Récit de la course : Paris-Mantes 2007, par isopropylamine
Paris-Mantes 2007
C'est donc moi qui m'y colle. c'était fatal. On a tiré au sort et j'ai encore perdu - ou gagné, c'est selon !
Il est vrai que je perds souvent à ce jeu-là alors, allons-y !
Tout d'abord, qui c'est "on" ? réponse : les kikoureurs bien sûr, à savoir Chtigrogon et Corto rencontrés sur la ligne de départ, ou plutôt quelque part au milieu de l'épais troupeau qui se massait ce soir-là, c'est à dire il y a quelques heures, devant la Mairie de Boulogne, prêt à en découdre avec les 54 immuables km du parcours historique, n'ayons pas peur des mots, que diable !
Ne connaissant ni l'un ni l'autre, sans les bonnets, c'était mission impossible de se reconnaître. Vraiment, quelle excellente idée ;
à refaire encore et encore : on veut des signes extérieurs de reconnaissance mutuelle, et bigrement ostentatoires en plus !
0h00, après un agréable interlude à déambuler dans les couloirs matérialisés par l'organisation à cette occasion, ayant déposé ici nos attestations d'assurance, choisi là un brassard phosphorescent (la sécurité est un souci réel des charmants organisateurs), obtenu ailleurs le traditionnel poinçon faisant office de contrôle de départ et c'est... parti pour la promenade par une belle nuit presque tiède - du moins par rapport à l'année dernière.
Et c'est là, Mesdames et Messieurs, que je réussis mon premier coup de la soirée, et celui dont je suis le plus fier. Accrochez-vous à vos baskets et soulevez votre bonnet pour être certain de bien comprendre : je réussis à convaincre mes deux coéquipiers de négocier cette marche... en marchant ! Et oui, j'assume entièrement mes opinions lorsque je déclare que je respecte les organisateurs de toutes les manifestations auxquelles je prends part et, dans le cas qui nous occupe ici, je respecte leur volonté clairement affichée de ne pas transformer leur bébé en course alors, tout simplement, je refuse de courir et je n'approuve pas ceux qui le font.
Du coup, nous partons donc d'un pas tranquille et remontons aisément l'interminable file des participant(e)s sur la route de la forêt de Marly avec, il faut le dire, force commentaires de l'ami lillois - comment dire ? souvent grivois - qui porte bien mal son pseudo. Soyons honnête, Paris-Mantes, c'est long, c'est dur mais on se marre et ça donne envie de revenir à chaque fois (pour les trois raisons en fait !).
On y voit aussi, chemin faisant, de beaux exemples de vrai courage, comme cet homme infirme progressant avec conviction à la force de ses béquilles ou cet aveugle, seul, dont la confiance totale en son chien nous laisse pour le moins perplexes.
Tout cela pour dire que Paris-Mantes, c'est un parcours certes sans grand intérêt, surtout de nuit et avec un épais brouillard qui ne nous accordera à peu près aucune visibilité, ni dans la forêt de Marly, ni sur le plateau des Alluets. Déjà qu'elle était vraiment épaisse, cette purée de pois mais en plus elle avait tendance à couler sur les bords, ce qui n'a pas tendance à arranger les affaires des porteurs de lunettes. Perso, je m'en fous : je me sens bien dans cette ambiance irréelle, comme dans du coton et, s'il n'y avait pas ces vicieuses flaques d'eau, je pousserais bien le bouchon jusqu'à couper la frontale.
Donc, comme j'ai failli le dire un peu plus haut avant de dériver sur une digression psychanalytique, Paris-Mantes, c'est aussi un intéressant échantillon d'humanité à observer de près. On y voit aussi des choses qui font un peu peur : des trailers équipés comme pour l'UTMB (à quoi ça sert les bâtons sur ce terrain ?), des coureurs en culotte courte (OK, cette année, ça passe ! mais quand même...), des fumeurs de cigare (authentique, j'ai des témoins), des amateurs de musique de m. - enfin, je veux dire, de mélodies à la mode (certifié politiquement correct), les foires à la brocante (l'expression est du Chti) tous les 10 km pour les marcheurs du dimanche (aïe, je vais me faire des ennemis, là) dont l'autonomie est vraiment pathétique et j'en oublie certainement mais faut m'excuser, je n'ai pas tellement dormi cette nuit. Pour un peu, il se pourrait que l'on trouve même quelques fautes d'orthographe dans ma prose !
Et puis il y a aussi le meilleur : de jolies (certainement jolies car la nuit, toutes les femmes sont belles ; de toutes façons, on les rêve comme telles) signaleuses qui jouent les pom-pom girls avec leurs bâtons de lumière, des gendarmes souriants (Serrez à droite ! et bon courage, les gars !), des bénévoles accueillants au delà de leur propre fatigue et encore de larges sourires, témoignages de respect et d'amitié qui réchauffent autant que le café.
Bien, retour au sport, y'a pas, Paris-Mantes, cela peut se voir aussi sous un angle plus sportif, même si, répétons-le une dernière fois, il s'agit d'une randonnée sans classement. Il n'est pas interdit de se faire plaisir. Donc, je résume, accélération sérieuse de Corto dès la sortie de l'escalier - avant, pas possible, c'est le joyeux bordel dans les (83) marches. Oh, oh, me dis-je, je ne le connais pas (honte à moi, Mathias, je n'ai pas appris sa fiche par coeur), donnons lui le bénéfice du doute, il s'agit peut-être d'un client, en plus, c'est en quelque sorte le régional de l'étape. Chtigrognon et moi le suivons donc de près et nous arrivons de bonne heure au premier contrôle où nous savourons l'incontournable (et unique) BN accordé pour tout ravitaillement. Tu t'en souviendras, n'est-ce pas, Chti, de ce gâteau ? Je t'en enverrai un paquet à Noël si tu es sage !
Après cet intermède, sortie de la forêt - mais pas du brouillard - pour attaquer gaillardement le plateau des camps militaires et de la SPA. Commentaire du Chti : on se croirait à Guantanamo ; y'a un peu de ça, ouais, t'as raison en fait. En tous cas, Corto ralentit quelque peu l'allure, ce qui a pour effet de me propulser à l'avant; Cela tombe bien, Isopropylamine aime bien mettre le nez à la fenêtre et comme je ne veux pas froisser mes compères, je continue à doubler ce qui apparait devant moi. Quelques rappels à l'ordre et nous rallions Maule ensemble mais il me semble que Corto a un peu grillé son moteur. Alors là, j'ai un truc important à dire : quand on fait Paris-Mantes en marchant lentement (pardon, il fallait lire normalement) ou en trottinant (euh, pas à allure marathon, vous voyez bien ?), c'est facile pour quelqu'un de bien entraîné en endurance (vélo, course à pied ou autre, peu importe) ; par contre, si on veut prendre de la vitesse, là, je prétends qu'il faut avoir l'habitude ou être un vrai marcheur athlétique, ce qui n'est pas (encore) mon cas. Sans quoi on s'expose à avoir, passez-moi l'expression, sacrément mal aux pattes sur la fin (la plante des pieds qui grillent, les cuisses gorgées d'acide lactique, etc.). D'où la remarque particulièrement lucide de Corto : en courant (objectif 6h30 pour fixer les choses), cela aurait été une petite sortie d'entraînement mais en marchant vite (pas loin de 8 km/h dans notre cas), cela devient vraiment une épreuve. Tout à fait exact ! Et en plus, il faut aller jusqu'au bout. On attaque la dernière portion nettement moins fringants. Enfin, pour moi, c'est un peu l'état de grâce et je me sens des fourmis dans les jambes alors je maintiens le rythme dans les difficultés qui jalonnent le parcours (et oui, Paris-Mantes, ce n'est pas absolument plat, voyez-vous) et l'on perd Corto. Reste le Chti qui s'accroche bien. Superbe. C'est son premier à ce que j'ai compris : cela va lui laisser un souvenir impérissable. Et puis après, toutes mes excuses les gars, je ne sais pas ce qui est arrivé. Mettons cela sur le compte des endorphines, oui, c'est la seule explication plausible. J'ai l'impression de voler tout d'un coup. Pourtant, croyez-moi, j'ai aussi les cuisses en feu mais je n'en ai cure. C'est à peine si je discerne les dernières protestations du Grognon (qui aurait de bonnes raisons de l'être, à ce moment précis) parce que j'en remets une couche, et encore une autre... Bon dieu, Mantes déjà : cela m'a paru tellement court cette année. Alors, je m'offre ma patisserie annuelle (nan, je plaisante quand même) en revenant vers la gare, un peu honteux mais content quand même. Ce qui me paraîtra beaucoup plus long, c'est le retour à Palaiseau. Plus de 2 h par le train, quelle galère ! C'est dommage mais finalement, je me sens étrangement reposé en arrivant chez moi. Et si j'écrivait ce petit compte-rendu finalement ? Ben non, c'est déjà fait, espèce d'âne ! OK, je sors. Mais avant, je vous donne tous rendez-vous à Vincennes dimanche prochain : il faut se remettre aux choses sérieuses maintenant.
4 commentaires
Commentaire de titifb posté le 29-01-2007 à 06:29:00
Bravo à vous trois !
C'est que le Chtigrincheux, il s'est bien accroché...Vous avez eu raison de marcher. A l'origine, c'est bien une marche, non ? Enfin, quand on pense qu'il y en a qui marche à 8 km/h, c'est déjà la vitesse de course de certains ! Vous prendrez bien une petite Mantes pour récupérer ? !
Commentaire de chtigrincheux posté le 29-01-2007 à 09:45:00
J’ai appris beaucoup cette nuit la, super départ très émouvant et rien que pour les premiers kilomètres cela vaut le déplacement.
J’ai profité de la présence de mon pote hérisson pour le présenté aux kikoureurs
Franchement que dire de lui……..
On y passerait la journée à user les touches du clavier, c’est la quarantième fois qu’il participe à cette marche (il est givré du caberlot)
On à déliré sur ses tartines de viande haché de cheval cru à l’ail, de son espèce de lecteur de cassette …. Pas trop de touches sinon il ne comprend rien
Des musiques paillardes, des valses et des marches militaires
Son équipement d’un autre temps son maillot de cycliste à la Raymond Poulidor avec les poches ventral pou faire concurrence au kangourou. Il est unique, incontournable mais prudence il monte vite en pression, je le calme de boutade qui fonctionne bien jusqu'à présent.
« Si tu te tai pas je vais te rouler une gamelle
Il est ou le bouton ON OF ?
Pas moyen de l’arrêter se machin là »
Il nous à accrocher quelques kilomètres, d’ailleurs il possède des fiches de chaque sortie
Mon ami corto et moi avons repéré un chouette buisson bien pratique en agglomération pour les petits besoin, vas falloir qu’il le rajoute à sa fiche.
Des délires par centaines des fous rires souvent, nous avons passé une nuit à l’affut de la moindre boutade.
J’ai quand même eu droit à deux bisous d’infirmière et d’un sourire prometteur
J’ai particulièrement apprécié notre sens commun d’humanisme sans se concerté nous avons rendu service à différentes personne et la franchement un grand bravo à l’esprit kikourou qui se démontre une fois de plus
Des inconscients par dizaines, sans eaux sans nourriture mal équipé ne manquai que les tongs pour que le délire soit total
La clop au bec, la bière à la main, des touristes pour couper court
Ce n’est pas les premiers ravitaillements qui leurs ont sauvé la mise
Un gobelet d’eau plate et un pas deux un BN
Isopropylamine est vraiment dans son élément, il ne faut pas lui laisser deux mètres d’avance sinon il file je lui ai demandé d’ailleurs s’il n’avait pas le syndrome du suppositoire, droit devant ?.......
Pour la marche le haut du corps travaille beaucoup à contrario de la course à pieds, il nous a démontré que son déhanché est efficace. Un fin tacticien mine de rien, il accélère pour doubler mais ensuite il garde la vitesse acquise, la tête dans les épaules sans dégivrage incorporé de lunette, vas falloir se pencher sur le problème pour y remédier
Combien de fois nous à t’il attendu, à chaque fois le sourire aux lèvres
Sur qu’il doit bien se débrouiller en dansant la lambada
J’ai choppé mal aux pieds j’avais les deux petits doigts de pieds en sang, c’est mon point faible et je ne sais comment parer à se problème si petit en apparence mais qui me pénalise beaucoup.
J’ai laissé partir isopropylamine aux quarante cinquième kilomètres environ, je le ralentissais de plus en plus, je me suis fondu dans le groupe, coupé ma frontal et j’ai vu son chouette brassard clignotant s’éloigner peu à peu, un vrai saumon remontant le fleuve mais il n’aime pas la comparaison car il connaît le destin des saumons suite à cette prodigieuse épreuve.
Les dix dernières bornes furent longues et éprouvante, je m’accrochais mentalement à ce que j’avais de plus précieux pour oublier au maximum mes « paturons »
Plus le gout à la déconnade, le jour pointai le bout de son nez on voyait le toit de la cathédrale de Mante la Jolie
J’ai terminé mentalement, un vrai zombi, heureusement que j’étais bien équipé, parfaitement nourri et hydraté. Le ravito de l’arrivé était bien consistant mais j’avais qu’une envie c’étais d’aller voir les podologues
Rien à redire des champions, le chef d’équipe a même pris une photo en gros plan de mon arpion
Je ne développe pas, âmes sensible s’abstenir après trois quart d’heure de tripotage en tout genre, je récupère mes deux pieds qui s’était déguisé en Ramsès deux.
Bilan positifs, un mental plus riche, merci à vous deux pour cette nuit mémorable
Par contre le premier qui me soumet un BN sous le nez je lui mets dans le c ..
Commentaire de corto posté le 29-01-2007 à 15:40:00
Salut Iso,
Tout ce que tu dis est vrai, et merci de prendre ta responsabilité de nous avoir fais marcher lol. La prochaine fois je t'ecoute pas et je cours.
Tres sympa d'avoir fait 38km avec vous deux. Dommage que l'arrivé ne ce soit pas fait ensemble.
Suis bien arrivé à la maison apres une grosse faiblesse (voir mon CR sur la fiche de la course).
J'espere vous revoir tout les deux.
A bientôt
Commentaire de JLW posté le 31-01-2007 à 10:23:00
Très beau récit avec un bel humour comme je l'apprécie et en plus sans faute d'orthographe (enfin j'en ai pas vu) ce qui ne gache rien, au contraire.
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