L'auteur : rico69
La course : Saintélyon
Date : 5/12/2010
Lieu : St étienne (Loire)
Affichage : 3370 vues
Distance : 69km
Objectif : Terminer
Partager : Tweet
Par où commencer... pas facile y'a tellement de choses à dire.
Bon commençons par un petit retour en arrière... Nous sommes début 2010, l'année de mes 40ans. Je me dis qu'une sorte de gros contrôle technique s'impose, histoire de voir si j'ai bien l'âge de mes artères. Le principe est simple, je me lance 3 défis et si ça passe, c'est bon pour le service pour 10ans. Les deux premiers défis, c'est du réchauffé si je peux dire: 1 saut en élastique (déjà fait en 1990), un Marathon (Déjà fait en 1999). Le dernier est évidemment le plus costaud c'est finir la Saintélyon. Et oui autant choisir un truc de ouf de ma nouvelle région.Et nous voilà le 3 octobre 2010, le jour du marathon de Lyon (mon deuxième défi). J'ai terminé un peu cuit et je me dis là, il va falloir vraiment en mettre un coup parce que tu n'as que deux mois pour te préparer pour LE défi. J'attaque donc mon petit plan d'entrainement avec une seule obsession : faire du dénivelé et travailler la puissance un peu plus que l'endurance. Je vous passe les détails. Au final aucune blessure une petite fatigue sur la fin et 455km parcouru pour 8000m de dénivelé positif.Et puis vient le Mardi 30 Novembre et la neige, beaucoup de neige, 25cm. Le jeudi 2, le site de la Saintélyon prévient, « pas question d'annuler, il y a de la neige sur le parcourt (entre 25 et 40cm) et il fera froid alors équipez vous en conséquence ». Alors je m'équipe, guêtres, sous-gants et chaines pour chaussures, je vois déjà des sourires, j'en reparlerai...La météo ne s'améliore pas, il fait froid, c'est sur va y'avoir de la neige. Adieu le chrono, adieu les objectifs de Finisher de bronze (- de 8h30) que je commençais à envisager en fin de préparation. Maintenant l'objectif devient il faut finir! Je ne prend donc même pas la peine de calculer mes temps de passage ni rien. A un moment, j'hésite même à prendre une montre...Nous sommes le samedi 4 décembre. Pour éviter le stress de dernière minute, je demande à Sophie (ma femme…) de m'emmener tôt. Nous arrivons donc à Saint Etienne vers 18h. On trouve une place devant l'entrée du parc expo. Un petit ¼ d'heure pour récupérer mon dossard et puis je sais que l'attente va commencer. Surtout ne pas s'énerver ou s'agiter. Je me change de suite histoire de s'assurer que je n'ai rien oublié (peu probable j'ai vérifié 3 fois mon sac avant de partir ). Et puis je « renvoie » Sophie à la maison je sais que c'est aussi stressant pour elle. Je me trouve un endroit dans le Hall B pour m'installer dans mon duvet. Un petit tour à la pasta party et puis retour au duvet. Le hall se remplit, pas question de dormir mais j'arrive à ne pas trop penser à ce qui m'attend. 23H45 en route pour la ligne de départ, ça caille dehors! Minuit Départ! 4 min après je passe la ligne et c'est parti pour 8km de bitume (sans neige ni verglas!) il fait -8°C. La fin des 8km ce fait, en montée, en marchant parce que tout le monde marche « partir doucement et ralentir tout de suite » est ma devise. On quitte la route pour les sentiers et la neige est bien là en quantité. « Ca monte donc je marche » (autre devise appliquée à la lettre!). Les appuis deviennent fuyant ça patine, il est temps de sortir l'arme absolue de cette Saintélyon, les chaines Yaktrax. 1 min pour les mettre et je retrouve mes appuis et la confiance. J'en profite pour regarder derrière moi et admirer le long serpentin fluorescent former par les frontales sur la neige. C'est vraiment trop chouette. Grâce aux chaines, sur les parties moins pentues, j'arrive à courir. Premier raidillon en descente et c'est les premières chutes de concurrents. Avant le premier ravito je double un gars qui a déjà la cheville en vrac, il est dans sa couverture de survie et essaye de se lever, aider par d'autres concurrents. D'autres chutes suivront. Pour ma part je n'en ferai aucune sur les 68km! Les descentes sont précédées de bouchons de concurrents pétrifiés par le sol glissant. J'arrive à passer en me faufilant, les chaines me donnent un avantage considérable, même pas peur!Arrivé au Premier ravito à Saint Christo (16km) en 2h04, je me dis que finalement je ne suis pas si lent que ça! J'avais initialement prévu de ne pas m'arrêter mais finalement le chrono n'étant plus d'actualité je prend un coca, un thé, et je repars.La suite est dantesque, il y a de plus en plus de neige nous sommes obligés de progresser les uns derrière les autres. Dépasser nécessite un passage dans 30cm de poudreuse, trop d'énergie pour rien. Je profite simplement des quelques descentes pour courir. Le rativo de Moreau (22km, 3h05) initialement supprimé a été rétabli à la hâte compte tenu des conditions. Re-coca, Re-thé. Il fait vraiment froid pas de thermomètre sur moi mais nous sommes probablement autour de -10°C -12°C. Je cherche un robinet pour faire le niveau du Camelbak (je pense qu'il me reste assez pour aller au prochain ravito mais on ne sait jamais...), un bénévole me dit « plus haut ». Je repars de ravito dans une montée en espérant trouver de l'eau que je ne trouverai pas. En repartant, petit SMS à Sophie, je sens le froid, il faut que je me réchauffe rapidement sinon...La couche de neige atteint par endroit 50cm sur le plateau au niveau du point culminant, on ne m'avait pas dit que la saintélyon était un trail blanc!! Nous progressons en file indienne, avant chaque descente c'est le bouchon et je papote avec les autres concurrents. Certain regrette l'ancien temps où il n'y avait que 2000 participants d'autres ralent contre les bâtons (autorisés au dernier moment) d'autres comme moi profitent de ces conditions extrêmes pour admirer les décors. L'arrivée sur le ravito de Sainte Catherine se fait par une belle descente bien raide. Panique à bord pour la majorité des concurrents et bouchons. Nous sommes maintenant carrément arrêtés pendant plusieurs minutes. En haut de la descente je me lance, je zigzag entre les concurrents sur la glace et la neige tassée, j'ai une confiance aveugle dans mes chaines ( et j'ai raison) les autres me prennent sans doute pour un fou mais d'autres possesseurs de chaînes me suivent. J'ai sans doute gagner plusieurs dizaines de places sur quelques centaine de mètres... Ravito de Sainte Catherine (30km 4h02) je suis vraiment pas mal. Je perd pas de temps, les jambesvont et la tête aussi. Les premiers abandons attendent dans les bus. Les relais nous rattrapent et traversent la tente sans s'arrêter (il va falloir cohabiter sur le petit sentier...). Je fais les niveaux d'eau, un verre de coca, un verre de thé, un peu de solide. A la sortie une dame veut arrêter son ami (mari?) tente de l'encourager mais c'est mal partie... je repars. En quelques kms, ma condition physique change. Je commence à ressentir une gène dans la cuisse gauche. Bon sens, je ne suis qu'à la moitié! Allez hop un gel anti-oxydant, une rasade de flotte en espérant que ce n'est que des petites courbatures, qui passeront. Avant d'arriver à St Genou, le 4ièmeRavito il y a la fameuse descente du bois Darfeuille. Comment dire... de dantesque les conditions deviennent dramatiques. La descente c'est transformée en piste de bobsleigh cabossée!! Pour la plus part, la descente ce fait sur les fesses au mieux. Les chutes sont légions. Les chaines au pieds je me lance dans un déboulé (tant pis pour ma cuisse!) sur deux kilomètres je déboule... je pense, à posteriori, que j'ai dû faire peur à plusieurs concurrents qui tentaient de ne rien se casser.A St genoux (34km 5h35 4ième ravito), la gène c'est transformée en douleur... mais le moral est là c'est très supportable. Et puis normalement nous devrions attaquer la portion descendante... La poudreuse c'est transformée en neige tassée ou verglas. Mes chaines me permettent de courir même sur le verglas je suis vraiment en confiance. Je ramasse au passage un concurrent qui tombe lourdement sur l'épaule. Je le relève ça à l'air d'aller. La grande descente, tant attendue, n'est finalement pas si agréable que ça. La douleur à la cuisse a (presque) disparu mais mon genou gauche me fait mal. Je dois enlever et remettre mes chaines assez souvent puisque certaines portions de route ou de chemin sont dégagées. Parfois je les metspour 500m. Courir avec sur le goudron (sans verglas) n'est pas agréable du tout.Autour du 40ième kilomètres je me mets à calculer le temps qui me reste. Je regarde mon Garmin, je suis à 6,7km/h de moyenne et plus de 6h de course. Et là manque de lucidité , 68-40 égale 35?!? j'estime que ma moyenne va nécessairement chuter pour moi il me reste au moins 6h de course soit une arrivée après midi bien tassé!!!! Ca va être long. Je refais mes calculs dans ma tête 35km, 6km/h de moyenne etc.... Le moral en prend un coup, moi qui voulait arriver quand même avant midi c'est raté!! Et puis à peine 5min après je passe le panneau « arrivée 25km » j'interpelle mon voisin « il reste que 25 bornes » « bah oui » je pousse un cri « génial!! ». D'un seul coup Ca va mieux! Soucieu en Jarrest, 5ième rativo 44km, 6h45. C'est dur, les jambes deviennent lourdes, la douleur au genou persiste sans augmenter d'intensité. Coca, thé, chocolat, banane, niveau de camelbak et je repars. Je sais en sortant que j'irais jusqu'au bout plus rien (sauf une blessure grave) ne peut m'empêcher de rallier l'arrivée. La goudron refait son apparition il y a moins de neige; Que du verglas! Je poursuis en alternant trottinage et marche rapide dès que ça monte un peu. C'est dur d'enlever et mettre les chaines il faut plier les genoux. Mais je le fait quand même j'ai vu trop de chutes. J'entre dans Chaponost 54km le jour ce lève, même trottiner devient compliquer mais bon un gel et ça repars. De toute façon, je suis « arrivé », je vais passer la ligne le moral est bon. Dernier Ravito Beaunant 57km 8h48. Il fait grand jour. En plus du traditionnel coca, thé je m'offre un tranche ou deux de fromage. Pas la peine de faire le plein de camelbak il me reste assez pour finir! Petite séance d'étirements très légère, histoire de voir et j'appelle Sophie. Surprise au téléphone elle croit à la blessure. Non tout va bien je t'appelle juste pour te dire que je vais finir et je devrais arrivé entre 10h30 et 11h. 2h pour faire 11 bornes, la honte!!!, mais peu importe je vais finir c'est génial!!Dernière difficulté et pas des moindres, 2,5km de montée avec une première portion à 20%, la fameuse côte de sainte foy. Seul les Relais la montent en courant et encore pas tous. Tout le monde monte en silence un pas après l'autre. La descente n'est plus un soulagement mon genou me faire souffrir. Je m'économise avec des foulés très rasantes. La fin du parcours dans Lyon n'a que peu d'intérêts hormis le retour de glace sur les quais de Saône et du Rhône (il fait 0°C). Je n'ai plus le courage de remettre mes chaines, de doute façon je ne cours plus! Le palais des sports est en vu, l'émotion arrive. « Arrivé 100m » il faut que je passe la ligne en courant allez 75m, 50m je vois Sophie, mes filles, je suis au bord des larmes. J'entre dans la palais des sports, l'arche d'arrivée, le « bip ». Ca y est je suis Finisher de la Saintélyon 2010 en 10h37!!! Ce fut une course vraiment difficile mais magnifique. La neige a ajouté une touche féérique avec les frontales. Paradoxalement, je pense que ces conditions m'ont obligé à ralentir dès le départ ce qui m'a peut être permis de finir. L'ambiance d'une telle course est vraiment spéciale. Il y a de la solidarité entre coureurs. Chacun doit puiser dans son mental pour tenir la distance, 68km c'estvraiment très long.
2 commentaires
Commentaire de Knet posté le 17-01-2012 à 16:01:05
Contrôle technique validé : t'es ok pour les 10 ans à venir avec une course pareille ;)
Commentaire de Arclusaz posté le 17-01-2012 à 22:04:47
bravo pour cette course
et aussi pour le courage d'écrire un CR plus d'un an après !!!
il t'a fallu tout ce temps pour te réchauffer ?
En tout cas, cela aurait été dommage de ne pas l'écrire, merci.
Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.