Récit de la course : Ultra Tour des 4 Massifs - 100 Master 2023, par nanard7th

L'auteur : nanard7th

La course : Ultra Tour des 4 Massifs - 100 Master

Date : 22/7/2023

Lieu : Uriage Les Bains (Isère)

Affichage : 1687 vues

Distance : 101km

Objectif : Terminer

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UT4M100 : Sublime !!!

J’ai déjà terminé l’UT4M100… mais c’était l’édition de 2016 ou les conditions météo désastreuses (pluies et orages) avaient obligé les organisateurs à se rabattre sur le parcours de replis dans Belledonne (tout en forêt) et de shunter Chamechaude … au final « seulement » 80km et 4400mD+ faits en 16h30 ! 
Frustré de mon abandon au Sappey il y a deux ans et dégouté par mon DNS de l’année dernière (le COVID 3 jours avant), je suis plus que motivé pour terminer cet UT4M100 et enfin passer le seuil des 100km en trail (ou en tout cas s'en approcher, l’organisation annonçant 97,5km). 
Cette année, j’ai donc fait de l’UT4M100 mon objectif principal ! 
 
Avant-course 
Pourtant, je ne pense pas que ma préparation soit au « top » (il me manque clairement beaucoup de D+ dans les jambes), mais j’ai commencé à faire du vélotaf depuis l’achat de mon Gravel, fin Mai, soit 34 km par jour ou j’appuie quand même assez fort et surtout j’y prends gout ! J’espère que cet entrainement mixte va payer.  
Au final, j’arrive au départ sans stress ni aucune douleur ce qui est excessivement rare chez moi avant une course ! 
 
Je pense faire une partie de l’UT4M100 avec Caroline, rencontrée lors du Trail de Saint Jacques début juin. Nous avions à cette occasion pratiquement la même allure. 
 
Après 15 jours de canicule, la température est en légère baisse et on devrait être épargné par les orages. Nous aurons un temps idéal, Samedi et donc le parcours dans son intégralité !
J’arrive à Uriage à 6h30, je pose mon sac de repli et je retrouve rapidement par chance Caroline. Pas besoin de la chercher dans la foule … On est quand même près de 500 au départ. 
 
Uriage – Croix de Chamrousse 
Après un soi-disant incident technique, le départ est donné à 7h10. Je pars en suivant Caroline. Là, surprise, la boucle supplémentaire autour du parc (qui n'est pas dans la trace GPX) doit bien être faite comme d’habitude. Ça va fausser toute ma roadmap … 
D’un autre côté, l’avantage de cette boucle c’est qu’elle étire le peloton et surtout, elle nous rapproche des 100km ! 
Malgré ce petit tour du parc, il y a quand même quelques ralentissements à la sortie d’Uriage mais pas de véritables bouchons comme celui (interminable) rencontré au début du Grand trail de Saint Jacques il y a 2 mois. 
Caroline part avec Marco, son compagnon d'infortune de 2022 (ils ont terminé tous les deux derniers de l'UT4M/UT4M100 avec les serre-files en ... 36h) puis elle retrouve son frère et son neveu au Recoin. Ils vont nous accompagner jusqu’à la Croix de Chamrousse. 
Finalement, Marco accélère et nous distance rapidement.  
 
Le frère de Caroline est consultant en architecture IT, et ça me fait tout drôle de discuter d'Apigee, Soap & Rest en plein UT4M100 ! 
 
A l’arrivée au-dessus du lac Achard, je prends le temps de faire quelques photos et de profiter du point de vue. Quel contraste avec 2021 ou le brouillard avait complètement gâché la traversée du massif. 

Lac Achard
Lac Achard

On se suit avec Caroline et on est vraiment dans les derniers. On reste isolé même après l'Arcelle ou les coureurs de l'Extrem nous ont rejoints.  
Nous arrivons à la Croix de Belledonne en 5h25, dans les temps de mon roadbook.  
Caroline retrouve ses parents (qui vont faire l'assistance sur ces deux jours de course), moi, je prends mon temps et je profite d'une bonne soupe de vermicelle. Pour le moment tout va bien.  
Marco est là, mais il a vraiment mauvaise mine ... Il ne se sent pas bien et souhaite abandonner ... Caroline lui conseille d'attendre avant de se décider et de faire une pause (on a beaucoup d'avance sur la BH) … il abandonnera finalement ... 
J'avais espéré que Franck (un ami qui fait l'Extrem) allait me rejoindre, mais son arrivée à 9h30 à Rioupéroux ne me laisse que peu d'espoir (il arrivera en effet à 15h00). 
 
Croix de Chamrousse – Refuge de la Pra 
On repart et on attaque alors la longue traversée de Belledonne, pas question de courir … mais nous marchons à bonne allure quand même ! 
On passe entre les lacs Roberts, le lac Longuet (et le lac Bernard, le bien nommé) puis finalement le lac Claret. Même s'il ne fait pas trop chaud, le soleil tape fort et à chaque lac, j'en profite pour me rafraichir sans toutefois suivre les conseils donnés lors du briefing qui recommandait de s'humidifier les aisselles !!!  

Lac Longuet
Lac Longuet
Lac Claret
Lac Claret

En 2021, j'avais découvert le lac Claret en y mettant le pied dedans tellement il y avait du brouillard ... Là, j'en prends plein les mirettes. 
 
On arrive au refuge de la Pra après avoir traversé une petite plaine verdoyante ... c'est magnifique ! 
7h50 - 30km - 5' de retard sur le roadbook. 
Au refuge de la Pra, on refait le plein d'eau ... c’est très artisanal ! une bénévole remplit nos gourdes avec un broc qu’elle plonge dans une bassine contenant une eau un peu suspecte …. Bon, je m'attablerais bien pour prendre une bière mais ce n'est pas raisonnable et je me promets de revenir au refuge d'ici la fin de l'été ...  
 Le ciel se couvre de nuages en ce milieu d'AM je m’inquiète d’un possible orage, mais le ciel de Belledonne se découvrira finalement quelques heures plus tard. 

Refuge de La Pra
Refuge de La Pra


Refuge de la Pra – Col de Freydane 

On se dirige vers le col de la Pra. A gauche, le Lac du Crozet qu'on surplombe (itinéraire de 2021 qui montait au col du Loup), à droite... le nouveau tracé de l'UT4M100 depuis l'année dernière ...

Lac du Crozet
Lac du Crozet

Commence le premier juge de paix : la montée vers les lacs du petit et du grand Doménon et surtout la montée à Freydane et sa terrible descente. 
A la Croix de Chamrousse, j'ai promis aux parents de Caroline de l'accompagner sur cette descente (qui l'avait tétanisée l'année dernière) jusqu'à Prélong. Comme tous les parents de trailers, ils sont très inquiets à l'idée qu'il lui arrive quelque chose sur la course et surtout dans ce passage. 
 La montée vers le col de Freydane se décompose en 2 coups de culs bien raides mais finalement assez courts.  
 Je distance un peu Caroline sur la première montée et je l'attends à proximité du premier lac (le petit Doménon). L'effort en vaut vraiment la peine ! L’endroit est magique. Lors de la montée, nous sommes dépassés par un groupe de randonneurs. Ils avaient choisi ce parcours sur un guide qui indiquait "randonnée sportive et intimiste sur un chemin peu emprunté"  
Raté pour eux ! Mais je crois qu'ils ont quand même apprécié la balade.  
 

Lac du Petit Domenon
Lac du Petit Domenon


Caroline me rejoint, on prend le temps d'une photo ensemble, puis nous reprenons notre marche en avant ! Philippe, un ami trailer et collègue de bureau m'a indiqué que le long des lacs du Doménon, le sentier, en légère montée, est très courable ... Avec Caroline on n'est pas pressé... Donc on marche ! 

Caroline & Bernard
Bernard & Caroline 

La montée finale de Freydane apparait soudain après le passage du Grand Doménon. Elle aussi est impressionnante mais je me sens bien et j'avale les 250m de D+ en 40'.  
 Il y a deux ans, fin juillet, en rando, j'avais fait le parcours en sens inverse et j'avais descendu sur les fesses un énorme névé sur 500m, là il ne reste que quelques traces de neige. Sur toute cette montée on ne va traverser qu’un seul névé sur une dizaine de mètres ...  
Au sommet, à 2650m, un vent glacial nous accueille et je prends ma veste en attendant Caroline qui me rejoint rapidement. 
 

Arrivée de Caroline au col de Freydane
Arrivée de Caroline au col de Freydane

Col de Freydanne - Prelong 
On commence la descente et une centaine de mètres après, je comprends pourquoi elle avait terrorisé Caroline l'année passée ... 
C’est une succession de lacets dans un pierrier très raide ou le passage de coureurs et des randonneurs a fait apparaitre la terre. C'est très, très glissant. Sur un tel sentier généralement, je suis assez à l'aise mais je tiens à respecter ma promesse et j'attends Caroline patiemment. Les premiers mètres de descente me font craindre le pire alors je la rassure et je lui indique où prendre appui et où mettre les pieds puis les endroits les plus sûrs ou passer ... peu à peu Caroline reprend (un petit peu) confiance, alors j'avance à son rythme et elle peut me suivre avec un marquage « à la culotte » ! 
 
J'ai tout mon temps pour admirer le paysage incroyablement sauvage et le glacier de Freydane qui là aussi n'a plus rien à voir avec celui vu il y a deux ans. 

Glacier de Freydanne
Le passage le plus périlleux se termine enfin alors qu’une bonne vingtaine de coureurs/coureuses nous ont dépassé ... quelle différence par rapport à ma descente endiablée du Col du loup il y a deux ans ... D’un autre côté, je me suis bien préservé.  
La suite, même si elle est plus facile techniquement n'est reste pas moins compliquée, impossible de courir avec Caroline ! 
Le passage autour du Lac Blanc est un ravissement ... on n'avance pas trop vite (et j'attends régulièrement Caroline) alors j’en profite. Dans un goulet escarpé, je perds l’équilibre et je me rétablis miraculeusement devant le regard ébahis de deux randonneuses... Ne jamais oublier qu’en montagne, le danger est toujours présent ! 

 

Cascades de Boulon
Cascades de Boulon

On arrive finalement à la passerelle du Mousset pratiquement 2h après le passage du col de Freydane après 4,5 km de descente. Dans mon roadbook j'avais prévu une descente à 4,5km/h ... quelle erreur ! 
Et je me demande quel temps j'aurais mis seul... 1 heure de moins ??? Mais je me dis que c'est beaucoup d'énergie d’économisée pour la suite … énergie qui me permettra peut-être d'aller au bout ! 
 
Depuis le col de Freydane, je fais attention à mon eau … Imprudemment (et surtout pas très tenté), je n'ai pris qu'1 litre au refuge de la Pra. Je ne pensais pas que ce passage serait aussi long ... Etrangement, Caroline me propose de l’eau à ce moment-là, mais je refuse.  
 
Après la passerelle, selon Caroline, ce devrait être plus roulant ! 
Que nenni, le chemin est certes moins pierreux mais tout autant piégeux ... et ce n'est qu’aux abords du refuge de Prélong qu'on peut finalement courir un peu.  
On arrive pratiquement main dans la main avec Caroline. Ses parents l'attendent et sont heureux de la voir en pleine forme. Ils me remercient ! J'ai tenu ma promesse ! 
 
 43,5km et déjà 13h de course. On a mis 5h10 pour faire 13,5km ... Belledonne quoi ! 
Au total, j’ai perdu plus d’1h30 sur mon roadbook dans cette descente … 
 
Ce passage, emprunté par les coureurs de l'Échappée Belle, donne une petite idée de la difficulté incroyable de cette course. Pas étonnant que François D'Haene ait mis 4h de plus qu'à l'UTMB alors qu’il y a 25km de moins ! 
 
Pour le moment, coté bobos, tout va bien ou presque … mise à part une légère douleur au releveur gauche ressentie sur la fin de la montée de Freydanne … non ce qui me préoccupe, c’est un échauffement douloureux à un endroit que ma pudeur m’empêche de citer … Pourtant je m’étais largement tartiné au départ … mais je n’ai pas ma NOK sur moi … Lorsque je vois les parents de Caroline avec deux énormes sacs de sports remplis d’habits de rechange et plein d’autres affaires, je me dis qu’ils ont peut-être une crème pour moi. Bingo !!! Caroline à mieux que ça ! Un baume fabriqué par un artisan Isérois fait avec des plantes locales ... complètement improbable … et ce qui est dingue c’est que ça va marcher ! 
Merci Caroline ! Tu as sauvé ma course ! 
 
A Prélong, Philippe, doit me rejoindre, alors j'annonce à Caroline que je vais profiter de la longue descente vers Lancey pour (enfin) courir et qu'on se rejoindra peut-être à Saint Nazaire (ou je pense faire une longue pause) ... mais je n'y crois pas vraiment … 
 
Prélong – Saint Nazaire 
Et donc je repars en courant, je me sens super bien ! Après 1km, j'aperçois Philippe, il me félicite pour mon apparente belle forme (et c'est le cas) et nous descendons ensemble. 
Quel plaisir d'être avec un “pacer” qui me guide en m'annonçant le parcours et les passages délicats.  
 Nous croisons un ravitaillement "sauvage" ou je m'arrête prendre un verre de sirop  
 Il se fait de plus en plus tard, alors Philippe m'éclaire avec son téléphone (j’ai la flemme de sortir la frontale). Même le raidillon avant l'arrivée sur Lancey ne me pique pas les jambes. 
Peu après, les deux enfants de Philippe nous rejoignent pour nous accompagner jusqu'au ravitaillement. 
Là, j'ai le stand pratiquement pour moi tout seul et je suis acclamé par les bénévoles et les parents de Caroline qui attendent leur fille. Quel bonheur ! 
D'autant que Philippe m'annonce qu'il va m'accompagner avec son fil jusqu'à Saint Nazaire ... 
Finalement j'ai mis 1h15 pour ces 9km depuis Prélong… 
 
14h30 de course - 52,5km ! Il est 21h40 et j'ai toujours 1h45 heures de retard sur mon roadbook … Mais je suis confiant pour la suite (comme en 2021) …. 
  
Après 10' de pause nous repartons tous les trois. 
J'alterne la marche et la course, encouragés par mes pacers. C'est une grande chance de les avoir pour les 6 km les plus fastidieux de l'UT4M ! 
Après 1heure (que je n'ai pas vu passer) j'arrive à Saint Nazaire pour une longue pause ! 
Philippe me conseille de vivre ma course maintenant et de ne pas attendre Caroline mais de toute façon je suis persuadé qu'elle n’arrivera pas avant mon départ ... 
Je laisse partir Philippe et son fils à regret ! 
 
15h40 - 59km - 3250D+ 
Je viens de terminer le troisième massif de l'UT4M, le plus long et le plus beau. J'en ai pris plein les yeux! J'ai l'impression d'avoir encore plein de réserves ... le bonheur quoi. 
  
Je vais prendre une heure de pause à Saint Nazaire. 
D'abord manger (une bonne soupe) ou j'utilise mon assiette et mes couverts, matériel obligatoire (mais dont j'entends un bénévole dire que c'est la première fois qu'il en voit !!!) 
Ensuite recharger le téléphone et la montre... 
Puis se doucher... 
Juste avant d'y aller, j'ai la surprise de voir Caroline entrer dans le gymnase. A peine 20' après moi ! Dingue ! Ces parents étaient arrivés juste avant. Elle est souriante malgré l’effort fourni (la descente, ce n’est vraiment pas sa tasse de thé !). 
Une fois douché et paré d’habits propres (et d’une nouvelle paire de chaussures), je repars (sans Caroline) après 1heure de pause ... Il est minuit pile ! 
 
Juste avant, j’ai regardé le suivi Live et j’ai vu que Franck est passé à Freydane à 19h45, j'ai peur qu'il soit bloqué à Saint Nazaire par la BH … 
 
Saint Nazaire – l'Emmeindra 
Après avoir passé les premières 15 heures de course accompagné, maintenant, je suis seul ! je marche tranquillement jusqu'au début de la montée de la Féta. 
C'est mon second juge de paix ... Il y a deux ans, j'avais mis 2h30 pour faire les 6km et 1000m de D+ en ayant l'impression d'être au bout de ma vie ... 
Là je vais y passer 2h50 !!! Très rapidement, là où la pente est la plus forte, je sens que je n'ai plus de force ... j'avance au mental et je dois m'arrêter tous les 100m de D+ … que c'est long ... Quelques trailers me dépassent mais ils vont trop vite (ou je suis trop lent) pour espérer m'accrocher ... Un calvaire ... pourtant à aucun moment je pense abandonner... L'année passée, Caroline à fait l'UT4M100 en 36h et j'ai encore 16heure devant moi pour terminer. Ça va le faire … Et puis tout au long de la montée, je dépasse quelques coureurs probablement autant épuisés que moi ... Ça me rassure ... 
Finalement mètre après mètre, lacet après lacet, j'avance et je passe enfin le col à plus de 3heures du matin ... 

J'arrive au refuge de l'Emeindras complètement carbonisé mais je ne vais pas arrêter maintenant. 
Là, je suis pris d'un coup de folie et je demande une Chartreuse verte ! Le bénévole propose de me remplir un bouchon, mais je demande qui me serve directement dans mon gobelet qu'il remplit pratiquement au quart ! 
5/6cl à 55°, voilà qui va me remettre d'aplomb ! Et que c'est bon ... et puis, il y a plein de sucre, ça ne peut pas faire de mal !  
Mais rapidement je sens que ça ne va pas bien se passer ... au même moment Caroline arrive ! Même si elle me dit qu'elle était à la ramasse, elle m'a repris 15' dans la montée ! Quelle mental ! 
Elle ne fait qu'une très courte pause et nous repartons donc ensemble à 4h du matin … 
 
L'Emmeindra - Le Sappey 
Sur les 200m D+ qui arrivent très rapidement après le ravito, je n'avance plus ... Et pour la première fois, c'est Caroline qui m'attend ! Je commence à ne plus être vraiment lucide ... l'effet de l'alcool se cumule avec la fatigue ... je ne vois plus très clair et sur le sentier de Chamechaude en faux plat montant, je manque tomber plusieurs fois ... je ne marche plus vraiment droit ... je titube en essayant de suivre Caroline qui m'attend patiemment ...  
Après le Habert de Chamechaude, je trouve que ça devient dangereux, il y parfois des passages escarpés ... Alors j'indique à Caroline que je vais faire une pause, elle veut rester avec moi, mais je ne veux pas lui gâcher sa course. Finalement elle repart. Je m'allonge en laissant ma frontale allumée et là, je crois que je perds un peu la notion du temps, je ne crois pas m'endormir mais je suis bien ... je cuve ma Chartreuse ... Au bout d'une petite dizaine de minutes, je refais surface ... 
 
Etrangement, ça va beaucoup mieux.  
J'ai retrouvé de l'énergie et je peux même courir ... Incroyable ! 
 
Finalement, je rejoins Caroline juste avant Bachasson et la montée à Chamechaude ... 
Cette montée, j'y tiens ! Ça fait 33 ans que j'habite Grenoble et je ne l'ai jamais faite ... 
Il a deux ans, je l'avais shunté pour aller abandonner au Sappey .... 
J'attaque cette dernière difficulté de l'UT4M (400D+ sur 1,7km) avec un gros mental. 
Caroline me distance encore une fois rapidement. Elle fait la montée à bloc !  
 
Rapidement, j'arrête la frontale, on va avoir le lever de soleil au sommet ! Malgré le manque d'énergie, cette montée est magique, je fais quelques pauses, plus pour admirer le paysage que pour reprendre mon souffle. Au bout d'une heure 15, je suis au sommet (enfin pas vraiment, le sommet est trop dangereux pour des coureurs exténués comme moi !), je prends quelques photos et j'attaque la descente. Comme prévu je rattrape rapidement Caroline. Un petit coucou et je la distance rapidement. Je sens que nous nous reverrons plus avant l’arrivée. 
 

Lever de Soleil sur Chamechaude
Lever de Soleil sur Chamechaude


De retour à Bachasson, je m'aperçois que pour la première fois de ma vie, je viens de dépasser les 24heures de course ! Mais, pour faire 77km, ce n'est pas très glorieux ! 
Je descends à bonne allure en alternant marche et course … 
Au col de Porte, je fais un arrêt minute pour très vite repartir. 
Seul un sentier boueux peu après le col (la seule boue rencontrée de tout le parcours) va vraiment me ralentir. 
 
J'arrive au Sappey (84,5Km à 9h15 après un peu plus de 26h de course), j'ai fait les 8 derniers km en 1h30 ... j'ai un peu accéléré mais j’ai quand même 2h45 de retard sur mon roadbook. 
 
J’entre dans la salle … Et c'est magique ! 
J'ai l'habitude des fins de peloton et de leurs ravitaillements faméliques ... 
Le ravito du Sappey, c'est Byzance, toutes les assiettes son pleines, bien garnies, toues les bouteilles sont prêtes à être servies ... J'aurais dû prendre une photo ! Je demande si tout ça c'est pour moi ? Depuis que je suis la tête d’affiche du Trail de Prélenfrey (ils m’ont mis sur leur page d’accueil Facebook: Trail du Gerbier), je crois un peu au père Noël … 
Mais non, ce buffet tout beau, il n’est pas pour moi mais pour les coureurs du 40km Chartreuse dont l’arrivée du 1er au ravito est annoncée sous peu ! 
Ils sont partis de Saint-Nazaire à 7h et il est 9h45 … 2h45 pour 25Km et 2200m D+ …. Alors que je viens de mettre 9h30 … Non, impossible ! C’est une blague ??? 
 
Je prends mon temps, je regarde les bénévoles faire la fête avant le “coup de feu” et je repars tranquillement sans avoir vu l’ombre d’un sprinter. A la sortie de la salle, je croise une dernière fois les parents de Caroline qui viennent d’arriver pour attendre une nouvelle fois leur fille. Je suis admiratif devant tant d’abnégation … 
 
Le Sappey - Col de Vence  
Je sais qu’il me reste la montée au Saint Eynard mais, on m’a rassuré au ravito, rien à voir avec la Feta … 
Que nenni ! J’en chie grave … c’est régulier mais raide quand même et puis tout d’un coup un avion me dépasse … les fameux coureurs du 40km Chartreuse et puis un autre et autre … des centaines de coureurs vont me dépasser la plupart avec un petit mot d’encouragement ! 
C’est sympa mais d’un autre côté, maintenant, je n’ose plus me poser pour éviter les questions et puis, merde, j’ai ma fierté … alors j’avance … Cette horde ininterrompue de coureurs va me dépasser jusqu’à l’arrivée … Et une remarque : je suis vraiment surpris de ne voir aucune féminine parmi les coureurs du 40km … la première ne me dépassera qu’après une cinquantaine de coureurs, plus d’une heure après le premier …  
 
J’arrive finalement au fort du Saint Eynard mais je ne m’arrête pas car la chaleur commence à devenir étouffante … Après la traversée d’un long tunnel sous le fort (rafraichissante) j’attaque la descente que j’attendais depuis longtemps : le sentier qui mène au col de Vence et ses 17 épingles. Je commence à courir mais les dossards jaunes (40Km chartreuse) vont bien plus vite que moi … c’est assez pénible …  
C’est à ce moment-là que ma montre tombe en rade. J’ai du mal la brancher lors de sa recharge à Saint Nazaire … J’ai vraiment la haine car je suis en train de finir ma plus belle course et que je n’en aurai pas tous les détails … 
Du coup, sans information (je suis un accro des chiffres), le temps se dilate, les km augmentent et le D+ s’envole ! 
 
Col de Vence … je commence à avoir mal aux pieds et les jambes sont douloureuses. Là, on retrouve la civilisation et la pollution à la traversée de la D512 qu’on va longer sur quelques centaines de mètres. Il y a beaucoup de monde de partout … quel contraste avec le Sappey… Ça ne me plait pas alors je remplis mes gourdes une dernière fois, je mange quelques carrés de pastèque et je repars pour l’ultime montée et la promis, elle doit passer comme une fleur...  
 
Col de Vence - Grenoble 
Bof… j’ai du mal à croire qu’il n’y a que 140m de D+ et j’ai l’impression que les 2,5km du chemin des Batterie sont plus proches des 10km. Vu que ma montre n’est plus là pour m’informer, mon cerveau, plus trop alimenté en oxygène, a une fâcheuse tendance à l’inflation ! 
Enfin on enchaine avec le chemin de Pierre Mode, le bien nommé ! 
Pour avoir de la caillasse, il y a de la caillasse … A ce moment je rêve d’une route goudronnée et plate si possible. Cette longue descente vers La Bastille est elle aussi interminable … la chaleur est épouvantable et à la traversés du mont Jalla, je perds une flasque … décidément, il est temps d’en terminer ! 
 
La Bastille est enfin là, j’adore les passages en escaliers qui permettent de faire un maximum de D- le plus rapidement possible, et curieusement, contrairement à certains, je les descends sans douleurs. 
Dans un virage, je suis dépassé par Petit Franck et Teddy, son ourson fétiche (sans qu'il me reconnaisse, mais il va trop vite !) … 
 
Je suis tout proche de la fin lorsque je vois un attroupement. Un coureur de l’Extrem vient de faire un malaise. Il est écorché aux genoux mais surtout ne répond pas aux sollicitations. Il semble respirer et il a été mis en PLS. Un autre coureur l’arrose abondamment. Il semble bien entouré alors je continue. En sortant de la Bastille je vois les pompiers qui arrivent … j’espère que ce n‘est pas trop grave. 
 
Je fais le dernier km en courant accompagné par Loiseau de Kikourou qui est venu à ma rencontre ! Je suis vraiment heureux de faire ces derniers mètres avec lui. Merci Jan, c'était génial ! 
 
Enfin l’arrivée, une bise à Carole, ma femme venu m’attendre (avec un parfait timing) et je passe la ligne d’arrivée après 30h45 d’effort, 346ème/361 finishers. 
Caroline terminera 1 heure après moi et Franck (dont j’avais vu qu’il avait finalement passé la BH de Saint Nazaire) 3h après… 
 
Nous ne nous attardons par à l’arrivée vu la chaleur et le joyeux foutoir qui règne place Victor Hugo (et à ce moment-là, Livetrail indique Caroline arrivant 1h30 plus tard). 
 Arrivée
Epilogue 
Au final, mon premier trail au-dessus de 100km, près de 6000D+, plus de 30h de courses, mes trois MP à plus de 61 ans après 40 ans de CAP et 15 ans de trail ... 
Alors bien sûr, je suis lent (roi des BH sur l'UTV !) mais le format de l'UT4M100 avec ses BH calquées sur l'Extrem me laisse de l'espoir pour les prochaines années même si après 60 ans le temps compte double voir triple … 
 
Un mot sur l'organisation : Absolument fantastique (même si j'aurais aimé remplacer ma veste finisher UT4M100 de 2016) !!!  
C'est le meilleur balisage que je n'avais jamais eu en course, les ravitaillements toujours garnis et de bénévoles souriants (même pour les derniers). 
Mesdames & Messieurs de l'UT4M, votre course est merveilleuse ... vous aussi ! 
 
Et finalement, d’immenses remerciements à tous ceux qui m’ont accompagné lors de cette longue randonnée !  
Bien sûr, Caroline et sa famille tout au long de la course. Caroline tu m’a impressionné par ta volonté, ton optimisme et ta gentillesse ! J'ai adoré les moments de partage et d'entraide !
Philippe et sa famille, pour tous vos encouragements et encore une fois, pour m’avoir fait oublier cette satanée traversée de la vallée du Grésivaudan,
Jan pour ce dernier km auquel je ne m’attendais pas, 
Et évidemment Carole, un immense merci à toi qui me supporte depuis si longtemps, tout au long de l’année !  

1 commentaire

Commentaire de loiseau posté le 30-07-2023 à 22:41:26

J'ai finalement pris le temps de lire ton récit, super ! Bravo encore pour ta course très bien gérée. C'était un plaisir pour moi aussi de courir ce dernier kilomètre avec toi, tu avais encore des jambes !!
Pour 'l'incident technique' du départ : impossible de joindre le premier ravito (Recoin) par radio ou téléphone, la direction de course voulait être sûr que le ravito était bien en place avant le départ.
Je me souviens très bien de Caroline et Marco, j'étais serre-fil sur la dernière partie l'année dernière. Elle avait les pieds en compote. Apparemment cette année ça c'est mieux passé.
Et pour Freydane : la première fois que je suis passé, mi-août 1999, la montée et la descente de Freydane étaient sous des mètres de neige, et le glacier finissait dans le lac blanc :-(

Encore bravo, j'espère que tu as bien récupéré et j'espère pouvoir recourir un bout de trail avec toi un jour !!

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