L'auteur : marathon-Yann
La course : Saintélyon
Date : 3/12/2016
Lieu : St étienne (Loire)
Affichage : 3456 vues
Distance : 72km
Objectif : Pas d'objectif
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Sacrés défis que cette SaintéLyon ! Premier trail de nuit, premier trail avec autant de dénivelé, première fois aussi que je participe à ce genre de course trois semaines après un marathon couru à fond, il y a de quoi faire frissonner le routier que je suis avant même le départ !
J’avais prévu de passer un samedi un peu solitaire, mais on est rarement seul quand on fait de la course à pied. Je retrouve dans mon RER parisien Hervé, un ami marathonien qui pars travailler, discute avec plusieurs coureurs bretons dans le TGV – qui est rempli pour plus de moitié de traileurs sous le regard vaguement incrédule des passagers « ordinaires », et retrouve un peu surpris l’ancienne instit’ de mon fils au village départ, accompagnée de sa sœur et d’un ami –Stéphane- que je connais également d’Orsay. Nous resterons ensemble jusqu’à la pasta party.
Un mot pour saluer l’organisation, absolument parfaite. Le retrait des dossards est rapide, le système des navettes impeccable, nous pouvons économiser nos forces. Je discute avec Stéphane qui me donne des conseils précieux sur le parcours « tu verras, ça ne fait que monter et descendre jusqu’à Lyon » (moi qui m’attendais à un parcours très roulant, cet avertissement m’évitera de mauvaises surprises), sur le choix des chaussures (à cette heure, j’hésite encore à prendre des routières), sur l’ambiance avant la course (« tu verras, à partir de 20h c’est extraordinaire »), et pendant la course (« très sérieuse»). Sur tous ces points, il aura parfaitement raison.
Je vais dans un premier temps prendre l’ambiance au hall de départ à Saint-Etienne. A ma grande surprise, les coureurs commencent à sortir des matelas, des sacs de couchage, et à s’allonger. Je m’allonge moi aussi et continue ma discussion avec Stéphane, avant de rejoindre Le Flore pour le rassemblement kikou.
Merci aux organisateurs de ce rassemblement ! Je me retrouve en bonne compagnie, à une table calme et sympathique. Je profite de ces dernières discussions pour caler mon objectif : faire aussi bien qu’à l’Ecotrail, couru en 8h21, à condition d’avoir récupéré bien sûr. Mes pâtes avalées, je vais m’allonger dans la salle mise à notre disposition. C’est peut-être le moment le plus inattendu de la journée. Il règne un silence, un calme, extraordinaires. J’ai l’impression d’assister à un bivouac de soldats qui prennent des forces avant de monter au front. Il n’y a plus un cm de libre, les coureurs allongés bouquinent ou essaient de dormir. Un chuchotement de temps en temps. Je ferme les yeux et laisse filer le temps.
Ce sont les applaudissements qui me réveillent. Les coureurs de la 180 viennent d’arriver. Ces champions ont décidés, pour le fun, de faire le parcours à l’envers avant d’enchainer avec la course officielle. Cela donne le signal. Je m’équipe, boucle mon sac et vais rejoindre le départ. Comme au Flore, les coureurs cherchent encore du repos ou s’équipent, dans une atmosphère de plus en plus effervescente. Je retrouve Laurent, un copain traileur grâce à l’habilité duquel je serai dans la première vague.
Le calme avant la tempête (photo page FB de la course)
Il est bientôt minuit, nous sommes serrés dans le SAS de départ, l’excitation et la bonne humeur sont au rendez-vous. Certains coureurs ont mis des leds colorés sur leur sac, façon guirlande de Noël. A la demande du speaker, nous allumons nos frontales et nous élançons dans la nuit.
Afin d’éviter les bouchons sur le parcours et aux ravitaillements, et ayant la chance d’être dans la première vague, je décide de partir vite, à mon allure marathon (environ 12 km/h). De ce point de vue, ce sera une réussite. Après 7 km, nous abordons les sentiers, l’aventure commence vraiment. L’aventure, c’est ne regarder que les quelques mètres devant soi éclairés par la frontale, éviter les pièges du parcours (feuilles, pierres, flaques…), résister à la tentation de courir dans les montées … J’avais peur du froid mais mon équipement s’avère adapté. Tous les voyants sont au vert.
La fameuse fête des lumières de Saint-Etienne (photo page FB de la course)
Saint Christo en Jarez, premier ravito, déjà. J’avale un thé chaud, une banane, et repars. Je suis surpris qu’il y ait tant de monde, à une heure passée, pour nous encourager. Mon étonnement va aller croissant dans la nuit : à 1h, à 2h, à 3h du matin, il y aura des supporteurs devant leur brasero ou sur le palier de leur maison, pour nous encourager. De nombreux gamins parmi eux, je pense aux miens qui doivent dormir.
Le soleil de minuit (photo page FB de la course)
Après une nouvelle côte, je me retourne. Le ruban lumineux qui s’allonge à perte de vue est indescriptible. Je songe au titre du film « Mes nuits sont plus belles que vos jours ». Mais l’heure n’est pas aux songes, ni à la poésie. Je continue mon bonhomme de chemin, courant dès que possible, marchant quand le chemin s’élève. Vers le 25ème km, je suis pris d’une soif inextinguible, que mon Powerade fétiche n’arrive pas à calmer. Je me dis qu’à cette heure, mon estomac ne doit pas fonctionner normalement, et qu’il faudra que je teste plein de boissons au ravitaillement de Sainte Catherine, qui n’est pas loin (riche idée).
Et au milieu coule une rivière (de lumière) (photo, page FB de la course)
Je m’attendais à un passage un peu plus pentu vers le Km 31, mais je surpris par le pourcentage de la monté. Heureusement, le sol n’est pas trempé, dans la boue cela aurait été un cauchemar. Alors que je réussi d’habitude à récupérer en montant (oui, je marche), je me sens sérieusement entamé arrivé en haut. Heureusement, la route est plus facile ensuite, je peux récupérer jusqu’au ravitaillement de Saint Genou. Comme chaque fois, en passant sur le tapis de pointage j’adresse une pensée muette à mes proches, je sais qu’ils sont plusieurs à vérifier régulièrement si les loups ne m’ont pas dévoré.
Toujours debout à Saint Genou
Dans cette foule de coureurs, des visages me sont maintenant familiers. Je me fais dépasser dans les côtes et dans les descentes, et rattrape tout ce monde sur les parties les plus roulantes. Je suis admiratif devant les coureurs qui, tels des chamois, dévalent les descentes en sautant de pierre en pierre. J’admire les quelques coureuses qui me dépassent avec légèreté. Mais il n’y a plus beaucoup de dépassements, en regardant mon évolution, le lendemain, je constaterai que mon classement aura varié de la 660 (1er pointage) et a 560ème place (Chaponost ; 585eme à Lyon) au gré de la nuit et du profil du parcours, ce qui représente assez peu de dépassements (puisque nous étions répartis sur 6 vagues). En attendant, cela me prouve que je suis toujours dans le rythme, et que mon départ rapide ne m’est pas préjudiciable.
Au ravitaillement de Soucieu (Km 51), un bénévole taquine un coureur qui lui demande de verser du thé dans sa gourde : « vous vous rendez compte de ce que vous me demandez à 5h45 du matin ? » C’est l’un des rares moments où je réalise que c’est la nuit. Je me dis que la dernière fois que j’ai fait une nuit blanche, c’était pour la naissance de mon fils,… il y a 13 ans. C’est nettement plus douloureux cette fois ! (note : mon épouse ne lis pas mes récits sur kikourou). Il fait bien chaud dans ce gymnase, je vois la pancarte qui annonce le passage de la navette « abandons », une fraction de seconde je me pose la question. Alors je repars rapidement. Cet arrêt est heureusement suivi d’une longue (presque trop longue) portion courable, alors je cours. Deux fois (ce sera les deux seules fois du parcours), je serai devant des bifurcations sans personne devant moi, il me faudra suivre l’impeccable balisage, ce qui est assez inattendu vu la densité de coureurs au départ.
Au dernier ravitaillement, à Chaponost, les bénévoles nous encouragent : plus que 10 km. J’imaginais 12, cela constitue une bonne nouvelle. La nuit s’éclaircie, nous courons dans un parc, descendons quelques marches : c’est ça, les fameuses marches finales ? Quelle rigolade ! Malgré les 5 km restants, je serre déjà un poing vainqueur. Il fait jour maintenant. Encore des montées, encore des descentes. Nous rattrapons quelques coureurs des autres courses qui finissent leur parcours en marchant, ou en courant très lentement. Plus que 2 km. Nous sommes en haut d’un vrai escalier cette fois, 200 marches peut-être à descendre. Puis une boucle sur un quai, la remontée vers le pont, et l’arrivée au Hall Tony Garnier. Au passage sous l’arche en 8h19, je me prends la tête entre les mains, l’air de dire « qu’est-ce que j’ai fait ? ». Ce que j’ai fait ? Je viens de participer à une course hors-norme.
Et je me marre, sur le pont Raymond Barre
7 commentaires
Commentaire de Arclusaz posté le 14-12-2016 à 18:13:59
super course, bravo !!!!
faut juste revenir pour réviser le nom des villages traversés : sur la photo à 6h39, c'est Soucieu, pas St Genou et tu es tombé dans le piège de Chanopost, erreur que beaucoup de monde fait (en fait, c'est Chaponost).
Le reste est parfait : il y a bien environ 200 marches à la Mulatière (certains te diront 181 ou 184 mais ça dépend comment on compte !)
Commentaire de marathon-Yann posté le 15-12-2016 à 09:53:18
Merci Arclusaz,
tu penses que c'est possible d'être à 6h39 à Soucieu, et à 8h à Lyon ? C'est peut-être Chanopost, euh, Chronopost, non, Chaponost ? Bref, tu as raison, il faut que je revienne(mais de jour alors, pour mieux reconnaitre les villages)
Encore merci pour l'organisation du repas et du repos au Flore !
Commentaire de Arclusaz posté le 15-12-2016 à 10:52:11
oui, tu as raison, sur la photo ce n'est ni Saint Genou ni Soucieu c'est Chaponost.
mais, c'est bien quand même !!!!!!
pour l'orga du Flore, je n'y suis pas pour grand chose : c'est Caro et Franck qui ont tout fait, je ne fais que "chauffeur de salle" !!!!
Commentaire de Khioube posté le 15-12-2016 à 07:38:28
Belle course, félicitations ! C'est toujours chouette de finir une course en se disant qu'on a fait quelque chose d'incroyable... A l'an prochain, donc ! ;-)
Commentaire de marathon-Yann posté le 15-12-2016 à 10:00:44
Merci ! C'était une belle aventure, j'ai vraiment apprécié !
Commentaire de Jean-Phi posté le 15-12-2016 à 10:08:43
Bravo pour ta course. Pour une 1° c'est pas mal du tout ! Tu as certainement un peu de marge.
6h39 pour 8h à Lyon, c'est jouable mais il te faut en avoir encore sous le pied. C'est descendant et si tu y mets du rythme, les jambes couinent pas mal.
Commentaire de Laurent V posté le 15-12-2016 à 10:14:59
Et tout ça 15 jours après le marathon Nice-Cannes ! non mais quelle performance, bravo !
Bien plus qu'une course, une aventure.
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