L'auteur : tidgi
La course : Ultra Tour du Lac Monteux
Date : 21/10/2022
Lieu : Monteux (Vaucluse)
Affichage : 767 vues
Distance : 235km
Objectif : Battre un record
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Je regarde les 3 derniers guerriers repartir. Et pourquoi n’ai-je pas pu continuer avec eux ?
Il est 21h, une nouvelle nuit a commencé. C’aurait pu être une 3° nuit blanche pour moi…
Backyard, c’est quoi ? C’est très simple.
C’est un concept d’ultra endurance venu des US. Cela consiste à faire une boucle de 6,7km en 1h maximum. Car toutes les heures, un nouveau départ de cette boucle est donné.
Toutes les heures ? Mais jusqu’à quand ? Et bien jusqu’à ce qu’il en reste plus qu’un, qui doit aussi valider sa dernière boucle seul pour être déclaré vainqueur. Tous les autres étant DNF (Do not Finish).
J’ai eu l’occasion d’expérimenter ce type de course une 1° fois en Juin dernier, avec la Backyard de Dijon, dans le cadre du circuit Infinity Trail.
Une boucle typée trail avec un peu de dénivelé, que j’avais réussi à faire 24 fois. Soit 24h et 166 km. Une petite déception sur le moment car j’imaginais pouvoir – naïvement - arriver à 30h (j’avais participé à une course locale pour l’association « Vaincre Parkinson » où j’avais réalisé 24 boucles de 1h15, soit 30h en Avril).
Bref, voilà mon objectif tout trouvé à Monteux : atteindre cette fois-ci les 30 heures et 200km sur un circuit quasi plat.
Monteux… Monteux… Je ne connaissais même pas ce coin il y a encore 6 mois.
J’en ai entendu parler à la Backyard de Dijon, où les quelques champions allaient se donner RDV là-bas. Ça m’aurait bien intéressé mais il n’y avait plus de dossards de disponibles.
En discutant avec Jean-Louis/Crocsman, avec qui j’ai foulé les chemins des 10 marathons d’Orta en Août dernier, me voilà à m’inscrire car finalement des dossards sont redevenus disponibles, et lui-même allait être présent.
A priori c’est bien plus plat, les 30h seraient donc jouables alors ?
Je comprends quelques semaines avant que la finale mondiale n’a pas lieu en même temps, mais une semaine avant. Tant pis pour voir les 15 Français batailler. Mais suivre çà à distance permet de se mettre un peu dans le bain mentalement.
J’embarque dans le sillage l’ami Bernard/zézé, chez qui je loge avant la course. Ce sera, comme JL/Crocsman, sa première participation.
La route - et peut-être l’excitation à l’approche de l’échéance – m’empêche de dormir. Ce sera 1 heure de sommeil tout au plus. Bonjour déjà le handicap !!
A priori cela fera 2 nuits blanches donc si je prévois de m’arrêter au bout de l’objectif de 30h, soit vers 16h. On fera donc avec.
Arrivé sur place, on découvre l’effervescence à quelques dizaines de minutes du départ. La déco restée en place pour la finale mondiale pour les 15 Français est magique.
Un salut à JL et à quelques heureuses « retrouvailles »… et l’on part installer notre tente commune avec Bernard (merci à lui de m’héberger. C’est quand même plus sympa de partager cette aventure à 2). C’est bien plus luxieux ici qu’à Dijon, on s’améliore ! Mais certains font vraiment très fort, comme j’avais pu déjà le voir à Dijon.
La météo montre des risques de pluies de faibles à modérées. Avec un temps bien plus sec 24h plus tard. Bon… ben… voilà ce qu’il reste à faire pour profiter du soleil.
Après le briefing de Philippe, de l’organisation, 84 concurrents s’élancent pour la 1ere boucle.
Sur celle-ci, que je découvre seulement, je vais repérer les portions où il faudra marcher, afin de ne pas se fatiguer prématurément. A Dijon, il y avait quelques petites montées, la marche était alors « logique ». Ici, c’est plat.
Ma stratégie sera :
- De boucler le tour en 50 minutes environ. Entre se reposer et ne pas se refroidir.
- Partir en chaussures, mais alterner avec les sandales (comme les 4 marathons sur 10 faits à Orta).
Et c’est ainsi que les 4 premières boucles se font plutôt tranquillement.
J’apprends la routine à mettre en place :
Annick est là pour m’épauler à chaque arrêt et c’est top !
A la boucle 5, je me sens en confiance alors je décide de passer en sandales. J’ai l’impression que ma foulée devient lourde alors si je veux ne pas trop me fatiguer, je préfère courir « léger ».
Du coup, la routine évolue un peu pour s’adapter au terrain : courir sur le dur, marcher sur les sentiers, et évidemment marcher sur les 500 derniers mètres. Je dois donc courir dès le départ car le sentier arrive 500m après….
Même si on ne chemine pas ensemble, on se retrouve toujours avec Bernard.
Je vais ainsi essayer de garder ce protocole le plus longtemps possible, sans me mettre tout de pression sur le chrono de la boucle.
Et la pluie arrive… Bon, pas bien méchant et cela permet de refroidir un peu la machine. En espérant ne pas être déstabilisé si elle tombe plus dru.
C’est ainsi que les boucles suivantes s’enchainent sans trop de problème.
Je passe en mode nuit à la 10° boucle, à 19h. Annick restera jusqu’à 22h pour revenir pour 8h le matin… Si je suis toujours en vie. Dans ma tête un décompte comme à Dijon… Tenir la nuit seul avec en objectif le retour de mon assistance au petit jour. A Dijon, j’avais passé une bonne nuit mais une grande lassitude était arrivée au petit matin.
Les pluies annoncées ne feront plus rares que prévues, c’est parfait.
Je papote un peu avec David, Jean-Michel, Jean-Louis qui réduira son allure au fil des tours. Allez ! On tient !
Arrêt de Bernard vers 4h du matin, problème médical. Jean-Louis stoppera 2 heures après, avec un dernier tour bouclé de justesse.
De 84 au départ, nous nous retrouvons plus qu’une petite quinzaine au lever du soleil. Ce dernier va faire du bien. Philippe nous disait régulièrement à chaque départ nocturne d’aller « chercher le lever du jour ». C’est chose faite ! Malgré une petite gène à l’ischio que j’essaie de gérer à chaque tour. Rien de bien méchant mais je ne veux pas que çà me perturbe le mental aussi.
Mais – étonnamment – j’arrive à garder mon protocole de départ mis en place depuis la 5° boucle avec les sandales. Ces dernières sont toujours à mes pieds alors que je pensais alterner. Mais je sens que si je remets des shoes classiques, ma foulée va me sembler plus lourde.
Ce qui est curieux, c’est que je continue à tourner toujours assez régulièrement entre 50 et 52’ max. Mes pauses marche ne sont pas amputées. Le rythme reste ainsi le même alors qu’à Dijon il avait commencé à décliner au bout de 18h.
Des promeneurs proposent même de me prendre en photo alors que je shootais le lac.
Il faut maintenant viser les 24h afin d’égaler Dijon. Ce qui sera chose faite à 10h, un peu après le retour d’Annick.
Il commence à faire chaud et je repasse en mode été.
Direction maintenant mon objectif, à savoir les 30h/30 boucles et passer les 200km, jamais réalisé auparavant.
La lassitude tant redoutée fait alors son apparition. Mais je dois tenir bon, je sais que j’ai de la marge au niveau timing puisque je continue à marcher sur les mêmes portions qu’à la 5e boucle, et ceci toujours en sandales.
Mais le décompte des boucles devient curieusement plus long.
De 10, nous nous retrouvons plus qu’à 7 lorsque je franchis la barre symbolique des 200km, soit 30 boucles… Il est 16h et le beau temps est présent…. Alors ??
Alors ?? Je continue à rester sur le même timing et protocole, les jambes semblent aller bien, il y a juste une petite difficulté à m’alimenter. Mais, mais… Ce serait dommage de ne pas profiter du lieu encore un peu… Allez ! 32, au pire 33 avant la nuit.
Oui, je ne vois pas passer une 3e nuit blanche pour le coup, en sus de la nuit d’avant course où je n’ai pas dormi et la nuit à tourner autour du lac.
Bref, c’est reparti pour 32 ou 33 boucles (l’un après l’autre ai-je entendu).
Ces 3 là passent plutôt rapidement. Je continue d’essayer de gérer, bien que je me trouve quasiment à la fin du groupe… comme à Dijon sur la fin. Il ne faut pas que je me laisse déstabiliser. L’objectif n’est pas le classement mais de faire la boucle dans le timing imparti. Et ce dernier reste encore régulier. Et puis c’est dur pour tout le monde ou presque…
Dans ma tête néanmoins, une envie d’en finir mais aussi profiter de l’ambiance qui reste présente sur le parcours, un samedi en fin d’après-midi.
Au moment de partir sur la 33e, nous sommes alors 5. Je pars bon dernier.
C’est alors qu’Annick m’envoie un SMS : si je continue, j’ai des chances de passer top 4 ; René n’étant pas très bien… Et puis c’est bon pour les sélections en Equipe de France… Ah ! Ca a discuté avec l’organisation je vois.
Du coup la 33e boucle va se passer à cogiter :
- La nuit arrive et je n’ai pas envie de faire le hibou. Mentalement chaque tour devient compliqué, surtout certains passages que je ne peux plus voir !
- Par ailleurs, et même si j’ai suivi l’équipe de France le WE. Je n’ai jamais songé à me rapprocher des performances de leurs membres.
- Et pourtant, 33 c’est déjà une performance me dis-je
- Je suis toujours dans les temps pour la boucle, avec presque toujours les mêmes portions de marche, même si j’ai un peu « adapté » au fil des dernières boucles.
Alors… OK pour 1 ou 2 boucles pour le fun et pour le début de la nuit. Dans ma tête l’objectif passe à 35.
Arrivé à la fin de la 33°, nous ne serons plus que 4 pour repartir, Sébastien, de l’organisation, me propose d’aller dans la salle, avec les 3 autres guerriers, Fabrice, Jérome et Pierre. Il y a plein de place à présent…
Je rends compte que j’ai été jusque-là assez isolé, déjà dans la tente avec Bernard, puis sous un barnum afin que Bernard puisse démonter la tente pendant que je continuais à faire le hamster.
Banco ! Annick sera aidée au déménagement pendant que je repars… Fabrice et Jérome toujours devant dès le départ, puis je suis doublé par Pierre. Le jour déclinant, le cerveau se met en mode sommeil et me voilà à avoir quelques petits étourdissements lors que je reprends la marche. Pas cool !
Je marche moins du coup mais ne boucle pas plus vite pour autant le tour. Et ça fait 34 !
En entrant dans la salle, je découvre l’organisation bien plus « confort » de mes 3 co-hamsters que la mienne. Je fais un peu light à côté. Rigolo !
L’estomac ne veut rien, lui aussi a décidé de se mettre en mode sommeil.
Mais je souhaite repartir pour la 35e boucle. Ce sera la dernière, j’ai déjà fait du rab…
Comme à Dijon, elle est courue à allure modérée, pas de tour rapide, de record ou quoi que ce soit. Un remerciement et un peu de papotage aux bénévoles qui ont tenu (en se relayant bien sûr) les 2 passages piétons.
35 boucles ! Check ! Pour un temps de 4 minutes de plus que d’habitude, en ayant eu de temps en temps le doute de finir dans les temps. Il reste un peu plus de 5’ quand je franchis la ligne pour la dernière fois.
Mais pas moyen de vouloir repartir pour 36 (pourtant c’est 24+12 me dit Sébastien). Oui mais entre les étourdissements et l’estomac, cela va suffire. J’ai déjà dépassé mon objectif.
Il est 21h quand je regarde mes 3 compères repartir. Je ne suis plus dans le sas de départ, 35h après avoir commencé. Et j’ai toujours mes sandales aux pieds.
Avec David, Sébastien, Annick, nous allons longtemps discuter, moi aussi dans mon siège. J’en oublie même d’arrêter ma montre, 45 minutes après.
Au bout d’une heure de rangement et papotage, nous repartons chez Bernard qui aura eu la patience de m’attendre 6 heures de plus.
Un immense merci à Annick, qui a superbement assuré à mes côtés !
Un grand bravo à l’organisation, notamment Philippe, Agnès pour les photos, Stéphane, Sébastien !
Big up à tous les bénévoles qui ont été géniaux !
Et bravo à tous les concurrents, venus tester ici leurs limites pour la plupart.
Superbe ambiance !!
Une chouette expérience qui ne me donne qu'une envie : celle de revenir pour la 2e édition et pourquoi pas faire mieux...
EN CHIFFRES
En bonus une magnifique vidéo de la finale mondiale (ça donnerait presque des frissons !), équipe France, à Monteux. La semaine d'avant dans ce même lieu.
2 commentaires
Commentaire de Mazouth posté le 03-11-2022 à 21:33:37
Encore une prestation magistrale ! Mais je crois que tu commences à être un peu atteint non ? ^^
Commentaire de tidgi posté le 04-11-2022 à 21:28:39
Faut croire que oui ;-)))
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