Récit de la course : Le Grand Raid de la Réunion : La Diagonale des Fous 2008, par chjou2

L'auteur : chjou2

La course : Le Grand Raid de la Réunion : La Diagonale des Fous

Date : 24/10/2008

Lieu : ST PHILIPPE (Réunion)

Affichage : 2614 vues

Distance : 150.1km

Objectif : Pas d'objectif

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Diagonale des Fous 2007 : je n'ai pas survécu...

Samedi 20 octobre 2007 à 5h30, il fait jour depuis une quinzaine de minutes, je viens de m’asseoir sur une pierre sur un sentier réunionais dans la vertigineuse descente sur La Plaque dans le cirque de Mafate.

Je me prends la tête entre les mains, essaye malgré la fatigue de faire le vide total dans mon crâne. Depuis une quarantaine de minutes, je souffre le martyr à chaque foulée, à cause d’une douleur à hauteur de la cheville et de la base du tibia. Que dois-je faire ? Abandonner alors que je suis encore dans un état physique plus qu’acceptable ( je n’ai cessé de remonter au classement au cours de la deuxième nuit gagnant une centaine de places et me situant en ce moment à la 292 eme position ) et tirer ainsi un trait sur 10 mois de préparation et 30 heures d’effort durant cette course ou continuer en marchant ou trottinant (car je ne peux absolument plus courir) et risquer d’aggraver la blessure sachant qu’il reste 40 kilomètres de course soit encore une bonne douzaine d’heures.

De grosses larmes commencent à couler sur mon visage et après mure réflexion, la raison l’emporte, je décide d’abandonner.

Je prends mon portable et appelle le numéro d’urgence que nous avons sur le dossard afin de savoir ce qui est le mieux : descendre jusqu’à La Plaque (mais c’est inaccessible en voiture) ou remonter d’où je viens c'est-à-dire au Col des Bœuf-Sentier Scout (endroit qui est par contre accessible). L’organisation me signale que, si je le peux, il vaudrait mieux que je remonte car si je descend à La Plaque il faudrait m’évacuer en hélicoptère, que cela prendrai sûrement beaucoup de temps et cerise sur le gâteau, que si le médecin estimait que je pouvais continuer, que cela serait à mes frais.

Un petit coup de fil à ma femme et mes deux amis Katie et Jean-Jacques pour leur annoncer que j’arrête (ils ont bien essayé de me rebooster mais dans mon esprit tout était très clair et ma décision entérinée), qu’ils viennent me récupérer au col des Bœufs et j’entame ma remontée qui sera un véritable chemin de croix. Refaire encore autant d’effort en sachant que c’est pour rien puisque l’on a abandonner, continuer à souffrir (la tendinite me lance des coups de poignard à chaque appui même si c’est un peu moins douloureux en montée qu’en descente), répondre à tous les raideurs que je croisent et qui me demandent systématiquement et très gentiment «  qu’est ce que vous faites ? », je dois reconnaître qu’à ce moment là j’ai vraiment le moral dans les baskets……….

Finalement au bout d’à peu près 1 heure 30 de calvaire, je rejoins le col des Bœufs, je remets mon dossard symbole final de mon abandon (il est 8h15), et je suis immédiatement pris en charge par des bénévoles aux petits soins avec moi. Ils n’arrêtent pas de me parler, de me demander si j’ai besoin de quoi que ce soit, vraiment des perles de gentillesse…….j’essaye  par politesse de répondre à chaque fois à leur demande mais je suis vide……... Mon aventure est finie………..

  

Novembre 2006 : après avoir fini les 100 kms de Millau et avoir cogité quelques mois sur l’établissement de mon planning pour 2007, je décide de participer à La Diagonale des Fous.

Ceci est une décision réfléchie et je suis persuadé qu’avec une bonne préparation tout au long de l’année, je pourrai aller au bout de La Diag et enfiler ce fameux tee-shirt avec l’annotation « J’ai survécu ».

 

De janvier à juillet 2007 : tout au long de ces mois, je prépare cette épreuve en essayant de participer à des trails afin de m’habituer à courir en nature et à tester mon matériel. Après un début d’année habituel sur la route ( promclassic, semi Nice-Monaco et Cannes, marathon de Cheverny), j’enchaînerai divers trails comme celui de la Nartuby (19 kms), les allumés de la pleine lune (50 kms de nuit) et le marathon du Mont-Blanc (42 kms). En même temps, j’essaye pour la première fois de trouver des sponsors (bingo, j’arriverai à financer pratiquement la totalité !!!!) et j’organise notre voyage en fouillant sur internet.

 

De juillet à fin septembre 2007 : plus de course mais une prépa spécifique ou j’essaye d’inclure pas mal de dénivelé, de renforcement musculaire et de m’habituer à alterner course et marche.

 

Début octobre : je relâche l’entraînement afin de faire le maximum de jus. Je suis satisfait, je me sens bien, pas de problème physique tout en ayant vraiment bien bossé. Le jour du départ approche……..

 

Vendredi 12 octobre : ça y est après 10 mois d’attente, nous sommes à l’aéroport de Marignane avec mes amis Katie et Jean-Jacques, et dans quelques minutes nous allons décoller pour La Réunion !!!!!!!!

 

Du samedi 13 au mardi 16 : l’île intense porte vraiment bien son nom !

Depuis que nous sommes arrivés, nous ne cessons de nous enthousiasmer devant les paysages tous plus beaux les uns que les autres (et surtout tellement différents) que nous avons visité : le cirque de Salazie au départ d’Hell-Bourg, les différentes cascades, le volcan………….

J’ai pratiquement oublié pourquoi j’étais venu au départ à La Réunion !!!!!!!!!

 

Mercredi 17 : direction St-Denis pour la remise des dossards au stade de La redoute. Cette fois-ci ça y est, je commence à rentrer dans la course.

Bon coté organisation pas terrible cette remise des dossards, une queue interminable (on m’expliquera que c’est fait exprès pour la presse et les sponsors), mais bon je reste zen et profite de chaque moment : j’aperçois de loin Vincent Dellebarre vainqueur l’an dernier, Marco Olmo vainqueur de l’UTMB en 2006 et 2007, enfin que du beau monde quoi…….. Une petite interview pour Clicanoo et hop ça y est j’ai mon dossard et les deux tee-shirt obligatoire (il faut les porter au départ et à l’arrivée pour les sponsors….)

 

Jeudi 18 : le matin nous décidons de continuer notre visite de l’île par la cote sud (St-Leu, Grand Anse, Manapany et St Joseph) Ainsi le temps passe relativement vite et je ne cogite pas trop.

L’après midi, retour à la chambre d’hôte pour essayer de faire une petite sieste car après c’est deux jours sans dormir…… Malgré le stress qui commence à monter, j’ai quand même réussi à dormir deux heures.

19h, nous prenons la direction de St-Philippe, un dernier petit resto et ouppss…..21h30 il est l’heure de se rendre sur le stade de Cap Méchant pour le contrôle des sacs. Alors là pas tip top non plus l’organisation, une entrée en entonnoir de deux mètres pour faire passer 2200 raideurs…………….une véritable cohue……….ça y est je suis passé mais que ce fut dur. Le contrôle, une formalité vu que j’ai du faire et refaire mon sac une bonne douzaine de fois, saurait été le comble s’il me manquait quelque chose !!!!!!

Il est 10h30 et nous sommes parqué sur le stade, je discute un peu avec Cagouillard un raideur rencontré sur le forum de La Diagonale, puis je vais m’allonger et essaye de me reposer un petit moment. 11h30, dans 30 minutes c’est le départ, je regarde le spectacle de danseuses sur la scène puis commence les discours des organisateurs…….10,9,8,7,6,5,4,3…….le 2 et le 1 ne seront même pas dit que les premiers « fous » sont déjà partis comme pour un 10 kms…..incroyable !!!!!!!!

Un départ encore en entonnoir et on frôle vraiment la catastrophe, étant littéralement comprimés les uns contre les autres et portés sans pouvoir rien faire contre les grilles, grrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr………..je joue des coudes et arrive enfin à m’extirper……………..cette fois-ci c’est vraiment parti,  ma Diagonale a démarré.

Le début se fait sur la route nationale et il y a un monde fou pour nous encourager (vu l’heure tardive j’en suis très surpris), comme prévu je cours tranquillement, tout va bien.

Nous attaquons ensuite une route forestière sur une dizaine de kilomètres qui va nous amener à la première grosse difficulté : la montée du volcan. J’y arrive exactement dans les temps prévu (1h50), prends le temps de faire le plein d’eau et de bien me ravitailler, hésite à me changer le tee-shirt car je suis trempé tellement il fait chaud mais finalement je décide d’attaquer le sentier ainsi. Alors là, la montée au volcan……….surnaturelle, nous montons en fille indienne à 2000 m d’altitude dans une ravine avec de la boue de partout. Pas un bruit à part la respiration des raideurs…….impressionnant !!!!!! Comme je l’avais décidé je monte au train, tranquille, de toute façon il est quasi impossible de doubler. Une heure, deux heures que nous montons toujours sur le même rythme et toujours dans le même silence……….le sommet approche et je commence à avoir froid, je décide de finir l’ascension et dès que l’on sort de ce sentier je me change. On sort enfin, le jour se lève et je profite quelques instants de ces paysages fantastiques au lever du jour : SPLENDIDE.

 

Foc-Foc (km 23) : je me ravitaille tranquillement, change mon tee-shirt pour un plus chaud, mais ne perd pas trop de temps car il y a un gros ravitaillement au volcan. J’apprend alors qu’un raideur s’est cassé la jambe : ça me glace le sang….. Je repars en alternant marche et course selon le terrain et suis subjugué par une mer de nuages au dessus du volcan : tout simplement SUBLIME.

 

Le Volcan (km 31), 5h59, 475 eme : je fais ma première petite pause d’une dizaine de minutes, mange une petite soupe, refais le plein de mon camelback, pour l’instant tout va vraiment bien, le volcan a été passé et nous allons attaqué une partie plate (ce sera bien une des seules du parcours), la plaine des sables. Ensuite viendra la montée sur l’oratoire Ste Thérèse que je passe tranquillement. Je reçois alors un coup de fil de ma petite femme qui se lève, bon pour le moral ça….. lui dis que je devrais être à l’heure à notre rendez-vous de Mare à Boue.

 

Piton Textor (km 40) : j’attaque une longue descente dans les champs qui me mènera à Mare à Boue ou je retrouverai mon premier sac d’assistance. Je descends sur un bon rythme mais légèrement en dedans quand même afin de garder des forces pour la suite.

 

Mare à Boue (km 50) 8h38, 421 eme : en arrivant j’aperçois mon ami Jean-Jacques qui est venu à ma rencontre et cours les derniers mètres avec moi, puis ma femme et Katie : que ça fait du bien de voir des êtres chers !!!!!!

Première grosse pause de la journée (30 minutes). Je récupère mon sac d’assistance, rajoute un tee-shirt car il commence à bruiner, il fait plus froid, mange des pâtes et un sandwich au saucisson : hum ça fait du bien de manger autre chose que des gels. « C’est Christophe ? » me lance une voix inconnue : c’est Benoît (Bendidos) de Courir Le Monde. Je suis vraiment ravi de faire sa connaissance à ce moment là de la course (je le recroiserai une deuxième fois lors de mon abandon). Je reste quelques minutes avec mes accompagnants, leur donne rendez-vous à Cilaos et il est déjà temps de repartir.

J’attaque une montée qui me paraîtra interminable : la montée du Kerveguen. Il a beaucoup plu les jours précédents et cette partie sera véritablement un enfer…..de boue. C’est la première fois de la journée ou j’ai vraiment du mal à relancer et je gère comme je le peux afin d’arriver au sommet.

 

Kerveguen (km 59) 11h33, 441 eme : j’ai perdu vingt places, absolument pas grave du tout en soi mais cela confirme l’impression que j’avais dans la montée : je suis moins bien. J’en profite donc pour bien me ravitailler, souffler un bon coup car il faut encore gravir une montée qui nous mènera au gîte du piton des Neiges, point culminant de la course, par un sentier pas terrible, terrible. Même si je me sens un peu mieux ce n’est pas encore la grosse forme et je continue à puiser au plus profond de moi pour passer cette difficulté (beaucoup de monde me double à ce moment là). Agrrrrrrrrrr…..je sers les dents, pense à tous ce qui peut être positif et arrive enfin au sommet.

Je bascule maintenant sur la terrible descente sur Cilaos (à peu près 1000m de D-) et la descente ça me plait bien….. Petit à petit je trouve mon rythme de croisière, je sens que cela va beaucoup mieux (je double c’est bon signe !) mais essaye quand même d’être prudent car cette descente est très technique et dangereuse. Je rejoins enfin la route et là mes « qualités de routiers » me permettent de doubler beaucoup de monde en étant très réguliers.

 

Cilaos (km 70) 13h58, 421 eme : arrivée au stade j’aperçois de suite ma petite femme et lui fais un gros bisou. Ensuite c’est la totale : douche, changement complet de tenue (je vérifie mes pieds et suis ravi de voir que je n’ai aucune ampoule), petit massage par ma femme (hum que c’est bon ça !!!!!), relaxation sur la pelouse du stade en discutant avec mes amis puis un repas complet (soupe, pate, jambon, coca) au total une bonne heure d’arrêt.

Je repars donc comme neuf et je suis assez satisfait de ma gestion de course : je suis encore frais. Je traverse Cilaos ou il doit y avoir un marché, c’est assez bizarre de traverser des rues où il y a autant de monde, un petit retour à la civilisation car dans les sentiers on se sent  vraiment seul.

 

Cilaos Bras-Rouge  15h16, 401 eme : je descends tranquillement sur Bras Rouge et me prépare à une des grosses difficultés du parcours : la montée du Taibit.

 

Pied du Taibit (km76) 16h53 422 eme : et là patatras, je ne sais pas pourquoi mais ce sera un des moments les plus durs pour moi de toute la course. Plus de jambes, j’essaye d’accrocher les raideurs qui me passent les uns après les autres, de prendre le bon wagon comme on dit, mais à chaque fois je suis lâché. Pour la première fois depuis le début, j’en ai marre…..pfffffffff….je n’arrête pas de….. m’arrêter… tellement les jambes me brûlent. Une pensée négative m’effleure l’esprit : je n’en peux plus, je vais tout stopper !!!!!!! Ouppsssss « ça va pas mon gars, me dit une petite voix intérieure, 10 mois que tu t’entraînes pour çà et tu lâcherai tout ainsi, impossible, reprends toi ».

Je m’aperçois alors que cette course est vraiment une visite permanente au plus profond de soi et qu’il faut aller chercher des ressources cachées très loin pour continuer à avancer.

Alors que je suis une nouvelle fois arrêté et adossé à un gros rocher, un soupçon de lucidité me fait penser qu’en fait, la longue pause de Cilaos m’a un peu couper les jambes et que petit à petit la forme va revenir (tous les moyens sont bons pour se persuader !!!!) Je repars donc en essayant de ne plus faire de pause et miracle la fin du col se passe relativement bien : je monte régulièrement et n’est plus du tout cette impression de jambes lourdes. Le sommet et je bascule pour une belle petite descente sur Marla alors que la nuit est en train de s’installer.

Depuis que j’ai décidé de participer à cette épreuve, je me suis toujours dit que la deuxième nuit sera le moment le plus dur à passer. Et bien en fait, je m’étais complètement trompé car à partir de ce moment là et jusqu’à mon abandon, je vais être comme dans un rêve, tout va se passer comme sur des roulettes et je vais remonter durant cette nuit de la 422 eme place à la 292 eme……..

 

Marla (km 80) 19h21 421 eme : je décide de faire une petite pause, remet de la crème nok sur mes pieds, de bien me ravitailler (soupe, pâte) avant de repartir dans Mafate pour la nuit. Au bout de 20 minutes (j’avais prévu de stopper 30), me sentant en pleine forme, je décide de repartir mais au bout de quelques mètres je vois que je suis tout seul et je me dis qu’il serai peut être mieux d’être en groupe pour passer une partie de la nuit. J’aperçois au loin devant moi des frontales, alors j’accélère l’allure afin de les rattraper. Au bout de quelques minutes dans la descente très technique sur la rivière des galets, je rejoins un couple de raideurs, me colle derrière eux pour voir si le rythme me convient….nous commençons à entamer la conversation (ils viennent de Laval et courent toute La Diagonale ensemble) et finalement nous ferons course commune durant une dizaine de kms. Nous hésitons un peu en traversant la rivière et cherchons plusieurs fois notre route puis avec lui, nous nous relayons continuellement afin de maintenir une allure soutenue. Cette portion est une succession de petites montées et descentes et il faut continuellement relancer : j’adore ce type de terrain.

 

Roche-Plate (km 90) 22h28 386 eme : “çà va Christophe, tout va bien, tu veux de l’eau dans ton camel, assied toi, je t’apporte soupe, sandwich ? » Tiens une connaissance, me dis-je, pas du tout un bénévole tout simplement : alors là petit apartheid pour faire une STANDING OVATION à tous ces bénévoles présents à chaque ravitaillement et qui sont vraiment là pour aider et soutenir les raideurs. Souriant systématiquement, trouvant toujours les mots justes   dans les moments difficiles pour vous réconforter, ils vous prennent en charge dès que vous arrivez et ne vous lâchent pas tant que vous n’êtes pas reparti. Pour tout vous dire, ils sont tout simplement l’AME de cette course.

J’enfile mon kway car il fait de plus en plus frais et je repars sans mes compagnons de route car lui, ayant un début de tendinite, doit faire une grosse halte chez les kinés. Je suis donc tout seul dans la descente vertigineuse qui va nous ramener une nouvelle fois dans la rivière des galets. Je ne double plus personne et aucun raideur ne me rejoint. Je descend seul sur un très bon rythme passant par des endroits à pic vraiment impressionnants (je fais vraiment attention et redouble de vigilance). Tout d’un coup, en levant la tête, oupppppppppsssssssssssssssssssss……………………….. j’aperçois en face de moi un faisceau lumineux de frontales qui montent vers le ciel : la prochaine montée vers La Nouvelle a l’air de ne plus jamais en finir !!!!!!!!

Je traverse la rivière et pour la première fois du parcours rate un galet, me retrouve le pied dans l’eau……..cela m’énerve et je m’élance motivé comme jamais dans cette interminable montée. Tête baissée, régulier, ne m’arrêtant jamais, je réalise une montée plus qu’honorable ne me faisant rattraper que par cinq-six personnes. Cette montée est vraiment à pic et j’ai vraiment hâte d’en finir….ça y est j’arrive au ravito.

 

La Nouvelle (km 97) 26h2 392 eme : soupe, soupe et resoupe, je me réchauffe car il fait vraiment froid. Un petit coup d’œil pour m’apercevoir qu’ici c’est l’hécatombe : tout un tas de raideurs enveloppés dans leur couverture de survie, arrivant à peine à manger, la nuit est en train de faire de gros dégâts. Je regarde mon road book et je m’aperçoit que l’on enchaîne directement par une montée de plus le Col des Fourches : je l’avais oublié. Comme je me sens bien, je repars très rapidement, et n’arrête pas de relancer. Je connais une période euphorique et je double un nombre incalculable de concurrents. Par contre c’est à ce moment là aussi, ou je ressens une légère gène au niveau de la cheville. Rien d’alarmant, je n’ai pas mal du tout, c’est un sentiment bizarre, mais je comprendrai plus tard que ma douleur a démarré à ce moment là. Déjà le sommet, allez le col des Fourches est lui aussi derrière moi et je dévale maintenant dans le cirque de Salazie direction le sentier scout. Dans cette portion, je continue d’être à l’attaque malgré le fait que le terrain soit très boueux et je sens que ma gène à la cheville s’amplifie. Nous passons sur de nombreux rondins ou je double continuellement des raideurs qui me donnent l’impression d’être scotchés sur place. Je commence à boitiller et cela m’inquiète de plus en plus.

 

Col des bœufs-sentier scout (km 105) 28h40 323 eme : 70 places de gagnées depuis le dernier ravito !!!!!  Je n’en reviens pas….. Et là encore, c’est Verdun, des raideurs aux teints blafards, les lits picots sont remplis……..vite une petite soupe, je fais bien attention de refaire le plein d’eau, je demande à un bénévole s’il y a un kiné, « pas ici, à Aurère me répond-t-il » et hop je repars…….(après coup je me dis qu’à ce moment là, j’aurai du m’arrêter un moment et prendre le temps de voir les pompiers ou un infirmier mais bon…….facile à dire après, car pendant la course on a sûrement plus toute sa lucidité….). Petite montée avant de prendre un chemin qui nous emmène pour une longue descente sur La Plaque. Au moment ou j’emprunte ce sentier un bénévole m’annonce « allez gars 292 eme » Trop content le Christophe, j’ai encore gratté une trentaine de places simplement sur le ravito et en plus je sens que j’ai encore la pêche.

Ce sera bien la dernière fois ou je serai « content » !!!!!!!!!!

Plus je descend et plus ma foulée devient saccadée, chaque appui me lançant des pics juste au dessus de la cheville. Je m’arrête une première fois tellement la douleur devient présente, j’en profite pour enlever mon kway car le jour se lève et il commence à faire meilleur. Je repars mais je vois de suite que ça ne va plus du tout, la douleur devient insupportable et je n’arrive plus du tout à courir. Que m’arrive-t-il ? Pourquoi cette douleur est elle apparu si soudainement et si violemment ? (en fait je comprendrai lors de ma remontée que c’est en descente que je souffre le plus) Je continue encore tant bien que mal 2 voir 3 kms, me persuade que cela va passer, mais je ne fais plus que marcher et les escaliers qui se trouvent dans cette descente sont un véritable enfer pour moi.

 

Voilà la suite vous la connaissez déjà et alors que ma femme et mes amis m’ont récupéré et que nous nous dirigeons vers St-Gilles , pleins de questions me hantent l’esprit et je ne fais que penser à ce qui a pu « merder » pour que je termine ainsi cette magnifique épreuve. En tournant les problèmes dans tous les sens dans ma tête, je ne trouve pas de réponse.

Après une après-midi entière de sommeil, je me lève beaucoup plus serein, commence déjà à réaliser tout ce que je viens de vivre : déçu, bien entendu, mais je n’ai aucun regret (la blessure fait parti intégrante de la vie du sportif et peut frapper à n’importe quel moment) ……j’ai vécu mon aventure à fond, j’ai donné le meilleur de moi-même, je suis passé durant la totalité de l’épreuve par différentes phases qui m’ont permis d’aller chercher des choses au plus profond de moi-même que je ne pouvais même pas soupçonner, j’ai vécu des moments extraordinaires et j’ai découvert durant quinze jours une île fantastique avec une population très accueillante. La prochaine fois, car je suis persuadé qu’il y en aura une, je reviendrai encore plus fort et j’irai au bout de cette course impitoyable……mais si envoûtante et attachante !!!!!!!!!!!!!

 

Je ne pouvais finir ce CR sans adresser un ENORME MERCI à tous ces bénévoles sans qui la Diagonale ne serai pas ce qu’elle est et à mes trois accompagnants Valérie, Katie et Jean-Jacques qui ont vécu cette aventure à mes cotés…….

Je vous le promet : un jour « JE SURVIVRAI».

1 commentaire

Commentaire de calimero posté le 02-07-2008 à 22:00:00

Bravo pour cette magnifique aventure!!Je sais que tu l'a reprogrammée pour cette année et là çà va le faire!!

Dire que j'en rêve souvent de cette course mais il me faut d'abord passer comme toi par les 100 bornes de Millau pour voir si je suis déjà capable d'aller aussi loin!!

A+

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