I-RMV, amalgame d’ultratrail, de C.O. et une petite dose de bitume
20 avril 2004, dans le fourgon qui m’emmène de Montpellier à Valencia en Espagne toutes les conversations tournent autour de l’ultra. Normal, je suis en compagnie d’ultra fondeurs, Gérard CAIN, Laurent BRUEYRE et Christophe MEDARD, organisateur du Raid Montpellier Valencia. Le Raid partira le lendemain de Valencia. En effet Christophe a choisi d’alterner le sens de course chaque année, cette année ce sera donc Valencia Montpellier.
Quand nous arrivons à Valencia le bivouac est déjà monté. Nous dormirons par deux sous les tentes. Mon compagnon sera Ernesto, le seul coureur espagnol. Je parle la langue de Cervantès et je serai son traducteur auprès des coureurs pendant la durée du raid. Ernesto BLASBERG est un bon coureur, 2ème et 3ème des 100km de Madrid, 7ème sur 70 du marathon du Nil, course de 300km par étapes. Il a également terminé Berlin Paris. Avec Laurent nous en faisons notre second favori derrière Gérard CAIN. J’enlève tout suspens, ils seront second (Gérard) et troisième (Ernesto) derrière…Laurent lui-même.
Il s’agit pour moi d’une première expérience sur une course par étapes, je suis coureur d’ultras d’un jour (100km et 24h) et j’appréhende cette épreuve au niveau de la récupération, d’autant plus que 10 jours auparavant j’ai participé aux 24h de St Fons. Je ne suis ni un forçat de l’entraînement ni habitué à ce type de profils, revêtements caillouteux ou sable mou. Mais j’aime la découverte et je veux tenter le pari (fou ?) de doubler 24h et Raid en m’alignant sur cette ligne de départ le 21 avril…
21 avril : Valencia - Sagunto, 44km
Avec Laurent nous avons décidé de courir cette étape ensemble car nous préférons opter pour un départ en douceur.
Une partie de cette première étape se court dans Valencia à la demande de la ville. Ce n’est certes pas la partie la plus intéressante, nous verrons moins de bitume par la suite. La ville a mis des moyens à notre disposition, nous sommes escortés par la police et la circulation neutralisée sur notre passage jusqu’à la sortie de Valencia.
A vouloir trop suivre notre road book plus que le fléchage, Laurent et moi nous égarons (addition : +2km) Il fait chaud parmi les champs d’orangers ! Les organismes ne sont pas encore habitués à la chaleur à cette époque de l’année. Au point de contrôle n°2 nous sommes cependant pointés en tête. On croit rêver mais nous sommes bien les premiers à avoir gravi la montagne qui mène au P.C. En effet, les coureurs partis devant ont « pris l’autoroute » et seront pénalisés. Nous choisissons d’arriver ensemble au Castillo de Sagunto et c’est main dans la main qu’avec Lolo nous prenons la tête du premier classement général.
22 avril : Oropesa - Benicarlo, 61km
Laurent et moi adoptons la même tactique au départ, on ne change pas une tactique qui gagne. Malheureusement dès le 3èmekm je suis contraint de lui demander de partir devant, mon genou ne veut pas suivre le rythme imposé (manque de récupération depuis les 24h de St Fons) C’est donc en solitaire que j’affronte les longues plages de gros galets sur lesquels il n’est pas facile de trouver ses appuis. Je finirai tranquillement cette étape. Je comprends que mon manque de fraîcheur sera un lourd handicap sur cette course et je préfère assurer pour aller au bout de l’épreuve. Finir sera déjà un exploit.
Gérard CAIN s’impose sur cette étape courue sous une pluie battante après la chaleur de la veille. Gérard fait à ce moment de la course figure de grand favori. Rappelons qu’il est le vainqueur de la Mauritanienne Race 200 2003 et second de la Trans 333 en Inde, en 2003 également.
La pluie n’aura pas permis à l’organisation de monter le bivouac et nous serons donc logés dans un hôtel de Peniscola.
23 avril : Ampolla - Cambrils, 58km
Succession de falaises et criques de sable mou, nous comprenons que l’épreuve se durcit, ce que nous croyions être la course n’était qu’un préambule. Au PC n°2 je suis encore dans la course. Je retrouve Laurent qui cherche le point de contrôle, mais les 17km de sable mou après la terrible ascension d’une colline causeront le début de mes malheurs. C’est là en effet que naît ma périostite qui sera invalidante jusqu ‘à l’arrivée.
L’étape est remportée par Hervé BRESSOLIER, ex-aequo avec Ignace LECLERCQ.
24 avril : Tarragona - Sitges, 57km
C’est l’étape que j’avais choisie pour m’exprimer un peu plus dans cette course, je l’avais indiqué à Laurent lors de la première étape. Malheureusement ma périostite me fait souffrir et je dois ralentir à partir du 7ème KM, laissant filer le temps sur les parties les plus roulantes. L’écart est important par rapport aux premiers, je suis déçu par la tournure que prend pour moi cette course et je sais déjà que la journée de repos sera insuffisante pour récupérer. Le final sur Sitges est terrible avec la montée du Belvédère.
Ignace est à nouveau vainqueur d’étape, cette fois ci en compagnie de Gérard.
25 avril : jour de repos
J’ai rejoins mon ami Manolo et ses frères pour le week-end. Il y a 23 ans que je connais Manolo. Il était à l’époque lutteur de niveau national (lutte gréco-romaine) Lui comme ses trois frères ont couru au moins un marathon dans leur vie, histoire de savoir en parler. C’est donc en compagnie de cette famille sportive que je passe ma journée de repos et tous sont enclins à penser que ma blessure mettra un terme à ma course. Le médecin de l’organisation me le confirme le dimanche soir, je vais devoir abandonner. Je me renseigne sur le degré d’aggravation de la périostite, selon le médecin la guérison sera ralentie, mais au-delà des risques, c’est la douleur qui m’interdira de poursuivre ma route. Selon lui je jetterai l’éponge dès le premier PC. Je décide cependant de repartir, je ne sais pas si j’irai au bout de l’aventure mais je tiens à aller le plus loin possible, demain chaque passage de PC sera une victoire.
26 avril : Blanes -Palamos, 61km
Christophe MEDARD nous l’annonce comme l’étape la plus difficile. La longueur ne me gêne pas, bien au contraire, le dénivelé+ non plus mais je vais souffrir terriblement dans les descentes où je n’arrive pas à poser le pied. Je reçois de nombreux appels téléphoniques, certains me conseillent d’abandonner, d’autres m’engagent à réfléchir. C’est tout réfléchi, des milliers d’appels de plus n’auraient rien changé. J’ai décidé d’aller jusqu’à la contrainte de l’abandon puisque le risque est quasi identique. Je pense à Jo LE GUEN pendant sa traversée à la rame et ses doigts de pied gelés. Je me dis que mes petites misères ne sont rien à côté de celles de Jo. Les monastères s’enchaînent sur les hauteurs de la Costa Brava. A défaut de pouvoir courir normalement j’en profite pour me charger les mémoires des belles images que nous offre ce raid. Dans la descente je suis repris par Marianne BLANGY alors que j’avais une avance conséquente dans la montée. J’arrive à relancer dans le final et je conserve la septième place à laquelle je me suis maintenant abonné. Mais que ce fut douloureux !
Devant la course prend forme, un trio de favoris se dessine avec Gérard CAIN, Ignace LECLERQ et Laurent BRUEYRE. Ils sont suivis par l’espagnol Ernesto BLASBERG puis Jean-Marie GARCIA, le facteur de Gignac (34) et Hervé BRESSOLIER, second de la précédente édition. L’homme du jour est à nouveau Gérard.
27 avril : Estartit - Empuria Brava, 45km
Au réveil il m’est impossible de poser la jambe gauche, la périostite me fait terriblement souffrir. Cette étape est annoncée comme une étape de transition mais je souffre même sur les parties plates. Encore des pensées pour Jo pour relativiser la douleur! De plus je me perds dans les marécages. Tout le monde s’est perdu ce jour là mais je l'ai été plus longtemps que les autres, ce qui n’arrange pas mes blessures. Je rentre au camping très réservé sur l’étape du lendemain, convaincu que je ne pourrai pas repartir. Le moral n’est pas au mieux mais je vais repartir et au minimum essayer de respecter les délais pour éviter l’élimination.
Laurent remporte l’étape et pour 5 minutes, il vient coiffer Ignace pour la seconde place du général.
28 avril :Figueras - Montesquieu les Albèress, 72km
Miracle dans la nuit, je n’ai pas invoqué St Jacques de Compostelle et pourtant, curieusement je suis mieux ce matin. Et puis l’étape est longue, ce qui n’est pas fait pour me déplaire. 72km avec 2000m de dénivelé plus, je vais pouvoir partir plus doucement et gérer. J’oublie enfin Jo LE GUEN, ce qui est bon signe.
Je fais l’équivalent d’un semi à quelques hectomètres devant Marianne et Philippe, je les entends revenir dans les descentes où je joue la carte de la prudence, puis je commence à accélérer progressivement. Je limite la perte de temps sur la tête de course par rapport aux jours précédents.
Devant la bataille fait rage. Cette étape causera des dégâts. Gérard conserve sa première place mais a cédé un peu de terrain. Il n’aime pas les profils accidentés et fait un début de périostite lui aussi. Ignace gagne l’étape et reprend …3 minutes à Laurent! Mais Laurent s’est fait un claquage à la cuisse, quant à Ignace, des douleurs aux jambes l’inquiètent pour la suite de l’épreuve. Qui sortira vainqueur ? Pour l’heure impossible de le dire…
29 avril : La Franqui-Cabane de Fleury (annulée)
En raison de pluies torrentielles, le départ est retardé. Les organisateurs doivent vérifier le parcours avant de lâcher les coureurs.
Ignace LECLERQ annonce son retrait. L’année passée l’épreuve était moins disputée mais cette année ça bagarre. Ignace est soucieux de sa santé et ne souhaite pas continuer dans ces conditions. L’annonce de l’annulation de l’étape pour intempéries n’y fera rien, il campe sur ses positions. C’est dommage, le cœur qui se serre, une poignée de paluche, Ignace prend le train…
30 avril : Cabane de Fleury-Marseillan, 53km
Là où je me perds à nouveau. Les routes sont inondées, parfois nous courons dans 40 cm d’eau. Laurent tente de porter assistance à une dame immobilisée dans sa voiture. Ce sont les pompiers qui viendront finalement à son secours. Les organisateurs ont du rebaliser le parcours qui ne correspond plus au road book. La périostite s’est à nouveau enflammée. Ouille ça fait mal là ! L’étape est pour moi inintéressante, je n’arrive même plus à profiter des parties plates pour compenser une partie du temps perdu en descente. Puis je me perds à nouveau (coût de l’opération, environ une heure) Heureusement, il ne reste qu’une étape.
Ernesto BLASBERG remporte l’étape devant Jean-Marie GARCIA. Gérard termine péniblement, périostite à chaque jambe. C’est quelqu’un qui sait se battre, et il fera tout pour aller au bout lui aussi, il me l’a dit. Laurent prend la tête du classement général.
1er mai : Frontignan - Montpellier, 45km
La der commence par un mur, une ascension terrible dans le massif de la Gardiole (34) D’autres côtes et descentes suivront. Elles seront terribles pour moi, surtout les descentes. Je ma prends à hurler en posant le pied. Heureusement, après ces 20km dans le massif, l’arrivée sur Montpellier est plate et miraculeusement j’arrive à courir. Est-ce l’odeur de l’écurie ? Je monte à 11km/h pour finir. Je n’ai plus rien à gagner mais je suis heureux de pouvoir finir ainsi même si je sais que ce n’est pas le meilleur remède pour mes tendinites.
Lolo notre nouveau « maillot jaune » est gonflé à bloc. Il gagne l’étape devant Ernesto. Gérard souffre toujours autant de sa double périostite mais conserve facilement sa seconde place.
Nous sommes huit classés sur dix partants. Je termine à la 6ème place.
Le podium:
1- Laurent BRUEYRE
2- Gérard CAIN
3- Ernesto BLASBERG
1ère féminine:
Marianne BLANGY (7ème au scratch)
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