Récit de la course : Triathlon Moyenne Distance de Dijon 2005, par coeurgan

L'auteur : coeurgan

La course : Triathlon Moyenne Distance de Dijon

Date : 17/7/2005

Lieu : Dijon (Côte-d'Or)

Affichage : 2346 vues

Distance : 108km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

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Le récit

C’est dimanche. Il est 7H du matin. Dans le couloir de la maison familiale mon frère Sylvain s’agite déjà. Pour ma part je suis très partagé. Deux perspectives s’offrent à moi. La première c’est un petit déjeuner gatosport, une descente en vélo vers le lac avec mon sac à dos, puis deux kilomètres et demi dans l’eau boueuse du lac Kir, quatre-vingt kilomètres de vélo et enfin une vingtaine de kilomètres dans une chaleur infernale.
Le deuxième choix, il est à quelques centimètres de moi, je n’ai qu’à tendre le bras et mes rêves les plus fous se réaliseront, j’entrerai dans un univers de magie et de féerie, où tout est possible et bien plus encore. Et avec ça du rire, des larmes, du suspens et des sentiments, le tout confortablement installé dans mon lit, en mangeant ce que je veux quand je le veux. Bref d’un coté le triathlon de Dijon et de l’autre Harry Potter et le prince des sang-mêlés. Il va falloir choisir…

A 7H15, sans surprise mais avec un dernier regard envieux vers le livre merveilleux, je finis par me lever. Bien sûr il fait beau, bien sûr on va avoir TRES chaud.

Le lac Kir. Evidemment les dijonnais l’appellent le Lac. Le tour du Lac à pied est le passage obligé du dimanche après midi. Le reste du temps, c’est le règne des coureurs et des rollers. 3700 mètres, une balise tous les cent mètres, si on sait les chercher, de quoi se prévoir des entraînements aux petits oignons. J’en ai fait des tours du Lac en courant quand j’y pense. Et l’eau du Lac, j’en ai bu de l’eau du Lac… Kayak, planche à voile, triathlon, plein de bonnes raisons de boire la bonne eau du Lac, une eau verte, opaque, vaseuse… Mais bon quand on aime…

Et à nouveau me revoilà, prêt cette fois à boire le calice jusqu’à la lie. Prêt pour le grand triathlon de Dijon, comme je l’ai toujours appelé. Par opposition au petit triathlon bien sûr. Celui-là je l’ai fait souvent mais il ne m’a jamais réussi, drôle de choix donc pour un premier grand triathlon. Mais entre le Lac et moi, faut pas se voiler la face, c’est un peu l’amour vache…

La natation, faut déjà sortir de la vase. Ensuite faut essayer d’éviter les coups des gars qui doublent, et enfin tu peux nager. Moi généralement quand je commence à nager il reste trois nageurs derrière moi. Et d’ailleurs quand je finis c’est rarement mieux. Mais cette fois je me suis entraîné, et pis j’ai ma combi. Par contre j’ai pas mes lunettes, enfin j’ai mes lunettes d’eau mais j’ai pas mes vraies lunettes. Donc sur la ligne de bateaux qu’on doit laisser à notre droite je vois qu’un seul bateau. Je suis obligé d’imaginer donc. Et j’imagine que c’est loin. D’ailleurs c’est loin. Mais tout arrive, le demi-tour, la presqu’île à gauche, la presqu’île à droite, le restaurant, et enfin je vois la banderole. Enfin je sors.

A la transition Sylvain est là et Soeur nous encourage. Bon temps il me dit, et il repart aussitôt. C’est vrai que c’est un bon temps, surprenant presque. Moi je crois que je suis prêt mais en fait non, alors je repars un peu après. En plus je crois que je vais le rattraper. Je suis loin du compte, et finalement c’est lui qui va me rattraper, en course à pieds, avec un tour d’avance.

Il faut pas croire mais à Dijon, il n’y a pas seulement le Lac. Il y a aussi le Canal. Avec une belle piste cyclable. Avec des beaux arbres pour faire de l’ombre, des bateaux pour faire joli, des petites écluses pour faire passer les bateaux, et une meute de triathlètes qui cherchent, parfois vainement, la supravitesse. Je suis de ceux là, et je cherche vainement. Rien à faire je n’avance pas. Alors j’attends la côte en comptant les triathlètes. Ca fait passer le temps. Et une fois dans la côte, évidemment, je suis toujours scotché. Un peu moins peut-être mais pas sûr. Vivement la descente je me dis, tout en sachant que je suis pas très doué en descente. Alors comme je suis un optimiste, je me dis vivement la prochaine côte, ça ira mieux.

Et puis à la prochaine côte rien ne change. C’est ça le problème de l’optimisme, on a souvent des déceptions. Alors à Baulme-la-Roche, je regarde le paysage, qui reste magnifique, je respire le vrai air de la campagne, moi qu’on a exilé à Paname, et je continue à compter les triathlètes. En attendant la descente, encore une fois.

Elle finit par arriver la descente, là je suis vraiment chez moi, ça ne change rien à ma vitesse mais au moins je me sens bien, tout est simple et sans surprise. Ensuite retour au Canal. Il n’a pas bougé, il est toujours présent, toujours aussi plat, toujours désespérément tout droit. Et pédaler devient une charge, plus de trace de plaisir, je ne rêve que de descendre du vélo et de me coucher. Je m’imagine le 15 août dans cet état.
Le doute s'installe. Si je ne suis pas plus fort à Embrun c’est inutile de faire le voyage. Déraisonnable même. Et je n’ai plus le temps d’être plus fort. Devant moi un triathlète ralentit, il roule tranquillement le long de ce fameux Canal. C’est comme un rappel à l’ordre. Enfin, je me dis que moi aussi je dois ralentir, profiter un peu, et voir un peu comment je cours avant de tirer des conclusions.

Le Lac à nouveau. Je jette enfin le vélo maudit. Le soleil est très haut, brûlant, et le moral est bas, très bas. Je vois une inquiétude dans l’oeil de Jéjé qui est passé nous supporter. Je dois faire peine à voir. Chaussettes, chaussures, gels, casquette, mes gestes sont lents, mal assurés. J’entends Gilles Reboul au micro. Il n’a pas gagné mais il a tout donné. Moi j’ai l’impression d’avoir tout donné mais je suis loin d’avoir fini.

Enfin je repars. Et le miracle s’accomplit, le calvaire annoncé est repoussé aux calendes grecques, j’ai des jambes ! Je cours sans problème ! Pas vite évidemment mais je ne suis pas pressé. Marie et Loïc sont passés pour m’encourager eux aussi, et d’un coup mon moral en berne remonte. Je me sens bien. Je me sens fort. Et rien ne viendra troubler ce bonheur de courir que j’ai, moi qui aurait pourtant préféré être un cycliste.

La suite, c’est du détail. La suite c’est un point d’eau à chaque kilomètre qu’on attend comme si on avait passé deux jours dans le désert, c’est une racine qui dépasse, une culbute dans la terre, un spectateur qui m’aide à faire passer les crampes, un anglais qui demande si je suis "all right", un chouchou, un "true triathlète" qui prend des photos sur un pont et que je ne veux pas déranger, les filles plus jolies les unes que les autres, l’eau fraîche du Lac qui tend les bras aux triathlètes calcinés, mon frère qui me double comme un avion, un ruban, les gamins qui tapent dans les mains, un indien qui se demande ce qu’Ils mettent dans les tubes de gel, et puis finalement l’arrivée, l’envie de lever les bras et la timidité peut-être qui m’en empêche.

Voilà. C’était long, c’était dur, c’était bon. Vivement le prochain, bravo et merci à l’organisation, parfaite encore une fois.

2 commentaires

Commentaire de agnès78 posté le 02-06-2007 à 08:51:00

Un très très rès très beau récit et plus encore!!!!
Quelle émotion et quel humour!
Merci du fond du coeur de nous avoir fait partager ton triathlon via ce magnifique récit! Un bon entrainement pour cet été à Embrun et son fameux col de l'Izoard!
Mais si tu vas y arriver!!!
Et puis là bas, il ya a aussi des rubans d'enfants qui t'appaudissent d'Arvieux jusqu'au Col et plus loin même, des jolies filles, des photographes et même des anglais qui te demandent si tout est "all right"... Donc, tu seras en terrain connu!
Encore MERCI et bonne fin de prépa!
bises
agnès

Commentaire de marmite posté le 27-06-2007 à 18:06:00

Un bien joli récit.

Haaa, comme c'est bon de souffir et de savoir qu'on a bien souffert mais qu'on est allé au bout.

MASOCHISTE !!

Bon, je dis ca mais je suis pareil (En largement moins atteint hein mon JoJo...)

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