Récit de la course : Marathon de New-York 2010, par JK42

L'auteur : JK42

La course : Marathon de New-York

Date : 7/11/2010

Lieu : New York (Etats-Unis)

Affichage : 1620 vues

Distance : 42.195km

Objectif : Pas d'objectif

5 commentaires

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NYC 2010 très perso

New York City Marathon 2010

Vendredi 5 novembre : Début d’après midi sur New York. L’aéroport JFK est envahi de coureurs arrivant du monde entier, ce qui rallonge encore les formalités particulièrement tatillonnes de la douane américaine. Une fois mes bagages récupérés, je rejoins mon groupe amené par « Planet Tour », et prends place dans le bus qui va nous conduire à l’hôtel ; certains sont venus en couple, d’autres en famille ou en groupes, d’autres encore seuls, comme moi. Je retrouve dans le bus une connaissance professionnelle, le monde est petit !! Il a gagné son voyage et son dossard (pour lui et sa femme !) sur internet…

Sur le trajet qui nous rapproche de Manhattan, je repense à mon premier voyage à New York, il y a… 19 ans déjà, au terme de mes études.

Une heure plus tard, nous arrivons à l’hôtel Waldorf Astoria, en plein coeur de Manhattan, à deux pas de Time Square, Central Park et de l’Empire State Building. C’est un établissement magnifique, avec un hall gigantesque, chef d’oeuvre de l’art déco avec colonnes, velours et dorures. J’apprendrai plus tard que cet hôtel a servi de cadre à de nombreux films, dont Gatsby le Magnifique.

Après nous être installés, nous avons rendez vous pour aller récupérer les dossards au village expo du Marathon. Je sympathise avec un couple de Lyonnais, et nous décidons de nous y rendre à pied, histoire de nous dégourdir les jambes après le long voyage (c’est à une demi-heure environ). Monsieur est médecin à Lyon, et me dit être plutôt un spécialiste de « l’ultra long », c'est-à-dire des courses d’au moins 100 km!!! Drôle de gars, super sympa, mais il fait super froid, genre 2 ou 3°, il y a un vent glacial, et lui est en chemisette et costume. « Je ne crains pas le froid », il me dit. Et ça a l’air d’être vrai.

On traverse Time Square et ses écrans publicitaires géants diffusant des flots d’images ininterrompus. Impressionnant !! On arrive au village expo, l’organisation est parfaite, et en quelques minutes j’ai récupéré mon package Marathon, mon dossard, des teeshirts, la puce électronique, etc. Ensuite, je fais un tour dans le village expo, qui est en fait un salon commercial où toutes les grandes marques en relation avec le running proposent leurs équipements. J’ai faim et je profite surtout des dégustations de produits énergétiques. J’ai perdu mes acolytes lyonnais, je prends le taxi pour rentrer à l’hôtel. Je commence à fatiguer, avec le décalage horaire il est 2 heures du mat en France. Je mange quelques pâtes dans un snack et vais me coucher.

Samedi 6 novembre : Le lendemain réveil matinal, à 5 heures du mat je suis debout (toujours effet du décalage). Ce matin, on va courir la « Friendship Run », quatre bornes pour la paix au départ des Nations Unies jusqu’à Central Park. Pas de classement, beaucoup de déguisements et super ambiance : un avant goût de marathon. A cette occasion, je fais la connaissance de Luc avec qui je ferai le parcours, et qui sera à partir de là mon « compagnon d’aventure » pendant tout le reste du séjour.

L’après midi, visite de la ville en bus, où j’entraine Luc et un autre couple qui ne s’étaient pas inscrits. Passage obligé à « Ground Zero », qui est un immense chantier. Le mémorial est en cours de construction, et la tour qui dominera New York (plus haute que les Twin Towers) est bien avancée. Il y a 19 ans, j’étais monté au sommet du World Trade Center.

Le soir, direction la Pasta Party à Central Park. On se retrouve à table avec des mexicains, et des hollandais. Super ambiance, où on entend parler dans toutes les langues !! Par contre pour les pâtes… Lasagnes où il n’y a pour ainsi dire que du fromage, avec quelques pâtes perdues au milieu. Pas idéal pour une veille de course !! Heureusement, il y a aussi du riz, mais moi je rêvais de spaghetti !! Retour à pied à l’hôtel, j’ai du mal à imaginer que c’est demain le marathon. Tant de mois à y penser, à m’y préparer. Ca me semble un peu irréel.

Dimanche 7 novembre - « D » Day : Réveil hyper matinal, et déjeuner (trop !) rapide. C’est génial, le soleil se lève, même si la température s’annonce fraiche. Je suis impatient d’y être !! Mes affaires de course ont été préparées la veille au soir, runnings, short, gels énergétiques, boisson et vêtements d’attente.. Nous avons de la chance car le bus de Planet Tour part à 7h, alors que la plupart des autres bus sont partis une heure avant, d’où une très longue attente dans le froid avant la course. Il est prévu une heure de trajet, et je dois partir avec la première vague à 9h40. Le trafic est dense, et nous arrivons plus tard que prévu au lieu de départ, le pont de Verrazzano. Je rejoins mon couloir de départ, où je rentre 10 minutes avant l’heure limite. Par contre, les camions UPS qui récupéraient les sacs consigne et devaient nous les ramener à l’arrivée sont partis. Tout ce que j’avais pris en trop pour ne pas me cailler devra donc être laissé sur place, et sera comme le veut la tradition distribué aux déshérités New Yorkais: une casquette toute neuve, un survêtement Damard que je comptais dans tous les cas « sacrifier », des crèmes de massage, et le trop fameux survêtement bleu du club de football où j’ai fait l’essentiel de ma carrière…

Nous nous rendons vers la plateforme de départ en marchant. Nous sommes si nombreux…Je ne vois pas la tête de la troupe. Il fait grand soleil, environ 8 ou 9°. Le temps avance, et la pression monte. Tout à coup, l’hymne américain retentit, fort, puissant. Ca fait quelque chose !! Ensuite, c’est « New York New York » de Sinatra qui retentit, tout le monde trépigne, le départ est très proche. BOUM !!! le coup de pétard libérateur !! Tous à l’assaut du pont de Verrazzano !! Mythique !!

Ca y est j’y suis !! Le pont fait 2 Miles, d’abord la montée, puis la descente. Je suis dans le flot, porté par l’euphorie, j’ai du mal à estimer ma vitesse.

Le pont est derrière désormais. Entrée dans Brooklyn. Une très longue ligne droite, bordée de ces petits immeubles en briques pas très nettes, flanquées de ces passerelles et échelles métalliques. Images de séries télé. Premier contact avec la population, dense, multiethnique, euphorique. Je suis dans un bon rythme, je me sens hyper bien, et passe le dixième kilomètre en 45’30, vite par rapport à l’objectif mais si facile.. Je pense aux conseils de mon coach Salva : « ne pars pas trop vite, parce que quand il n’y a plus d’essence, il n‘y a plus d’essence.. ». Mais je n’ai pas l’impression de forcer, et je me dis que je peux aller chercher les 3h20, 3h15 même..

Peu après, il y a encore plus de public, d’ambiance. Les enfants tendent la main pour qu’on vienne « toper », des spectateurs proposent toute sorte de ravitaillement. A certains endroits il y a tellement de cris que l’on ne s’entend plus respirer. Encouragements à tout rompre, orchestres…Les pulsations grimpent !! C’est génial !! On se croirait dans une étape de montagne sur le tour de France, les flics ont du mal à canaliser la foule qui empiète de plus en plus sur la chaussée !! Trop fort !!

Le pont PULAWSKI nous fait basculer dans le QUEENS, et dans la deuxième moitié de la course. Je passe en 1h36 au semi, relativement frais et toujours dans les temps pour l’exploit!!

Très vite, le second pont, un monstre d’acier ce Queensboro. Routier et ferroviaire, bruyant et grinçant. Montée vacharde, en plus c’est le seul endroit du parcours où il n’y a pas de spectateur. J’apprendrai plus tard que c’est là que le recordman mondial du marathon Gebresselassie a abandonné ce même jour, près d’une heure avant mon passage. Je sens que j’ai perdu de la vitesse, et un coup d’oeil à mon chrono me le confirme.

Descente en douceur du Queensboro. Un long virage marque l’entrée dans Manhattan par la 1
ère avenue, et une nouvelle plongée dans la foule. Les gens hurlent leurs encouragements. « Let’s go, You’ll do it !! ». A moi, à tous, à chacun. C’est fort, et ça fait du bien !! Surtout que je commence à sérieusement piocher. Je passe au 30ème en 2h19, et je sais que c’est mort pour 3h15 ou 3h20, car je souffre de plus en plus. Et je sais que ce n’est pas fini, je l’ai lu et entendu : « les 30 premiers kilomètres ce sont les jambes, les 12 derniers la tête !! ».

Petit passage par le Bronx, puis retour à Manhattan par Harlem. La foule est plus clairsemée, mais j’ai droit à quelques « Allez Fraaaaaaance !! » ou « Allez John Luis », grâce au drapeau et mon nom que j’ai inscrit, comme beaucoup d’autres, sur ma tenue.

5ème Avenue. Le 35ème kilomètre est passé, je suis de plus en plus mal, et je ne sais pas comment je vais finir. J’évite de réfléchir, il faut courir, courir, courir… Il avait bien raison, le coach, et à partir de là je suis à la dérive complet, les jambes molles, les muscles tétanisés. Je prends de plus en plus de temps aux ravitaillements. On longe maintenant Central Park, mais ça me parait interminable, et c’est montant. Je repense à Salva : « si tu n’es pas bien, marches 10 ou 15 secondes, plus s’il le faut, mais ne t’arrêtes pas, et repars !! » Plusieurs fois, au ravitaillement, je dois marcher, et je repars !! Mais je n’avance plus, j’ai l’impression que mon corps n’est plus connecté à mon cerveau, qu’il vit sa vie et n’obéit qu’à lui-même!! Putain, tout le monde me double !! J’en double aussi quelques uns parfois, visiblement encore plus mal que moi. Interminables derniers kilomètres. 40

ème kilomètre en 3h15. Je suis à l’agonie complet, mais je me dis qu’il me reste 14 minutes pour finir sous mon objectif de préparation de 3h30. 14 minutes pour 2km2, facile d’habitude, mais là je me traine littéralement. Nouveau gros coup de mou quelques centaines de mètres plus loin. 2 spectateurs m’encouragent : « Go on , you’ve allmost arrived ». Je redémarre. Enfin, je tourne pour la dernière ligne droite, encore en montée. Je vois l’arrivée quand une crampe que je sentais arriver me tétanise la jambe droite.

Je m’arrête sur le bord, bondé de public, pour l’étirer. Je suis cotonneux, il y a beaucoup de bruits, de cris, je capte un regard « Go On , Go On, GO ONNNNNNNNN !! » C’est une spectatrice qui hurle contre moi, j’ai l’impression qu’elle m’engueule d’être là, arrêté si près du but!! Je tourne la tête vers l’itinéraire et redémarre péniblement, pour aller couper la ligne d’arrivée. C’est une libération, une joie EXCEPTIONNELLE, malgré la fatigue !! 3h28’48, contrat rempli.

Retour à l’hôtel en métro, gratuit pour les marathoniens ce jour. Je suis dans un état second, fatigué mais d’une grande tranquillité, parfaitement serein; les endorphines sans doute.. Par contre mes jambes me font terriblement mal, et monter ou descendre les escaliers est une torture !!

Bain, sieste, et repas dans un STEAK HOUSE avec 5 potes le soir.

Lundi 8 novembre : Matinée shopping, dur de résister à un LEVIS à 49$ !! New York est l’endroit rêvé pour le shopping, les minettes sont aux anges, dans leur élément!! Moi je découvre les nouvelles marques branchées (Abercrombie § Fitch, c’est connu ça ?), où les magasins imposent des files d’attente afin de canaliser leur clientèle (une demie heure d’attente minimum, y compris à l’ouverture, chez A§F !!). C’est dur quand les jambes sont encore hyper douloureuses. Mais bon, vu le décor de cinéma à l’intérieur, ça vaut le coup d’oeil, et impossible de sortir sans rien tant le choix et la présentation incitent à la dépense !!

Pour déjeuner, on se rend chez Gray’s Papaya, présent dans tous les guides et connu par les gastronomes locaux pour être le meilleur restaurant de… Hot Dogs. Nous découvrons avec surprise ce resto au décor flashy de fastfood, où il n’y a aucune place assise. Tout le monde debout !! Nous testons le « special recession menu » à 4.95$ : 2 hots dogs et une boisson. Rigolo, plutôt bon, mais ce ne sont que des hots dogs !!!

Pèlerinage ensuite à quelques pas de là, à Washington Square où j’avais habité plusieurs mois dans les locaux de NYU (New York University) en 1991. Je suis content d’y revenir, mais ça me laisse aussi un sentiment étrange, une forme de nostalgie sans doute.

Hier, Luc avait testé le spa luxueux en face de l’hôtel. A 150$ l’heure de massage, j’avais préféré m’abstenir (et ce malgré les encouragements de mon épouse, je le signale pour les bien pensants!!). Mais je lui avais indiqué que d’après le routard, si on voulait un massage à New York, Chinatown était
the quartier : il m’avait fait promettre de ne pas y aller sans lui.

La mort dans l’âme (lol), nous nous y rendons l’après midi. On se croirait en Chine, en tous cas même si je n’y suis jamais allé c’est bien comme ça que je l’imagine. Sons, enseignes, couleurs, idéogrammes et marchés renvoient à un autre monde. Mais nous ne sommes pas là pour regarder, mais pour RECUPERER!! Nous repérons donc différentes enseignes proposant relaxation, médecine chinoise et massages. Notre choix est fait, et la patronne nous demande de revenir dans 30 minutes. 30 minutes dont nous profitons pour aller prendre un thé, et imaginer les douces et frêles mains asiatiques prenant grand soin de nos jambes et muscles meurtris.

A l’heure dite, la responsable du salon et sa collègue nous installent. Ensuite… massage parfait, dans les règles de l’art. Il faut dire qu’une heure à me faire masser, ça ne m’était tout simplement jamais arrivé. Sauf que !! Après nous avoir installés, ce sont des mecs qui sont arrivés et nous ont massé !! Très bien certes, mais bon ça casse un peu le délire!! Immédiatement après, je sens toutefois que le massage m’a fait du bien : les courbatures se sont atténuées, et la marche est plus facile, plus fluide.

Le soir, virée au « Five Guys », vrai bon fast-food plébiscité pour ses hamburgers de compétition où chacun choisit sa garniture.

Mardi 9 novembre: Dernier jour, et derniers cadeaux souvenir. Virée à Wall Street.

Le soir, rendez vous avec la « famiglia » de New York. En effet, le frère de ma grand-mère maternelle (italienne) ayant émigré à New York dans les années 30, j’ai la chance d’avoir toujours de nombreux cousins et cousines qui vivent dans le New Jersey, à 15 minutes de Manhattan. Une semaine avant mon arrivée, j’avais écrit aux « cousines » que j’étais allé visiter lors de mon premier passage, les avertissant de mon arrivée. A peine arrivé, elles m’ont appelé à l’hôtel afin que l’on se rencontre Après être venu me chercher à l’hôtel, elles m’emmènent chez l’une d’entre elles (bonne soeur !), qui vit dans un appartement avec vue féérique sur Manhattan (photo).

Ensuite, repas au resto. Nous sommes 12 (dont 2 amies invitées pour l’occasion !), et je suis l’attraction de la soirée !! C’est très sympa, et le resto est excellent; j’y mange un succulent T Bone Steak (version US XXXL cf le photo), sans doute le meilleur que j’ai eu l’occasion de manger de toute ma vie!!

Retour à l’hôtel, le temps d’une Bud avec les potes au bar de l’hôtel, et il est temps d’aller préparer les valises.

Mercredi 10 novembre : On veut en profiter jusqu’à la dernière seconde. Visite de Grand Central Station, la gare immense en plein centre de New York, où des millions de New Yorkais prennent leur train chaque jour. Le hall, éclairé par des verrières de 25 m de haut, a des allures de cathédrale. C’est ici que Hitchcock tourna une des fameuses scènes de La Mort aux trousses… Quelques huitres au Oyster Bar en sous sol pour finir, et il est temps de rejoindre notre bus pour l’aéroport.

EPILOGUE :

Le marathon de New York, j’en rêvais depuis longtemps. J’imaginais un grand moment, il a été bouleversant. J’adore cette ville, où tout va très vite, où tout est tellement démesuré que ça en devient parfois violent. C’est la ville monde, la ville de toutes les cultures, de toutes les ethnies, une ville qui vous envoute par son gigantisme et sa diversité. Le marathon est un moment magique, avec tout ce monde, cette ambiance !! Malgré la fin difficile, ça restera un super souvenir, une super expérience, dans une ville à la population extraordinaire.

« Merci à maman, à papa qui ont toujours été avec moi, à Bineta pour son inlassable soutien

durant toute la préparation et au-delà, à Salva sans qui ce serait sans doute encore

un rêve, et à tous ceux qui m’ont encouragé et soutenu »

5 commentaires

Commentaire de Berty09 posté le 19-11-2010 à 22:04:00

Merci pour le voyage à New-york,bonne récupération. Le prochain, tu nous emmènes où???

Commentaire de Girith posté le 20-11-2010 à 16:08:00

merci pour ton récit, petit voyage à new tork sans ce déplacer ;)

Commentaire de Klem posté le 27-11-2010 à 16:16:00

Super, merci pour ce beau récit, j'avais fait le marathon de New York l'an passé, je l'ai revécu avec émotion en te lisant Bravo pour ta performance

Commentaire de rchauny posté le 02-09-2012 à 20:46:26

Merci pour ton récit !
J'ai un dossard pour cette année... c'est un vrai rêve pour moi, j'espère le vivre avec autant d'émotions que tu en as eu.
Bravo à toi !

Commentaire de JK42 posté le 15-11-2012 à 18:01:58

Bonjour,
Je viens de lire ton commentaire sur mon récit de NYC 2010.. Je suis bien désolé par ce qui vous est arrivé à tous (bien sur avant tout aux résidents qui ont été touché par cette catastrophe..).
J'espère que tu as surmonté ce coup du sort, et que tu auras l'occasion de connaitre celà.. cette ambiance si particulière qu'encore aujourd hui d'y repenser j'en ai la chair de poule..
Bonne chance à toi pour la suite,
JLE

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