L'auteur : stephnoz
La course : SaintéLyon
Date : 2/12/2023
Lieu : St étienne (Loire)
Affichage : 1119 vues
Distance : 78km
Objectif : Pas d'objectif
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Chronique d'une galère annoncée...
Sur un coup de tête je prends tardivement un dossard sur la SaintéLyon, car je souhaitais faire un dernier trail long en fin d'année. Cette course ne m'avait jamais attiré, mais il y en a peu en fin de saison.
Je visais initialement le grand trail des Templiers, mais comme je m'y étais pris un peu trop tard pour l'inscription, j'étais du coup sur liste d'attente sur cette course. Quand un dossard s'est finalement libéré sur les Templiers, je m'y suis inscrit et l'ai couru ; et cette SaintéLyon est devenue pour moi la course de trop de l'année...
Sans grande motivation, je me suis donc préparé à un week-end peu reposant, dans l'enchaînement de plusieurs semaines intenses au boulot. TGV Massy-Lyon le samedi matin suivi du Tram lyonnais, et j'arrive à la halle Tony Garnier.
Un mot me vient instantanément en tête à l'intérieur : c'est l'usine ! J'ai l'impression de retrouver les retraits de dossards du marathon de Paris ou de l'EcoTrail ; tout je ce que j'ai essayé de fuir ces dernières années avec des courses plus confidentielles.
Un afficheur géant indique le temps restant avant le départ : plus de 9h30 à attendre ! 😲
Aucun endroit pour s'installer avec un minimum de confort dans cette halle... Je m'assois sur un strapontin sur les gradins. J'ai besoin de repos avant la course alors je m'allonge sur 4 strapontins et je mets un tour de cou sur mes yeux pour tenter de sommeiller. Au bout de 15 minutes un vigile me réveille en me disant que ça n'est pas possible de dormir ici. N'importe quoi, on fait comment quand on n'est pas lyonnais ?! Ca commence mal cette course...
Je monte tout en haut des gradins et je me "dissimule" entre deux rangées de sièges pour reprendre ma tentative de sommeil tout sauf profond. Vers 17h00 je prends le chemin vers les bus qui font la navette vers Saint-Etienne ; c'est déjà la nuit quand j'arrive au départ des bus. L'organisation a dû mobiliser tous les bus de la région, ils partent à la chaîne !
Dans le bus je discute avec mon voisin un jeune gars sympa qui est venu du nord avec sa copine. Le trajet dure 45 minutes environ et on nous dépose à 250 mètres du centre d'exposition de Saint-Etienne, lieu de départ de la course. Il fait déjà bien froid...
Dans le centre d'exposition, c'est encore pire que dans la halle Tony Garnier ! Des coureurs partout, assis ou allongés, ou encore faisant la queue (quelques dizaines de mètres) pour les toilettes ou la pasta party (quelques centaines de mètres 😣).
Je me change pour mettre ma tenue de course, finaliser la préparation du sac puis je me mets dans la longue file pour la pasta party. Après ce repas, il me reste encore 4 heures d'attente ; je me trouve un petit espace pour m'allonger sur le sol froid et tenter de dormir.
Mauvais choix d'endroit ! Je suis à 20 mètres de la porte d'arrivée de ceux qui font la Lyon-SaintéLyon. Dès qu'un coureur arrive, de l'air glacial arrive sur moi et je grelotte. Je finis par me déplacer plus au centre de la salle, pas très loin d'un chauffage qui vient du plafond ; ici c'est plus agréable.
Les heures passent lentement, très lentement. J'arrive quand même à sommeiller par intermittence. Et arrivent enfin j'entends les annonces du départ prochain. L'endroit où j'étais me permet d'être plutôt bien placé pour sortir de la salle, dans la nuit et le vent glacial.
On se serre dans les rangs pour couper le vent. Il y a une bonne ambiance, mes voisins font des blagues.
Et puis on assiste à un spectacle de drones (!) allégorique sur la SaintéLyon et son sponsor principal Asics. La plupart des coureurs sont peu réceptifs, a fortiori dans les conditions météo que nous avons. C'est joli mais parfaitement inutile et vraiment pas du tout dans l'esprit trail...
Avec le froid l'organisateur décide de réduire le quart d'heure (inutile) qui sépare chaque vague. Ca avance relativement vite. Je suis dans la troisième vague, après les élites et les dossards "perf". Rien à voir avec mes performances, j'étais juste bien positionné dans la salle 😉.
C'est enfin le départ !
Les 12 premiers km de la course sont essentiellement sur bitume. Il va falloir s'y habituer, il y en aura beaucoup (trop). Avec les premiers dénivelés qui arrivent, on aperçoit les longues cohortes de frontales dans la nuit. Le peloton s'est étiré, mais à aucun moment, et ce jusqu'à la fin de la course, je ne me retrouverai seul.
Au km 19, premier ravitaillement à Saint-Christo-en-Jarez. Il y a pas mal de choses à disposition : bananes, quatre-quarts, chocolat, barres de céréale, bouillon, des boissons (eau, coca, Saint-Yorre) Ce sera le même contenu sur les trois premiers ravitaillements. Ca manque quand même d'aliments plaisir (saucisson, qu'on n'aura que sur les deux derniers ravitaillements) et de nouilles ou vermicelles dans le bouillon. Je repense à l'animateur qui avait dit avant le départ que les ravitaillements étaient très copieux 🙄.
Le ravitaillement est servi sous des barnums chauffés, mais en plein air. On a très vite froid dans le vent sans bouger et l'envie de repartir arrive très vite !
Quelques km après ce ravitaillement, on rentre réellement dans la partie trail du parcours, avec davantage de chemins et un parcours plus vallonné. On monte sur les plateaux et la neige commence à apparaitre. Il y a quelques passages au milieu des sapins couverts de neige qui sont jolis, mais j'avoue que c'est compliqué pour moi de me souvenir de passages distinctifs dans ce parcours de nuit et sur un terrain inconnu.
A plusieurs endroits on voit sur une grande distance la ligne lumineuse des frontales. Au moins on ne risque pas de se retrouver seul...
Je ne prends vraiment pas de plaisir dans cette course... Le deuxième ravitaillement, au km 34, est semblable au premier : on n'a pas envie de s'y attarder ! J'en repars rapidement avant de grelotter. Dès la sortie un vent glacial et une humidité très présente me cassent le moral. Je ne suis pas spécialement fatigué à ce stade mais la motivation à continuer est au niveau zéro. Je fais demi-tour sur quelques mètres pour voir si j'aperçois des organisateurs avec dans la tête une grosse envie de stopper cette épreuve sans plaisir pour moi.
Il n'y a personne de visible ; je décide de continuer jusqu'au prochain ravitaillement, sans motivation.
On croise de temps en temps des gens qui nous encouragent, en pleine campagne et dans le froid glacial. Ca fait du bien !
La température a continué de descendre. On commence à rencontrer les premières plaques de verglas, soudaines et quasiment invisibles. Les coureurs de la Lyon-Saintélyon, qui sont passés dans l'autre sens dans la journée, nous disent que les conditions ont vraiment changé entre-temps ; la neige n'était alors pas tassée et il y avait peu de verglas car les températures étaient plus hautes.
On enchaine quelques montées et descentes, essentiellement sur sentiers. C'est l'étape la plus "nature" du parcours, entre les km 34 et 45. La plus galère aussi, car les plaques de verglas sont désormais partout. Chutes à répétition des coureurs autour de moi. Certains semblent s'être fait très mal en tombant et ont du mal à se relever. D'autres coupent loin du chemin pour éviter les plaques de verglas.
La chute finit aussi par m'arriver. La première est sans dommage mais soudaine ; elle ne sera malheureusement pas la dernière, je tomberai au final cinq fois sur cette course ! Je ne suis pas seul à ce moment à maudire les organisateurs qui ont largement sous-estimé le phénomène de froid et n'ont pas rendu obligatoires les Yaktrax.
Lors de ma seconde chute, ce sont les os mes avant-bras qui s'écrasent très douloureusement sur les cailloux. Quelques centaines de mètres plus loin, rechute sur les mêmes zones des avant-bras. Je serre les dents...
Le jour commence à se lever, on longe un joli point de vue sur la vallée, d'où on peut admirer un superbe contraste entre le blanc de la neige et les couleurs de l'aube.
Le jour commence à poindre mais nous sommes quand même au moment le plus froid de la nuit. Je suis confronté depuis quelques km à un nouveau souci : les tétines de mes flasques ont gelé avec le froid, plus possible de boire sans les ouvrir, ce qui contraint à s'arrêter, surtout dans ce terrain glissant. Je sens bien que du coup je ne bois pas assez...
J'arrive finalement au passage qui a été le plus délicat dans cette édition glaciaire : la redescente depuis le signal de Saint-André, le point culminant du parcours. Cette descente n'est pas très raide mais le chemin est devenu une gigantesque patinoire. A plusieurs endroits je descends sur les fesses cas il est quasiment impossible de rester debout.
Dix mètres plus haut j'entends un trailer hurler, il a eu le réflexe de s'agripper au barbelé qui longeait le chemin lorsqu'il a glissé et le barbelé a traversé son gant... 😲 Il est aussitôt entouré par ses voisins ; je suis déjà nettement plus bas que lui, je continue en espérant que ça ne soit pas grave...
On sort finalement de cette zone horrible en arrivant sur un large chemin enneigé.
On redescend vers la vallée, la neige disparait rapidement et on passe sur un sentier pentu et caillouteux qui donne envie de dérouler, mais il faut rester très prudent car des plaques de verglas s'y cachent par endroit, rendant aventureuses les tentatives d'accélération. Je décide de rester à allure modeste mais prudente, jusqu'au ravitaillement de Saint-Genoux-le-Camp (km 45).
Il y a a une bassine d'eau chaude au ravitaillement, spécialement là pour dégeler les tétines (bonjour bouillon de culture de microbes ! 😲). Le dégel n'est pas immédiat, mais elles finissent par laisser repasser l'eau. Ce qui ne sera pas très durable car après quelques km dans le froid les tétines gèleront à nouveau...
Je sais que j'ai fait le plus dur du parcours et le gros du D+. Il reste encore 33 km mais d'après ce qu'on m'a dit, ça devrait être nettement plus roulant.
On redescend régulièrement. Il n'y a plus de neige mais la boue fait son apparition. Pas agréable, mais au moins ça ne glisse quasiment plus (il reste quand même quelques plaques de verglas par endroit)...
Les couleurs pastels des monts du lyonnais, aux sols gelés, sont très belles au lever du jour.
On arrive dans des zones avec une alternance de champs et de parcelles plantées d'arbres fruitiers. Le parcours alterne entre chemins et zones avec bitume, globalement en descente. Cette partie est assez simple même si la fatigue est désormais bien présente ; ça tire sur les muscles.
Avant et après le dernier ravitaillement de Chaponost, il y a un passage à double sens, où l'on voit passer les coureurs qui repartent dans l'autre sens. C'est un peu nul et pas bon pour le moral...
La fin du parcours est essentiellement sur bitume, notamment les 13 derniers km.
On finit par arriver à Saint-Foy-lès-Lyon, avec ses grosses barraques. Ca ne sent pas la misère ici !
Il fait nettement plus chaud, les tétines on dégelé toutes seules. Juste après avoir dépassé le pont-siphon de l'aqueduc de Gier ( l’une des plus grandes réalisations romaines dans le domaine hydraulique), une montée assez raide nous attend. Mais on reste sur route et ça se fait sans problème.
La fin est un peu longue, on pense être proche de la redescente et non, ça remonte... J'espère avec impatience les escaliers pour redescendre vers Lyon. Ils arrivent enfin, immédiatement suivis du pont qui permet de rejoindre le musée des Confluences.
Ca sent l'écurie !
J'accélère la cadence sur le dernier km, et c'est enfin l'arrivée dans la halle Tony Garnier et la fin d'une course qui a été sur toute sa longueur bien désagréable pour moi.
Je file vite fait à la douche, un espace collectif où l'on est une trentaine en tenue d'Adam (les tenues d'Eve sont dans un autre espace). Il ne faut pas être pudique !... Mais la fatigue aide à la désinhibition... Un jeune rentre dans les douches et crie : "ouahh mais c'est super sympa ici !", ça fait rire tout le monde.
Une fois dans des vêtements propres et secs, je vais prendre mon repas d'après-course et me prépare à la dernière longue attente du week-end, avant de reprendre le chemin du retour vers la gare Part-Dieu et mon TGV.
Le voyage retour sera très rapide pour moi, j'ai eu un gros trou noir à peine installé dans le TGV et me suis réveillé juste avant d'arriver. Idéal !
Vous l'aurez deviné je n'ai pas du tout aimé cette course. Tout d'abord le parcours, sans difficulté majeure et avec beaucoup trop de sections sur bitume. L'épreuve largement de nuit fait qu'on ne sait pas bien si on a couru ou pas dans des endroits sympas.
La vraie difficulté de la course a été le verglas.
Pas mal de défauts à mon sens dans l’organisation de cette course, dont j'ai ressenti la vocation commerciale à de multiples moments (le summum étant le spectacle de drones à la gloire d'Asics). Beaucoup trop de coureurs, ce qui complique toutes les étapes (ravitaillements, toilettes, pasta party avant le départ). Attente interminable avant la course. Un vrai sous-dimensionnement de la sécurité de la course compte tenu des conditions climatiques, c'était vraiment dangereux à certains endroits !
Un grand point positif quand même : régulièrement sur le parcours, y compris en pleine nuit et sortis de nulle part, on a croisé des groupes de gens qui nous encourageaient. Bravo à eux, dans le froid il fallait le faire ! Et merci également aux nombreux bénévoles, sur les ravitaillements, toujours souriants et accueillants ! 😎
Faites-vous votre propre avis, le mien n'est forcément pas celui de tout le monde...
4 commentaires
Commentaire de Twi posté le 08-12-2023 à 09:48:39
Bravo quand même pour avoir fini.
Avec des conditions météo différentes mais tout aussi hivernales, j'en étais arrivé à la même conclusion en 2019. Et encore à l'époque, il y avait le Flore qui était une parenthèse de douceur dans un monde de brutes. Tout fout le camp ma pauv'dame !
Commentaire de stephnoz posté le 09-12-2023 à 15:26:57
Merci pour ton retour. C'est quoi le Flore ?
Commentaire de LandousInParis posté le 09-12-2023 à 14:50:53
Bravo pour ta course et pour avoir persévéré malgré le manque d'envie et de fraicheur! Tant qu'on ne se met pas en danger physiquement, on gagne toujours à aller au bout.
J'étais aussi de la partie samedi dernier, et j'ai vécu d'une manière différente cette course. Je le partage non pas pour critiquer ton récit, mais simplement pour exprimer qu'on peut vivre un même événement de manière différente. Oui il y a beaucoup de monde, mais je trouve que l'organisation est super efficace. Pas de temps d'attente long pour les dossards (5' max) et pour prendre le bus (10'). La Pasta party : 20' d'attente, et ça passe vite quand on se met à discuter avec des collègues dans la file d'attente. Après le repas : j'avis eu vent de la longue attente, et j'avais pris un matelas gonflable + sac de couchage pour patienter une heure trente au chaud sans dormir mais allongé et sans trop dépenser de l'énergie. La course : froid, les 2 paires de gant étaient nécessaires (soie + polaire), néanmoins ce froid forçait en quelque sorte à relancer en trottinant quand on pouvait. Je te rejoins sur les petits sentiers dans la neige et sous les arbres, c'était top! A certains endroits dégagés, on voyait les lumières de la vallée en contrebas, la nuit était claire, un peu de vent sur les hauteurs, mais sans que ce soit abusé. Et le lever de soleil avec les Alpes en toile de fond : magique!! Bilan: je voulais faire cette classique des classiques, et au final je n'ai pas été déçu. La prochaine sur les Templiers probablement!
Commentaire de stephnoz posté le 09-12-2023 à 15:26:01
Merci pour ce retour différent du mien !
Ce récit ne traduit que le ressenti de mon expérience, je suis persuadé que beaucoup de coureurs n'auront pas eu les mêmes sensations que moi, sinon cette course n'existerait plus depuis longtemps.
J'ai davantage l'habitude des trails longs dans les Alpes ou les Pyrénées, où l'on en prend plein la vue et plein les jambes du début à la fin. Le parcours était pour moi un peu "morose" ici. Ce n'est pas le ressenti que j'ai eu en courant cette année les Templiers ou la 6000D, qui sont également des courses à forte participation ; j'espère que tu prendras plaisir l'année prochaine sur les Templiers !
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