression de passer mon temps à grimper pour descendre légèrement puis remonter. Difficile de se repérer en fait, j’aurai du noter les km.
Les chemins sont vraiment variés, nous passons de chemins en terre, à des monotrace en dévers et en caillou où il faudra faire attention. Puis nous passons à travers plein de sapins. Sur cette partie, il ne fallait pas se poser de question et tirer absolument tout droit entre les arbres. Ils forment des lignes droite, et il n’est pas question de slalomer entre. Bien sur, je ferrai cette erreur provoquant quelque doute chez moi.
Au km 52, donc en fait 49 si on ne se perd pas, nous attaquons la dernière bosse de la série de trois. La chaleur est vraiment présente, je suis trempé de sueur et je bois tous les 2 km. Cette montée se ferra uniquement en marchant, je suis explosé. Une fois terminée, nous basculons sur une descente raide devant nous emmener à l’avant dernier ravito.
Au détour d’un village, un couple s’amuse à arroser les concurrents à l’aide d’un jet d’eau en criant « Ici douche gratuite ». Je ne me fais pas prier, et j’accepte ce rafraichissement.
Km 58, et voici le ravito, ce qui est plus en accord avec l’annonce au briefieng. Ouf, me voilà sauvé je ne vais pas me faire 80 km, mais restons vigilent.
A ce ravito, une douche nous est encore proposée. Ok, je viens d’en prendre une il n’y a pas longtemps, mais il fait tellement chaud que je ne la refuse pas. Toujours le même scénario sauf que cette fois–ci, le bénévole annonce « Toi tu es 19, toi 20 et toi (moi) 21 »
Hein quoi, comment ? Ca me paraît un peu fou et là les sentiments se mélangent dans ma tête. J’ai « lâché » la course, je suis en mode rando / course mais je peux aller dans les 20 premiers. Même si nous étions moins de 100 au départ, ce n’est pas si mal. Je ne sais plus si je dois recommencer à me mettre en mode chasseur ou continuer à me faire un entraînement soutenu.
Bon, je repars devant les deux autres, c’est déjà deux places de prises gratuitement. Finalement, je continue ma descente jusqu’au km 62 en mode « On reprend la course ». C’est marrant parce que après analyse je tourne à plus de 6’/km sur le plat, ce qui n’est pas exceptionnel.
Mais en fait, le ventre commence à m’envoyer des signaux, il y a un truc qui déconne. Je ne suis pas à l’aise, j’ai faim sans avoir faim. Vite un gel, beurk ça ne passe pas top. Une compote que je dois chercher dans ma poche arrière. Mais je n’arrive pas à l’ouvrir, et je suis obliger de faire tourner la ceinture pour voir ce que je fais.
En remettant la ceinture, je vois que mon dossard ne tient plus très bien, il serait con de le perdre. Pour des raisons inconnues, j’ai l’impression d’entendre un bruit derrière moi. Je me retourne et là… le dossard parterre. Deux pas en arrière, je le ramasse et reprends ma course. J’ouvre ma poche de devant pour le ranger et op un gel tombe. De nouveau deux pas en arrière, je ramasse et repars. En fait, il n’y a plus de doute, je ne suis plus lucide.
Tout ceci va se confirmer, je perds mes moyen et j’ai l’impression de partir doucement mais surement en hypoglycémie. Le gel devrait faire effet plus tard, j’ai besoin de sucre rapide, donc vite une nouvelle compote.
Ouf sauvé, ça va mieux et je peux atteindre le dernier ravito.
Avant d’arriver au ravito, j’avais doublé un gars. Mais j’ai besoin d’un bon break pour faire le plein de calorie. Sinon je risque l’arrêt brutal. Il en profite donc pour me passer durant l’arrêt aux stands. Je ne m’inquiète pas, je suis 18 ème à ce moment. Ce qui somme toute, n’est pas si mal.
Une fois que je pense avoir faire le plein me voici reparti. Et op, je le reprends, et je repasse 17 ème. Je reprends ma chasse à la place. Les bénévoles nous ont indiqué qu’il restait 9 km, donc 3 de montée et après c’est de la descente.
Effectivement, ça monte, un léger faux plat où l’on peut courir et puis plus raide. J’en profite pour reprendre un nouveau concurrent, Ca me grise et je me dis que je suis 16 ème. A la bascule, je veux mettre une mine et décide de tout donner.
De toutes les façons, ça ne doit que descendre et être plat sur la fin. Je vais le payer très cher.
Donc j’envoie comme je peux, environ 5’/km, pour creuser l’écart. Mais le chemin est étroit et traite. Il faut que je fasse attention, car je suis déjà tombé deux fois et sur du plat, alors en descente …
Vers le km 70 d’un coup sans m’en rendre compte, j’ai l’impression de me réveiller. Cette sensation où l’on se demande si on est en train de rêver ou si c’est réel. Je me rends compte que mon esprit a quitté mon corps. Les jambes tournent par reflexe mais je ne suis plus conscient. Comme une poule à qui on coupe la tête, mais qui coure toujours. Je me ressaisi en me jurant de faire attention et de rester concentré. Mais ce réveil se produit à nouveau, je ne sais même plus où j’habite, où je suis ni même quel jour nous sommes. Je me dis que ça doit être cette sensation qu’ont les boxeurs KO debout. La fin va être longue très longue. Il va falloir s’accrocher. La deuxième hypo pointe son nez, vite une compote et prions pour que cela tienne.
Cela ne m’empêche pas de reprendre encore un gars et je me place donc en 15 ème position. Cependant, je vois des avions venir de la gauche lors d’un croisement. Ce sont les concurrents du 17 km. Ils nous rejoignent. Drôle d’impression de voir toutes ces personnes nous passer à une vitesse hallucinante sur l’instant. Ils doivent être à 5’ – 5’15 au kilo, mais j’ai l’impression de voir des sprinters.
Km 73, je me dis qu’il ne reste plus que 1 km, nous sommes sur le bord du lac, il faut que je m’accroche. Mais mince, j’ai estimé à 4km le rab, donc 71 + 4 = 75. Gros coup sur la tête, mais ça va le faire, il faut que ça le fasse.
Malheureusement, ce n’est pas totalement plat, c’est un enchaînement de montées / descentes. Tout est relatif car les montées doivent faire 5-10m de D+, donc rien de violent, mais c’est trop dur. J’arrive à trottiner, sauf une en cailloux blanc sous le soleil. Je marche, et pense même que je titube. Les gars m’encourage « Aller, on reste debout, courage ». Quoi ? Rester debout ? Je me suis allongé sans m’en rendre compte ?
A la bascule, je vois une petite plage, la délivrance je me dis que c’est la fin. Mais celle-ci est faite de sable, il y a des vacanciers qui profitent du soleil pour se dorer la pilule. De mémoire, il n’y avait pas de sable sur la zone de départ car c’est une base nautique. Ouch, encore un coup au moral et drôle de contraste. Les vacanciers nous prenant pour des fous et nous qui courront. Il faut longer la plage et de nouveau remonter.
Sauf que cette fois-ci, c’est la fin. Je suis épuisé. J’ai qu’une envie, enfin quand mon esprit revient dans mon corps, c’est d’arriver. Je repense à ce kikou qui se demandait comment les gens font pour être explosé en course, un manque de préparation, quel est le plaisir la dedans etc etc.
Bah un élément de réponse, les coups de fatigue peuvent arriver à tout le monde et il faut vraiment être humble devant ces courses. Même si je pense que je me suis suffisamment préparé, je n’ai pas été à l’abri du coup de chaud, de l’hypo et peut être déshydratation.
Donc voici la dernière bascule, les barrières, l’arche d’arrivée, des spectateurs qui nous montrent le chemin. Je tape dans les mains des petits garçons et petites filles tendant leur main. Mon coach et le deuxième pote sont sur l’herbe au bord de l’eau et me voient arriver. Ils crient mon nom et leur répond par un simple signe de la main, plus la force de rien, juste de mettre un pied devant l’autre dans un semblant de foulée.
Dans un moment de lucidité, je sors mon dossard pour le tenir sur le torse avec les mains et franchi la ligne. Un bénévole se présente devant moi et me dit de conserver mon dossard. Je vais l’écouter mais pose mes deux mains sur ses épaules et me penche. Une fois de plus je perds mon esprit, je ne suis pas loin de m’écrouler. La je peux le dire, je suis épuisé. Il m’accompagne alors pour m’assoir dans l’herbe de pars vite me chercher deux bouteilles d’eau. Mon coach m’enlève chaussures, chaussettes, et manchons. Il aurait pu me mettre nu, je n’aurai pas réagis. Le pote s’assoit sur ma main et je me rends compte que ma montre est bloquée. En fait, il a activé la sécurité des touches, et moi je n’ai pas arrêté le chrono.
Entre temps, on m’a annoncé 13 ème de l’épreuve, ce que je peine à croire car j’ai compté 15. Il y aura prêt de 40 abandons sur cette course, signe qu'elle n'était pas si simple que cela.
Il me faudra bien 30 minutes pour reprendre mes esprits et sentir les crampes arriver. Elles sont bien présentes dans les cuisses, aux fessiers, à la plante de pieds. Je me suis donné, je suis allé à l’épuisement et je suis content de cette course. Elle a été difficile, j’ai un peu lâché mais je me suis repris. Le classement aurait pu être meilleur, mais combien se sont perdus devant ou derrière moi ? C’est le jeu du trail, c’est de ma faute et il faut l’accepter.
Je suis également content car j'ai réussi à terminer, à le faire au mental. J'espère que le corps s'en souviendra avec la sacro sainte période de surcompensation.
Le soir sera compliqué pour manger la pizza achetée dans le village du coin, mais très facile pour dormir.
Ce trail est superbe. Il mériterait d’y avoir un peu plus de monde, mais pas trop. Certains passages sont très étroits et si par malheur il pleut, ça peut être vraiment le bordel.
TOUS les bénévoles sont adorables et à nos petits soins. Au ravito, à l’arrivée, au départ, lors des repas, ils auront tous eu un petit mot pour nous.
Une suggestion, qui a été faite à celui qui ouvrait la voie, c’est de mettre un peu plus de rubalise, même si c’est juste pour rappeler. Nous avons fait parfois des descentes pendant plus d’un kilomètre sans voir de marquage.
Un regret, nous ne voyons pas assez souvent le lac. Alors soit j’étais vraiment KO, soit ils ne peuvent pas y faire grand-chose à cause de la végétation.
14 commentaires
Commentaire de seapen posté le 29-07-2013 à 16:17:23
Bonjour Ejouvin,
J'ai assisté au départ du 71 kms étant venu très tôt pour participer au 36 et bien sûr aux arrivées. Ton récit, regard quasi fataliste presque amusé au ton léger et détaché est super dans lequel tu ravives ces moments particuliers qui ont rempli ta course. Bravo. je suis toujours médusé devant ces véritables perf. que sont les longues distances. Salutations sportives.
Commentaire de ejouvin posté le 29-07-2013 à 16:59:16
Oh mais il ne faut surtout pas être médusé.
Toutes les distances sont difficiles, toutes méritent des encouragements et des félicitations.
J'ai vu ton temps... super résultat aussi.
A une prochaine peut être.
Commentaire de Jean-Phi posté le 29-07-2013 à 16:48:47
Bon, l'essentiel est préservé : La pizza et les allusions graveleuses aux cuissots de mamanpat ! Pour le reste, c'est plutôt bien comme classement surtout avec le déchet à l'arrivée ! 40 / 100 si mes souvenirs de CM1 sont bons ça fait 40%, c'est énorme !
Bref, bravo pour ta course et avec une meilleure gestion c'était top 10 assuré. Le mental est bon par contre et ça c'est une super nouvelle ! Bravo Etienne !
Commentaire de ejouvin posté le 29-07-2013 à 17:06:40
Merci jean-phi.
Je te jure, quand j'ai vu l'équipe de France d'avyron... Piou, je me suis fais tout petit et j'ai pas dis de connerie. Par contre, je dois avouer un truc, ils étaient super sympas et abordables. Il y avait des champions olympiques, la classe.
Je ne voulais pas parler de MamanPat, mais là j'étais obligé. Et je dois avouer un truc, quand j'ai passé le km 70 à la montre, j'ai pensé à son temps sur le Saint Jacques de l'année dernière ... Je me suis dis que ce n'était pas gagné pour moi.
Oh les pizzas, j'ai oublié d'en parler ;) Nous les achetons en faisant bien attention. Le troisième gars les prend en sortant de la voiture et d'un coup.... par terre les pizzas. On a rigolé comme des idiots, car nous étions tellement morts.
Oui, il y a eu beaucoup de déchets sur cette course. La température de 35° y est surement pour quelque chose. Nombreux sont ceux qui sont partis devant, et n'ont jamais vu l'arrivée.
Déjà, sans le détour de 20', je rentre dans le top 10 théoriquement. Et la course aurait été différente, je n'aurai pas autant lâché dans certaines portions. Cela dit, je serai peut être passé à la trappe aussi.
Pour moi la compétition, le trail, c'est une grande part de mental. Je le travaille à l'entraînement, mais également dans ce type d'épreuve. Tant que je peux mettre un pied devant l'autre, je continue, je vais au bout. Bon, il a un peu flanché suite au détour, mais c'est un très bon entraînement. Par contre, y a encore du travail pour la SaintéLyon.
Commentaire de sabzaina posté le 29-07-2013 à 21:52:19
Je t'ai déjà félicité sur FB pour ta très belle place.
Mais à te lire là, je suis soucieuse, tu me fais peur avec tes pertes de lucidité.
Coup de chaleur? Hypo? Surentraînement?
Tu te laisses un peu de temps pour récupérer là dans les prochaines semaines?
Prends soin de temps hein...
Commentaire de ejouvin posté le 29-07-2013 à 22:02:30
Re merci ;)
Ne sois pas soucieuse, c'était surement un coup de chaud, cumulé à des petites hypo que j'ai réussi à "sauver". Je suis arrivé épuisé c'est sur, mais ça passe.
Reprise en douceur cette semaine, pour mieux repartir sur une course fin août, à trouver.
Commentaire de Jean-Phi posté le 30-07-2013 à 07:10:44
Et c'est sab qui parle de recup !!
PS Étienne, si tu ne veux pas que mamanpat te file un coup de pied au derrière, corrige vite le mot aviron (pas de y) ! ;)
Ne t'en fais pas pour le saint Jacques, je reste persuadé que si tu gères bien le cardio tu seras bien classé. La stl c'est différent, faut gérer la course de nuit etc'est un aautre monde.
Commentaire de ejouvin posté le 30-07-2013 à 07:50:53
Op ni vu ni connu ;)
Pour le Saint Jacques, il faudrait envoyer 7h pour un bon classement ... Je n'y suis pas. Affaire à suivre.
Commentaire de tortue01 posté le 30-07-2013 à 09:44:09
Waouah..ca fait super flipper ton CR!!! J'ai cru que tu n'arriverai pas vivant...mais finalement tu as survecu..Bravo et surtout bonne recup...
Commentaire de ejouvin posté le 30-07-2013 à 09:50:05
Mais non il ne faut pas flipper. J'ai "juste" eu un coup de chaud ou d'hypo. C'est des choses qui arrivent. Oui j'ai survécu, je suis allé au bout de moi même.
Merci, je vais récupérer tranquillement cette semaine, enfin si la semaine le permet.
Commentaire de Arclusaz posté le 20-09-2013 à 16:02:41
bien envie d'aller cafter auprès de qui tu sais.......
j'hésite, j'hésite......
Belle course où tu es allé au bout de tes moyens : surement un moment important pour ta stupéfiante progression.
Commentaire de ejouvin posté le 20-09-2013 à 16:05:18
Hehe, elle n'a encore rien dit...
Pour les bêtises, il ne faut surtout pas hésiter.
Merci en tout cas. C'est vrai que ce fut un super souvenir cette course. Mais la progression ralentie de plus en plus à mes yeux. A valider très prochainement.
Commentaire de Mamanpat posté le 20-09-2013 à 19:14:01
Je vois que je ne peux pas faire confiance... Un vrai gosse, je pars quelques semaines et à peine le dos tourné, hop, des conneries !
Donc oui l'aviron est le plus fabuleux des sports (physiquement parlant), les rameurs sont à tombés, ils sont grands, beaux et musclés avec des petits cu... Oups je m'égare... Bref, tu sais donc pourquoi j'ai épousé un rameur... Tu veux que je lui fasse lire tes bêtises ???
Mes cuissots sont chauds bouillants pour la semaine pro, ton ardoise vient de retrouver son niveau maximum...
Sinon, bravo d'avoir fini je crois que les conditions étaient vraiment rudes... Un peu comme au St Jacques l'an passé d'ailleurs... :-)
Commentaire de ejouvin posté le 20-09-2013 à 22:45:06
Ouiiiiii un môme.
Le plus fabuleux sport, faut pas déconner ;) juste un truc de bourins qui soulève de la fonte. C'est la natation le plus fabuleux.
Pour ton mari, Heuuuu non il va me taper.
Rendez vous dans une semaine, pour effacer l'ardoise.
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