L'auteur : tiblam
La course : Grand Raid Manikou
Date : 19/12/2008
Lieu : Grand Rivière (Martinique)
Affichage : 1675 vues
Distance : 127km
Objectif : Pas d'objectif
Partager : Tweet
C'est parti dans les champs de cannes ou de bananes, je ne sais pas bien, j'avance, et à un moment je double 2 personnes, je ne suis plus dernier , un peu de pêche retrouvée … J'avance, j'hésite à quelques carrefours, car la nuit, dans les champs, on ne voit pas bien le balisage. D'ailleurs un peu plus tard, je vois 2 personnes qui reviennent en arrière, c'est Georges et Bernhard. Ils me disent qu'il n'y a plus de balisage, heureusement qu'ils l'ont vu, car j'étais parti … Donc on revient en arrière, et on décide de continuer tranquilles ensemble. C'est tout de suite plus sympa, on parle, je refais un peu d'allemand, car Bernhard est autrichien ou allemand ( sa réponse n'était pas claire pour le bilingue que je suis…).
Arrivés au rond point sarrault, je croise Greg qui me dit que Gaétane ( ma sœur) va venir courir avec moi en haut de roches carrées, est ce qu'on y est dans 1h ? Mais roches carrées et à 8kms de montée à 20%, donc je lui dit qu'il a le temps J ET c'est au bout de ? heures , en tous cas, c'est vers minuit que Gaétane nous retrouve en haut de roches carrées, on commence une descente raide pour les jambes vers le st esprit je pense et des champs jusqu'à l'habitation Clément qui prend du temps à arriver, c'est le 70e, on est tous fatigués, je comptais m'arrêter, mais on me conseille le contraire, par rapport au fait que je suis dans la course et que se faire la montagne du vauclin au soleil, c'est mieux la nuit …
Donc nous voilà repartis vers 3/4h du matin repartis à l'assaut du morne ?? très dur puis de la montagne du vauclin, c'est raid, on finit par un chemin de croix. C'est le lever du jour, c'est super beau, on voit les 2 côtés de l'île.La descente est une descente d'enfer, trop dur pour les jambes, mais bon, faut y aller … Nous arrivons enfin tous ensemble au stade du vauclin ver 8H30 où mon père nous attend en massant quelqu'un puis me masse, et j'essaie de dormir un peu. Mais j'ai un peu de mal, je veux partir pour essayer d'arriver en fin d'après midi à Ste Anne, ça a l'air jouable, on est au 86e, en gros il reste un marathon. Donc un marathon en 10h pour une partie qui est censée être plate, ça va … En tous cas, maintenant je suis largement dans les barrières horaires, donc ça va le moral !!!
Après environ 2h d'arrêt nous voilà repartis tous les 3.vers Macabou, Gaétane s'arrête là, après 8h de course, pas mal pour une reprise après accouchement …. On nous avait prévenus qu'il y avait un mur, mais en fait il y en avait des tonnes, ce que je pensais être du plat s'avère être que du « montée/descente », et ce jusqu'à la fin, il faut en être conscient , enfin, vaut mieux en être conscient à partir du Vauclin que dans le morne du lorrain au 35e,sinon le moral … Enfin, nous arrivons au 95e (ie Macabou) en environ 4 ou 5h, ça nous faisait une belle moyenne horaire : 2.5 km/h … A Macabou vers midi, une heure, je me dis que ça va être dur d'arriver pour 18h à la maison, mais bon, je ne vais pas m'arrêter là non plus. Au ravito, je me goinffre de sandwichs, j'ai faim et pas mal de salé. Quand je suis bien repu, un organisateur arrive avec un poulet coco qui m'a donné bien envie, mais je n'avais plus de place, j'étais dégoûté de ne pas avoir été prévenu avant… Enfin, les 3 larrons repartent ves Ste Anne, mais là, je connais, je suis assez confiant … Nous voilà sur la magnifique plage de grand macabou, mais que c'est dur de marcher sur le sable, j'avais oublié le marathon des sables … Et pour couronner le tout, il fait super beau, et le soleil tappe pile poil de face sur ma tête … J'ai envie de m'hydrater, mais je n'ai pas soif, je me force à boire, avec mon camelback jaspire de l'eau que je recrache sur ma casquette pour avoir le max d'hydratration, car c'est de ça dont j'ai envie : d'eau sur la gueule … Là, le camelback n'est pas top ; c'est mieux le systme de bidons du sac raidlight du mds.
Enfin, nous avancons, suivi des organisateurs qui débalisent … ça ce n'est pas toppissime pour le moral car ils vont vite, et on sent qu'ils nous pressent… mais ça force à avancer, et ils sont très sympas et nous encouragent.Au 100e km je n'ai même pas cette joie d'avoir réussi une distance extraordinaire à pied. Je ne me rends compte de rien, car j'ai très chaud, et suis comme un lendemain de nuit blanche : dans le coltard … Nous arrivons à Macré où ma petite femme Audrey m'attends avec 2 copines : Mimi et Claude. Mes compagnons de galère et moi sommes bien contents d'avoir un peu de présence féminine dans ce grand raid très raid. Mimi et Claude nous accompagnent environ 3 kms, et il n'y a que la courageuse Audrey qui continue avec nous jusqu'à Cap Chevalier. Cette partie, je l'ai déjà faite plusieurs fois, mais aujourd'hui, elle est vraiment plus longue. Une partie nous a paru interminable, le balisage indiquait que ça ne faisait que 6.5kms, et nous 3 étions sûrs d'avoir fait au moins 10 kms, j'ai jeté un œil sur ma montre GPS, et nous avions à peine fait 5 kms … C'est dur …
A Cap Chevalier, Audrey nous quitte, et la nuit nous rejoint : 2e nuit sous les tropiques à la belle étoile … Nous ne voyons pas bien le balisage, et des gens nous disent, « normalement il faudrait faire un détour par là, mais vu votre état, passez directement là ». Déjà, nous ne voulons absolument pas tricher, surtout pas après toute cette souffrance, en plus pour gagner 200m, et leur chemin a l'air plus que sombre et sans balisage, donc nous attendons nos « serre fils » qui vont débaliser derrière nous …
Nous voilà donc partis vers la baie des anglais, dans des chemins inconnus, qui eux aussi remontent et descendent … il ne fait pas chaud, on ne risque plus de se perdre, mais je commence à « pêcher des lambis », c'est trop dur, bizarre, j'ai vraiment envie de dormir, mais j'ai vraiment l'impression d'avancer comme un robot, un zombi, je pense ressentir la sensation que Stephen King décrit dans son livre « Marche ou crève » , c'est tout à fait ça !!! Avant la traversée de la baie sur des pontons et des tours et détours que je ne comprends pas, je me sens perdu tout le temps ; nous nous arrêtons à un ravito tous les 3, et je trouve qu'on s'arrête trop longtemps, mais aussi pas assez, je me dis que si je ferme les yeux je vais dormir, donc j'essaie de gérer de fermer les yeux, mais de ne pas me laisser aller au sommeil, donc ce n'est pas évident, et finalement je ne me repose pas !
Enfin, nous arrivons à trabaud où un bon ravito avec un gros barbecue et un gros feu nous attendent, pareil, même technique pour fermer les yeux, pas reposante, je pense qu'on va repartir, je vois Bernhard s'allonger sur une bâche, bon, ben je décide de faire de même, en plein vent, mais j'ai mon coupe vent, et Bernhard devant moi … Finalement, sans m'en rendre compte, ni avoir prévenu quiconque de me réveiller, je m'endors, et c'est en sursaut qu'une heure plus tard je me réveille, mais il me faut un petit temps pour savoir ce qu'il se passe. D'ailleurs Christophe ( de l'organisation) me demande si tout va bien, et si je sais où je suis. En effet, au début, je me suis dit, c'est fini, j'ai fini le manikou, à non, on est à trabaud, zut quelle heure est il, j'ai perdu combien de temps ? Et Christophe , ainsi que les autres organisateurs étaient cassés eux aussi n'en savaient rien. C'est Georges qui nous a rassurés en disant qu'on avait dormi 1h, ça va, et même ça va très bien, je me sens en forme, et quand on repart c'est cool, car le sable de trabaud est assez dur ; je connais la savane des pétrifications, je connais les salines, ainsi que caritan/salines, je sais que je n'ai plus beaucoup de dénivelé. L'avenir nous dira que je m'étais trompé …
Enfin, trabaud et la savane des pétrifications se passent très bien. Georges et Bernhard sont un peu derrière moi, et arrivé à la table du diable, j'ai continué en solo. J'hésitais à courir, mais j'ai marché jusqu'au début des salines, et là, regain de force, il me reste normalement 7 kms, donc sur toutes les salines je cours. Je sens que je gagne du temps, qu'au lieu de mettre 4h pour ces derniers kms, je vais peut être mettre 1h à ce rythme là …
Enfin, j'arrive assez vite au début de salines/caritan ; je connais encore, ça va, mais je ne peux pas courir, on ne voit pas bien, il y a du sable fin , donc j'avance doucement, j'arrive au dernier ravito qui me dit que l'arrivée est dans 3kms. Sachant que l'arrivée est au stade, et que la fin de la marche dans le sable est à caritan,et qu'entre les 2 il y a environ 1.5 km, je me dis que j'ai bientôt fini ma grosse galère … Mais je me trompais lourdement, je ne savais pas que Caritan/ Salines avait autant de dénivelé, des pointes que je ne connaissais pas, je pensais même que j'arriverais directement à la pointe marin, sans passer par caritan tellement c'était long ; au final au lieu de 3 kms,mon GPS m'a annoncé 5 kms, ce qui était normal car au total j'avais bien mes 127kms de prévus, mais … dans la têt e pour un parcours inconnu, c'est toujours dur à gérer …
Je sors enfin de la galère pour rejoindre la route où Audrey et mon père m'attendent, et me suivent en voiture, je leur demande combien de kms il me reste, et je suis un peu bougon quand mon père me dit 1km, car il en reste au moins 2 … Et oui, il faut être précis dans ce genre de phase finale de la course, chaque mètre est important, enfin je sais que beaucoup me comprenne …
J'arrive donc à Sainte Anne, je traverse le bourg animé, je passe devant le cimetière, aperçois le stade,mais ce n'est pas là l'arrivée, il faut se diriger vers la plage ; enfin, là, je ne m'enerve pas trop, car Audrey court avec moi, et me dit l'arrivée est au club med, donc je me conditionne sur le club med, car après de toutes façons, il n'y a plus de route … Et en fait, l'arrivée se faisait au camping, donc bien avant le club med … L'arrivée n'est pas celle de l'ironman, mais Audrey et mon père sont là et me tombent dans les bras, donc c'est super. Et sans eux je ne serai pas arrivé au bout. Je finis assez en forme, en tous cas, bien plus en forme que le 3e de la course.
Et nous rentrons à la maison, où il y avait le chanté noël que j'ai raté. Je vois que mon père appelle ma mère pour lui dire qu'on rentre, et essaie de lui dire un truc de façons à ce que je ne comprenne pas,mais il a laissé le haut parleur, et ma mère commence à dire : « donc je leur dit de … » et mon père raccroche et il essaie de me babouler sur autre chose, donc je fais comme si je n'ai pas compris, je sens que quelque chose m'attend, mais je ne sais pas quoi … Quand j'arrive, tout le monde est dans le jardin à m'applaudir, me faire une hola, enfin, là, je suis tout timide, je ne sais pas quoi dire, je suis fier de moi, j'ai traversé mon île,mais devant tout ce monde, je me sens tout petit, et me dirige rapidement vers la douche. Je discute, bois de l'eau Didier avec les plus courageux ( il est 2h du mat), et puis je ne vais pas tarder à aller me coucher, ça va faire 48h que je n'ai pas dormi,là c'est bon, je vais retrouver Audrey et rêver à mon prochain défi.
1 commentaire
Commentaire de LtBlueb posté le 15-09-2009 à 22:00:00
Bravo pour être aller au bout : la hola était amplement méritée !
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.