Récit de la course : SwissPeaks Trail - 360 km 2024, par vuillerl

L'auteur : vuillerl

La course : SwissPeaks Trail - 360 km

Date : 1/9/2024

Lieu : Oberwald (Suisse)

Affichage : 268 vues

Distance : 395km

Objectif : Terminer

3 commentaires

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395km de bonheur dans le Valais

 

Plus de 9 mois d’attente avant le départ pour cette grande balade qui a concentrée mon attention sur cette année 2024. Ce cadeau de Noël, je ne suis pas prêt de l’oublier!

J’ai fait une bonne préparation, 60 000m de D+ sur les trois derniers mois, particulièrement en Ariège, terre de la PicaPica. Pour finaliser cette prépa, je participe à la Picariège deux semaines avant le départ de cette SwissPeaks 2024.

J’arrive très motivé pour cette aventure bien que j’aie l’impression d’être un nain parmi tous ces géants qui participent à cette épreuve. En discutant dans le train pour le départ, je me rends compte que la majorité des coureurs ont déjà fait ce type distance. Pour cette traversée du Valais, nous sommes accompagnés par les participants qui font le retour de la SP660km avec déjà 320km dans les jambes…

Oberwald – Fiesch (51km – 3200m D+ - 9h35)

C’est parti sous un soleil radieux, bien que l’on nous prédise un temps orageux sur le parcours. Il y a une belle ambiance pour ce départ, les deux premières ascensions sont assez roulantes, pas de difficultés particulières, les balcons donnent sur les glaciers et je me régale de ce cadre somptueux pour ce début de course.

On arrive à Reckingen avant la première montée sèche de l’aventure. Super ravito avec du saucisson proposé à la betterave, aux noix, fumé…. On sent une réelle volonté de bien accueillir les coureurs, c’est agréable et motivant!

La balade se poursuit et la montée sur le sommet de Chummefurgge est longue et raide. La vue est splendide avec cet ensemble de sommets au loin noyé dans une mer de nuage. Cette descente en faux plateau descendant est roulante. On arrive à un nouveau ravitaillement du côté de Chäserstatt, avec du Chili Sin Carne, un régal! Ensuite, on traverse une longue passerelle et on arrive à la première base de vie, à Fiesch. Tous les voyants sont au vert. Je prends 30 minutes de pause, je mange des pâtes au réfectoire et repars avant la première nuit. 

Fiesch – Eisten (108km – 7400m D+ - 25h41)

Les difficultés commencent avec une nouvelle montée raide et sacrément longue, près de 2000m de dénivelé positif à grimper, il fait bien froid pour cette première nuit. On bascule enfin sur une descente nous amenant sur un ravitaillement extérieur ou je ne reste que peu de temps pour poursuivre sur une section descendante bien pentue, direction Grund. S’ensuit une nouvelle ascension pour le sommet de Nanzickle, 1350m de D+ sur 5,5 km. Que ce fut dur! Cette montée dans ces pierres fut plus qu’usante, particulièrement avec ces températures glaciales. J’arrive vidé au ravitaillement de Lengritz, à nouveau extérieur, alors que cela fait des heures que je ne pense qu’à me réchauffer. Je ne fais qu’une halte rapide espérant pouvoir me réchauffer au plus vite.

On rentre dans de la purée de pois, nous glaçant un peu plus avant un levé de soleil salvateur et une vue magnifique sur ces montagnes et leurs mers de nuage.

Le ravitaillement de Giw est également extérieur mais bien plus accueillant sous ce soleil. On repart pour la base vie d’Eisten, la descente est assez technique dans des sous-bois avec pierres et racines en devers. La météo alterne entre pluie et soleil et j’arrive enfin à me réchauffer. Je me sens bien vidé ayant beaucoup de mal à récupérer après ces deux montées tellement usantes… La base de vie ressemble à un gymnase ou on peut se poser, j’essaye de dormir sans succès, picore ça et là avec de la polenta et repart sans bien récupérer. J’aurai dû prendre bien plus de temps…

Eisten – Grimentz (167km – 11850m D+ - 48h40 – 1h45 de sommeil)

Je repars en début d’après-midi, il fait chaud. On commence par une belle montée bien raide en foret avant d’arriver à la station de ski d’Hannigalp, il y fait bon. On bascule par une descente roulante qui nous amène au ravito de Zum See, un restaurant super chaleureux ou on peut manger du Cholera, spécialité Haut-Valaise, qui passa super bien.

La descente se poursuit avant une montée sèche qui se finit par le sommet de Augstbordpass dans un pierrier bien difficile, d’autant qu’il se passe de nuit avec une dette de sommeil qui commence à bien se faire sentir. Je n’avance plus, je fais plusieurs pauses avant une descente plus que longue nous amenant au ravitaillement de Bluömatt. C’est une grande grange ou nous sommes accueillis chaleureusement  avec de la raclette, quelle bonne surprise! Bien que cette grange ne soit pas chauffée, on peut aller dormir sur l’étage sous des plaides épaisses. La fatigue étant bien présente, j’espère arriver à dormir un peu, malheureusement sans succès. Je ne me suis assoupi qu’une quinzaine de minutes à peine.

Incapable de me reposer, je fais le choix de repartir me disant que je vais aller me reposer à la troisième base vie 20km plus loin. Ça repart pour l’ascension du col de Forclettaz, la montée commence bien, j’avance, mettant un pied devant l’autre. Le temps avançant, je me sens de plus en plus fatigué. Le soleil se lève pour cette troisième journée, le cadre est toujours aussi beau mais l’énergie me fait défaut. En plein milieu de cette ascension, je me fais rattraper par Lucas Papi et son acolyte. Il vient me voir et me conseille vivement de faire une micro-sieste au prochain ravito. Cette marque d’attention m’a fait le plus grand bien mais m’alerte sur mon état. Je suis tel un « zombie » selon Lucas… Je me ressaisis pour atteindre le col de la Forclettaz ou un ravito extérieur nous attendait. Il ne restait qu’une grande descente de 10km avant la base de vie de Grimentz et je décide d’attendre celle-ci avant d’essayer de dormir. Le parcours dans les sous-bois de Grimentz est plat et vraiment long pour accéder à cette base de vie.

Quelle base de vie ! Le top du top ! La base de vie est 5*, j’ai une chambre pour moi, je peux prendre ma douche, me changer, dormir (1h30 de sieste). Ensuite j’ai droit un massage revigorant. L’alimentation n’est pas en reste avec des œufs brouillé, rösti, pates, …

Je sors de la base de vie, bien, commençant à m’adapter à cet effort et intégrant le fait que je doive bien plus manger et dormir, je commence à prendre de plus en plus de plaisir dans cette aventure.

Grimentz – Thyon (208km – 15500m D+ - 69h – 3h45 de sommeil)

Je repars en début d’après-midi, il fait bon et beau. Direction le barrage de Moiry, la montée se fait facilement, je fais la connaissance de Thierry avec qui je vais faire une bonne partie de chemin. Le cadre est somptueux, la couleur de l’eau du lac du barrage est turquoise, magnifique avec les glaciers au-dessus, quelle régalade! On arrive dans les alpages de Torrent ou un ravito nous attend. On a droit à des pancakes à la demande, jambon/fromage, nutella, encore une fois au top!

La balade se poursuit par l’ascension du col de Torrent, encore un décor merveilleux sur ce barrage et les glaciers ! Direction Evolène ou on a une longue descente bien roulante. Je me sens super bien, le masseur m’a rendu des jambes toutes neuves et je suis bien dans cette section. Je peux courir jusqu’à ce village super charmant, Je m’arrête à ce ravitaillement ou je prends une heure de sommeil supplémentaire qui me fait le plus grand bien.

Je quitte Evolène avant la nuit, direction le col de la Meina, je n’ai que peu de souvenir cette ascension nous amenant sur la base de vie de Thyon. Bien que celle-ci ne me semblait pas loin en consultant le roadbook, l’accès à cette base fut pénible et difficile, le manque de connaissance du parcours m’a couté en énergie. J'étais persuadé d'avoir raté la base vie dans cette section technique et usante. J’y arrive exténué pour un repos plus que nécessaire. J’ai pu y dormir une heure, prendre une bonne douche et manger en quantité.

Thyon – Slavan (292km – 21000m D+ - 102h – 6h de sommeil )

Je repars de la base vie en début de matinée pour le col de Charousse, le début de l’ascension est agréable, il fait doux. Me sentant encore bien fatigué, je décide de faire une petite sieste à l’ombre, dans de l’herbe, un petit bonheur de 15 minutes qui a fait du bien mais m’a laissé vaseux à la reprise dans cette ascension. On rentre dans une section bien minérale qui se termine par un beau pierrier bien technique et raide.

On arrive sur la station de ski de Verbier Saint-Bernard avec une belle descente bien roulante que je me fais plaisir de descendre en courant jusqu’au ravito de Lourtier, ou une bonne raclette m’attend. Encore une fois, un vrai plaisir! La qualité des ravitaillements et la gentillesse des bénévoles rendent ces moments particulièrement inoubliables. Une nouvelle nuit s’annonce, les conditions météorologiques se détériorent, le vent se lève, le froid est de plus en plus présent. La montée au Mont Brulé se passe pourtant au mieux, les jambes sont de plus à l’aise, sans parler de la descente suivante, pourtant terriblement longue. Sur la descente sur Orsières, je rattrape plus d’une dizaine de participants. Je suis de mieux en mieux dans cette course. Malgré une absence de rubalise sur le parcours ayant généré un peu de stress, j’arrive à Prassurny, ou une bonne pause s’impose. Je prends une heure de sieste avec un bon repas et je repars. La météo se dégrade de plus en plus. Plus de Fenêtre d’Arpette, un parcours de repli est mis en en place avec le passage par Bovine. Il pleut à grosses gouttes, je retrouve Thierry et on passe le lac de Champex, la montée de Bovine sous la pluie et le vent. On ne verra pas le Mont-Blanc mais les jambes sont là et j’avance à bonne allure sur ces sections montantes avant d’arriver au ravitaillement du col de Forclaz. Encore un ravito généreux, on nous propose des fajitas et des hot-dogs !

Il reste une dernière ascension  par le Mont de l’Arpille que nous ferons sous la pluie. On se rapproche de Salvan, 5ème base vie. Ca se passe de mieux en mieux, je suis à l’aise, en montée et en descente! Le terrain est glissant avec toute cette pluie, je me prend une belle pelle dans la descente tout proche de la base vie. Je ressens alors une petite gène au niveau de la cuisse droite, rien d’alarmant. Enfin, j’arrive dans un bunker à Salvan ,lieu de la base de vie.

C’est assez spartiate, mais les basiques sont là, douche, lit et repas. 1h30 de sieste - Je me fais masser en demandant une attention particulière sur cette cuisse. Tout va bien…

Salvan-Morgins (340km – 24000m D+ - 122h45 – 8h30 de sommeil)

Je repars en début de soirée, direction le col de Susanfe, l’ascension du col de la Golette étant annulé à cause des conditions météorologiques. Ca monte raide, un enchaînement d’escaliers aux abords de cascades laisse imaginer des gorges bien encaissées. La nuit est chargée, le brouillard est réellement dense, on ne voit pas à deux mètres, même avec la frontale. On entend des aboiements de Patou qui ne sont guère rassurants dans cette section. ils sont probablement parqués. On poursuit aux bords d’un barrage et on fait une pause sur un ravitaillement dans une chaufferie. Des pizzas nous attendent avec une ambiance chaleureuse. L’ascension se poursuit dans du bien raide et caillasseux. On atteint enfin le col de Salanfe sans aucune visibilité dans ce brouillard épais. Dès les premiers pas de cette descente, ma cuisse se réveille et je ressens une vive contracture sur le haut du genou droit. C’est le début des difficultés, je ressens une gêne lorsque je cours, voire quand je marche en descente. Je prends sur moi me disant que je demanderai de l’aide à la prochaine base de vie, sauf que celle-ci est dans 30 kilomètres… On descend une partie probablement magnifique de jour, les gorges du Dailley. On descend grâce à des chaines sous une pluie continue et un vent glacial. Avec cette cuisse endolorie, je suis dans le dur mais il est hors de question de lâcher ! J’avance lentement dans ce passage que je ne suis pas prêt d’oublier. La descente se poursuit sur une section encore technique qui m’amène vers le prochain ravitaillement. Celui-ci est exterieur, une bénévole me met de la pommade sur ma cuisse pour me soulager un peu. Je suis au ralenti avec ce handicap mais j’avance et c’est le principal! On nous informe que le prochain ravito a été supprimé et que le prochain ravitaillement est dans 20kilometres, à la base de vie de Morgins. Je repars avec ma cuisse et mes doutes. Le levé de soleil va me ravir, la météo s’éclaircit et le cadre devient somptueux, à en oublier mes douleurs. Je passe les arêtes de Berroi avec bonheur. Que c’est beau! Il s’ensuit une descente bien boueuse avant l’ascension aux Portes de l’Hiver ou les paysages sont juste exceptionnels, surtout avec cette lumière! Une dernière descente bien technique teste ma résilience et on arrive sur un faux plat descendant proche de cours d’eau sous ce soleil radieux. Cette section nous amenant à la base de vie de Morgins est interminable ! Quelle frustration de ne pouvoir courir normalement dans cette section, ça travaille le mental. Enfin j'arrive à la dernière base de vie!

C’est un hôtel, encore une fois 5*. Une chambre pour moi, douche, repos et massage, le kiné s’occupe de ma cuisse, me rassure, me dit que ça va prendre du temps avant d’aller mieux… Je mange pas mal de  charcuterie, fromages et hachis parmentier. Je prends bien mon temps dans cette base vie ne voulant pas arriver de nuit à au Bouveret.

Morgins – Le Bouveret ( 395km – 26700m D+ - 143H35 – 8H30 de sommeil)

Je repars en fin de journée pour cette dernière partie, convaincu que je vais aller au bout, je suis particulièrement ému, je vais réussir cette aventure, ça résonne en moi!
Cette nouvelle ascension nous amène sur une vue sur les Dents du Midi, ou on a un magnifique soleil couchant. On arrive sur le ravito de Conche, encore un chalet chaleureux, Pancake à la demande, on n’a pas forcément envie de repartir… La dernière nuit commence, il fait frais ; c’est assez venteux dans cette section assez longue pour accéder au ravito suivant : le Chalet de Blansex ; ça monte, ça descend, ma cuisse m’handicape toujours mais j’avance malgré tout. Ce ravito est une grande tente ou il fait bien froid. On nous propose Rosti ; polenta, raclette, … Encore une fois au top ! je me régale et repars pour le prochain ravito du Taney ou je ne fais qu’une brève halte, frigorifiée dans cette nouvelle tente. On enchaine par l’ascension de la dernière côte significative, le Pas de Lovenex. On y arrive juste avant le levé de soleil et le spectacle s’annonce sublime sur ces dernières montagnes. La descente est technique dans ce pierrier et ma cuisse se fait toujours sentir. Le soleil se lève sur ces montagnes rougeoyantes. On passe un petit coup de cul par le col de la Croix et on poursuit la descente sur le dernier ravitaillement du Grand Pré.  Magie du moment, ma cuisse droite ne me fait plus souffrir, je peux attaquer la dernière côte et surtout les 10km de descente en courant, je n’ai plus mal nulle part. Bien que cette descente soit particulièrement technique, je cours dans le devers, les racines et les pierres sur les hauteurs du Lac Léman, je cours sous ce soleil qui est éclatant! Il me reste 2km lorsque l’on arrive aux bords du Lac, j’ai tout donné dans cette descente et j’ai les cuisses en feu. Je fais quelques centaines de mètres en marchant au bord du Lac avant de faire le dernier kilomètre en courant pour en finir avec cette course inoubliable!

 

Epilogue

Quelle aventure !!! J’ai adoré cette course. Le parcours est magnifique, les ravitaillements et la logistique sont au top, les bénévoles d’une gentillesse et d’une bienveillance remarquable, je n’ai pas assez de superlatifs pour vous partager la reconnaissance que je peux avoir pour toutes ces personnes qui ont rendu cette expérience exceptionnelle !

Pour une première expérience de ce type de format, j’ai été gâté !

De mon côté, Il va me falloir du temps pour réaliser ce que j’ai fait et « digérer » tout ça.  J’ai beaucoup d’enseignements à en retirer, tant sur la partie alimentaire, que la gestion du sommeil. Idem pour le contenu de mon sac d’hydratation ainsi que mon sac suiveur…

Je suis  très surpris de ma capacité à pouvoir courir si longtemps malgré cette contracture à cette cuisse, disparue depuis la fin de cette course…

Vivement de nouvelles aventures!

 

 

3 commentaires

Commentaire de elnumaa[X] posté le 17-09-2024 à 13:47:48

whaou !! merci pour les précisions et le nom des lieux , j'avais tout bien zappé ^^
comme toi ce fut une fabuleuse aventure , de loin la plus intense et réussie .
j'ai trouvé l'organisationnel exceptionnelle et l'accueil au top .
voila
Bonne récup !

Commentaire de galette_saucisse posté le 17-09-2024 à 13:57:10

Bravo, belle gestion pour une première XXL! On sent que tu as bien kiffé. Tu as dû me passer entre Fiesch et Eisten, puis je suis repassé devant toi sur la portion Salvan-Morgins, dommage on s'est loupé, en même temps j'étais pas tout le temps super conscient.
Merci pour ton récit qui me fait raffraichir la mémoire.

Commentaire de Lécureuil posté le 19-09-2024 à 08:42:05

Bravo pour cette belle première qui en appelle certainement d’autres ;-)

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