L'auteur : jedaf
La course : Trail du Cassoulet - 32 km
Date : 7/10/2018
Lieu : Verfeil (Haute-Garonne)
Affichage : 1648 vues
Distance : 32km
Objectif : Terminer
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Trail du Cassoulet.
7 octobre 2018
Il a plu, mais p.. qu'est-ce qu'il a plu !
Fervent adepte du Forest Trail où je sais que le temps sera pourri, que l'usage des raquettes semblera plus judicieux que celui des chaussures fussent-elles à crampons, où il sera préférable de se tremper tout habillé dans une baignoire d'eau glacée avant d'être obligé de le subir pendant la nébuleuse, je ne m'attendais pas à faire un Forest avant le 2 février.
Et encore on a eu de la chance car il a fait jour.
Mais je suis ravi d'être ici et impatient de participer à cette fête. Transi, déjà mouillé, mais fébrile.
Trois mois sans une goutte d'eau excepté pour jaunir un liquide dont la couleur fait la joie de nos soirées entre amis, 3 mois sans voir un nuage dans le ciel occitan et le vendredi 6 octobre dès la nuit tombée, un Dieu dont le fils nous accompagnera un bout de chemin le lendemain, choisit de laisser le ciel se déchirer.
Huit heures du matin, un magnifique moment où l'on peut déguster un café et quelques viennoiseries. J'adore ce moment dans les courses surtout si elles sont conviviales comme l'est le Trail du Cassoulet où j'arrive une bonne heure à l'avance, voire plus, et où je m'attarde au buffet du matin un gobelet chaud dans les mains. Ici, actuellement, il ne pleut plus. Pas encore...
8 heures 30, il pleut. 9 heures, nous nous alignons au départ, 25 et 32 réunis. Nicolas mon fils et moi-même ayant postulé pour le 32 km. Il pleut. Le départ est donné. Et il pleuvra quasiment tout le parcours. Quoique il est bon de remarquer que courir sous la pluie est préférable à courir sous un soleil nous balançant sadiquement des 40° et buvant avidement toute l'eau de notre corps. Aujourd'hui, la déshydratation n'est pas une option.
Donc, le départ est donné et de suite nous notons un changement dans le parcours. Au lieu de grimper par la route départementale que nous suivions les années précédentes sur quelques centaines de mètres pour passer à travers la cité, les organisateurs ont choisi de nous faire passer sous la route puis à travers un champ cultivé afin de rejoindre le village par une rue latérale. Peut-être ont-ils voulu éviter les risques de responsabilité inhérents à la circulation automobile que l'on ne peut dévier sur cette route principale. Toujours est-il qu'à peine 200 mètres parcourus nous connaissons un joyeux embouteillage où les coureurs du 25 et 32 réunis sont obligés de se resserrer pour ne former qu'une seule file d'autant plus difficile à écouler qu'à la sortie du tunnel l'accès au champ agricole et glissant nécessite l'escalade d'un talus. Heureusement tout se passe dans la bonne humeur. Ce genre de départ favorise évidemment les plus aguerris qui se plaçant au premier rang, ne sont pas ralentis et prennent ainsi une confortable et prépondérante avance sur d'éventuels poursuivants dont je ne fais évidemment pas partie. (Alors que je termine ce récit, un message des organisateurs me parvient précisant que le départ aurait dû avoir lieu comme les autres années mais qu'une erreur de balisage avait provoqué cette mauvaise orientation. Les organisateurs en sont tout excusés. Nul n'est à l'abri d'une erreur.)
Il faut dire que nous avons le Christ avec nous, oui le vrai, je l'ai reconnu. Torse nu avec sa croix sur le dos et ses stigmates, arborant une fière couronne d'épines. Il patine, comme nous. C'est vrai qu'en plus il doit avoir les pieds troués, ce qui n'arrange rien. Nous le retrouverons un peu plus loin, en difficultés dans un secteur glissant, nous le dépasserons et ne le reverrons pas. A-t-il franchi son Golgotha ? On ne peut en même temps marcher sur l'eau et adhérer à l'argile détrempée, il faut croire qu'il s'agit de deux spécialités différentes.
Je cours avec mon fils, à moins qu'il ne courre avec moi. Il me surveille, je lui tiens compagnie. Aujourd'hui il n'est pas au meilleur de sa forme. Il a été contraint de négliger les entraînements ces derniers temps et dans le souci de se rattraper il a ramassé une contracture dans le mollet, de plus un genou commence à le faire légèrement souffrir. Ce qu'il y a de bien c'est que quand il n'est pas en forme et que moi je le suis, nos niveaux se rapprochent. Il m'attend toujours patiemment mais moins longtemps.
Ayant enfin passé le tunnel et grimpé le champ argileux nous prenons une rue qui nous mène au cœur du village. Au son d'une banda nous finissons d'atteindre le haut de Verfeil juché sur une colline dominant la région puis nous plongeons vers des chemins forestiers, des bordures de champs, des sentiers monotraces forestiers que nous ne quitterons presque plus jusqu'à l'arrivée .
Le Trail du Cassoulet se veut festif et convivial (il l'est) notamment par l'encouragement au déguisement. Si cette ambiance est respectée pour le 25, elle l'est moins pour le 32 où l'on trouve moins de coureurs mais plus affûtés qui, visiblement, ont plus la vocation à établir des performances qu'à courir costumés. Pour un V3 comme moi, il est plus difficile d'accrocher un cœur de course mais le plaisir reste intact.
La première partie est aisée. La pluie est encore anecdotique, on peut ôter le coupe-vent, les chemins sont d'herbe, les pentes douces, les dénivelés négatifs majoritaires et l'on atteint la première halte ravitaillement de Bonrepos-Riquet très frais. Cette année le buffet ne se situe plus dans l'orangerie mais dans un Barnum extérieur. Il me semble au vu des étais métalliques accolés aux murs qu'un bâtiment a besoin d'une rénovation urgente. Ce château où Riquet expérimenta les premières esquisses du Canal du Midi est beau dans sa simplicité, entouré d'un parc ombragé (pluvieux aujourd'hui) où l'on aimerait se recueillir. Le buffet est copieux. Nicolas et moi reprenons notre petite foulée en direction de Montpitol pour le second ravitaillement puis le lac du Laragou.
Je suis un petit mangeur de bitume, même si celui-ci est verdoyant. Sur route je trotte à 10 ou 11 km/h et en trail ma moyenne se situe plutôt à 8 km/h ce qui me laisse espérer pour celui-ci un temps aux alentours de 4 heures, loin des 2 heures et quelques des intouchables de la discipline. En revanche je n'ai aucune crainte quant à ma résistance face à la distance. Mon objectif est le plaisir, la régularité, la durée et la préservation. Ainsi que les buffets gourmands. J'y arrive pour l'instant à merveille tout au moins en ce qui concerne ce dernier point.
La pluie recommence à tomber, plus drue. Je ne ressors pas le coupe-vent qui ne sert à rien ni la casquette qui mouille autant par la transpiration intérieure que l'humidité extérieure. Tant qu'on court on n'a jamais froid. Une fille aux oreilles de Mickey (une Minnie donc) nous dépasse. Peu de déguisés en vérité. Derrière nous on distingue (le contraire eut été difficile) un couple déguisé avec des peignoirs de bain d'un blanc éblouissant. Le tissu éponge sous la pluie est épatant. Au fur et à mesure des kilomètres leur poids augmente. Ce sont les seuls de cette course sans doute qui prendront 20 kg en 32 km.
Les monotraces dans les sentes forestières sont somptueuses. Quelques passages commencent sérieusement à glisser. Je plains celui ou celle qui a opté pour des chaussures de route. Le problème quand on n'est pas dans le groupe de tête c'est que le tracé de la course a été malaxé par des centaines de chaussures et que si le premier qui est passé l'a fait aisément, le dernier dépense 2 fois plus d'énergie. Ah ! Le fameux dernier de cordée !
Nous filons notre petit bonhomme de chemin avec régularité et sans fatigue excessive. On discute quand on descend, on roumègue quand on grimpe. Tout va bien.
Un raidillon, une longue montée, une voie goudronnée et nous trouvons le second ravitaillement à Montpitol. Que de l'eau ! Mais c'est bon de faire une pause. Peu de public sur la route et on le comprend aujourd'hui mais les bénévoles ont toujours une parole d'encouragement. Nous devons être à la moitié du trajet . Ça commence à sentir l'écurie. Maintenant nous prenons la direction du lac de la Balerme.
Le temps maussade a mis à mal bien des projets de déguisement. Le papier crépon ne survivrait pas plus de quelques kilomètres. Dans les premiers temps de la course une coureuse était déguisée en Rubik's Cube. Engoncée dans cette boîte, les deux bras à l'horizontale elle trottinait courageusement. Je l'ai revue à l'arrivée, toujours dans son cube. Était-il étanche ?
La fatigue commence à se faire sentir, l'argile à glisser davantage et les chaussures à se remplir. Il pleut régulièrement, nous sommes relativement seuls. Dans le 32, le groupe de tête disparaît dès les premiers kilomètres. Nous ne sommes que 200 et sur une telle distance, à partir de la moitié inférieure les coureurs sont dispersés dans le paysage. Nous courons à proximité d'une participante qui a à peu près le même rythme que nous. Une fois devant, une fois derrière. Minnie nous a dépassés, derrière à quelques centaines de mètres on distingue deux peignoirs de bain blancs. Ils doivent vraiment prendre 1 kg par kilomètre. Je me serais débarrassé de ces attributs depuis longtemps. Ils auront amplement mérité leur bouteille de vin à l'arrivée. Au loin retentit régulièrement le son grave d'une corne, une corne de brume appropriée tenue par des coureurs que je ne verrai pas.
Nous pénétrons dans une sente forestière obscure, elle suit un ruisselet, celui, sans doute, qui est alimenté par le lac du Laragou. C'est très agréable de courir dans ces endroits mais il faut être peu nombreux. Cela commence à glisser sérieusement. Nous nous accrochons aux branches pour les parties périlleuses. On dirait qu'une horde de sangliers enragés a choisi cet endroit comme lieu de villégiature.
Le lac du Laragou n'est pas le site que je préfère. Nous en faisons la moitié du tour. C'est plat,dénudé et monotone. Un vent froid nous surprend de face qui nous poussera quand nous aurons passé la digue pour longer l'autre rive. Malgré la pluie continue, il y a des fans d'aviron qui essaient de lutter contre le vent et des pêcheurs au coup, stoïques, qui guettent les tressautements de leur flotteur. Nicolas me dit : « J'aime la pêche mais je ne comprends pas le plaisir que l'on peut éprouver à rester sous la pluie à taquiner le gardon. » Je lui réponds que les pêcheurs qui nous voient passer doivent se demander quel plaisir on peut éprouver à courir sous la pluie en short et en tee-shirt.
Après la queue du lac nous pénétrons dans une autre sente forestière qui est aussi un sentier botanique. Des panneaux indiquent les noms de différentes essences végétales. Toujours à une allure régulière, en lisière de champ et à travers bois, nous atteignons un passage qui m'effraie toujours un peu ; il s'agit de la buse qui passe sous la route. Ce tunnel doit faire une vingtaine de mètres et oblige à progresser courbé. Outre le fait qu'un sentiment de claustrophobie ne peut s'empêcher de transparaître, le fait de marcher courbé, les jambes pliées, dites « en canard », n'arrange en rien la fatigue musculaire qui commence à s'installer après 20 km d'efforts argileux.
De l'autre côté on grimpe un raidillon bien glissant puis on descend vers la Balerme.
Avant une descente qui nous rapproche du lac de la Balerme se tient le troisième point de ravitaillement. Je n'y vois que de l'eau. J'en suis ravi mais il me semble me souvenir que l'an passé j'y avais dégusté de la saucisse de Toulouse fraîchement grillée. Un désespoir me saisit. Encore 10 km passe, mais sans saucisse, non, c'est trop dur ! Nous repartons.
Peu avant le lac nous pénétrons dans un bois pour une nouvelle monotrace. Nous y retrouverons d'autres coureurs en difficulté. Cette piste est une succession de montées et descentes souvent en dévers, c'est plus un simple passage sadique qu'une piste fréquentée. C'est un véritable bourbier, on ne peut progresser qu'en saisissant les branches à proximité. Cela nous a permis de dépasser lâchement 2 ou 3 coureurs maîtrisant moins bien que nous l'art du patinage. Nous attrapons le bord du lac et prenons le sentier qui en fait le tour que nous suivrons sur quelques centaines de mètres.
Un Barnum blanc et un autre point de ravitaillement, avec de la saucisse. Enfin ! La voilà !. J'étais au désespoir, je renais.
Nous nous trouvons à 3 ou 4 coureurs. Le bénévole saucissier nous demande si ce n'est pas trop pénible de courir avec cette pluie. Nous lui répondons que tant qu'on court ce n'est pas un problème et que de toute façon nous préférons ceci à une forte chaleur. Il nous regarde interrogatif et nous reprenons notre route.
Le dernier raidillon. Je le grimpe fréquemment. Je connais ce parcours pour m'y entraîner. Mais là, après 28 km, je trouve plus judicieux de le monter en marchant. Ce que font d'ailleurs les autres coureurs, d'autant plus que l'expérience m'a montré que grimper un raidillon en trottinant laborieusement et se faire dépasser par un marcheur n'était pas spécialement motivant ni rentable en terme de fatigue. Nicolas commence à souffrir du genou et n'est pas forcément mécontent lui-aussi de marcher un peu d'autant plus qu'avec l'état des sentiers notre chrono 2016 ne s'en trouvera pas amélioré de toute façon. Quelques centaines de mètres nous hissent au dessus du lac puis nous traversons la départementale. Verfeil apparaît à quelques kilomètres. A partir de là nous n'aurons que de la descente aisée.
Quand je fais ce trajet pour mon plaisir, je suis un parcours qui mène directement à En Solomiac (lieu de départ et d'arrivée) par un large chemin d'herbes essentiellement descendant. Mais les organisateurs dans leur infinie perversité (comme dans nombre d'autres courses d'ailleurs) ont préféré nous faire un dernier cadeau. Les balises nous dérivent vers la droite sur un sentier encaissé. La pente descendante est importante et la piste est fortement creusée en son centre, les bords très touffus interdisent la course à l'extérieur. De sorte que nous ne pouvons éviter de glisser vers le centre qui est rempli d'une boue argileuse et onctueuse qui ferait le bonheur d'un centre de thalassothérapie. Une centaine de mètres de glissades et d'accrobranche puis le reste est aisé quand nous rejoignons la piste connue. Un dernier raidillon et nous pénétrons sur l'aire d'arrivée.
Un peu triste aujourd'hui l'aire d'arrivée. On a l'impression que nous sommes arrivés après la fête. Il n'y a pas de public ou presque. Tout le monde est aggloméré sous le Barnum où est distribuée la bière et le dernier ravitaillement. Nous passons seuls la ligne d'arrivée et pourtant je saurai qu'il y a encore 31 coureurs derrière nous le dernier arrivant une heure plus tard. Sur 220 inscrits 209 sont classés. Nous sommes 178èmes. Je dis nous car mon fils a toujours mon classement quand nous courons ensemble. Non qu'il coure lentement, non que je coure vite mais parce que nous courons ensemble et c'est vraiment un plaisir. Heureusement pour lui qu'il reste nombre de courses trop élevées à mon niveau où il peut donner libre court à son énergie.
Un ami nous attend avec son épouse. Il a fait le 14 km marche. Il est arrivé aussi crotté et trempé que nous. Ça me rassure.
Maintenant nous allons vite nous frigorifier. Nous nous jetons sur la bière et le buffet sans nous attarder. Un peu triste donc l'ambiance à l'arrivée mais ce n'est pas la faute des organisateurs toujours aussi efficaces. Mais la course est toujours un plaisir.
Nous avons couru. « J'ai fini et pas le dernier ! » Ceci est devenu ma devise.
Et nous serons là l'an prochain.
6 commentaires
Commentaire de philibert69 posté le 11-10-2018 à 14:21:18
Le trail du cassoulet. ..un indispensable de la region !!! Effectivement, si au départ tu prends la buse du retour : Bonjour le bouchon. Bravo pour ta course.
Commentaire de jedaf posté le 11-10-2018 à 18:09:27
La buse a été prise par la totalité des coureurs des 24 et 32. Les organisateurs s'en sont ensuite excusés, ils avaient fait une erreur d'embranchement au départ. Il est vrai aussi qu'au milieu de tous on joue un peu les moutons de Panurge.
Merci pour cet échange.
Commentaire de rvialles posté le 11-10-2018 à 16:00:42
sympa le récit. Pour ma part j'étais sur le 14 km et me suis bien régalé. La pluie était là mais au final, une fois lancé ce n'était pas désagréable, au contraire. Par contre c'est certain que ça glissait pas mal quand même ! Belle organisation en tout cas.
Commentaire de jedaf posté le 11-10-2018 à 18:12:28
Sincèrement si tu en as la possibilité tente le 25, on n'est plus à quelques kilomètres près. Personnellement j'ai commencé par un 13 puis 18, 24 et maintenant 32. Je prends toujours autant de plaisir.
Merci pour l'échange.
Commentaire de Shoto posté le 12-10-2018 à 07:18:48
beau récit plein d humour. Dommage que la météo n ait pas été de la partie. sympa de courir en famille.
Commentaire de jedaf posté le 12-10-2018 à 17:31:12
Tu as raison. Mais la pluie n'est pas un obstacle. Quant à courir avec son fils c'est un grand partage.
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