L'auteur : MatthieuChanv
La course : Trail de la Vallée des Lacs - 87 km
Date : 18/6/2016
Lieu : Gerardmer (Vosges)
Affichage : 3051 vues
Distance : 87km
Objectif : Terminer
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Vallée des lacs, acte II
Blessé bêtement l'an dernier à 2 semaine du départ, j'avais dû déclarer forfait à ce qui était un de mes objectifs de l'année. Rebelotte pour cette année : avec deux "gros" ("qui est gros ? ") au programme : le 85 de la Vallée des Lacs et la CCC.
Plus ça approchait et plus je me disais que la plus dure des deux ne serait peut-être pas la plus longue… Certes la CCC c'est 1500+ et 15km supplémentaires que sa belle-soeur des Vosges, mais celle-ci est plus technique, et les BH un peu plus serrées (18h au total vs 26).
Bref un beau challenge et l'occasion de franchir un palier.
Arrivée tranquilou la veille, dossard, pasta party, et au dodo, départ à 4h00, donc réveil 2h45, ça picotte !
316 au départ (j'ai compté ! ), dans la fraicheur mais au sec, avec des modifs annoncées sur le tracé en raison des tonnes de flotte qu'on s'est pris depuis 2-3 semaines. Une petite traversée de Gérardmer by night, passage devant une boîte de nuit, et dès la première montée on peut presque apercevoir les premières lueurs du jour entre les (gros) nuages. Alternance piste de skis et singles, ça monte régulièrement, bâtons, frontale, je suis toujours en mode "diesel-prudence" dans ces moments là, et il y a beaucoup plus de monde devant que derrière.
Une première heure avec essentiellement de la grimpette, arrivée au premier sommet dans les nuages ou le brouillard, ou les deux. On voit à 30 mètres et on s'attend à voir surgir un truc sauvage d'un instant à l'autre (ours, loup, Vosgien…). Heureusement que le balisage est au top et le sentier bien marqué parce qu'on n'y voit goutte : ils auraient pû mettre la pyramide de Khéops là-haut qu'on ne l'aurait jamais vu…
05h00, puis 6h00, on bascule dans la descente : il est sensé faire grand jour, mais entre les nuages, le brouillard et le sous-bois, on n'y voit goutte ! On a dû changer d'hémisphère, où un truc comme ça, on va faire la journée à la frontale !
Dans une descente fort sympatoche : je frôle le drame : je change mes bâtons de main et la dragonne me fouette le visage et me fait tomber une lentille de contact ! 25 ans que j'en porte, ça ne m'était jamais arrivé ! Le hic, c'est qu'avec ma myopie, je confond Catherine Poletti et Kilan Jornett à 1m. Autant dire que soit je la retrouve, soit je rejoins le premier ravito avec mon bâton en mode cane blanche et j'arrête là…
Me voilà à 4 pattes au milieu d'un sentier, à chercher une aiguille dans une botte de foin, de feuilles, de mousses et d'herbes… Un gars qui me rattrape me suggère d'utiliser la frontale. Alleluia ! Merci mon bon génie, 30 secondes plus tard un reflet me procure un truc qui devait ressembler à un orgasme. Voilà la fugueuse en place, et ça repart : je dévale le sentier en rigolant nerveusement de ce coup de bol monstrueux, trop content de continuer ma course alors qu'une partie de moi avait déjà renoncé…
Le premier ravito se fait attendre (plus de 20km) : arrêt rapide : le plein des flasques (définitivement préférées à la poche à eau tellement plus pratiques ! ), du salé, et ça repart. Ni trop lentement, ni trop fort : un bon rythme avec les bâtons quand ça grimpe, en petites foulées quand c'est plat (autant dire jamais), et une bonne allure en descente, en prenant le soin de s'économiser. Comme promis : c'est du single, peu de pistes, et surtout beaucoup d'eau : dans les rivières, les torrents, ça déborde de partout et les chemins sont quasiment tous inondés. Plus la peine d'essayer d'éviter les flaques : j'ai les pieds trempés, et je sais que ce sera comme ça jusqu'à ce que j'ai le droit d'enlever mes chaussures !
Je grignotte lentement mais sûrement des places : notamment en montée ce qui doit être une première pour moi. Fondamentalement je m'en fous mais ça fait toujours du bien au moral. Deuxième ravito, 35ekm, même topo : le plein svp ! 5 minutes maxi', emballé c'est pesé ! Le but est toujours d'arriver à peu près frais au 50e kilomètres, au ravito qui est au pied du Hohneck, la grosse ascension de la journée. Je suis toujours plutôt bien : pas de bobos, pas de douleurs, du plaisir et de bonnes sensations : une belle bosse suivi d'une superbe descente, à peu près sèche, roulante, rapide, technique par endroits : je me lâche un peu et me régale. Un peu de piste pour finir et voilà donc Mitlach : atteint vers midi (toujours pas de montre/GPS/cardio…), sous le soleil.
Je m'octroie un bon quart d'heure : soupe et casse-croute plus conséquent, et ça repart. A peine le temps de faire 1km et les nuages nous rattrapent pour la première averse de la journée. Je passe la veste, monte régulièrement, double encore et encore. Comme quoi les séances de grimpettes droit dans la pente portent leurs fruits ! Je suis bien, à mon rythme : jamais essoufflé, jamais le cardio qui s'emballe, comme dans un rêve !
Arrivé sur les chaumes les nuages s'écartent et découvrent le paysage : toujours aussi beau. Sur le sentier des névés, le vent est tout de même bien frais. On fait la jonction avec le 55, parti 5 heures après nous : ça remet un peu de monde sur le sentier. Passage au sommet du Hohneck : dans la tête le plus dur est fait, mais il reste bien dans les 30 bornes.
Début de descente et arrivée au 4e ravito du Sotré. J'attend presque le moment où je vais commencer à avoir mal qulequepart, ou subir un coup de fatigue, mais rien ! Merde alors ! Ravito express : il y a du monde, je ne traine pas et attaque la descente dans une douce euphorie. Un gars me dit qu'on en est à 10h de course. J'ai peine à y croire : moi qui voulais juste terminer dans les clous (18h), me voilà sur les bases de 14h-15h. Ca me booste et je fais une descente plutôt rapide (tout est relatif, hein…) sous une grosse averse, avec un gros moral et une grosse envie de faire un truc. Descente jusqu'au lac de Limbach, remontée bien raidasse qui passe toute seule, mais que je paye un peu plus loin, j'aurai du manger un peu plutôt que de forcer en attendant le dernier ravitaillement qui tarde à venir. Mais le sentier est sympa, du sigle pour sanglier qq belles montées, des blocs et des passages un peu casse gueule : tout ce que j'aime !
Arrivée en relançant au dernier ravito de Longemer. Là, les avis divergent sur ce qu'il reste compte tenue des modifs : 12km selon la police, 18 selon les organisateurs… Ce qui sûre c'est que sortie de ravito il y a LE mur de la journée, tout en terre, difficilement grimpable sans la corde installée là, tant c'est humide et glissant ! Derrière on ne monte plus beaucoup, pas mal de relances, de faux plats qui testent la motivation : elle est là, et je suis presque surpris de constater que les jambes aussi sont encore de la partie ! J'ai fait 75 bornes et je relance : du jamais vu, cette seule sensation me porte. Je fais le yoyo avec un autre gars du 87 et on s'encourage mutuellement pour aller chercher les 14h, mais sans savoir exactement la suite du programme.
A un moment nous retrouvons les filles du 13km, qui déboulent comme des dératés. Si on est content de voir du monde, et tant qu'à faire des demoiselles, se faire déposer par des avions nous plomberait presque… A chaque descente on pense basculer dans la dernière vers Gérardmer, mais à chaque fois un replat, une remontée. "Cette fois c'est la dernière" : on nous fera le coup deux fois : résultat : deux fois planté dans des raidards pas méchant, mais on a trop lâché les chevaux avant pour être efficace. Là où on s'attendait aux 6 derniers kilomètres, il y en avait plutôt 9. Pas grave, une dernière averse pour arroser ça, une dernière vraie descente et nous voilà au bord du lac pour passer l'arche bien arrachée, mais super content et très surpris de mon chrono. 14h18, jamais je n'y aurai cru, et largement dans la première moitié du classement : une première pour moi sur une course de plus de 50km.
Difficile d'estimer le temps "gagné" suite aux modifs de parcours : je ne sais pas ce que ça représentait en kilométrage, mais a priori ce n'est pas fou. Aux dires de l'orga le kilométrage total et le D+ ne changeaient pas, globalement on a surtout évité qq portions techniques trop casse-gueule. Pour avoir une petite idée : la course se gagnait en 10h02 et 9h30 ces deux dernièese années, vs 9h06 cette année.
Au final que du positif : le parcours est top, technique, varié, les amateurs de courses costauds sont servis. Le balisage est irréprochable, les bénévoles au top, les ravitos juste comme il faut (pas besoin de 50 trucs non plus). Les pieds dans le lac pour le décrassage, une douche chaude, un bon repas, une bière : des petits plaisirs décuplés quand on a crapahuté toute la journée.
PS: et désolé pour la qualité des photos... c'est ça quand on au téléphone moisi (mais qui téléphone, c'est déjà pas mal...)
9 commentaires
Commentaire de Greg136 posté le 23-06-2016 à 22:43:13
Joli récit et superbe performance. Ca à l'air tellement facile en te lisant.
Pas de sentier des petites roches cette année? Dans tous les cas avec un chrono pareil tu vas trouver ça facile la CCC 😃
Commentaire de MatthieuChanv posté le 24-06-2016 à 08:58:00
En effet, pas de sentier des roches : quelques sections parmi le plus techniques ont été zappées en raison des fortes pluies des jours précédents. Si le kilométrage et le D+ étaient identiques, la course était de fait un, peu plus rapide (de tête ça se gagne en 9h10 cette année, contre 10h00 et 9h30 les deux années précédentes).
Et effectivement l'objectif CCC qui était globalement de terminer pourrait être revu à la hausse, enfin à la baisse, enfin on se comprend quoi… :-)
Commentaire de Arclusaz posté le 24-06-2016 à 08:47:20
Faire 14h18 dans ce coin tant marqué par les combats, ne me dit pas que tu n'as pas fait exprès !!!!
Bonne récup.... ( à SO mais...Dessus ou Dessous ?)
Commentaire de MatthieuChanv posté le 24-06-2016 à 09:00:06
J'y ai pensé en arrivant ! Mais non, non, non, je n'ai pas fait exprès !
Et pour SO, les deux communes ont fusionnées ! Officiellement il n'y a plus de "dessous" et de "dessus". Même si pour moi ce sera toujours "dessus", mais il faudra attendre juillet pour ça !
Commentaire de arnauddetroyes posté le 24-06-2016 à 21:43:19
merci pour ton cr et bravo pour ton super temps Dommage de ne pas t avoir vu sur le parcours ,avais tu un signe kikou?
Commentaire de MatthieuChanv posté le 26-06-2016 à 12:28:03
Merci ! Et, non, je n'avais pas de signe de reconnaissance, il va falloir que je remédie à ça d'ici la CCC :-)
Commentaire de randoaski posté le 26-06-2016 à 11:06:57
Content que tu ai apprécié le parcours de repli.
Des retours que j'ai le parcours sort finalement aux alentours de 85km pour 4400 D+.
L'intégrale réelle fait 88 pour 4900 avec du très technique. La version de l'année dernière fait 88 pour 4700 avec LE bout technique en moins qui n'est faisable que par temps vraiment sec.
L'intégrale de l'année prochaine devrait faire 87 pour 4900 voire 5000.
En tout cas: bravo pour ta course et ton récit et bon courage pour la suite de ta saison.
Commentaire de MatthieuChanv posté le 26-06-2016 à 12:30:02
Bravo à vous tous surtout pour cette très belle course, j'y reviendrai, c'est certains, pour le parcours intégral tant qu'à faire !
Commentaire de Shoto posté le 23-01-2017 à 18:42:48
Sympa le récit. Bravo pour la course. Et merci pour l'humour :-)
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