Récit de la course : 24 heures de Plouvorn 2004, par mmi
Le récit
14h30 ! On vient me chercher sous la tente dans laquelle je m'étais isolé depuis 45 minutes maintenant. Le départ est à 15 heures, mais il faut faire les tests de puces et écouter les consignes etc...
Je sors donc de mon antre, la tension est au maximum ! Comme Philippe Laloco avec qui nous en parlons nous sommes des compétiteurs et nous nous mettons la pression. Est-ce parce que je ressens intrinséquement que je suis à la veille de battre mon record ou au contraire suis-je encore trop fatigué des étapes faites avec Fredou sur le Lyon-Paris,je ne sais pas !
Quoiqu'il en soit, je regarde mon cardio et il affiche 15 à 20 pulsations de plus que d'habitude. Bref ça m'énerve encore plus. 2 jours auparavant j'avais fait un test avec mes 3 acolytes et à 10 à l'heure mon coeur était à 120/125 pour le petit faux-plat. Là j'ai fait un test et c'est 140 qui s'affiche, je suis dégouté et le doute s'installe. Bref je ne suis pas au mieux quand le coup de canon retentit et que le départ est donné.
Je pars dans les bons derniers, quelque part ce mauvais état m'aura obligé à être raisonnable sur ce 1er kilo, je ne m'imagine pas faillir alors que Djohra, Lydia et Haoua mes 2 belles soueurs sont là, sans oublier bien sûr la cause pour laquelle nous courrons Vanessa (AVML) la fille à Philippe.
Bien vite pourtant, j'aperçois Léo, Marmotte, plus loin Philippe et mon rythme habituel reprend le dessus, je monte à leur hauteur échange quelques paroles et repars à mon rythme.
Je croise Philippe un peu plus loin il est raisonnable, il s'applique et je trouve cela bien, il est très concentré et je ne lé dérangerais pas. Pourtant moi je ne peux me résoudre à me freiner, l'allure ou je me sens bien est au dessus de 10 et je ne veux pas forcer à changer ou ralentir ma foulée, car je sais que nerveusement cela me fatique, l'expérience acquise sur les 2 derniers 6 heures m'apporte des certitudes sur ce point.
Je roulerai donc à 10,3/10,5, tout va bien et cela va durer des heures. Pourtant je me sens énervé, je sais pourquoi !
Une idée n'arrete pas de me tarabuster l'esprit depuis des mois, je sais qu'aujourd'hui je peux à l'aise battre les 10h58 de mes 100 bornes de St-Estève.
Mais j'ai fait une promesse à Djohra je dois rester dans le tableau de marche qu'elle a patiemment établi avec le mag, ce qu'elle a lu, les heures passées avec moi etc..., je ne l'avais pas écouté à Roche-la Molière et elle avait très triste pensant à la limite que je me foutais un peu de sa gueule en n'en faisant qu'à ma tête. je me devais de lui démontrer que ce n'était pas cela, Philippe en ce sens m'aidera bien à la fin de la course, explications plus loin.
Sinon j'avais parlé avec Chico quelques minutes avant le départ et lui aussi m'avait dit: "mmi, 11h, 11h30, c'est ok si tu vises 180". Bref il faut que j'oublie ça, mais au ravitaillo je sais que je suis pas sympa et je me contiens.
Sur les deux dernieres épreuves de 6 heures auxquelles j'ai pris part je faisais tous mes ravitaillements en vol rodés avec Djohra et là elles laissent faire mes belles-soeurs qui elles s'amusent, moiça m'énerve et sans le vouloir quand elles renversent le coca, ne sont pas pretes, je les engueulerais volontiers mais je me retiens etc... je me sens méchant alors qu'elles sont adorables, je m'en veux !
[Fin de la mauvaise humeur intérieure]
Je passerais donc le 100ème en un tout petit peu plus de 11 heures, c'est volontaire de ne pas être descendu sous cette barre car là avec Djohra ç'aurait été le clash, vu qu'elle s'est remis aux petits soins avec moi, j'ai promis d'être raisonnable, ça me coute mais avec tout ce qu'elle fait pour moi, je n'ai pas voulu la trahir et flatter mon ego au risque de foutre mon 24 heures en l'air car c'est bien là l'objectif et non pas le 100 bornes. Pourtant il faudra que je me mange les doigts de pieds et heureusement un arret pour change aura mis de l'eau dans mon vin, je la soupçonne d'avoir vu tout cela, et de m'avoir manipulé en me parlant des potes etc... ce qui me fait dire ça c'est un sourire anormal au 95ème sur son visage , plus tard dans la nuit j'y repenserai et serai plié de rire de la savoir si coquine, de toute manière un arret de 4 minutes auprès du commentateur pour expliquer notre mobilisation pour l'AVML servira aussi cette cause.
Bref, je pense que mon 24 heures aura bien démarré à ce moment.
La nuit est magnifique je me sens à l'aise, n'ai pas sommeil je dois être à ce moment dans les 5/6 premiers du classement, j'exhulte et me mets à rêver de 200, oui c'est immodeste mais je ne peux cacher qu'à cet instant, cela me semble jouable.
Je me vois en train de vous le dire sur le forum, je suis comme un espèce de crapaud qui a gonflé sa gorge, quel prétentieux je fais ! J'ai un sourire béat et je me sens invincible à tourner autout du pla d'eau.
Pourtant je suis inquiet, des nouvelles de mon pote Philippe au passage au ravitaillement ne sont pas excellentes, il a comencé à souffrir des tendons, du ventre, bref ça me gache un peu la fete.
Heureusement, il y aura le plaisir de voir marmotte qui redonnera de la joie à tout ça, quel Dandy, il teste ses petites tenues UTMBISTES et nous aurons droit à un défilé digne de Dior.
Presque la douzième heure et je décide de m'arreter afin de couvrir le bonhomme car maintenant la nuit est plus fraiche et de toute manière cela ne pourra pas me faire de mal, mais malheureusement pour moi, c'est terrible de faire cela, en moins de temps qu'il ne faut pour le croire, la situation devient terrible, assis en train de changer mes chaussettes, je sens le froid me gagner et mon estomac se serrer, et ce que je croyais plus possible à ce moment là arrive. Je suis pris d'une crise de vomissements et j'aurais honte de faire vivre ce spectacle à la famille de Philippe, marmotte et ma famille. je suis plié à régurgité je ne sais quoi ! Cette crise passée, je sais que la seule solution est de me poser quelques minutes bien au chaud, afin de faire passer les mauvaises minutes. Je décide donc de rentrer une demi-heure dans le duvet afin de remonter en température mais ça ne s'arrange pas et le docteur de course à la demande de Djohra viendra me prendre la tension. Le verdict tombe 9.6, il faut s'arreter 1 heure et on met une couverture chauffante. Je ne dormirais pas et une rage énorme me gagne. Il est hors de question que j'arrete, j'ai prévenu la toubib, je me connais et celle-ci elle hallucinera quand ensuite elle me verra gambader sur le circuit, je lui verrais même quelques larmes aux yeux vers la fin de course.
Bref, avec toutes ces péripéties, j'aurais perdu 1h40 de course, et quand je me remets en route, il me faudra bien quelques tours pour refaire le point et revoir les objectifs, 200 c'est fini car il reste à peine un peu plus de 10 heures et je sens que j'ai laissé des forces dans l'histoire. Mon coeur ne monte plus beaucoup, mais j'ai quand même la gnac. Donc 180/185 si je ne merde pas reste jouable.
Il n'en sera rien !
Il reste 6h30 de course, je n'ai plus revomi, mais je ne me sens plus très fort. Je ne me suis plus alimenté en solide depuis le mauvais épisode, mais Lydia ma belle-soeur va m'obligé à manger un sandwich Pain-Pates eh oui, c'est une recette mmienne :-)
Encore quelques tours et le soleil a fait son apparition, étrangement je me sens de nouveau requinqué et je pense être un des plus rapides du circuit, c'est bizarre, dès que cette satanée barrière des dernières 6 heures arrivent, des ailes me poussent, je double Albert Vallée le vainqueur final (231km) avec qui nous avons bien sympathisé puisque cela fait 2 courses que l'on court ensemble en 3 semaines et celui-ci me demande ce qu'il m'arrive, sur quelques tours il n'arrivera pas à me suivre et cela me donne une pêche d'enfer, vous imaginez le truc.
C'est à ce moment que Chico m'apelle il reste environ 5 heures de course, et j'ai plus de 133 pitons, il me dit Mmi là tu déconnes pas, tu me fais les 180, mais moi je vais geindre un peu en me plaigant. Vous connaissez la gentillesse légendaire de notre Chico national et en raccrochant, j'explique à Albert avec qui je suis au tél., Il se marre quand je lui dis "Tu re rends compte, une burne comme moi qui se fait appeler par le vice-champion de France de 24 heures et qui se permet de se plaindre...". C'est sur une crise de fou rire que nous terminerons ce tour.
Le public est maintenant bien présent sue le circuit, l'infatigable Léo avec qui nous jouons à l'élastique au gré de mes états de forme me croise et me toise en me sussurant des "allez, mimi", un gladiateur le Léo pas une lopette comme moi qui s'apitoye sur son sort me dis-je dans ma tête !
Il reste environ 1h30 sur l'épreuve, je passe Philippe qui me demande ou j'en suis, je lui dis que je suis cuit, que j'en ai marre, j'ai battu mon record de Roche (154) bref qu'à 80 tours (164Km) j'arrete et attends la fin pour franchir la ligne. Oh Put... que n' avais-je pas dit là !
Je sens tout d'un coup dans mon dos une présence et voilà le Philippe qui arrive à ma hauteur et qui me dit "Mmi, ça va pas non, tu vas me faire les 170, même 172 et on peut 174km, fais le pour Djohra !!!!!".
Je le regarde, il rigole pas, il est ferme et là soit je l'envoie "chier" avec ses conneries soit j'abdique et je me secoue un peu la couenne. J'opte pour la 2ème solution et je peux dire aujourd'hui que cela restera comme un des mes plus grands moments de sport. Philippe me portera littérallement jus'quau 170km que nous franchirons vers 23h30 de course, 12 minutes sur certains tours, lui touché par 2 tendinites se sacrifiera pour moi, il va tout gérer, je n'aurais qu'à courir, jamais auparavant je n'avais vu quelqu'un faire ce qu'il va faire, il ne laissera personne me parler, il répondra à chaque intrelocuteur, il devancera tous les ravitaillements. Et pour finir, le "salaud" il fera faire une annonce au speaker quand je franchirais les 170 en s'arrangeant avec lui et Djohra pour que je fasse un tour de plus pour atteindre les 172.
Comble de son dévouement, il organisera pour mon dernier tour une garde royale autour de moi comme 03oignon à St-FONS. à 500 mètres, alors que tout est fini, une dernière crise de vomi viendra les inquiéter mais 2 minutes après je m'envolerais à 13 à l'heure pour la dernière ligne droite.
Des cris de joie, des larmes sur les visages de ceux que j'aime clotureront ce tour en m'offrant 172,200 km au final. Je pourrais encore en faire un, ils tenteront de me le proposer mais la machine ne voudra plus.
Je serre Philippe dans mes bras, Djohra pudique nous laisse savourer ce moment d'amitiés et je croiserais, les photographes se ruent sur nous, c'est la folie sur la ligne. Je regarde la joie dans les yeux de Vanessa, je suis l'espace d'un instant leur héros, je reve éveillé, je suis un homme heureux, le monde peut s'arreter à ce moment. Merci la VIE, merci l'ultra, merci mes amis.
épilogue:
Roscoff 18h00 environ, autour d'un bon cidre avec mes belles-soeurs, Djohra et marmotte nous nous refaisons le WE, nous avons quitté nos amis, Léo, son frère et sa famille, Philippe et sa famille, Titi29 (désolé pour ceux que j'oublie de citer mais ils sont dans mon coeur...), la mer est belle, nous sommes heureux, direction Chamonix maintenant :-)
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mmi
1 commentaire
Commentaire de totoche58 posté le 05-08-2006 à 23:32:00
Merci mmi pour ce cr . Je pars faire cette course avec plein de questions dans ma ptite tete....Je suis vraiment impressionné par tes perfs ...j'vais p'etre bien te voler la recette du pain pate ça sera peut etre ça ma solution magique.....Abientot
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