L'auteur : Sylvtrail06
La course : Courmayeur - Champex - Chamonix
Date : 28/8/2015
Lieu : Courmayeur (Italie)
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Distance : 101km
Objectif : Terminer
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Date : 28/8/2015
Lieu : Courmayeur (Italie)
Distance : 101km 6100m D+
Objectif : Terminer
Mon premier ultra....CCC 101 km 6100 D + ....Il parait que les premières fois font toujours mal....
En amuse bouche...
Et voila, j'y suis, au temple, au cœur, à la mecque du trail, depuis le temps que je regarde des vidéos de ces courses mythiques, j'en fais désormais parti !
Après 2 années de pratiques ou j'ai progressivement allongé les distances et 3 petits points gagnés grâce à la saintetlyon et au trail Salomon de serre chevalier j'ai la chance d'avoir mon dossard après un tirage au sort favorable.
Ma préparation fût insuffisante pour sûr mais surtout perturbée par une entorse à la cheville fin Mai qui ne m'empêcha pas une semaine après et le pied encore meurtri de faire l'intégralité du GR20 en rando sur 6 jours. ( Point fort de ma prépa pour la CCC ).
Et voici l'entrée...
28 Aout 4h25
Mon réveil sonne... bon la réalité c'est que je l’ai éteint avant étant donné que j'ai vu défiler toutes les heures de cette satanée nuit... fort de cette nuit ... blanche.... je me dirige à Chamonix prendre la toute première navette pour Courmayeur.
Hop hop tout le monde dans le bus, les coureurs sont concentrés et également beaucoup plus âgés que moi, il est vrai que la moyenne d'âge de la course est de 42 ans , avec mes 28 bougies je fais office d'ado prépubère...
Bref j'arrive enfin à obtenir mon dossard après un contrôle pointu de mon équipement et me range gentiment à la fin du premier ( sur 3 ) SAS de départ.
Le plat de résistance ( copieux)...
9h00 : Courmayeur (0km):
Le départ est donné sous l'hymne traditionnel de l'UTMB à savoir Conquest of paradise, la joie et l'euphorie laisse rapidement place à la peur, dans quoi je me suis embarqué encore...
Je suis étonné de voir que nous nous mettons à trottiner de suite; c'est un réel plaisir !
Après un bref passage dans les ruelles de cette jolie petite ville d'Italie et poussés par les cloches nous attaquons la première grosse difficulté de la journée à savoir :
L’ ascension de la tête de la tronche sois 10,4km pour 1460m de D+.
A mon humble niveau l'objectif bien sûr est d'être finisher, mais comme je suis incorrigible j'ai malgré tout prévu un petit road book avec l'idée illusoire, saugrenue, utopique...bref de viser les 20h de course.
Après un début de montée sur la route nous attaquons un très joli sentier forestier, nous sommes cul à cul mais le rythme me convient tout à fait, j'ai la chance d'être parti dans la première vague et les bouchons je ne les subis pas trop. La forêt laisse progressivement place à l'alpage et la vue sur le massif du Mont Blanc me donne le sourire, ma Go pro ne refroidit pas .
11h18 : La tête de la tronche ( 10,4km) ---> 482emes 2h18 de course
Le sommet est franchi sans mal je suis même relativement frais et j'ai 12min d'avance sur le programme.
Nous descendons sur un magnifique single avec toujours une vue dégagée sur ce joli massif, mon dieu que ça fait du bien de cavaler un peu... je double quelques coureurs par-ci par-là mais reste très prudent car je sais que mais cuisses n'aiment pas trop ça ( et je ne vais pas être déçu).
11h49 Refuge Bertone ( 14,7km) --- > 423émes 2h49 de course
Arrêt express je remplis juste ma gourde d'appoint je n'ai quasiment même pas bu encore dans le camelback. Les voyants sont au vert j'ai 11min d'avance et fonce ( façon de parler ) au refuge bonati. J'ai de bonnes sensations mais je sens finalement que j'ai laissé quelques plumes dans la première montée et mes jambes semblent lourdes. Est-ce le départ un poil rapide ? ou la descente vers Bertone ? bref...
12h53 Refuge Bonati (22,1km) --- > 445émes 3h53 de course
Bon c'est officiel cela fait à peine moins de 4h00 de course et j'ai déjà les cuisses en feu, vous savez ( ou pas peut-être ) cette sensation que la cuisse se raidit et peut à tous moment déclencher une crampe. Ayant 13min d'avance sur le planning je m'accorde une pause de 10min histoire de m'étirer un peu les quadri, manger un bout et surtout ma petite récompense ... le verre de Coca.
Pour le moment malgré ce mal qui sommeille en moi je suis ravi de voir que je suis plutôt régulier niveau horaires et que je prends beaucoup de plaisir à être ici parmi ces chanceux de CCCistes.
Après une brève montée, la descente vers Arnuva pointe le bout de son nez et me permet par la même de confirmer mon mal de cuisse, j'arrive à courir bien sûr mais je commence tout doucettement à serrer les dents et surtout je dois de temps en temps m'étirer pour éviter la crampe.
L'ambiance à l'approche de chaque ravito est extraordinaire, les applaudissements, les gens qui t'encouragent par ton prénom ( écrit sur le dossard hein) bref du pur plaisir et c'est dans cette ambiance que j'arrive au ravito.
13h50 Refuge Arnuva ( 27,3km ) --- > 4h45 de course
Ouch ! ça fait du bien quand ça s'arrête comme dirait l'autre ! La descente m'a bien éprouvé et je m'accorde de nouveau une belle petite pause, histoire de rassembler un peu de courage avant d'affronter le Grand col Ferret et sa montée de 4km pour environ 900m de D+.
L'ambiance entre les coureurs et pour le moment calme, peu d'échange en se début de course, la concentration et les nombreux pays représentés en sont pour quelques chose je pense. Pour ma part je m'en contrefiche, je ne suis pas ici pour tailler le bout de gras.
J'arrive au sommet à la 502eme place avec 7 petites minutes de retard sur mon plan, l'arrêt à Arnuva sans doute, car dans les montées je me sens bien, les bâtons me donnent un bon rythme et personne ne me double.
Je ne projette pour le moment qu'à Champex ( la mi course environ) en me disant que la CCC est finalement que l'addition de deux courses de 50 bornes.... un peu réducteur j'en conviens :).
16h25 Refuge La Fouly (41,5km) --- > 476emes 7h25 de course
Bon ben voila, le joli ( qui a dit ça ??) sourire que j'affiché tout au long de la course pour le moment laisse progressivement la place à une grimace de douleur... on est à moins de la moitié de la course et à seulement 42km je dois me contraindre à marcher dans les plats et les descentes ou à trottiner que de temps en temps... Je ne suis pas fatigué, je suis toujours aussi motivé seules ces satanés crampes me gâchent le ci joli tableau. Je ne suis pas plus surpris que ça, je suis un abonné de ce genre de problèmes, j'en rencontre même sur des trail de 30km parfois donc bon...
Je m'hydrate bien , le problème je pense étant un savant mélange de fatigue ( due à la nuit blanche de la veille ) , de stress post course et aussi d'un manque de prépa physique centrée sur les quadri je pense .
Loin de me morfondre, je profite de ma vitesse de tortue pour profiter du somptueux paysage qui s'offre à moi en entrant dans les contrées helvétiques. Les petits hameaux sont adorables ainsi que la population qui nous accueille. De nombreux ravitos sauvages sont mis à disposition par les locaux et comme je ne suis plus à quelques minutes près je m'y arrête bien volontiers.
J'ai l'espoir, un peu fou je vous l'accorde de me dire qu'à Champex une nouvelle course commencera et mes crampes disparaitront peut être .... hum ...
19h02 Refuge de Champex ( 55,7km) --- > 521emes : 10h02 de course
Nous y voila le premier cap de cette course est passé, je suis fatigué musculairement parlant comme après une course difficile ou je me dis d'habitude: " heureusement que c'est fini". Sauf qu'aujourd'hui c'est loin d'être le cas... je ne suis pas démoralisé malgré tous.
10h pour faire 56km ce n'est pas dégueu et j'ai même que 6 min de retard sur le planning. Je prends la décision de faire par contre une longue pause 30min pour me restaurer. J'enchaine sans aucune parcimonie les soupes et autres pâtes bolognaise, un véritable festin qui fais du bien au moral. il est près de 19h20, je décide toujours dans un souci de moral de me changer de la tête au pied et de troquer ma tenue légère, ma casquette et mes lunette de soleil pour une tenue plus chaude et ma frontale. Je m'accorde même une petite séance d'étirement des quadri en me disant que ça ira certainement mieux grâce à cela.
Je repars, donc en marchant bien sûr en ayant en tête les 3 sommets successifs qui m'attendent dans cette 2eme partie de course. Direction la Giete et ses 5km pour 900m de D+
22h05 La Giète (66,8km) --- > 533eme 13h05 de course :
Je me surprends même à prendre de nouveau du plaisir dans cette course, la fraîcheur de la nuit et la pleine lune me donne le sourire et malgré la difficulté de la côte je reste au contact de mes concurrents. Seul bémol en perspective la terrible descente vers Trient qui sera un véritable chemin de croix pour mes gambettes et moi...
23h04 Refuge de Trient (71,6km) --- > 554eme 14h04 de course
Pffiouuu mon dieu que c'est dur...cela fait maintenant une bonne trentaine de kilomètres que je suis en mode rando active sans pouvoir courir comme je le souhaite, je boite désormais beaucoup et la fatigue accompagnée d'une certaine lassitude se fait de plus en plus sentir...
L'idée de devoir me taper encore deux cols aussi durs voir plus que celui là ne m'enchante guère voir même me ruine le moral. Affalé sur une table, la tête toute proche de rencontrer mon bol de soupe, je craque et verse quelques larmes d'épuisement... je n'ai jamais ressenti une telle accumulation d'émotions...
Je décide d'aller visiter la tente médicale afin de me faire masser les cuissos car à l'heure qu'il est j'ai déjà du mal à traverser le ravito en marchant alors imaginez deux cols et leurs descentes...
Les kinés me demandent si je souhaite continuer la course, après 0,5s de réflexion je leur dis oui, en ayant la curieuse impression de signer mon arrêt de mort.
Je repars de la tente toujours boiteux mais en me disant que ca sera peut être possible et alors que je repars, je bloque sur le panneau marqué : " dépose de dossard", pour la première fois j'‘hésite à abandonner. ca serais légitime, je n'arrive plus à courir je boite, j'ai jamais connu un seuil de douleur aussi important et je pense avec humilité que beaucoup auraient lâché à ma place. Mais je décide de repartir ... en moonwalk ( façon de parler).
Allez je me motive direction le col de Catogne 5km pour 859m D+ ( c'est le tarif on dirait).
En me disant que si j'arrive a Vallorcine je serais sauvé car impossible d'abandonner aussi près du but.
01h20 Catogne (77km) --- > 611eme 16h20 de course
Mon objectif des 20h est oublié depuis longtemps cela va sans dire avec en tout 1h30 de retard au sommet de Catogne sur le plan initial. La descente sur Vallorcine et longue et sinueuse pour un canard boiteux comme moi. Mes bâtons sont mes plus fidèles alliés et je me fais doubler par des personnes qui me semblent encore bien fraîches par rapport à moi...
02h37 Vallorcines ( 82km) --- > 658eme 17h37 de course
Nous y sommes, la dernière ligne droite, ca sent bon, j'ai mal comme jamais j'ai eu mal, mais je peux plus reculer, les barrières horaires sont loin et peu importe le temps que cela prendra je finirais cette course. Moins de 30min de pause, 2 soupes de vermicelles , saucisson fromage et coca hop! hop! hop! il faut repartir et ne pas s'endormir. Je profite du retour en France pour écrire aux proches ainsi qu'à la copine et rassembler du courage pour pouvoir affronter le reste de cette course.
Musique sur les oreilles et fleur au fusil je repars vers un nom de col qui fait frémir... La tête au vent une petite bosse de 5km pour 867m de D+
( pour changer).
Une de mes images marquante parmi tant d'autres sera certainement ce dédale de frontales s'élevant jusqu'a la lune au pied de tête au vent. Impressionnant, terrifiant, saisissant, tous les superlatifs en "ant" en fait ...
Incroyable mais vraie, cette montée se passe très bien pour moi, alors que certains agonisent sur le coté ( façon de parler) je me sens bien et reprends même quelques places... suis-je donc un grimpeur ? ma prépa au GR20 m’a s'en doute bien aidé 170km pour 13 000m de D+ en 6j sa aide.
05h23 Tête au vent (90km) --- > 659eme 20h37 de course
Ca y est c'est la bascule psychologique il reste 11km, d'habitude je me dirai que c'est une formalité en plus de la descente mais bon justement depuis le début les descentes c'est ce que je redoute le plus ... donc ma concentration est au maximum !
Il ne reste plus qu'un petit ravito et après on aura la vue sur Chamonix .
On est désormais un petit groupe à descendre vers ce dernier point, on peste contre cette fin interminable et je souffle et souffre à chaque marche que je franchies.
06h21 La Flegere ( 93,3km) --- > 668eme 21h21 de course
Mais ... mais ... c'est Chamonix en bas, et oui plus que 8km et j'y serais, j'ai hâte tellement hâte que ça se finisse.
Comme après un séjour à Lourde je réussis à trottiner dans les descentes cela me fait tout drôle, après 40km de randonnée :).
Je profite donc de cette chance et fonce tête baissée ( à 6km/h) vers le Saint Graal.
Je fonce tellement que l'heure de rendez vous que j'ai donnée pour m'accueillir à l'arrivée s'en trouve modifiée... moi qui pensais mettre 2h00 pour les 8 derniers km je mettrai beaucoup moins occasionnant un petit couac niveau retrouvaille.
Je sens l'émotion monter progressivement et les douleurs presque ancrées en moi à part entière s'estompent presque par magie.
Chamonix et ses ruelles sont en vue!
Revoir la civilisation après avoir été perdu dans la nature fait du bien, il est relativement tôt mais des gens sont déjà la pour nous applaudirent. Je passe sous l'arche du dernier km et comme possédé je me mets à courir comme jamais je n'ai couru durant toute cette course. Les différents récits de course disaient donc vrai : " Chamonix donne des ailes ".
Je sors ma Go Pro et immortalise se moment extraordinaire des 100 derniers mètres rythmés par les cloches et le bruit de la foule. Je cours de plus en plus vite et finis même en sprint comme si je n'avais jamais eu aucune douleur.
Je franchis enfin cette fameuse ligne d'arrivée sous les lumières des photographes.
07h39 Chamonix (101km) 673eme aprés 22h38 de course
Un petit dessert...
Ce n'est donc pas un rêve je suis bien un finisher de la CCC !
Et marque par la même occasion mon premier pas dans le monde de l'ultra trail !
A peine cette ligne franchie que je me remets à boiter comme à mon habitude, la magie est de courte durée et je file du coup d'un pas boitillant chercher la fameuse polaire finisher.
Vous voulez un digestif...
Petit mot pour clôturer ce récit déjà trop long mais tellement court pour narrer cette aventure. Il est vrai que la part de douleurs, souffrance, lassitude a pris une part importante ( peut-être trop) dans cette course. Mais la joie, la fierté et la satisfaction d'avoir réussi ce pari fou, prend finalement le dessus.
Je me suis dit bon nombre de fois que plus jamais je ne ferais une telle distance et à l'heure ou je vous écris au chaud derrière mon PC, je potasse l'éventualité de revenir ici même à Chamonix pour peut être une bien plus longue aventure....
7 commentaires
Commentaire de Bérénice posté le 03-09-2015 à 12:05:16
Super ton récit ! Bon suspense où on se demande tout le temps si tu vas finir la course ou pas et dans quel état !!! Un grand bravo pour ton courage et vu ton "jeune" âge ça promet pour l'avenir... Bonne continuation.
Commentaire de Runphil60 posté le 03-09-2015 à 12:43:40
Il y a effectivement du suspens ..... Merci pour ce
Commentaire de Runphil60 posté le 03-09-2015 à 12:46:11
Je finis mon commentaire !
Je disais donc merci pour ce partage, on sent bien ta dure course!
J'ai une tite question sur ton gr20, comment l'as tu fait avec quel chargement. Et les souvenirs ?
Bonne récup
Commentaire de Sylvtrail06 posté le 03-09-2015 à 13:24:15
Merci à vous ! De magnifique souvenirs avec la CCC cela reste mes 2 aventures sportives les plus marquantes. je suis partis avec un sac de 20L + un pack avant de 4L. j'etais en autonomie complete niveau nouriture, on dormais juste dans les refuges, mon sac faisais 13,5kg avec 2,25L d'eau sur moi. Si tu as des questions plus précises je peux te repondre via facebook : dalmasso sylvain .
Commentaire de PetitManseng posté le 03-09-2015 à 13:37:35
Merci pour ton récit et bravo pour ta course! Je pense que nos trajectoires ont du se croiser à deux reprises. J'avais un buff Kikourou sur la tête. D'abord au refuge Bonatti (j'étais 437ème à ce moment mais vraiment pas bien du tout à cet instant de la course). Je pense que je t'ai redoublé entre la Fouly et Champex au vue de nos classements respectifs à ces deux endroits. Je suis en tout cas impressionné que tu aies terminé une telle course après seulement deux ans de pratique. Tu as un gros potential pour l'avenir.
Commentaire de Sylvtrail06 posté le 03-09-2015 à 14:53:28
Ah ben oui on à certainement du se croier mais vue ma 2eme partie de course assez compliqué tu n'a pas eu de mal à me doubler sur le plat ou en descentes. en tous cas merci pour tes compliments et bravo à toi aussi pour ce super souvenir sportif !
Commentaire de Edo posté le 04-09-2015 à 10:44:42
Bravo!
Tu as su vivre ton reve
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