Retour à Guerlédan, au cœur de la Bretagne en ce premier week-end de juin qui prend une allure estivale. Cela me change d’il y a trois ans, lors du Défi Vert, où ce n’était que boue et pluie ! Oui, je sais, j’y suis habitué ! Bref, avec les amis, nous arrivons juste à 16 h pour assister, ce samedi, au départ du 20 km. Le peloton est impressionnant. Cela fait chaud au cœur de voir un tel nombre de concurrents au départ d’un trail qui ne se résume pas, loin de là, à une simple ballade en forêt. En vérité, la Bretagne a su prendre le virage de la course à pied en passant de la route au chemin; les nombreux trails et les pelotons fournis en sont la preuve. Cependant, cela s’est fait avec des moyens financiers. A l’instar du Conseil Général de l’Aveyron, exemplaire dans ce domaine, celui des Côtes d’Armor soutient la course à pied et le trail en particulier. Et oui, comme sport de masse, il n’y a pas que le foot ! On est loin de mon département qui ne soutient que les chevaux, enfin ceux qui sont dessus, et les aérostats !
Bref, revenons à la course, je suis impressionné par le site de l’abbaye du Bon-Secours envahie par une multitude d’activités pour tous. C’est une vraie kermesse sportive ! Quelle ambiance. Bientôt 17h et voici les coureurs qui entament seulement la seconde partie du parcours. La chaleur semble vraiment incommoder les coureurs. Et demain la météo est identique ! Eh bien, nous voilà prévenus !
Dimanche, quelques minutes avant le départ à 9 h, les coureurs se rassemblent derrière l’arche gonflable. Je suis tendu comme d’habitude - et je n’ai pratiquement pas dormi de la nuit, comme d’habitude - et parle peu avec mes amis. Thierry et Allain se placent dans les premières lignes. Avec les Joël, je préfère rester nettement en arrière ! Un coup de corne et les 500 coureurs s’élancent. Nous empruntons une petite route qui s’élève doucement. Je me sens bien. Je m’arrête un instant pour vider ma vessie puis je rejoins les copains. Enfin, nous obliquons à gauche pour prendre un chemin étroit. Le peloton s’étire en file indienne sur cette piste qui serpente dans les genêts pour gagner le plateau qui domine la vallée où coule le canal de Nantes à Brest. Tout de suite, c’est l’émotion: la vue est magnifique sur le lac de Guerlédan. Le plateau est bordé par des schistes que le pendage dresse, menaçants, vers le ciel. Pas question de doubler sur ce sentier étroit encombré de rochers et de racines. Dans les passages délicats où il faut parfois mettre les mains, cela bouchonne. Tant pis, rien ne presse, nous sommes en début de parcours ! Je m’émerveille toujours de voir cette file colorée s’étirer sur ce sentier étroit, en bordure du plateau. Mais je commence à trouver le temps long derrière un groupe. Euh, vraiment, cela n’avance pas. Je joue des coudes et réussis à m’en extraire. Je prends mon rythme. Fin du plateau, nous plongeons vers un vallon humide. Mais vallon si beau soit-il a deux versants ! Il faut en escalader l’autre versant ! Les organisateurs jugeant ce vallon vraiment beau, nous y font retourner ensuite! Et nous regrimpons ensuite sur le plateau pour emprunter le sentier de tout à l’heure dans l’autre sens. Le rythme commence à s’installer mais il faut faire attention tant aux coureurs qu’aux pierres. Bingo ! Dans une course descente, me voilà parti tête la première dans les rochers, je roule sur l’épaule. Je me relève. Des coureurs s’enquièrent de mon état. C’est ok. J’ai les genoux couronnés et le coude droit également. Le sang sèche rapidement avec la poussière du chemin. Je raccroche mon dossard à mon short où il me sera le moins susceptible de le perdre. Après la descente du plateau et les gorges du Daoulas, le chemin devient plus sage et plus large; c’est la campagne. Nous traversons la nationale et continuons la course parmi les champs.
Soudain, c’est le bois, et tout de suite une pente, raide, vers le lac. Enfin, nous y voilà ! Mais, je n’ai pas le temps de m’émerveiller, la piste est ahurissante : ça monte, ça descend, c’est plein de pierres, de rochers, de racines !! Je comprends enfin pourquoi le profil de la course ressemble à un trace de sismographe lors d’un tremblement de terre ! Parfois, le sentier s’assagit et je foule un tapis moelleux de terre de bruyère. Le répit est bref. Là, ce sont des rochers qu’il faut escalader ! Mais quelle vue sur le lac !
Je m’alimente très régulièrement, essentiellement avec ma boisson énergétique et quelques barres. Le premier ravitaillement arrive. Je prends rapidement un verre de coca et un morceau de banane. Je repars. Je me sens bien. Je trouve mon allure de course correcte. Je double beaucoup de concurrents. Après s’être écartée un moment du lac, la piste nous y reconduit et, de nouveau, il faut être attentif à ses pièges. Tout à coup, à quelques dizaines de mètres devant moi, à travers les arbres, j’aperçois un maillot familier, jaune barré de noir. C’est celui d’Allain, mon initiateur au trail. Nous échangeons quelques mots. Je continue. Bientôt, la base nautique de Beau-Rivage est en vue. Les spectateurs encouragent les coureurs. Il est encore tôt dans la matinée mais la chaleur s’installe ! Beaucoup de promeneurs déambulent sur le sentier en bord de lac. Quelle incongruité que ces coureurs bariolés au milieu des flâneurs ! Nous quittons le lac pour traverser le bois de Caure. A aucun moment, il n’y a d’ambiguïté sur le parcours qui est parfaitement signalé par de la rue-balise et un fléchage orange au sol.
Dans une ligne droite, j’aperçois Thierry. Comme à son habitude, il est parti vite. Mais là, nous sommes aux environs du vingtième kilomètre, je ne pensais pas le rattraper si tôt. Thierry est un bon traileur mais sur des distances courtes, 20 à 30 km maxi. J’arrive à sa hauteur. Il est en pleine détresse. J’en suis étonné. Il me dit souffrir énormément de la chaleur qui, il est vrai, devient de plus en plus forte. Je lui adresse des encouragements, puis m’éloigne de lui. Un jour, c’est lui, un jour, c’est moi ! Depuis quelques temps, je guettais l’orientation du parcours. Enfin, nous piquons vers le sud, cela veut dire que nous ne sommes pas loin du mitan. L’aménagement du lac est vraiment parfait: j’emprunte une longue digue en bois afin d’éviter une partie marécageuse où des grenouilles m’encouragent de leurs croassements énergiques. J’aperçois le village de vacances où nous avons donné rendez-vous à nos fidèles groupies. Elles sont bien là. Sourires. Photos. J’arrive au deuxième ravitaillement, situé au trentième kilomètre. De nouveau, je bois un coca, chaud, horreur ! J’aurais du me contenter d’eau ! Le parcours contourne le barrage et maintenant, je file vers l’Ouest ! Je suis sur le GR341. Le chemin est beaucoup moins accidenté que celui de l’autre rive. Cependant, la fatigue commence à se faire sentir. Depuis quelques temps, je cours avec un petit groupe dont un coureur au short bretonnant et la deuxième féminine. Là, il va falloir gérer le retour. L’allure est moins fringante. Je continue à bien m’alimenter. Au troisième ravitaillement, prudent, je ne consomme que de l’eau et un morceau de banane. Après la butte de Malvran, la piste replonge vers le lac. Les difficultés sont identiques à celles de l’autre rive, mais, la fatigue étant là, elles sont plus douloureuses à passer. Je commence à être inquiet, car je sens des amorces de crampes aux adducteurs et derrière les cuisses ! Bien la peine que je consomme un anti-crampe à l’arnica ! Mes pastilles de sel auraient mieux fait l’affaire, qui sait ? Je croise un couple qui m’annonce plus que trois kilomètres. Je leur dis qu’ils se trompent. Ayant bien mémorisé le parcours sur la carte, je sais à peu près où je suis. Il reste encore six ou sept kilomètres. La féminine m’a lâché mais le breton est juste devant moi. Nous continuons ensemble. J’arrive aux Forges de Salles. Le site est impressionnant. Un petit malin a placé un panonceau à l’entrée de l’allée signalant la présence d’un radar !! Euh, question vitesse, ce n’est plus ça ! Je dois gérer mes crampes. Il ne reste qu’à gravir une longue côte dans le bois. J’y vais à petits pas pour ne pas bloquer mes muscles. Un coureur redescend, sans dossard, s’agit-il d’un qui soit arrivé et repart à la rencontre d’un compagnon ? Il m’annonce quelques minutes de descentes avant l’arrivée. Enfin cette descente et, signe qui ne trompe pas, j’entends le haut-parleur qui annonce les arrivées.
Soudain, à mi-pente, une crampe me cloue sur place. Je respire et essaie de me décontracter. Elle passe ! Je repars. C’est la première fois que je subis des crampes. Enfin, j’arrive sur l’aire du Bon-Repos. La foule est dense. Il nous font remonter le long du canal. Je cours sur une jambe. Les gens m’encouragent. Sur le pont, un me lance « Vas-y l’ancien ! » L’autre rive du canal. Puis j’oblique à gauche dans le pré où je retrouve mes groupies qui m’acclament. Dernier virage, mais, juste derrière moi, un coureur arrive sur mes talons. Non, je sprinte. Sans les crampes !!! Je franchis la ligne d’arrivée devant lui, c’était un coureur de Lisieux dont j’avais fait la connaissance la veille. Ce sprint m’a un peu gâché mon arrivée. Je n’ai pas pu vraiment la déguster. Tant pis. Mon épouse vient à ma rencontre. Voilà, le bonheur d’arriver. Je me rends compte qu’il fait vraiment chaud. Je me sens pas bien. Il me faut de longues minutes pour récupérer. Je vais voir mon classement. Je suis surpris : 83e et 9e VH2. Pas mal, finalement.
Guerlédan est vraiment un beau trail. Ce n’est pas encore la Suisse. Patience ! Le mois prochain me verra toujours en Bretagne, le long du golfe du Morbihan.
Mustang
1 commentaire
Commentaire de troll posté le 07-06-2006 à 13:19:00
super récit et vivent les V2 (j'en ferai bientôt partie !!! lol) et la bretagne, dommage que ce soit si éloigné de la provence.
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