Récit de la course : La Trace des Fées 2004, par Le Hareng Saur
La Trace des Fées
La Trace des Fées - 30/05/2004 - 100kms - 3000 D+
1. L'entraînement d'avant les Chapeliers
Et pourtant, j'avais mis toutes les chances de mon côté;.
D'abord, j'avais voulu tester les conditions d'entraînement
extrêmes. Dans le courant du mois de février, par deux
fois, oui, vous lisez bien, deux fois, j'avais fait une longue sortie
avec le Mogwai.
Ceux qui le connaissent savent que déjà passer 1/4 heure
en sa compagnie tient du masochisme à l'état pur.
Alors, vous pensez bien, faire deux fois trois heures à 15 jours
d'intervalle, ça mérite une médaille.
Donc, moralement, j'étais prêt à tout.
Même si G.W. Bush avait décidé d'instaurer une
démocratie sur le parcours de la Trace des Fées ce
dimanche, j'avais de toute façon vécu bien pire.
Et puis, après ces deux matinées de souffrance, alors
que, lors d'un jogging du club, j'étais en train de montrer
à l'Empereur comment on fait pour avancer à un certain
rythme, paf! La contracture au mollet droit.
Résultat: 15 jours de repos total, et ce, un mois pile (le jour
de Pâques) avant le Trail des Chapeliers (57kms , 1200 D+) qui
devait me servir d'entraînement pour cette Trace des Fées
du 30 mai.
A 15 jours des Chapeliers, je me suis remis à trottiner tout
douuuuuucement sur 6-7 kms.
La semaine avant les Chapeliers, une sortie (bien agréable,
celle-là!) avec l'Empereur sur le tracé des Caracoles
(22kms, 600 D+).
2. Les Chapeliers - 11/04/2004 - 57kms - 1200 D+
Autant vous dire que ça n'a pas vraiment suffi pour que je me
sente bien sur les 57kms. A vrai dire, j'ai essayé de
suivre les trois individus du club (Pascal, l'Empereur et la
Clète).
Dans un club, il y a toujours des gens qui ont le sens des autres, et
d'autres pour qui le "chacun pour soi" est une philosophie.
Je ne veux ici dénigrer personne, mais, des trois "amis" du
club, il n'y a que la Clète qui, voyant que j'étais
à l'article de la mort, que la Clète, donc, qui m'a
attendu, supporté, réconforté. Bref, seul
lui a été humain avec moi.
Les autres? Quels autres? Je n'ai vu personne
d'autre. J'ai découvert un ami et deux vautours tournoyant
autour de ma carcasse.
Quand je dis "ami", le mot est faible, d'autant plus que chaque fois
que je disais quelque chose de désagréable à
propos du Mogwai, il était d'accord avec moi. Un type
bien, la Clète. Si, si!!
3. L'après Chapeliers
Après quelques 15 jours de repos relatifs, j'ai repris le
collier sérieusement avant la Trace des Fées, qui
était mon gros objectif. Une dernière longue sortie
de 4h sur 34kms et 800 D+ sur le tracé des Caracoles (avec
Pascal, l'Empereur et mon ami la Clète), 15 jours avant la date
des Fées, devait terminer ma préparation.
Tout s'est bien passé. Beau parcours, temps
agréable, copains bien aussi.... contre toute attente.
Bref, le moral y était.
4. La Trace des Fées - 30/05/2004 - 100kms - 3000 D+
Nous sommes arrivés la veille du trail vers 22h30.
Accueil hyper-sympa de la part du comité d'organisation dans le
gîte à Arbespine, près de Spa.
Nous ne pouvions décemment refuser le verre qu'ils nous
proposaient, et c'est seulement vers 23h30 que je me suis mis au lit:
tout seul dans la prairie, loin des ronflements et des craquements,
j'ai bien, très bien dormi.
Réveil à 4h par un Empereur déjà à
l'affût de LA photo sensation. Pensez bien: un aveugle saur qui
dort et qui se tait, ça vaut le coup!!
Petit déjeûner sympa.
Petite causerie d'avant-course.
Puis pan! A 5h20 départ officiel des 143 cinglés pour le
100 Kms.
Nous voilà donc partis, Pascal D. et Olivier G. devant,
l'Empereur, la Clète et moi tout en queue de peloton.
Notre but à nous, c'est de terminer. D'après mes
calculs, je me disais que si on faisait 15h, ce serait pas mal, vu la
dénivelée (3000 D+), mais on n'en faisait pas une
fixation.
Départ mollo, donc. A chaque grimpette, marche cool.
Après 3 ou 4 kms, nous voilà partis sur une voie de
garage. A un moment nous voyons des flèches, certes, mais
dans l'autre sens. Aïe! Puis on voit un mec qui était
derrière nous de l'autre côté du ruisseau à
une centaine de mètres de nous. Nous coupons à
travers tout pour rejoindre le parcours et nous voilà repartis.
De temps en temps, des gens de l'organisation sont sur le parcours pour
nous encourager.
Un peu avant le 18ème km, grosse descente vers Spa, lieu du
premier ravitaillement en eau. On prend son temps, on discute le
coup, on remplit les poches à eau et zou, nous voilà
repartis.
Traversée de Spa, quelques montées, descentes mais rien
de bien difficile. En fait, les grosses difficultés
devaient, suivant le schéma, se situer entre le 35ème et
le 85ème km : six belles côtes de 300 à 450m de
dénivelée.
Avant le 35ème, belle descente technique le long d'un beau
ruisseau. Je commence à me sentir des ailes, après
un début avec les jambes en coton pendant 25kms.
Premier ravitaillement à Nonceveux : premier coup au
moral. Les félons organisateurs ont placé pour
démoraliser les concurrents un obstacle inattendu : un
Mogwai. Ils espéraient que, suite à ce coup de
Jarnac, j'allais abandonner, mais c'est bien mal me connaître.
Les 20 minutes de mon ravitaillement ont été
scandés par les sarcasmes du dit Mogwai, qui, soit dit en
passant, s'était bien entendu trouvé une lamentable
excuse pour ne pas participer. Je tenais à le dire.
Plutôt que de m'abattre, la vue du Mogwai m'a plutôt
dynamisé. Vous imaginez Mike Tyson, jusque là bien
calme, à qui vous dites malencontreusement qu'il est un peu
efféminé. Eh bien, au lieu de l'abattre, ça
l'énerve, le gars. Et hop, il vous met un pain que vous
avez du mal à vous relever. Pas tout de suite, en tous
cas!!
Après ce coup du sort, donc, nous repartons, tous les trois,
encore bien fringants, pour la première des grosses
difficultés. Quelques kms le long de l'Amblève puis
un dénivelé de 450m jusqu'au km 43.
Deuxième coup du sort. Ah! ils multiplient les
difficultés. Comme si c'était pas assez dur.
Encore le misérable Mogwai. Heureusement qu'il y a Tony et
Fabienne, l'épouse de Pascal, qui le tempèrent dans sa
saurerie (si, si, j'y tiens!!) haranguesque. Il est pire que
jamais. Mais, je vous dis, j'avais passé deux fois trois heures
avec lui, alors, c'est pas pour 10 minutes de plus.
Une descente vers Stoumont (km 50) et le début de la
deuxième côte, avant de redescendre vers Coo
(62ème) où a lieu le deuxième
ravitaillement. Nous y arrivons en 8h48, je crois. Il faut
dire que, les derniers hectomètres, j'avais un peu
traîné la patte, non pas parce que les deux autres,
toujours aussi fringants, allaient trop vite. Non, non:
l'idée de revoir le monstre...
Après une petite demi-heure passée au ravito, et nous
voilà repartis pour la troisième grosse difficulté
du parcours. Ca fout le moral en l'air de voir des gens monter
sur le téléphérique ce que nous faisons
péniblement en marchant. C'est une côte où il
était impossible de marcher dans le sens de la pente : il
fallait faire des diagonales pour adoucir la difficulté.
Pendant la montée, je reçois un message d'Olivier G. qui
a abandonné à Trois-Ponts, au km 70. Il a mal
géré son stock d'eau et est resté 3/4 heure sans
boire. Quand il a eu de l'eau, il en a trop bu.
Résultat: diarrhées, ... abandon.
Nous arrivons tous les trois à Trois-Ponts.
Remontée vers la Tour Leroux pour la quatrième
difficulté du jour. La Clète commence à
sentir une espèce de périostite qui va le faire souffrir
atrocement pendant 5kms.
Me souvenant de sa gentillesse au Trail des Chapeliers, je lui propose
de le porter jusqu'à l'arrivée, mais il refuse. Il
veut continuer. Un peu plus loin, il nous dit son intention
d'abandonner à Stavelot (km 75). L'Empereur et moi
trouvons que c'est une sage décision, à voir son pas de
plus en plus difficile.
En entrant dans Stavelot, nous voyons le beau-frère de la
Clète, qui le prend en charge. L'Empereur et moi
décollons, toujours frais.
Un peu avant, j'avais fait la remarque à mes compagnons que je
me sentais plus frais au km 70 de la Trace des Fées qu'au km 30
des Chapeliers.
Derniers sarcasmes de mon ennemi intime, dernière grosse
épreuve pour moi. Après Stavelot, tout devrait
aller bien, puisqu'il nous a dit qu'il filait vers l'arrivée, le
bougre. Bien sûr, là, il y a de l'Orval à
volonté. Alors, vous pensez bien qu'un trail, ça ne
l'intéresse que très peu. Tant qu'il peut boire, il
oublie tout.
Voilà, nous voilà à deux pour les 25 derniers
kms. Encore bien en forme.
Directement après Stavelot, cinquième grosse côte
pour monter vers un beau sentier technique où il est cependant
difficile de courir. La pluie commence à tomber doucement.
Le ravitaillement suivant est au km 85. Nous arrivons à un
endroit où une petite dizaine de coureurs sont
réunis. Je crois que c'est le ravitaillement, mais il
reste encore 4 kms en côte avant d'y arriver. En fait, il y en a
plusieurs qui ont décidé d'abandonner à cet
endroit.
Après une côte interminable, nous arrivons enfin au
ravitaillement. Il ne reste plus qu'à descendre sur Spa
(km 92) puis à rentrer.
L'Empereur se sent des ailes et se trouve régulièrement
de 20 à 50m devant moi, mais il m'attend. Traversée
de la Fagne, terrain spongieux au-dessus de Spa, avant de piquer par un
beau chemin tortueux vers ce qui était le premier
ravitaillement.
On repart enfin vers les 8 derniers kms et ça va toujours.
On y est, on arrive.
Patatras!! Pour ceux qui ne connaissent pas le Mogwai, c'est une
espèce de virus (ou plutôt un cheval de Troie) qui
ne fait pas son effet tout de suite. La période
d'incubation est, dans l'avatar que j'ai rencontré à la
Trace des Fées, de 67 kms. J'ai vu le Mogwai au
35ème km, et ce n'est qu'au km 92 qu'il a fait son effet.
Alors que tout avait été bien jusqu'alors, il a
commencé à faire ses effets. Je ne voyais plus le
bout, l'arrivée reculait au fur et à mesure que
j'avançais. De plus, je croyais les côtes
terminées, alors que ce n'était vraiment pas le cas.
En plus, je me rendais compte que je courais avec un menteur.
L'Empereur, me trompait effrontément sur le nombre de kms qu'il
restait. Je pensais 4 alors qu'il en restait 6. Je pensais
1,5 (ce qu'il confirmait effrontément) alors que c'était
3.
A 1km de l'arrivée, l'Aveuglette (qui avait couru
l'après-midi les 20 kms de Bruxelles) est venue à notre
rencontre, nous disant qu'il restait une côte très
dure. Alors l'autre, là, l'effronté menteur, qui
n'avait jamais fait le parcours : "Mais non, il n'y a plus de
côte". Eh bien si, c'en était une, mais si petite
par rapport aux autres, et si goûtue peu avant l'arrivée.
Arrivée en 16h13, fiers de nous. Nous voilà
Zoobornards, option trail.
Pendant tout ce trail, j'ai reçu plein de coups de
téléphone, d'amis, de collègues, de l'Aveuglette,
qui m'ont soutenu. Du Mogwai aussi, mais ceux-là,
c'était pour voir comment je sombrais. Mais ceux qui m'ont
fait le plus de plaisir, ce sont ceux que m'ont donnés mes
enfants, tout au long de la journée.
Merci à tous.
Merci aussi aux organisateurs, les Coureurs Célestes, qui ont
fait de cette journée une très grande
réussite. Leur sympathie, leur disponibilité, leur
gentillesse resteront dans un coin de ma mémoire.
S'ils avaient pu nous protéger du Mogwai, leur course aurait
été parfaite!!
L'Aveugle Saur
1 commentaire
Commentaire de oufti posté le 28-12-2006 à 18:48:00
Avec du retard... bravo!
Dommage que je ne faisais pas de trail à l'époque, le parcours m'aurait enchanté puisque j'ai habité pendant une vingtaine d'années à Coo. La montée le long du télésiège en particulier...
A bientôt sur une prochaine course.
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