Récit de la course : Trail du Beaujolais Vert - 110 km 2019, par vamosplaya

L'auteur : vamosplaya

La course : Trail du Beaujolais Vert - 110 km

Date : 11/10/2019

Lieu : Cublize (Rhône)

Affichage : 1740 vues

Distance : 110km

Objectif : Se dépenser

1 commentaire

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Le jour et la nuit

« Alors ce premier ultra ? Tu fais pas de CR ? »

Ben si c'est en cours. Juste du mal à m'y mettre...
Comme si mettre des mots sur cette course c'était fixer des choses.
Alors qu'elles ne sont pas très claires dans ma tête. Mais autant raconter pourquoi !

Alors voilà, cet ultra, c'était le jour et la nuit.


En réalité c'était plutôt la nuit avant le jour : avec un départ à 21 h ce vendredi d'octobre, chacun pouvait être sûr que la sortie longue au clair de lune allait durer au moins une dizaine d'heures. Je n'avais jamais fait de trail nocturne aussi long bien sûr. Ni de trail tout court aussi long d'ailleurs.

Mais la nuit n'a posé aucun problème. Vraiment ça a été une très belle expérience, riche de découvertes. Déjà le rythme, très particulier, d'un départ d'ultra. Le speaker avait prévenu les 430 partants : « Vous allez commencer par 2 bornes de plat. Profitez en, ce sont les seules ». Et finalement c'est parti plutôt vite autour du lac des Sapins, et à ce moment-là ça m'allait bien, car l'envie était grande de se dégourdir les jambes après une journée d'attente.

« Reste calme, reste tranquille ». A l'attaque de la première difficulté, je me force à me mettre dans le rythme plutôt lent des coureurs autour de moi. Beaucoup déplient immédiatement leurs bâtons. Clic-clic-clic dans la nuit qui nous accueille.

Il fait bon, voire très bon, ça grimpe tranquille, ce soir la lune est pleine, ce soir je suis en veine, la sortie s'annonce bien.

Après cette première bosse de 650 D+ et 18 km, déjà le premier ravitaillement (1 h 45 au lieu de 2 h 15 dans mes prévisions) : au cœur du village, une équipe de bénévoles pompiers très chaleureux nous accueille. Cette chaleur, nous la retrouverons à chacun de nos arrêts dans les villages, et à chaque intersection où il y aura des signaleurs. Même au petit matin, ils auront tous un petit mot, une blague, un « bon courage » pour les coureurs. Bravo et merci à tous ces gens, ils font une grande part de la réussite de ce trail.

Dans cette seconde portion, je me dis que ça va très vite, trop vite, alors je décide de stabiliser mon allure lorsque je rejoins la première fille. C'est là que je commence à regarder les techniques de course de mes collègues. Dès qu'une déclivité se présente, le coureur type se met à marcher, en poussant fort sur ses bâtons (90 % ont des bâtons). Ils relancent très rapidement dès que ça redevient à peu près plat. Et en descente, ça envoie...

Au début (les 70 premiers kils, on va dire que c'est le début), les descentes me semblent relativement roulantes, et l'envie d'en découdre me pousse à aller vite. Toutefois je trouve que dès que ça descend ça devient de plus en plus roulant. Mais roulant comme des caillasses qui roulent sous les pieds ! Il faut être très attentif et parfois pousser la frontale au maximum pour voir les pièges.

Là je suis dans les 40-45 premiers mais je n'en sais rien, je fais ma course, je suis bien, et bonne nouvelle, j'arrive à m'alimenter moi qui n'ai jamais réussi à le faire sur les expériences plus courtes. Le jambon et le pain me font de l'oeil à chaque ravito, et puis tout le monde prends son temps pour recharger, grignoter et taper la discute.

Car entre les ravitos, on ne parle pas beaucoup. Moi qui suis habitué à me faire des nouveaux potos sur les courses, là c'est plus silencieux et personnel.

Je vais juste rencontrer 2 personnes. Blandine, de Chambéry, qui tilte sur mon coupe vent TCO -elle est née sur la Côte d'Opale et elle terminera 2nde- et Michaël de Noeux-les-Mines, amateur de trails belges, qui finira très bien aussi. Deux ch'tis...

La nuit passe quand même assez vite. Je suis toujours dans les temps de mon road-book, même si nous nous égarons et perdons 20 mn, ce qui me mets un petit coup au moral. Ravito suivant, 66e km, pas mal de gens dorment sur les lits de camp, ça me surprend. Je n'ai aucune envie de me reposer. Et surtout pas envie de me refroidir, à 6 h il fait très froid dehors.

Quelques moments de moindre volonté, je me rappelle les mots de mon coach, souffle et tu retrouveras des forces et de la fraîcheur. Ça aide à relativiser ces passages, inhérents sur une durée aussi longue.

A 7 h, le ciel commence à s'éclaircir, c'est presque imperceptible au départ, puis les couleurs explosent sur la forêt. Ça fait un bien fou de sentir le soleil, surtout que la 6e grimpette a été dure, c'est raide, ça tire, il faut que la tête soit forte pour que les jambes consentent à se mettre en mouvement.

C'est enfin le ravito de Claveisolles, dans une étable c'est génial. Il y a deux mecs qui dorment comme des bûches, ça me fait sourire. Il est 8 h 30 et je sens que c'est bien une nouvelle course qui commence. Le jour après la nuit, comme la douleur après le bonheur. Déjà on attaque par 2 énormes bosses qui font mal. Je me perds encore dans la montée suivante, deux chasseurs de champignons me remettent dans le droit chemin, je suis un peu dégouté je décide de faire toute la montée en marchant.

Une fois en haut le calvaire se précise. Impossible de me mettre à courir dans la descente, où sont mes jambes ? Je glisse, je dérape, je grommelle. Je tombe, je me décourage. Il doit rester 20 kms, et deux « bosses » pour 1000 D+. Je pense arrêter. Mais pour aller où ? Alors autant marcher, et espérer que la volonté de finir coûte que coûte finisse par s'imposer.

C'est quoi 20 km finalement ? Ben c'est long quand on marche... Pour les boucler, il me faudra 5 h. Mais je pourrais compter sur tous les messages trop sympas de mes proches et du LMA : c'est un festival de dessins, d'encouragements, de photos, ça me fait à la fois rire et me plonge dans l'émotion.

 Je me fais doubler, je m'en moque, je veux finir et je finirai, un pied après l'autre. J'arrive quand même à trottiner au passage de la ligne d'arrivée, vers 15 h. Content de terminer, mais très déçu que ce soit dans de telles conditions. Plus jamais ça je me dis.

Le Beaujolais a été plus fort que moi ! Il a été plus fort que pas mal de monde finalement, car il a compté près de 100 abandons. Et j'arrive dans le premier tiers, ce qui donne la mesure de la difficulté. Je penserai le soir à ceux qui franchiront la ligne en fin de soirée, quand nous serons attablés et que la nuit sera tombée depuis longtemps, courage et respect à eux ! 

Quelques jours après, la déception est un peu passée. Finalement c'est une course où j'ai beaucoup appris. C'est quand même spécial un ultra.

On verra au prochain, qui de la nuit ou du jour sera le plus brillant.

1 commentaire

Commentaire de catcityrunner posté le 24-10-2019 à 21:19:48

Bravo pour ta course. Parti un peu vite, sûrement. On se laisse toujours griser au départ...

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