L'auteur : aragorn23
La course : Le Grand Raid de la Réunion : La Diagonale des Fous
Date : 13/10/2011
Lieu : ST PHILIPPE (Réunion)
Affichage : 2450 vues
Distance : 163km
Objectif : Pas d'objectif
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C'est ma deuxième participation, après 2009, à la "Diagonale des Fous" (surnom bien mérité).
Au programme de cette année 163 Km contre 148 km en 2009 avec 9700 m de dénivelé positif contre 9400.
A parcourir en 66 heures maximum avec pas moins de 22 barrières horaires.
Parcours et profil : départ de Cap Méchant au sud de l'île.
Edition identique à celle de 2010 avec un passage dans le cirque de Salazie qui n'avait pas été emprunté en 2009.
Je fais partie d'une équipe "La Piton Textor Team" constituée de 9 membres issus en partie des deux associations de Bon Pied Bon Oeil et de la Foulée Beauzelloise.
Avec 3 assistants de luxe :
Le départ de la course est donné le jeudi 13 octobre à 22H00.
Mon objectif pour cette édition est de terminer en 50 heures soit 10 heures de moins qu'en 2009.
Avant Course :
Nous arrivons tous , à la Réunion, le mardi 11 au matin deux jours avant le départ de la course.
Une arrivée plus-tôt ne permettant pas de profiter pleinement des atouts de la Réunion.
Il vaut mieux éviter les randonnées afin de ne pas se blesser et côté diététique : le Rhum et la Dodo ne sont pas nos amis jusqu'à l'arrivée de la course.
Contrairement à 2009, nous n'aurons pas droit à notre arrivée à l'aéroport à l'accueil par l'organisation avec le pot de bienvenue.
A l'hôtel à Saint-Gilles, Piton Textor nous dévoile les bambous qu'il a commandé sur internet et qu'il a préparé pour les 9 coureurs du groupe.
Bambous du team.
A l'hôtel, où nous résidons, il n'y a que des coureurs du grand raid.
Le journal local consacre des pages entières à l'événement.
Un des articles répertorie la liste des principaux favoris.
Philippe rajoute dans la liste, le Piton Textor Team, qui avait été injustement oublié et transmet le journal à une résidente de l'hôtel.
Celle-ci revient quelques minutes plus tard vers nous sourire aux lèvres en nous pointant du doigt un nom dans la liste
et nous indiquant qu'il s'agit de son mari : Ryan Bauman : un Suisse qui a terminé second de l'Ultra Trail du Verbier Saint-Bernard : un véritable client.
Un autre article parle de contrôles anti-dopage renforcés avec un dépistage renforcé du Zamal.
Le patron de l'hôtel nous explique qu'il s'agit du nom Réunionnais du cannabis.
Mercredi 12 Octobre : retrait des dossards.
En fin de matinée : baignade à l'Hermitage puis repas à base de poisson au bord de l'océan
indien en compagnie de Patrick Bellon et de Jean-Michel qui faisaient partie de l'aventure 2009.
Restaurant le Kabanon
L'après-midi direction le Stade de la Redoute à Saint-Denis pour le retrait des dossards en compagnie d'Eric Amar,
du club de Portet sur Garonne, qui me fait participer de façon symbolique pendant la course à un action pour le soutien
de la lutte contre la mucoviscidose en portant un fanion sur mon sac.
Le retrait des dossards est rapide avec une organisation bien rodée.
Stade de la Redoute
Passage de la puce :
Julien Chorrier, vainqueur de l'édition 2009 et futur vainqueur, est présent.
On en profite pour lui demander de poser avec nous pour une photo.
En compagnie de Piton, Julien Chorrier et Philippe.
Après le retrait des dossards, pour les fanas, une file d'attente impressionnante
permet de récupérer des gadgets, échantillons etc....
On en profite pour faire quelques photos de groupe avec le tee-shirt de la course.
Jeudi 13 Octobre : départ de la course.
Nous quittons notre base de Saint Gilles, le matin, pour rejoindre Saint-Philippe et la Cap Méchant au sud de l'île.
Nous avons décidé d'arriver relativement tôt afin de prendre le temps de nous préparer et de faire une bonne sieste.
Pendant le trajet Sonia réserve un restaurant, le "Pinpin", au Cap Méchant et le hasard fait bien les choses car le restaurant
se trouve juste en face du départ.
Le patron nous permet de nous installer dans une grande salle pour nous préparer.
Départ de Cap Méchant
Choix du bambou.
Les deux sacs de rechange de Cilaos et de Deux-Bras et ma mascotte : Maître Yoda.
La sieste
Un des préparatifs les plus importants : les pieds.
Pendant le repas Momo et moi avons le plaisir d'échanger quelques mots avec Catherine et Michel Polleti,
organisateurs de l'UTMB : épreuve jumelée avec le Grand Raid de la Réunion.
Canal plus Réunion est présent dans le restaurant et suit le Grand Raid en live pendant toute la course.
Notre capitaine Piton a droit à une interview.
Tout le groupe est prêt à se rendre dans le sas du départ.
Les coureurs sont obligés de se présenter au départ deux heures avant le top départ,
pour le contrôle des sacs.
Maribel et moi sommes recalés au contrôle des sacs pour le même motif : longueur des bandes de Strap insuffisante.
2,5 m au lieu de 5m. Pendant que Maribel achète le strap manquant Piton me lance le sien.
On est admis à entrer dans le stade pour une longue attente.
L'ambiance est assurée par des groupes de danse et des musiciens créoles.
Je retrouve notre ami Ryan Bauman avant qu'il ne se rende sur les premières lignes de départ avec les dossards préférentiels.
Nous nous asseyons sous une tente en attendant le départ. Karine Hery, futur vainqueur féminin du Grand Raid, un peu en retard
se faufile au milieu des coureurs pour rejoindre les dossards préférentiels.
Les 3 de Bon Pied Bon Oeil motivés.
L'attente dans la tente.
Le président du Grand Raid, Robert Chicaut, nous indique que la passage de la forêt de Belouve pourra se faire par la route
en fonction des conditions climatiques.
La décision étant prise au dernier moment.
22H00 le départ est donné et les 2300 coureurs s'élancent au milieu des nombreux spectateurs dans une ambiance de fête.
Les 5 premiers kilomètres ont lieu sur route. Deux théories s'affrontent :
Ali adopte la première tactique et les 8 autres choisissent la deuxième.
Dans les deux cas cette portion de route se fait en courant.
Nous nous donnons comme consigne de s'attendre au premier ravitaillement, au km 15, si on se perd.
Piton a choisi comme tactique de me coller aux chaussures pour arriver finisher à Saint-Denis et fidèle à sa réputation il me sème très rapidement.
Mon GPS indique 10 km/h. Je n'arrive pas à suivre le rythme des Lapins, de Piton et de Philippe.
Momo qui devait rester avec nous est encore plus loin devant.
Je me fais ensuite doublé par Mouloud et rattrapé par Sophie.
Ma montre GPS délire, je la croie bloquée sur une distance de 4 km mais je me rends compte qu'elle m'indique 4300 km.
Un petit incident technique qui me pénalise car j'aime bien connaître la distance parcourue pour mieux gérer
les barrières horaires.
Sophie me rattrape et nous faisons route commune.
Au km 5 on attaque le début du chemin en légère pente au milieu des cannes à sucre.
Nous passons en mode marche rapide. Puis c'est la forêt avec un chemin large pas trop raide.
Au bout de quelques km nous rattrapons Mouloud et Philippe avec qui nous faisons chemin commun jusqu'au premier ravitaillement.
Je fais connaissance avec un Castrais, finisher du Marathon des Sables, qui participe à son premier Ultra.
Nous évoquons le match de rugby du lendemain : Castres - Toulouse.
Le premier ravitaillement se présente nous retrouvons les 3 autres : Piton et les Lapins. Pas de trace de Momo.
Il est minuit 33. Prévision de passage à minuit 50 pour une barrière horaire à 01 heure. Tout baigne.
Nous nous ravitaillons en solide et liquide.
Premiers mètres hors du stade.
Nous attaquons maintenant, le premier gros morceau du Grand Raid :
le chemin du volcan avec 1700 m de dénivelé positif sur 8 km en monotrace.
Nous avançons à la queue leu leu avec quelques ralentissements sur les passages les plus techniques.
Le pente est raide et technique avec des cailloux, des pierres, des racines et un terrain humide.
Avec Philippe et Piton nous prenons la tête de notre groupe avec quelques longueurs d'avance sur les 4 autres.
L'ambiance est très bonne, d'après Maribel on n'entend que nous
A la sortie de la forêt le paysage devient lunaire c'est l'approche du volcan.
il fait très frais avec un vent fort.
Ceux qui comme moi n'étaient pas très couvert en profitent pour sortir le coupe vent.
On arrive sur une partie relativement plate. J'en profite pour me dégourdir les jambes en passant en mode
course.
Début du chemin du volcan.
On aperçoit Maribel, Mouloud et Sophie.
05H24 arrivée à Foc Foc, deuxième ravitaillement et pointage, pour une prévision d'arrivée à 04H57 et une barrière horaire à 06H15.
Quelques incidents bénins nous ont fait perdre plusieurs minutes :
J'ai la désagréable surprise de voir un concurrent fumer une cigarette. N'ayant pas eu la présence d'esprit de noter son numéro de dossard je ne sais pas s' il a terminé.
J'espère que non.
Le jour se lève petit à petit et on aperçoit l'Enclos et le piton de la Fournaise : un spectacle grandiose.
Dommage que le départ de la course ne soit pas donné à minuit, comme en 2009, car cela permet de profiter plus du volcan de jour.
Toute cette partie est roulante, on en profite pour trottiner sans oublier d'admirer le paysage.
Pointage suivant : le Volcan avec une arrivée à 06H20 pour une prévision à 06H30 et une barrière horaire à 07H45.
Le retard est rattrapé.
Au ravitaillement, premier arrêt pour des soins aux pieds pour Piton.
Les boissons chaudes : soupe, thé et café sont les bienvenues.
Foc-Foc
L'enclos au lever du jour
Au bord de l'enclos. Il fait froid et certains ont l'air endormi.
Le ravitaillement du volcan.
Sophie au ravitaillement du volcan.
Nous attaquons maintenant une des portion les plus belles : La Plaine des Sables.
Nous marchons à un rythme soutenu.
Tous le monde est émerveillé par ce paysage lunaire, y compris ceux qui l'ont vu en 2009 :
Piton, Mouloud et moi.
Au bout de la plaine des sables se présente la montée vers l'Oratoire Sainte-Thérèse. Une montée assez raide mais pas trop longue.
Au pied de la montée, premier contrôle anti-triche avec un pointage des numéros de dossards.
On profite de ce pointage pour enlever notre coupe-vent le soleil commençant à réchauffer l'atmosphère.
il y a deux ans la première défaillance est apparue dès les premiers mètres de cette montée.
Cette année aucun signe de fatigue dans notre groupe. La montée se passe sans problème.
Après le sommet de l'oratoire, direction Piton Textor une portion très roulante et peu escarpée.
Piton et Mouloud se sentent poussés des ailes (c'est normal pour Piton Textor il joue à domicile).
Le groupe s'étire et j'arrive au ravitaillement derrière Piton et Mouloud.
Arrivée à Piton Textor à 08H25 pour une prévision à 08H32 et une barrière horaire à 09H45.
Une formidable ambiance parmi les bénévoles nous attend. Ils chantent : "Qui c'est les plus forts, évidemment c'est Piton Textor".
On en profite pour faire une photo commémorative de notre passage en 2009.
Etape suivante : Mare à Boue où nos trois assistants doivent nous attendre.
Je téléphone à Sonia qui n'est pas encore arrivée au ravitaillement. Elle m'annonce la première mauvaise nouvelle : l'arrêt d'Ali à Mare à Boue.
Il ne peut plus continuer diminué par une blessure au genou. Une blessure qu'il se traîne depuis le Grand Raid des Pyrénées.
Deuxième mauvaise nouvelle : Momo a un problème de puce et se trouve derrière nous à l'oratoire Sainte Thérèse.
C'est assez incompréhensible. Si on l'avait doublée on l'aurait aperçue.
Je rappelle Sonia qui m'indique qu'il y avait une erreur et que Momo arrive en fait à Mare à Boue.
Elle a deux heures d'avance sur nous.
Nous quittons Piton Textor pour une portion du parcours complétement différente.
L'arrivée à la plaine des sables.
Panneau d'indication du piton des neiges. Une de nos prochaines étapes.
La plaine des sables.
La montée vers l'oratoire Sainte-Thérèse.
Piton, Maribel, Sophie et Mouloud.
La plaine des sables vue d'en haut.
L'oratoire Sainte-Thérèse.
Direction Piton Textor.
Piton Textor.
Le paysage change, on se retrouve au milieu des champs avec des vaches. On passe
d'un champ à l'autre en empruntant des échelles. Le terrain est accidenté avec de nombreux escaliers.
C'est une partie du parcours où l'on peut courir à un bon rythme.
Malheureusement le boue s'est invitée et le terrain devient assez vite glissant.
Je suis en forme et je lâche mes compagnons de route en comptant les attendre au ravitaillement.
On aperçoit au loin le Grand Benare et le Piton des neiges ainsi que son gîte : point culminant de l'épreuve
à 2470 m.
C'est aussi une des plus belles portions du parcours mis à part les derniers kilomètres sur route.
Je me fais quelques frayeurs avec des glissages dues à la boue et j'arrive à Mare à Boue à 10H33
pour une prévision à 10H37 et une barrière horaire à 12H00.
Nous avons parcouru 50 km en 12H37 de course.
A mon arrivée j'aperçois nos trois assistants et Ali qui a rendu son dossard.
Il a essayé de suivre Momo au départ de Mare à Boue mais la douleur était trop vive.
Avant le départ nous avions essayé de le convaincre, en vain, de la faire plus tranquille avec nous pour essayer de terminer mais
il a trop l'esprit de compétition pour se traîner avec les poireaux.
Il faut dire qu'il a largement le niveau pour faire un bon classement.
Ce sera à n'en pas douter pour une prochaine édition.
Sonia et Ali me disent que Momo est très bien physiquement et moralement.
Mare à Boue est un ravitaillement complet tenu par des militaires.
On a droit à du poulet avec des pâtes. Je me ravitaille copieusement et rempli ma poche à eau.
Pendant ce temps le reste du groupe arrive.
Passage du groupe au dessus des barbelés : Piton.
Maribel.
Philippe.
Raphaël.
Sophie.
Le piton des neiges avec sur la gauche la tache blanche : le gîte.
La plaine des Cafres.
Les escaliers.
La boue.
Des arums.
Mon arrivée à Mare à Boue.
Avec Ali.
Le poste de ravitaillement de Mare à Boue.
Mouloud et Piton arrivent quelques minutes derrière moi.
Sophie, Raphaël, Philippe et Maribel ferment la marche du groupe.
Piton et Raphaël veulent se faire soigner leurs ampoules aux pieds par Sonia.
Il est 11H00 : une heure d'avance sur la barrière. C'est la marge minimum que je me suis donné.
En plus la forêt de Belouve nous attend. Les nouvelles des derniers jours ne sont pas très bonnes.
Le terrain est détrempé avec de la boue d'après les coureurs qui l'ont reconnu.
Ne sachant pas si le parcours va emprunter la route je décide de ne pas m'éterniser.
Je demande à mes 6 compagnons de chemin de me suivre et seul Philippe se décide.
Il est 11H07, je quitte Mare à Boue après avoir récupéré mon bâton auprès de Sonia.
Jusqu'à présent tout se passait relativement bien pour nous tous, mis à part bien sur pour Ali, et c'est à partir de Mare à Boue que tout est parti en sucette.
Je pars donc avec Philippe pour, dans un premier temps, atteindre le Col de Bébour.
Jusqu'à Hellbourg il y a 20 km, 690 m de dénivelé négatif et 250 m de dénivelé positif.
Mes prévisions sont de 3 heures pour effectuer cette partie.
Entre Mare à Boue et le Col de Bebour il y a 4 km et 18 m de D - et nous allons avoir un premier aperçu de ce qui nous attend pendant 15 km.
De la boue, rien que de la boue avec des descentes raides, des branches d'arbres et des racines pour ne pas nous faciliter le travail.
Cette partie me semble interminable.
Même les Réunionnais ne reconnaissent pas le chemin et sont aussi dépités que nous.
On arrive enfin au bout de notre peine pour atteindre une portion de route que l'on va prendre pendant 2 à 3 kilomètres.
Après un petit malentendu avec Philippe sur le fait de courir ou non, on trottine au bout d'un kilomètre avant d'attaquer la
deuxième portion de boue.
J'attaque brillamment ce passage en me prenant une branche en pleine tête.
Plus de peur que de mal. Je laisse passer un coureur qui est ravi de quitter la route.
La deuxième partie n'est pas très longue, on retrouve la route que l'on traverse pour atteindre la portion suivante de chemin et de boue.
Avant de pénétrer dans la forêt nous sommes contrôlés avec prise de nos numéros de dossards : pointage anti-triche.
Cette partie est épouvantable avec de la boue de plus en plus profonde, un terrain très accidenté avec des racines, des arbres, des grosses pierres
et une adhérence des plus précaire.
Je suis content d'avoir mis mes guêtres.
Au début on essaye de contourner les parties les plus boueuses et on se résigne assez rapidement
en y allant franco dedans. C'est de plus en plus éprouvant, on a l'impression de ne pas avancer.
J'attends le ravitaillement en eau annoncé au bout de 7 km.
Un coureur me dit qu'on va être éliminé à la prochaine barrière horaire.
Je lui donne comme conseil de se concentrer sur sa course et ne pas écouter les autres.
Conseil que je m'applique suite à la mauvaise expérience de 2009 lors de la montée de la Roche Ancrée.
Une concurrente nous indique que nous avançons à 1,5 km à l'heure.
A ce rythme là la barrière horaire d'Hell Bourg est complétement emplafonnée.
Je lâche Philippe, pourtant j'ai vraiment l'impression de me traîner.
Soudain, surgit de nulle part, Sophie apparait, debout sur une branche, en proférant une série de jurons en Belge.
Elle ajoute "et encore je ne suis pas en chaleur !!!". Nous sommes tous interloqués.
J'ai juste le temps de l'entendre me dire qu'elle a dépassé une quantité incroyable de coureurs en les bousculant pour se frayer son chemin,
que Piton et les Lapins sont passés par la route, que Mouloud patauge dans la boue derrière elle, qu'elle n'a pas vu Philippe que je la voie disparaître à une vitesse incroyable.
Elle est visiblement dans un état second. Je ne l'avais jamais vu comme cela.
Dans un premier temps je me dis qu'elle aurait pu m'attendre et ensuite qu'elle a raison de faire sa course.
Sa vision m'a redonné un coup de boost et je me mets à accélérer sans aller aussi vite qu'elle.
Pendant toute cette partie on entend tout prêt la route mais à aucun moment on nous envoie pour la prendre.
Les conditions sont pourtant apocalyptiques. Le trail des Citadelles de notre ami Michel Arnaud est largement dépassé, c'est pourtant une référence tout comme le trail des 3 pics de cette année.
On se croit à Koh Lanta ou dans un parcours du combattant. Le ravitaillement intermédiaire est introuvable.
On rencontre trois photographes officiels qui sont là pour nous faire des photos à sensation.
Je me dis que c'est bon signe de les rencontrer la fin doit être proche.
Je dis à un photographe qu'il s'est placé à cet endroit pour remporter le prix de la photo de la plus belle glissade.
Je lui demande si la fin de notre calvaire est proche. Il me dit qu'il vient du gîte de Belouve à pied à environ 1,5 km.
J'arrive enfin à la sortie de cet enfer au pointage du parking du gîte de la forêt de Belouve à 15H49.
J'aurai du être éliminé par la barrière horaire fixée à 15H15.
Mais l'organisation l'a supprimée à cause (ou grâce dans mon cas) de la boue.
Je ne me suis aperçu de rien sur le coup, ce n'est qu'après la course que j'ai réalisé.
Je vois Maribel, Raphaël et Piton assis.
Je leur demande de continuer avec moi mais ils ont rendus leur dossard.
Pressé par le temps, fatigué par cette boue, je ne cherche pas à comprendre, je passe un coup de téléphone à Sonia qui est au courant et qui a aussi essayée
de leur faire reprendre la course en vain.
Comment s'est pris la décision pour Piton et les lapins d'abandonner ?
Ils sont partis de de Mare à Boue à 11h35 soit 30 minutes environ derrière moi.
Ils ont ensuite pris la descente vers le col de Bébour, par le chemin, puis rejoint un groupe d'une vingtaine de coureurs avant le dernier passage de boue.
Compte tenu des informations contradictoires obtenues auprès des bénévoles : chemin impraticable ou non, passage par la route ou non, de l'heure et de la barrière horaire annoncée à 15h15 au parking de Bélouve, ainsi que des conditions très limites dans la descente de Bébour , le groupe des 20 a décidé de prendre la route.
Après s'être concertés ils ont décidé également de prendre cette option, sachant que la lecture de l'article 19 du règlement, par Piton Textor, autorise un non pointage à une barrière horaire. Article ambigü il faut bien le reconnaître.
Sophie et Mouloud, qu'ils avaient rejoints, choisissant l'option de la mare à cochons par peur de la disqualification.
A 14h50 ils sont arrivés au "pointage" du parking du gîte de Bélouve, qui en fait n'en était pas un (de pointage!!) après une bonne montée par la route (marche en montée et course sur plat et descente, compte tenu de la barrière horaire annoncée à 15h15).
A leur arrivée ils ont rencontré des coureurs sortant de la mare à cochons indiquant qu'ils étaient partie de Mare à Boue à 9h40, alors que nous (Philippe et moi) en étions partis à 11h05.
Un rapide calcul prévoit une arrivée à 16h15 (un gain de 02h05 par rapport à Philippe et à moi) et donc une élimination pratiquement garantie à Hell Bourg.
Piton Textor a demandé à voir le responsable pour lui expliquer la situation (pas d'information ou informations contradictoires sur le parcours à prendre, problème de sécurité pour les coureurs dans la descente de la forêt de Bébour).
Le responsable du poste lui a dit qu'il comprenait la situation mais qu'il n'avait pas autorité pour prendre des décisions et que pour lui, son poste n'étant pas un pointage, il ne voiyait aucun inconvénient à ce que es 3 coureurs poursuivent jusqu'au prochain prochain pointage du stade de Hell Bourg à 18h00.
C'est alors qu'ils ont pris la décision de ne plus continuer, en considérant que cette "tricherie autorisée" n'était pas conforme à leur esprit de la course, notamment vis-à-vis de nous (Philippe, Sophie, Mouloud et moi) qui risquaient d'arriver hors délais alors qu'ils pouvaient eux, en passant par la route, ne pas être inquiété par ces barrières.
J'avoue ne toujours pas avoir compris leur décision d'abandonner. Cela ne m'aurai en aucun cas gêné s'ils avaient continué.
De toute façon rien ne dit que je n'aurai pas comblé l'avance d'une heure qu'ils avaient prise sur moi.
Il restait 95 km de course à cet endroit.
On aurait pu aussi se retrouver à Cilaos et quand bien même ils seraient arrivés avant moi je ne leur en aurai pas tenu rigueur.
Une décision d'abandon prise sans aucun doute trop à la hâte. Dans ce genre de situation il ne faut jamais rendre son dossard de suite mais se donner le temps de la réflexion.
Dans tous les cas étant donné la qualité de l'organisation et les conditions plus que limites du terrain il est difficile de prendre la bonne décision.
On aura vu de tout sur ces 20 km : des coureurs qui n'auront pris aucune des trois portions de boue, d'autres qui auront pris les trois et d'autres qui en auront pris une ou deux.
Mouloud de son côté jettera "l'éponge" (pleine de boue !!) avant la fin de la mare à cochon en prenant la route pour les derniers kilomètres le menant au parking du gîte qu'il rejoindra vers 17h00.
Il rendra son dossard pensant ne pas pouvoir rejoindre à temps le prochain pointage du stade de Hell Bourg à 18h00, et à coup sûr au gîte du Piton des neiges. Se cogner la montée du Cap Anglais, la nuit sans avoir pû récupérer un peu à Hell Bourg et devoir ensuite continuer sur Cilaos pour me faire récupérer par nos suiveurs ne l'enchantant guère.
Pour Mouloud c'est dommage, il était en forme. Il fait aussi partie des nombreuses victimes de l'organisation défaillante. S'il avait su qu'il y avait 30 minutes de délai supplémentaire à Hellbourg il aurait certainement continué.
Il le dit lui même il ne faut pas s'arrêter tant-que l'organisation ne nous élimine pas pour un hors délai.
La descente vers le col de Bebour.
Passage de rivière.
Maribel m'indique que Sophie est à environ 15 minutes devant moi.
Je continue mon chemin direction le gite de Belouve à 3 km d'après les bénévoles : chapeau le photographe pour son estimation des distances.
Le terrain est nettement plus praticable et en descente. Je me retrouve avec deux coureurs du Tampon qui plaisantent.
Enfin le gîte de Belouve. Les deux coureurs m'indiquent qu'il reste 30 minutes de descente avant Hell Bourg.
30 minutes pour eux certainement mais pas pour moi vu la vitesse à laquelle ils descendent.
Je vais tout de même assez vite. J'ai encore des réserves malgré le passage de la mare à cochons comme le surnommera Momo.
J'aperçois devant moi Sophie. Je l'interpelle, elle se retourne et se jette dans mes bras les muscles tremblant.
Visiblement elle est encore dans un état d'énervement avancé.
Nous terminons la descente ensemble jusqu'à Hell Bourg que nos atteignons à 17H16 pour une prévision à 15H00 et une barrière horaire à 18H00.
6 heures pour faire 20 kilomètres !!!! Un record.
Au premier pointage à Hell Bourg on nous indique d'aller au stade à 800 m de là par la route. On ne nous épargne décidément rien.
Un deuxième pointage au stade : 8 minutes plus tard, ils nous indiquent que nous devons pointer à la sortie (pourquoi deux pointages si proches plus un troisième à la sortie ?? ).
C'est enfin le ravitaillement avec une pause bien méritée.
J'indique à Sophie que nous partons à 17H45. Il nous faut attaquer le Cap Anglais, un des plus gros morceaux de la course : 1100 m de dénivelé positif de nuit
et une sacré réputation.
On se ravitaille avec Sophie et nous discutons avec une concurrente qui est dégoutée par ce passage de boue et qui décide d'abandonner.
17H45 on se prépare à partir lorsqu'on voit arriver avec un grand plaisir Philippe.
Il est aussi exténué que nous mais prêt à repartir.
Il nous apprend que l'organisation, dans sa grande sagesse nous octroie, un délai supplémentaire de 30 minutes sur toutes les prochaines barrières horaires.
Il a eu cette information d'une coureuse militaire qui fait partie de l'organisation.
Ils ont hésité entre un délai de 30 minutes, 1 heure, 1h30 et même 2 heures et ont choisi 30 minutes.
Quelle générosité vu le temps perdu dans cette mare à cochons.
J'indique à Philippe, qu'on lui laisse 15 minutes pour se ravitailler avant de partir pour le Gîte du Piton des Neiges.
Philippe nous dit qu'il faut 1H30 pour monter jusqu'au gîte : 1500 m de D+ en 1H30 je demande à voir.
Un des deux coureurs du Tampon qui se ravitaille à côté de nous rectifie le tir : minimum 03H00 et plutôt 04H00 vu le terrain et la pente.
18H05 on part pointer.
Le bénévole au pointage nous indique que c'est de l'autre côté de la tente. On sort et aucun poste de pointage en vue.
Un bénévole nous indique qu'il n'y a pas de pointage. Excédé je les traite de nuls. Le coureur du Tampon me demande d'être indulgent ce sont des bénévoles.
Je lui donne raison et nous partons à l'assaut du Cap Anglais à la tombée de la nuit.
La nouvelle barrière horaire est à 22H30 au Gîte. Avec 04H00 de montée environ, donc une arrivée prévisionnelle aux alentours de 22H10 il ne nous reste que 20 minutes de marge.
Avec les séquelles physiques de la boue et la montée pendant la nuit cela va être très chaud.
Je prend les devants avec Philippe et Sophie derrière moi.
Le début de la montée n'est pas trop raide.
On monte à un bon rythme. Le passage de la Mare aux Cochons n'a pas laissé autant de traces de fatigue qu'on aurait pu l'imaginer.
Je me retourne de temps en temps et j'aperçois à quelques longueurs le K-Way jaune de Philippe.
On arrive près d'une source sur une partie plus plate.
C'est ensuite la partie la plus raide qui se présente. C'est du costaud avec des pierres, des racines.
Au bout d'un moment le coureur en K-Way jaune que je croyais être Philippe me double. C'est là que je me rends compte que cela fait un bout de temps que j'ai distancé Philippe et Sophie.
N'ayant pas beaucoup de marge sur la barrière horaire je ne m'arrête pas pour les attendre.
Dans la montée je me suis trouvé derrière un ou plusiuers coureurs et à chaque fois un concurrent criait "Si vous voulez dépasser dîtes le". Et ils s'écartaient pour nous laisser le passage.
Rien de comparable avec l' UTMB.
J'arrive bientôt au Cap Anglais. Direction maintenant le Gîte par les crêtes.
Le chemin est plus long que prévu mais nettement plus facile.
Il est 21H56 j'arrive au Gîte du Piton des neiges. Soit 4 minutes avant la barrière horaire mais 34 minutes en intégrant les 30 minutes de rab dues à la boue.
Dans mes prévisions je devais être au gîte à 19H30. Soit 02H30 de retard. J'avais 03H00 de retard à Hell Bourg. C'est encourageant.
Je retrouve le coureur de Castres avec qui j'avais discuté pendant la montée au volcan.
Il est démoralisé. Il abandonnera d'ailleurs à Cilaos.
Je ne m'éternise pas au ravitaillement et attaque la descente vers Cilaos via le Bloc prochain pointage avec une barrière à minuit.
Le début de la descente n'est pas du tout humide contrairement à 2009. Cela permet de courir. Mais rapidement je quitte le terrain sec pour retrouver les
rondins de bois des escaliers et les pierres glissantes.
J'ai un mauvais souvenir de ce passage en 2009 avec beaucoup de chutes parmi les coureurs.
C'est moins trempé qu'en 2009 et j'ai compris comment négocier ces rondins de bois : le creux du pied posé dessus.
Si on met la pointe des pieds c'est une perte d'adhérence assurée.
J'arrive au bloc pas de pointage ??
Je téléphone à Sonia elle m'attend à Cilaos avec Laurence et Denis.
Elle me signale que Sophie et Philippe sont arrivés à 23H00 hors délai au gîte du Piton des Neiges et que Momo est à Cilaos depuis 2 heures.
Nous ne sommes plus que deux du groupe en course au bout de 90 km.
J'apprendrai par la suite qu'à Hell Bourg il y a eu une distribution d'eau avariée, que Sophie en a eu des nausées pendant toute la montée, que Philippe l'a attendue
et qu'ils se sont donc retrouvés hors délai au gîte.
En buvant du Coca Cola j'ai eu de la chance d'échapper à cette eau et je n'ai pas du remplir ma poche à eau.
Si j'étais resté avec Sophie et Philippe dans la montée je ne sais pas ce qu'il ce serait passé. Je ne pense pas que j'aurai abandonné Sophie malade.
Je fais les 3 km de route entre Le Bloc et Cilaos en courant.
A l'entrée de Cilaos je retrouve Sonia au même endroit où elle faisait la circulation sous la pluie il y a deux ans.
Là où je ne l'avais pas vu.
Elle me trace la route vers le stade en m'indiquant que les assistants, contrairement à 2009, ne peuvent pénétrer dans l'enceinte.
Ce n'est pas une bonne nouvelle. Bonne nouvelle elle a pu se garer pas très loin du stade.
Momo est arrivée environ 02H00 avant moi. Elle dort sur un lit de camp sous les tentes. Elle prévoit de repartir vers 01H00 du matin.
Laurence et Denis m'attendent à l'entrée du stade. Laurence est emmitouflée sous une couverture. Elle est transie de froid.
Il est 00H25 j'avais prévu d'arriver à Cilaos à 22H10. La barrière horaire est à 00H30. Avec la demi-heure de rab j'ai 35 minutes d'avance sur la barrière horaire.
J'ai 03H00 pour manger, me doucher, me changer et dormir.
Je commence par le repas avec de la soupe, du poulet et des pâtes.
Ensuite la douche, froide évidemment pour les poireaux, avec toute la boue à enlever.
Je retrouve avec plaisir Patrick Bellon qui prévoit de profiter à fond de l'étape de Cilaos pour repartir vers 3H00.
Il a particulièrement apprécié la mare à cochons. En regardant les temps de passage il a mis 07H45 entre Mare à Boue et Hell Bourg !!!
Je l'ai doublé dans la montée du Cap Anglais sans m'en apercevoir. L'effet nuit, la concentration sur l'objectif à atteindre et la fatigue.
Je me dirige ensuite vers la voiture, à côté du stade. Il est 01H30.
Sonia m'indique que Momo n'est pas encore repartie.
Je m'allonge à l'arrière et passe les pieds par la fenêtre pour que Sonia me refasse les straps qui me protègent des ampoules.
J'essaie de m'endormir et demande à Sonia de me réveiller à 02H30. Elle s'est renseignée sur la barrière de sortie et a obtenu des informations contradictoires : les 30 minutes
de rab sont à priori gommées.
Je préfère prendre une petite marge d'avance. Tant pis je ne ferai pas la route avec Patrick Bellon.
Dans un demi sommeil, j'entends Sonia discuter avec la femme d'un coureur qui lui demande de soigner son mari atteint d'une tendinite et à qui le corps médical a interdit de repartir.
Je l'entends aussi dire au téléphone : "je vais venir vous chercher". Je comprendrai plus tard qu'il s'agit de Philippe et de Sophie.
J'arrive à m'endormir pour un réveil à 02H30. Soit une bonne nuit de sommeil d'environ 45 minutes.
C'est un des moments les plus difficile de la course. Un réveil au milieu de la nuit après un somme trop court et 70 km à parcourir.
Il ne faut surtout pas se poser de questions. Se lever de suite, s'habiller et partir dans la foulée.
C'est ce que je fais.
Une des principale qualité de l'ultra trailer est de pouvoir débrancher son cerveau. Pour certains c'est relativement facile. Ce qui doit être mon cas.
Dans ma précipitation j'en oublie mon bâton. Heureusement que je m'en aperçois juste avant de pointer et de quitter Cilaos.
Je demande à Sonia des nouvelles de Momo. Elle m'indique qu'elle ne va pas repartir. Elle souffre d'un genou et a de grosses difficultés à marcher.
Elle dort toujours sur un lit de camp.
Je suis malheureusement le dernier survivant du groupe. C'est une motivation supplémentaire pour terminer. Il reste tout de même 70 km à parcourir.
Il est 02H47 : 45 minutes d'avance sur les barrières horaires.
Dans mes prévisions je ne devais rester qu'une 1H30 à Cilaos. J'y ai fait une pause de 02H20. J'ai maintenant un retard de 03H07 sur mes prévisions.
Je fais une croix sur les 50 heures. Objectif finisher quelque soit le temps.
Prochaine étape le célèbre col du Taïbit et le cirque de Mafate.
Le départ de Cilaos est mieux balisé qu'il y a deux ans. Direction la cascade de bras rouge. Une première partie en descente avec au bout de quelques kilomètres un pointage anti-triche.
Je commence à avoir des problèmes digestifs. Je suis obligé de m'arrêter pour me libérer. C'est certainement le produit laitier ingurgité au dessert à Cilaos.
Ce genre de problème ne m'arrive jamais d'habitude. Je repars pour une montée vers le début du sentier du Col du Taïbit.
J'y arrive à 05H20 : 01H40 sur la barrière horaire.
Au pied du sentier aucune indication du col du "broute minou" (autre nom du col de Taïbit). Ils n'ont pas d'humour cette année.
J'attaque la montée du Taïbit. Je sens la fatigue m'envahir au fur et à mesure de la montée.
J'attends avec impatience la tisane de l'ascenseur.
Le jour se lève et enfin un bénévole de l'association des 3 Salazes qui nous attends pour nous servir leur breuvage composé de fleur jaune, géranium rosat,
héliotrope, canne citronnelle et cannelier, cette tisane a la particularité de donner un « coup de fouet » 100% naturel.
Il existe aussi la tisane de la descente, composée de marjolaine, fleur jaune et menthe.
Dommage que ce ne soit pas Bob qui nous serve.
La tisane ne diminue pas ma fatigue et mon objectif est de tenir jusqu'à Marla au début du cirque de Mafate pour refaire un petit somme.
Je ne me souvenais pas que la montée était aussi technique et difficile.
Je résiste à la fatigue même en passant devant l'endroit où je m'étais accordé quelques minutes de repos en 2009.
J'arrive au sommet du col et je plonge sur Marla en courant.
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La tisane de l'ascenseur servie par un bénévole des "Trois Salazes".
Le lever du jour sur le Taïbit.
Cirque de Mafate vu du sommet du col du Taïbit.
Marla.
07H48 j'arrive à Marla. Mon avance sur la barrière est passée à 02H12. Je prends un plat de saucisse rougaiille,
Pourquoi pas au petit déjeuner ? On est de toute façon complétement décalé et il ne serve pas de Croissants avec du Café.
Comme dans tous les ravitaillements depuis le début les bénévoles sont sensationnels. Ils sont serviables, souriants, aux
petits soins pour nous les coureurs.
Pendant plus de 20 heures, ils servent les coureurs avec toujours le même sourire et le même dévouement.
Je m'octroie 30 minutes de sommeil sous la tente. Cette fois il y de la place, il n'y a pas d'hélicoptère ni le semi raid ni les ronflements de
Mouloud pour perturber mon repos.
Il est 08H45 direction Roche Plate. Le soleil commence à taper. Je n'ai pas prévu de crème solaire.
Je passe un coup de téléphone à Sonia pour la tenir au courant de ma progression et pour lui donner des nouvelles de mon physique et de mon moral
qui sont en harmonie avec la météo.
Direction Trois Roches dans un premier temps. Partie relativement facile. On ne passe pas par la Plaine aux Sables comme en 2009 et le chemin est plus direct et moins vallonné.
10H20 arrivée à Trois Roches avec la traversée de la rivière : 01H55 d'avance sur la barrière horaire.
Un bon petit matelas malgré mon arrêt prolongé à Marla. La fatigue a disparue.
J'ai une pensée pour Mouloud car c'est à cet endroit que je l'ai laissé en 2009.
Avant de traverser la rivière, je rempli un sac en plastique du sable de la rivière pour Ali qui est Arénophile (collectionneur de sable).
Une partie plus difficile m'attends vers Trois Roches avec de belles montées et quelques descentes.
Je suis relativement en forme. Je marche à un rythme rapide tout en profitant du paysage.
Mafate c'est magique. Il faut se le gagner mais qu'elle bonheur de traverser ce cirque.
J'aurai la chance d'y revenir deux semaines après la course pour une randonnée de trois jours avec Sonia et Sophie.
Le ravitaillement à Roche Plate est dans la cours de l'école il y a toujours autant de monde.
Il est 12H11 : 02H04 d'avance. Un bon matelas de sécurité.
Direction maintenant l'ilet aux Orangers, une partie nouvelle pour moi.
On attaque à la sortie de Roche plate une montée dans une forêt, puis on rejoint un chemin en balcon avec la paroi de près de 1000m
au dessus de notre tête et une vue magnifique sur le cirque à main droite.
Je peux voir en face la montée de la Roche Ancrée, qui a failli m'éliminer en 2009 et où j'y avais laissé beaucoup d'énergie.
On arrive au croisement de la montée vers le piton Maïdo et de la descente vers l'ilet des orangers.
A partir de là on attaque une partie plus technique avec en bas de la descente de nombreux blocs de pierres.
Deux concurrentes me doublent très facilement. Je n'ai ni leur souplesse ni leur agilité pour franchir ce genre d'obstacles.
Puis c'est la montée vers l'ilet avec deux belles séries de marches.
J'arrive aux Orangers à 14H11. La barrière est à 16H15.
Au ravitaillement j'apprends le résultat de la demi finale de la coupe du monde de rugby : France - Galles : 9-8.
Les bénévoles nous disent que nous n'avons rien raté.
La prochaine étape dans 10 km : Deux Bras la deuxième base de vie.
Ces 10 km sont majoritairement en descente avec quelques montées casse pattes. On peut profiter de magnifiques vues plongeantes sur la rivière des galets
et sur des vasques où j'aimerai bien piquer une tête.
Je pense à Alain Mialon que j'ai suivi en 2010, sur internet, sur cette portion entre-autre et je me demandai pourquoi il n'en finissait pas d'arriver.
Je comprend mieux maintenant en la faisant.
J'ai aussi l'impression de faire d'énormes détours. J'ai du mal à me repérer. Peu importe l'important c'est de suivre le balisage.
On franchit deux passerelles au dessus de la rivière avec un vide imposant.
Le trafic des coureurs devient de plus en plus important et je me fais doubler par des groupes.
Je comprendrai plus tard qu'il s'agit des coureurs du semi raid
dont le parcours devient commun avec le notre dans cette partie.
Le parcours nous amène au bord de la rivière que l'on suit sur quelques km pour atteindre Deux Bras.
Juste avant Deux Bras j'aperçois un concurrent sur une civière. Il a fait une mauvaise chute, me dit une bénévole, et s'est cogné contre un rocher avec perte de connaissance.
Juste avant Deux Bras, au bord de la rivière, je vois du sable fin, de bien meilleure qualité que celui que j'ai ramassé à Trois Roches.
Je me mets à 4 pattes et remplace le sable de 3 Roches par celui de Deux Bras.
Un concurrent qui me voit faire me demande ce qu'il m'arrive. Je lui dit tout simplement que je ramasse du sable. C'est la Diagonale des Fous.
J'arrive à Deux bras : le seul accès au cirque de Mafate pour les 4X4. Il est 17H32.
Il y a beaucoup de monde au ravitaillement. Je récupère mes affaires de rechange. Je me restaure avec de la soupe, du poulet et des pâtes : mon tiercé gagnant sans oublier le Coca Cola.
vaisJe retrouve le Réunionnais que j'ai croisé à Hell Bourg. Je lui demande s'il a bu le rhum arrangé dont il m'avait parlé aux Orangers. Il me dit que non.
Je lui propose de nous retrouver à Saint Denis pour boire une bonne bière ensemble. Il est d'accord. Je relève son numéro de dossard pour essayer de le retrouver.
Il sera finisher mais nous n'aurons pas l'occasion de trinquer.
Saucisse rougail.
Direction 3 roches et Roche Plate.
Trois roches.
Traversée de la rivière à Trois Roches.
Montée vers Roche Plate.
Roche Plate.
L'école de Roche Plate
La roche Ancrée
La descente vers les Orangers
Les escaliers avant l'arrivée aux Orangers
L'ilet aux Orangers
Le chemin de la canalisation des Orangers. On a trop envie de piquer une tête.
Les Lataniers
Pont sur la rivière aux galets
La traversée de la rivière aux galets avant deux bras.
Deux Bras Les Bains : 2ème base de vie.
J'appelle Sonia. Ils sont à Dos d'Ane et m'ont préparé de quoi manger et dormir. Je décide donc de ne pas m'éterniser à Deux Bras. De toute façon il y a trop de monde et pour dormir cela doit être la grosse galère.
Je me change. Il est 18H12, je quitte la deuxième base de vie. La barrière horaire de sortie est à 00H30. Je commence à avoir un bon matelas d'avance qui me servira pour dormir à Dos d'Ane.
Dos d'Ane, un mauvais souvenir de 2009 : une montée très raide et technique gravie de nuit où je m'étais cogné la tête contre la paroi et où je m'étais tordu la cheville.
Cette fois le début se fera de jour. On commence rapidement par des échelles qui donnent le ton de la montée.
La nuit tombe vite, je me fais dépasser par de petits groupes de coureurs qui s'avèrent être des coureurs du semi-raid.
Je trouve la montée toujours aussi raide et technique. Il faudra que j'arrive à la faire de jour pour me rendre vraiment compte des difficultés.
Je finis par atteindre le sommet où une formidable ambiance nous attend : du monde, de la musique, des encouragements.
Je retrouve Sonia qui m'indique qu'ils m'ont préparé de quoi manger et dormir.
Je demande où se trouve le poste de pointage. On nous indique qu'il est un peu plus bas.
Je dis à Sonia que je me me reposerai après avoir pointé.
Je prends la route avec Sonia, qui me tends un sandwich. On quitte bientôt la route pour prendre un chemin.
Sonia court toujours à mes côtés avec un oreiller et le sac de couchage qu'ils m'ont préparé.
Au bout d'un moment elle s'arrête, ne possédant pas de frontale, et me donne rendez-vous au ravitaillement censé être pas très loin.
J'ai ruiné tous leurs préparatifs pour me permettre de bien me ravitailler et de bien dormir. Philippe m'avais même réchauffé le sac de couchage !!!
J'attaque une partie pentue en descente au milieu de gros blocs de pierre. On traverse ensuite une route, puis une longue ligne droite pour atteindre le chemin Ratineau.
Une ravine se présente : de gros blocs, des racines, une pente très raide en montée et en descente : une horreur.
Je n'avais pas étudié particulièrement la fin de parcours depuis Dos d'Ane et je ne m'attendais pas à une descente sur la Possession aussi difficile.
Le ravitaillement est enfin là. Bien plus loin que prévu. J'appelle Sonia je lui dis que je suis à la Possession. Elle me dit que ce n'est pas possible.
Effectivement je ne suis pas encore à la Possession. Je reprends ma marche pour une partie toujours aussi désagréable avec toujours ces blocs de pierres.
Je fais une partie de la descente avec un couple dans un rythme très lent. Je n'apprécie pas du tout cette étape et regrette la version 2009 après Dos d'Ane qui était magnifique et montagneuse.
Il est 00H39 j'arrive à La Possession. J'ai 07H30 d'avance sur la barrière horaire.
Je retrouve Sonia, Maribel, Mouloud et Raphaël.
Ile me donnent des croque-monsieur avec des frites.
Direction la voiture pour une sieste d'environ 45 minutes.
01H45 je reprends la route c'est le cas de le dire car on quitte la Possession le long de la 4 voies. Un grand moment de trail.
Décidément, cette portion depuis Dos d'Ane est à oublier au plus vite.
Heureusement le calvaire ne dure pas longtemps.
Place au "Chemin des Anglais" un autre grand moment.
J'avais entendu parler de ce chemin des Anglais mais n'avais aucune idée à quoi il ressemblait.
Il s'agit d'un chemin assez large recouvert de pavés irréguliers dans une pente très raide.
En prenant le chemin au milieu on arrive à faire des pas relativement réguliers.
Je finis par trouver un rythme régulier et par m'amuser dans ce chemin des "Anglais".
Là où cela se complique c'est à l'attaque de la descente vers la Chaloupe.
Les pavés sont très irréguliers et ce qui devait arrivé arriva : une glissade et une chute avec le menton en premier sur les pavés.
Je n'ai pas eu le temps, avec le bâton à la main, de poser le mains au sol pour me protéger.
La chute n'est pas trop grave mais je me dis que ma course aurait pu se terminer bêtement là au km 146.
Je repars plus prudemment pour arriver à la Grande Chaloupe le dimanche à 04H50.
Un ravitaillement rapide et direction Colorado toujours par le Chemin des Anglais.
Heureusement c'est en montée. Petit à petit le jour se lève et je ressens un gros coup de mou.
Je décide de m'asseoir sur une pierre pour me reposer une dizaine de minutes.
Après cette courte pose je repars direction Saint Joseph.
J'arrive à Saint Joseph, il fait jour.
On traverse le village et on prend une route sur plusieurs kilomètres.
Il fait de plus en plus chaud et je suis de plus en plus fatigué.
Je passe en mode zombie tout comme pendant l'UTMB. Une drôle de sensation.
J'ai 56 heures de course derrière moi avec environ 02H00 de sommeil.
Je marche sans trop savoir pourquoi, à la vitesse d'un escargot.
Je n'ai pas encore d'hallucinations ni ne m'endors en marchant comme cela arrive dans ce genre de situations.
Ce passage sur route n'est pas des plus agréable, je le trouve interminable. Heureusement qu'il fait beau et que la vue est agréable.
Enfin le chemin direction La Fenêtre et Colorado.
Je me décide à sortir mon arme secrète : mon lecteur MP3.
C'est une arme redoutable pour lutter contre le sommeil et pour se donner un gros coup de pied au c.l à condition de bien choisir sa musique.
Cela fait partie de ma préparation : une playlist spécial course à pied.
Led Zeppelin, Muse et U2 me redonnent le coup de fouet tant attendu.
J'attaque la montée vers la Fenêtre à petites foulées malgré le terrain humide et glissant.
La fatigue disparait petit à petit, je retrouve tous mes esprits et recommence à prendre beaucoup de plaisir.
Je suis toujours surpris par la manière dont le corps humain peut passer d'un état de fatigue avancé à un état d'euphorie en quelques minutes.
Ce n'est pas la première fois que cela m'arrive.
Les 4,5 km qui me séparent de Colorado sont un véritable régal.
Je me mets à courir de plus en plus vite sur cette portion de forêt relativement roulante tout en me jouant des racines.
Je m'étais éclaté de la même façon en 2009 au même endroit.
Je dépasse pas mal de coureurs qui sont en difficulté.
Le ravitaillement de Colorado il est 08H03 : 58H00 de course.
Je téléphone à Sonia pour lui annoncer une arrivée vers 10H00.
Je vise de terminer en moins de 60h00.
Je me rends compte que j'ai de l'avance pour effectuer la descente de Colorado et arriver vers 10H00.
Je décide de ma faire une descente cool en profitant des derniers km du Grand Raid.
Surtout que c'est une descente très technique avec des blocs de pierre et des racines.
J'avais souffert en 2009 dans cette descente.
Je prends vraiment mon temps et du coup je la trouve facile cette descente vers le stade de la Redoute.
Je croise un spectateur et lui demande si le stade que j'aperçois en bas est bien celui de la Redoute.
Il me dit de ne pas me poser de questions et de continuer. Il doit penser que je suis à l'agonie.
J'arrive en bas de la descente où je retrouve Sonia. Elle m'indique que le reste de la troupe est de l'autre côté du pont.
Il m'attendent en effet en me faisant une haie d'honneur avec les bâtons en bambou.
Une haie d'honneur qui me touche profondemment.
Je me mets en mode course et frappe tous les bâtons avec le mien.
Dans ma lancée je continue à courir jusqu'à l'arrivée. Mes compagnons de route ont du mal à me suivre et essaie de me calmer mais
rien à y faire je termine la course en footing rapide et je franchis la ligne d'arrivée après 59H54M58S de course en 1059 ème position sur 1228 finisher.
J'ai droit à la médaille et au célèbre tee-shirt jaune : "J'ai survécu".
Tout se termine par la bière locale : "La Dodo" tant attendue.
Direction dos d'âne.
Mon arrivée à la La Possession dans un grand état de fraîcheur
avec la trace de la branche d'arbre au dessus de l'oeil.
Le chemin des anglais.
Saint Bernard
Direction La Fenêtre et ensuite Colorado.
Colorado.
Ravitaillement de Colorado.
La dernière descente.
Le terrain technique de la descente de Colorado.
Le stade de la Redoute.
Le base de la descente de Colorado.
Le concurrent de derrière a l'air à l'agonie.
La Haie d'honneur avec les bambous.
Les derniers mètres avant l'arrivée.
La médaille et le tee-shirt "J'ai Survécu" et les traces de la course
au dessus de l'oeil et au menton.
Interview.
.
Le groupe au complet : Laurence, Maribel, Piton Textor, Raphaël, Mouloud, Sonia,
Philippe, Denis, Momo, Ali et Sophie.
Bilan :
1228 arrivants sur 2372 coureurs au départ soit 47 % d'abandon : un record.
Précédent record d'abandons = 44 % en 2010 contre environ 30 % les autres années.
Le plus dur des ultras que j'ai couru à cause de la difficulté du parcours et des conditions climatiques qui ont transformé la forêt de Bélouve en Mare aux cochons.
Enseignements de la course :
Côtés positifs :
Côtés négatifs :
Une idée de parcours pour la 20ème édition : un mélange des éditions de 2009 et de 2011 : identique à l'édition 2009 jusqu'à Marla et ensuite le parcours de 2009.
Plus dur dans Mafate et surtout incomparablement plus beau au dessus de Dos d'Ane dans la réserve de la Roche Ecrite.
Tant-pis pour le chemin des Anglais.
Cela me donnera envie de m'aligner une troisième fois au départ du Cap Anglais.
Pour finir :
Un immense bravo à mes potes Toulousains finisher :
4 commentaires
Commentaire de gilou01 posté le 03-12-2011 à 20:03:54
bravo pour ta course et ton recit j espere bien etre au depart en 2012
Commentaire de gilou01 posté le 03-12-2011 à 20:04:46
bravo pour ta course et ton recit j espere bien etre au depart en 2012
Commentaire de akunamatata posté le 04-12-2011 à 18:12:42
Félicitations d'avoir pu mener au bout l'honneur de l'équipe, cela demande une grande expérience et force mentale, merci pour les photos ;-)
Commentaire de Bert' posté le 23-09-2012 à 22:40:37
Merci pour ton témoignage détaillé et toutes les photos ! Rien de tel pour se faire une idée plus précise du programme :-))
Comme on s'est bien croisé au Restonica Trail... quelles "comparaisons" tu effectuerais ?
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