Récit de la course : L'Ardéchoise 2005, par jobaco

L'auteur : jobaco

La course : L'Ardéchoise

Date : 18/6/2005

Lieu : St Félicien (Ardèche)

Affichage : 4882 vues

Distance : 216km

Matos : Veneto Altec 2+ et Ksyium SSC SL 2004 en 50/12 et 34/23.

Objectif : Faire un temps

Partager :

L’Ardéchoise, c’est avant tout une fête.

L’Ardéchoise, c’est avant tout une fête. La veille, pour rejoindre le départ, Pierre, Thomas, Benoît et moi avions donc le cœur plein d’enthousiasme pour nous rendre à Saint-Félicien.
Les cinq heures de route sont donc passées très vite, d’autant qu’une pose déjeuner à Beaune n’a rien gâché.
Une fois arrivés à Saint-Félicien, on récupère les dossards, on fait un petit tour dans le village des partenaires, pour admirer les machines de rêve, et on rentre à l’hôtel, non sans avoir profité de la pasta party.
Sur le parking, nos amis de Lannemezan, Ludovic et Alain, partent faire un tour de décrassage quand nous nous installons dans les chambres.
La soirée fut courte, mais mémorable : l’arrivée de Ludo a fait l’effet d’un tremblement de terre dans l’hôtel. Quelle rigolade ! Thomas (aka « l’Irlandais ») s’en souviendra !
Bref, avec un numéro pareil on n’allait pas s’ennuyer dans le sas de départ…
Onze heures, au lit. Chaleur étouffante.
Quatre heures quinze. Debout. Au radar, on charge les voitures et on file au départ, trois-quarts d’heure plus loin.
On est pas mal placés (il nous faudra quand même près de 10 minutes pour passer la ligne après 7 heures 30, heure de départ officiel). On s’allonge, on discute, on patiente, on rigole… La pression monte doucement. On attend tous la libération du départ. L’hélico qui plane au dessus de nos têtes donne la chair de poule à Benoît. Pierre se concentre. Alain est le plus calme d’entre nous. Ludo le plus excité. Thomas gère…

Le "groupe" CSCatalan.com

Une dernière barre et hop, on décolle. Les bons mots fusent. Une courte descente, à un train de sénateur, et la route se rétrécit. Bien placés au départ, nous évitons l’embouteillage de l’année dernière.
On réattaque une côte derrière, le col du Buisson. Tout va bien. On est groupés. On s’attend. Ça chahute, ça chambre. Bref, on s’éclate. Les choses vont se corser…
A Nozières (km 20), dans le faux-plat qui précède la descente, Ludo organise un petit groupe. Alain est là pour le maîtriser. Il déborde d’énergie. Pierre a les bonnes jambes aussi. Benoît et Thomas sont en forme. Tout baigne. On enchaîne sur la descente vers Lamastre, assez technique, mais au beau bitume. Les virages se succèdent. Je me cale dans la roue d’Alain qui pilote parfaitement notre petit groupe, quant tout à coup…
Ma roue arrière se dérobe : je pars dans tous les sens, tel Beloki dans le Tour 2003. Je n’ai même pas le temps d’avoir peur, ce qui n’est pas le cas des deux secouristes placés en sortie de virage, qui ont vu 85 kg (vélo compris, hein !) en perdition leur foncer dessus à 40 à l’heure sur la roue avant. Pierre, juste derrière, a vu mon pneu partir en fumée… Bref, la tuile.
Je repars immédiatement, sans avoir mis pied à terre, mais une sensation et un bruit bizarre dans ma roue arrière m’arrêtent quelques mètres plus bas. J’ai cassé deux rayons. Je continue tant bien que mal, et réussis à rentrer sur mes compagnons dans le bout de plat qui suit, après Lamastre (km 30).
La route remonte doucement, et j’en profite pour me renseigner sur l’assistance. On me dit qu’un stand Mavic est à quelques kilomètres en haut de la bosse, à Nonières (km 40). Il faut que ma roue tienne jusque là !
Elle tiendra. Les techniciens Mavic s’affairent dessus pendant une bonne quinzaine de minutes, en gérant en parallèle les flots de demandes diverses (graisse, coup de clé…), le tout dans le flot incessant des cyclos. On se croirait au bord d’une autoroute un jour de départ, mais sans le bruit ni la pollution. Les villageois sont aux anges. Des saluts fusent en réponse à leurs encouragements. Belle ambiance !
Je pourrais repartir, avec deux rayons neufs et une roue qui tourne globalement rond. Tant pis pour le temps perdu : j’aurai eu du mal à m’arrêter au bout de 40 bornes, après plus de 500 km d’autoroute pour venir !
J’ai une idée : retrouver les maillots "blanc i blau" du CSC. On attaque Mézilhac (1.130 m) au Cheylard (km 50), par un long faux plat qui se monte à un gros rythme. Je me retrouve dans un groupe de costaud et on tourne bien. La chaleur commence à monter, mais dans chaque village il suffit de tendre la main pour avoir un verre d’eau (gazeuse ou plate, au choix, s’il vous plaît).
Je trouve même un compatriote du VTT club de Thuir. Pensez donc : les villages de Thuir et de Castelnou, le berceau du CSC sont des frères limitrophes ! Je l’invite, bien entendu, au « KIL’10 » du 3 juillet, le contre-la-montre en côte du club (www.cscatalan.com).
Ensuite, la pente s’accentue à Dornas, et c’est vraiment le plus beau col de la course qu’on emprunte : des à-pic vertigineux dans un paysage sauvage et magnifique. Pour ne rien gâcher, l’hélico tourne au dessus de nos têtes. J’ai l’impression qu’il m’accompagne. Je fais un petit signe, au cas où ils tourneraient la vidéo de l’épreuve…
Le cadre est magnifique et les jambes tournes tranquillement. Je force, ça monte vite, mais sans me mettre trop dans le rouge. Tant est si bien qu’à quelques encablures du sommet, j’aperçois Thomas et Ludo. On est au 73ème km et c’est le premier ravito.

Thomas aux sources de la Loire

Ça fait un bien fou de manger et de remplir ses poches, y-compris d’un bon vieux sandwich au saucisson. Ça fait un bien fou aussi de retrouver des collègues. On se jette ensemble dans la descente. Ludo fonce comme un boulet de canon, nous faisant signe de le suivre. Il faut pourtant s’alimenter, et je reste calme, ma mésaventure encore présente à l’esprit.
A Laviolle (km 80) la pente s’adoucit. Je vide mes poches (sans jeter !) en mangeant les derniers quartiers d’orange.
On attaque une partie très vallonnée, à partir d’Antraigues, où ça remonte immédiatement très fort. Je laisse Ludo et Thomas, qui m’ont appris que Benoît n’était pas très loin devant.
En effet, une côte après, je retrouve mon vieux compagnon. Nous allons, encore un fois, faire un bon bout de chemin ensemble.
C’est à deux qu’on attaque donc la Barricaude (1.232m), peu après le km 100. Je n’en mène pas large dans ce long col où la pente ne se calme que très rarement. Benoît a beau entretenir la conversation, je me mure dans un silence qui ne cache pas un passage à vide évident. C’est dur. Tout s’y met : il fait chaud, les pieds commencent à s’échauffer, la selle aussi… Les kilomètres passent trop lentement à mon goût et les derniers de l’ascension sont un calvaire. Je ne reste en selle que parce que je sais que le ravito est là haut, à Sagnes, au km 123, comme me l’indique ma potence. Benoît m’aide aussi, par sa simple présence, même s’il n’est pas au mieux non plus.
Et le replat arrive ; on se laisse glisser jusqu’au ravito. Je me gave de fruits, goûte le fromage local (recommandé par une charmante bénévole), et m’assied dans l’herbe en sirotant le bouillon que m’a servi, contre les crampes, la secouriste de la croix rouge qui masse Benoît. On ne se refuse tellement rien que Ludo nous rejoint dans une grand éclat de rire.
Nous repartons donc à trois, Ludo, chaud comme une brésilienne, nous enjoint de prendre des relais, mais la courte montée vers le Gerbier de Jonc, point culminant de notre journée (1.416m), le refroidit (temporairement).

Avec Benoît et Ludo.

Je me remets doucement, mais quand Ludo et Benoît se jettent dans la longue descente (du km 130 au km 150), je les laisse prudemment filer.
C’est du reste une descente magnifique. A Arcens (km 145), la pente accentuée se mue en doux faux plat. Je suis malheureusement seul, et j’en garde sous la pédale pour ne pas trop m’user. On lâchera les chevaux plus tard.

L'Ardéchoise, un vrai toboggan

Je passe devant le ravito de St Martin de Valamas, où l’année dernière nous nous étions gavés de fromage, et où nous avions pris notre café, paisible, sur un banc, avec Benoît. O tempora, o mores… disait Cicéron. Pas un regard.
Je rejoins Benoît au pied de la remontée sur Saint-Agrève, au km 160. Ludo, déchaîné, est parti devant, me confie-t-il.
Nous montons un instant avec un fringant sexagénaire qui m’assassine le moral en nous expliquant qu’il fait le 270 km ! Nous devons le laisser partir. Il finira, nous le verrons plus tard, premier de l’Ardéchoise marathon, dans sa catégorie…
Nous continuons de concert jusqu’à ce que la pente se fasse plus forte, et il prend son rythme. Je ne suis pas au mieux non plus. LE calvaire recommence, mais je m’accroche. Je sais qu’en haut, le col de Clavière (1.088m) marquera la bascule vers le final. Là-haut, il restera à peine plus de 45 km, alors je me concentre sur mon coup de pédale, un peu chaotique, en recherchant l’ombre. Les murets sur le bas côté sont parsemés de types à la ramasse, les pieds à l’air et la langue pendante. Je dois résister à l’envie de les rejoindre.
L’Ardéchoise c’est aussi cela : des parcours très nombreux pour un public très divers qui se rejoignent à un moment donné. Alors je côtoie des cyclos en 30-29, ahanant leur peine (je ne suis pas fier non plus), des gars en VTT, des tandems déguisés. C’est vraiment un esprit à part.

Dur.

La bascule me fait du bien : je sais que moralement ça ira de mieux en mieux. Reste à retrouver Ludo. J’avale Rochepaule, peu après le km 180, pour foncer comme un damné sur l’ascension du Buisson (920m) et de ses passages à 15%.
Mon contre-la-montre a commencé.
Je descends très proprement, mais vite, tout en vidant mes dernières cartouches de « potions magiques ». A moi les coups de fouet, cochet !
J’attaque le début du Buisson (700m à 15 %) calé sur ma selle, avec un air de cannibale. Ma roue avant décolle de temps en temps, et je ne desserre les dents que pour sommer, d’une « droite ! » autoritaire, aux cyclos qui me précèdent, de me laisser un couloir.
J’enquille idem le kilo à 10% qui suit, ainsi que le reste de l’ascension. Paradoxalement, les 3 derniers km, qui montent moins, mon sont plus dur, mais j’ai vraiment fait la montée pied au plancher, à tel point que j’ai passé Ludo en n’échangeant que quelques mots.
Je bascule dans la descente comme un forcené. Je ne dois rien garder, au risque de le regretter une fois la ligne franchie. On est au km 200. J’ai 9 heures de vélo dans les jambes. Et je fonce sur Saint-Félicien.

A fons !!

Les deux derniers km font mal, en légère voire franche remontée, mais je lâche tout.
Une heure après, j’aurais encore des nausées.
Deux heures après, un bon plat de pâtes nous fera tous le plus grand bien.
Trois heures après, une pizza à Tournon nous régalera encore plus.
Quatre heures après, c’est un bon lit qui nous fera encore plus plaisir.
Le lendemain, un dernier petit déjeuner à Tain l’Hermitage, au bord du Rhône, tous ensemble, et nous voilà repartis pour la région parisienne… en rêvant déjà à l’Etape du Tour, et à l’année prochaine !

Résultats du Team CSCatalan :
Class. - Nom - Prénom - Dossard - Temps - Ecart - Moyenne
169 - FIATTE Pierre - 3615 - 8h 30' 15'' à 2h 1' 25'' soit 25.39 km/h
214 - ROTGE (*) Alain - 3618 - 8h 45' 3'' à 2h 16' 13'' soit 24.68 km/h
426 - BACO Joan - 3614 - 9h 31' 13'' à 3h 2' 23'' soit 22.68 km/h
478 - DEVELAY (*) Ludovic - 898 - 9h 39' 35'' à 3h 10' 45'' soit 22.36 km/h
556 - ROBEQUAIN Benoit - 3613 - 9h 53' 45'' à 3h 24' 55'' soit 21.82 km/h
658 - DE CAGNY Thomas - 3616 - 10h 23' 56'' à 3h 55' 6'' soit 20.77 km/h
(*) de Lannemezan.




Aucun commentaire

Il faut être connecté pour pouvoir poster un message.

Accueil - Haut de page - Version grand écran