L'auteur : Gilles45
La course : Grand Raid des Pyrénées - Ultra 160 km
Date : 26/8/2022
Lieu : Vielle Aure (Hautes-Pyrénées)
Affichage : 2148 vues
Distance : 160km
Objectif : Pas d'objectif
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Je commence à devenir le spécialiste des barrières horaires pour l’inscription à une course.
En effet, à 15 jours de l’évènement je ne suis toujours pas complètement décidé et tout est clos depuis le mois de juillet.
Je suis d’ailleurs inscrit le même WE sur un trail de 73 km dans le cantal (Les 6 burons) dont j’ai découvert l’existence totalement par hasard.
Mais voilà…sur Kikourou ça commence à parler des 10 ans de l’EB, de l’UTMB et évidemment du GRP.
Ni une ni deux, hop un petit mail – sans trop y croire – à François de l’organisation du GRP. En parallèle je m’inscris même sur la liste d’attente de l’EB qui m’accepte…dès le lendemain.
J’ai le choix du roi et opte finalement pour le GRP.
Réponse de François 10 minutes après : « Je t’envoie un mail avec un lien sur lequel tu cliques et tu t’inscrits ».
Gloups, pas le temps de réfléchir, paiement, certificat médical et voilà…Merci François pour ta mansuétude pour les retardataires lourdauds comme moi !
L’avantage avec ce mode de fonctionnement c’est que cela évite de stresser 4 mois avant la course !
Cette année en théorie, je n’aurais pas dû avoir la Team Gillou avec moi, mais nous verrons qu’ils seront bien présents à partir d’Hautacam…et tant mieux !
Concernant ma préparation, l’année a été sommes toutes assez légère puisque je n’ai pu mettre qu’un dossard en 2022 (le Vulcain 80 kil en Mars), le 90 du Mont Blanc ayant été annulé.
J’ai donc fait du Off (Sancy, 25 bosses) et un petit 30.000 de D+ sur l’année. Les sensations sont d’ailleurs néanmoins assez mauvaises depuis les vacances en Corse durant lesquelles j’ai connu une grosse déshydratation après une sortie de 10h... piégé par les sources et ruisseaux à sec les 4/5 dernières heures
Depuis je n’ai fait que du vélo de route près de chez moi.
Pour autant, la confiance est bonne, je ne suis pas vraiment embarrassé par le doute et je connais bien le parcours Pyrénéens.
Je prends la voiture le jeudi matin et arrive sur Vielle Aure dans l’après-midi. Je retire mon dossard, un petit achat de pain du Montagnard auprès de Thierry et je vais directement installer ma toile de tente dans le champ prévu à cet effet. Merci d’ailleurs à Grumlie pour le tuyau car je n’avais jamais eu connaissance de cet endroit auparavant. Je suis au calme avec le bruit de la rivière en toile de fond. J’ai également le plaisir de faire la connaissance d’un camping-cariste participant au 120. J’adore ces moments.
A 17h l’orage arrive, les trombes d’eau sont impressionantes mais la météo s’annonce globalement clémente et sèche. C’est bien cool car les prévisions des jours précédents étaient dantesques et se sont améliorées peu à peu
Le repas est prêt d’avance : Riz, patates douce à l’huile d’Olive.
Je me couche à 21h00 pour m’endormir à…2h environ pour un réveil à 3h30…ça va piquer !
Le départ – La Mongie :
524 coureurs au départ, j’ai donc le dossard 524…j’espère que cela ne correspondra pas à l’ordre d’arrivée.
Départ comme d’habitude dans une ambiance assez zen. Je suis placé assez proche de la ligne avec à quelques mètres à me droite un autre coureur avec casquette rouge Kikourou (de mémoire, son bandeau de frontale était de la marque Silva…si jamais tu te reconnais). Je ne le reverrai plus de la course ni d’autres Kikous d’ailleurs.
Bref, Robin le speaker met l’ambiance (pas facile à 5h du mat), le son de Colplay habituel et nous nous élançons dans vielle-Aure sous quelques gouttes de pluie très éparse.
J’ai pour objectif de partir plus doucement qu’en 2018 et 2021 pour ne pas exploser comme souvent aux 2/3 de la course. Evidemment je ne tiendrai pas mon plan en bon bourrin que je suis.
Le première partie de course est une longue montée de 15 km et 1500 de D+ jusqu’au col de Portet et au ravito de Merlans. Le parcours ne présente aucune technicité et permet même de trottiner assez fréquemment jusqu’au Col. L’ambiance est studieuse et concentrée dans le peloton, personne ne parle.
La météo est douce mais très humide. Le temps reste nuageux, avec une faible bruine par moment.
Lorsque le jour commence à se lever nous sommes dans les nuages, ce qui ne permet pas de bénéficier des magnifiques vues auxquelles j’étais habitué.
Je rentre tranquillement dans ma course en veillant à rester dans une zone de confort pour ne jamais me mettre dans le rouge. J’arrive à Merlans à 7h15 soit dans les temps habituels.
Le tronçon suivant n’était pas de mémoire celui dans lequel je m’étais senti le plus à l’aise lors des éditions précédentes.
Plusieurs éléments sont encore difficiles à gérer pour moi :
1° Dans le tout début d’une course j’ai du mal à me mettre dedans, je mesure tout ce qui reste à parcourir avec l’incertitude d’aller au bout. Bref, je ne suis pas encore chaud et pas dedans
2° Cette zone du Néouvielle reste caillouteuse, technique, piégeuse et il n’est vraiment pas simple de lever la tête pour profiter du décor. Je suis surtout concentré et à l’écoute de mes sensations car je manque de repères.
Néanmoins je trace ma route sur ce chemin en balcon au-dessus du magnifique lac de l’Oule.
Même si la vue reste bouchée, nous entrapercevons de magnifiques lacs.
Un point d’eau est organisé au refuge de Bastan puis nous entamons la montée au col de Bastanet (2500m) qui me plait bien et me semble de manière assez facile. Je ne la redoute pas en tout cas même si la vue est impressionnante en approche : un mur !
Je pointe au col à 8h16 (+3 minutes qu’en 2021). Il fait chaud pour nous coureurs mais les bénévoles sont particulièrement emmitouflés.
J’avais gardé un souvenir horrible de la descente durant laquelle j’avais perdu un grand nombre de places l’an passé. Je décide donc d’y aller cool, sans pression et finalement ce relâchement me fera faire une belle descente dans la roue de deux trois locaux.
Nous passons près du lac des Gréziolles et de deux très beau barrages. Cette zone vaut vraiment le coup d’œil et j’envie les quelques campeurs qui ont posé leur bivouac à quelques endroits.
Attention cependant au premier piège : le temps est très humide mais aussi très, très lourd. C’est un hammam et je ne prends pas conscience que je transpire énormément sans boire suffisamment. Mon t-shirt est trempé, plus que de coutume.
Le premier gros coup dur, gros coup de chaud viendra avec la terrible montée au col du Serpolet. Elle m’avait marqué l’an passé, mais je ne me souvenais plus de la difficulté de ce col : 370 de D+ droit dans la pente, dans l’herbe avec de nombreux ressauts, de la gadoue glissante par moment, des trous, des bouses de vaches. Vous pensez être en haut et non…il y en a encore et encore. Je dégouline tellement j’ai chaud. Je suis loin d’être le seul. Bref personne ne rigole sur cette section.
Au refuge de Campana des bénévoles m’avaient dit : « tu vas voir la montée est dure mais la descente va être encore pire ».
Je me souvenais bien des glissades « herbeuses » de 2021 mais cette année avec les fortes pluies et des mouvements de terrain, cette dernière a été jugée trop dangereuse.
Les incroyables bénévoles sont montés de nuit avec « pelles et pioches » pour aménager un chemin plus sécurisé…Ils sont incroyables.
Quelques petites frayeurs quand même après un passage assez « gazeux » où il ne fallait pas glisser et j’arrive à la Mongie à 10h05.
Je suis exactement dans la même minute que l’an passé mais cette fois…beaucoup plus entamé. J’ai même besoin de m’assoir au ravito, je suis complètement à sec.
D’ailleurs je commence déjà à pisser du sang…après 30 bornes c’est tôt…bon, il va falloir se gérer car le doute s’installe peu à peu. J’aperçois le service médical mais je n’ai pas envie de me faire arrêter…donc je trace.
La Mongie – Pierrefitte :
Cette année changement de parcours pour monter au Pic du Midi. L’accès à la Coume de Sencours n’est pas possible, nous devons donc commencer à redescendre par la droite et le pont des Vasquès (dur pour le moral de commencer une ascension avec de la descente, que dis-je plusieurs petites descentes !).
Sur cette partie je traine un peu ma peine, je suis vraiment mou et assez soucieux de mon hydratation. Néanmoins – et sauf si ma mémoire me joue des tours – j’ai trouvé cette montée plus régulière, moins technique que celle des années précédentes. Cela ajoute 2 km environ mais je ne les regrette pas.
D’ailleurs la météo commence à s’éclaircir et la vue monstrueuse du dôme du pic qui vous domine est incroyable. Je ne m’en lasserai jamais.
Premier passage à Sencours pour prendre de l’eau et j’attaque le pic dans une forme toujours aléatoire. J’ai l’impression de traîner, pourtant j’arrive au sommet à 12h34 (+ 11 minutes versus 2021 pour 2,5 km de plus).
La montée sommitale est toujours sympa au milieu des randonneurs et des coureurs plus rapides qui ont souvent un petit mot pour les laborieux que nous sommes.
Je l’ai déjà évoqué dans un précédent récit mais la montée au pic est vraiment simple et facile mis à part les quelques derniers mètres de D+ en single.
La vue est incroyable et il y a enfin du vent pour se rafraichir. Portant, je suis ratatiné…je commence déjà à penser rendre le dossard à Sencours…oui oui…déjà ! Je m’assoie 3 minutes.
J’ai omis de préciser, ma femmes et les amis de mon « team Gillou » étaient au Pays Basque sur Saint de Luz et on tenu à venir me rejoindre : « A partir d’Hautacam on te fait l’assistance ». Je commence pourtant à leur faire des SMS pour leur dire : « Il y a un gros risque que j’abandonne ».
Ma femme me met la pression (ce ne sera pas la dernière fois !) pour que je tienne jusque-là : « de toute façon on vient ! ».
Donc sur Sencours-retour, je me pose, me « nok » les pieds et prend une bonne soupe. J’ai aussi à cœur de bien boire car la section suivante est longue et les points d’eau sont incertains.
Cette section – superbe - se compose grosso modo d’un enchainement de 4 petits coup de cul dans un décor sauvage, à tomber : Bonida (+85m) - Aoube (+150m) – Bareilles (+220m) et Ouscouaou (+210m). Sur le papier ça ne paie pas de mine, mais si on ne veut pas perdre trop de temps, il faut rester constamment en prise sur des sentiers assez techniques. L’envie de lambiner au soleil de doit pas l’emporter.
Pas de bol cette année nous sommes dans la bruine et nous verrons rien du lac bleu, de l’alpage du lac d’Ourrec.
Je chemine dans un état que je pourrais qualifier d’étrange : pas de douleur, pas de blessure mais pas de jus non plus et bizarrement pas l’envie d’être là. J’ai du mal à profiter et j’ai gardé en tête mon envie de lâcher le dossard à Hautacam.
Par contre 48h plus tard avec le recul de celui qui a fini la course je mesure le côté très joueur, ludique, varié de ce tronçon que je suis loin d’être le seul à adorer.
La bruine rafraichit un peu l’atmosphère mais je continue à uriner du sang malgré ce que je bois. Ça fait 3-4 heures c’est beaucoup.
Heureusement cette année les bénévoles sont présent à la source du lac d’Ourrec « des analyses ont été faites, elle est potable ». Ouf ! On papote ils me disent qu’ils vont rester là jusqu’à 22h30. Quelle pugnacité, quel dévouement.
Malgré le moral moyen je me régale de la beauté des animaux que nous côtoyons : Chevaux de la race des Pyrénées Catalanes gros cheval de trait roux, vaches gasconnes…superbes bêtes.
Lors de la descente vers Hautacam je suis un couple d’espagnols qui vont bon trains et je prends leur foulée. La femme envoie en descente, je serre les dents, je lâche un peu pour les reprendre en général sur « le plat »
Je suis enfin à Hautacam à 16h55 et je vais enfin pouvoir rejoindre les amis et… abandonner : « 52 bornes c’est déjà pas mal » me dis-je.
Et là attention c’est le piège : je dis à un bénévole que j’envisage peut-être, éventuellement d’abandonner et…ni une ni deux il commence à prendre mon dossard !
Ouh là, attends deux seconde je vais voir la Team quand même.
Sur l’insistance de madame, des amis et même des spectateurs, je suis poussé, incité à descendre jusqu’à la base vie :
« Allez, tu n’es pas blessé, tu es très large sur les barrières et nous venons exprès de la côte pour te voir, n’arrête pas maintenant et vois à la BV ».
Je bougonne mais décide de me lancer derrière les deux espagnols.
C’est ridicule avec le recul que j’ai aujourd’hui mais j’ai toujours en tête de lâcher alors que je cours toute la descente sur un bon rythme. Il ne me faut qu’1h25 pour arriver à la base de vie.
J’ai doublé sans me faire doubler me semble-t-il
Il est 18h24, je suis 60ème.
Je prends mon temps : massage, soupe, smoothie (très frais mais ne passe pas car je ne supporte pas le concombre) et je me change intégralement.
Maintenant vous connaissez la musique :
Moi : « je voudrais vraiment abandonner, je n’ai pas de force et pas de plaisir »
Ma femme : « oui OK mais tu sais quoi : tu tentes de rallier Cauteret et après on voit sur place »
Cauteret – Luz Saint Sauveur :
Alors là il y a du nouveau concernant le parcours.
Suite à un glissement de terrain, nous ne pouvons plus monter au col du Riou par le chemin habituel et l’organisation change de parcours.
Dans mon esprit, si j’en crois le road book c’est simple : une longue montée douce de « seulement » 800D+ sur 15 bornes. Pas trop dur d’autant que tous les ans la montée au Col du Riou me flingue littéralement. Je suis donc confiant sur la facilité du segment.
Et bien il n’en sera rien : Certes, nous commençons par 6 ou 7 km de piste cyclable « pépouse » le long d’un torrent magnifique et très actif en termes de débit et de puissance. Il n’y a aucune difficulté. Je suis pour la première fois avec un trailer avec qui je discute bien. Le temps passe vite et mon moral remonte un peu d’autant que mon équipe a trouvé un coin de route pour venir me voir et me booster.
Mais les traceurs de l’organisation ont plus d’un tour dans leur sac. En effet, alors que nous pensons approcher de Cauterets, nous bifurquons à droite et montons directement dans une sévère pente. Cette montée en forêt va commencer à me tuer. J’ai chaud et je n’avance pas.
La descente va me tétaniser : cuisses en bois, je peine à poser le pied, appréhension. Cerise sur le trailer, j’ai changé de chaussures à la BV (passage de Dynafit Ultra à Evadict MT Cushion) et la semelle me brule la plante de pieds.
J’arrive à Cauterets à 21h58 et cette fois RIEN NI PERSONNE NE M’EMPECHERA D’ABANDONNER !!! Non mais c’est qui le patron, j’ai même préparé mon speech : « J’apprécie vraiment votre volonté de me booster, vous êtes merveilleux mais au final c’est mon corps, c’est moi qui souffre ».
A mon arrivée, ils ont même regroupé un peu de public pour m’encourager mais ils voient vite que je ne vais pas bien. Ce n’est pas la fête habituelle où je fais souvent le mariolle.
Nous allons tous nous poser un peu à l’écart sur les tables & chaises dispos devant le ravito.
Et là le combat mental s’engage : j’ai enlevé mes chaussures, je ne veux ni manger, ni de massage : « de toute façon j’arrête, pourquoi tu veux me masser ». Je demande à un bénévole quand est la navette, il me dit « bah après le derniers vers 4h30 / 5h demain matin ». Quoi ??? mais il est 22h. Bof…je pourrais faire une bonne nuit.
Je vais vous la faire courte mais il se passe une heure durant laquelle c’est argument et contre-argument entre mon équipe et moi (« j’ai plus envie » vs « tu vas le regretter » - « J’ai plus de force » vs « mais tu n’as aucune blessure, tu es large » - « ce n’est qu’une course » vs « dès que tu seras rentré à la maison tu vas avoir le moral dans les chaussettes et être chiant à cause de ton abandon ! »).
En plus ils sont malins car ils me disent ne pas pouvoir me ramener à Vielle Aure (« c’est trop loin »). Bref, je le saurai plus tard, mais ils se sont concertés pour me faire changer d’avis coute que coute. Ils ont quand même remarqué que je n’arrive pas à toucher ma ceinture porte dossard et que je ne me suis jamais levé pour aller voir les pointeurs. Je passe également mon temps à regarder tous ceux qui repartent du ravito.
Après une heure, sans que je ne sache trop pourquoi ni comment j’ai un « coup de chaud », je « clique ». Je ne parle plus, je lace mes chaussures, je remplis mes flasques et je dis « j’y vais ! »…
« Mais tu vas où ? »
« Je reprends la course »
Je pars au sprint sans dire grand-chose. Au fond de moi, le feu, la rage, un déclic que j’ai encore du mal à expliquer au moment où j’écris ce récit.
Ma femme dira à mes potes interloqués en me voyant partir : « C’est bon il est en colère, il va aller au bout ». Ils appréhendent nos retrouvailles mais madame qui me connait plus que bien est confiante.
Je quitte Cauterets à 23h, je suis au-delà de la 100ème place.
NB : avec le recul je ne suis pas fier de cette heure passée à tergiverser, mais je précise ne jamais avoir été désagréable avec eux tant je sais que le rôle d’accompagnateur est complexe. J’ai plutôt tenté d’attirer leur pitié…échec :-)
La suite…et bien la suite c’est un tout autre schéma de course et l’entrée dans une autre dimension pour moi. Pourtant la partie suivante est celle que je redoute le plus (et c’était aussi une raison sans doute qui me poussait à abandonner). D’ailleurs beaucoup de coureurs parlaient entre eux du fameux nouveau tronçon Cauterets – Luz.
Il s’agit cette fois d’un terrible enchainement : Montée au Col de Riou (+850 m que nous faisions habituellement avant Cauteret), petite descente sur Béderet puis le Col du Lisey (+360m). La grande nouveauté est qu’au lieu de redescendre sur Aulian, nous remontons à nouveau au Col de Caperette (+300m)...ouf !
Bref c’est 1700D+ sur cette partie (et 18km jusqu’à Aulian contre 8km normalement).
Mais là je m’éclate car la montée au Riou d’abord régulière puis plus raide se passe bien.
La descente sur le ravito est motivante car on l’aperçoit en contrebas
J’arrive à Béderet à 1h12 du matin. Je suis repassé de 105ème à 84ème. L’ambiance est top au ravito et pour la première fois je parviens à très bien manger : Soupe de tomate accompagnée de pates, coca en grande quantité, pastèque, tucs, fromage…tout y passe dans n’importe quel ordre.
La montée suivante c’est quelque chose : la montée au Lisey a été tracée droit dans une pente défoncée par les sabots des vaches.
Un mur, mais je me régale car nous sommes dans la nuit, il fait frais grâce à toute l’humidité et la rosée ambiante en bonus le ciel étoilé est incroyable !
Je crois qu’il s’agit vraiment des moments que je préfère en course, le bonheur de la nuit, de la nature, l’impression d’être seul au monde. Je grimpe assez facile et…j’urine clair
Arrivée au Lisey, j’enchaine avec les 300m de Caperette sans difficulté.
Il fait nuit donc je ne profite pas de la vue réputée magnifique. Dommage ! Alors je me lance dans la pente (une piste de ski) sur les 4 km jusqu’au ravito d’Aulian-Luz Ardiden
Je décerne une première palme à ce ravito : celui que l’on voit de loooooin mais qui n’approche jamais.
J’y suis à 3h08 (3h20 en 2021) en 76ème position.
Ce ravito – beaucoup le savent – est mythique pour ses crêpes faites sur place accompagnées de confitures, Nutella. Le tout arrosé de coca, je me régale. L’ambiance entre bénévoles et coureurs est géniale malgré cette heure avancée.
Au moment de repartir, Damien un coureur nantais me demande s’il peut m’accompagner. Au final nous partons à 4 pour cette portion de 9 km de descente jusqu’à Luz.
Le terrain est assez varié : Single herbeux, route bitumé que nous coupons régulièrement, puis des singles pas trop techniques mais assez raides qui nous emmènent dans les 2 ou 3 jolis villages avant la BV. (Grust…)
Le temps passe vite avec Damien qui est très sympa et avec lequel nous parlons de choses et d’autres et notamment de la Corse, une passion commune (il est finisher terre des Dieux).
Nous arrivons à la BV à 4h44. Je suis descendu 20 minutes plus vite qu’habituellement.
A Luz, c’est toujours le même mélange atypique de coureurs et de fêtard en sortie de boite de nuit.
Nous routes se séparent car Damien veut aller voir les podologues et de mon côté je compte faire un arrêt assez efficace. Cette fois l’équipe n’a pas besoin de me rebooster, ils voient que je suis focus et concentré sur ma course. On papote, on rigole pendant que je mange et me change pour la dernière partie du parcours.
C’est quand même plus cool (surtout pour eux) d’être dans ce mood. Je vous rassure avec le recul ils en rigolent.
Luz Saint Sauveur – Col de Portet :
Je n’avais plus trop de souvenir de la montée vers Soubralets. Je savais qu’il y avait plus ou moins 800D+ mais punaise…que c’est raide. Malgré la fraîcheur de la nuit j’ai très très chaud. Néanmoins je suis assez rassuré par le fait de doubler un certain nombre de coureurs du 120.
Je pourrais décrire cette section en 3 parties distinctes : Une montée très raide mais régulière, puis un enchaînement de petits ressauts bien cassants en enfin un superbe et facile sentier en balcon.
Arrivé au ruisseau de Bolou, je suis ravi de partir à gauche plutôt qu’à droite avec les coureurs du 120 qui vont avoir à monter jusqu’à la Glère (500 m de +).
Il me semble avoir entendu que le 1er du 160 s’est trompé et que part dépit il a abandonné au point suivant (1h de perdue)
Sur cette partie je me régale car je trottine ou parfois je prends une drôle de foulée assez bizarre alternant marche rapide, course, marche rapide, course toutes les 30 secondes.
J’arrive à Tournaboup à 8h30 le jour est désormais bien levé et je me suis régalé en appréciant la vue autour de cette zone de barèges.
A Tournaboup évidemment la Team est là en camping-car et se prépare un petit dej dans ce cadre idyllique.
De mon côté je pointe 63ème et suis décidé à repartir assez vite.
En effet l’an passé j’avais énormément souffert de la chaleur dans la montée vers la cabane d’Aygues Cluses. Il était 10h, là j’ai une heure trente de fraicheur en plus.
Je reprends mon triptyque : Soupe de tomate-pate-tome avec coca et pastèque.
Seulement 10 minutes de stop et j’ai froid en repartant. C’est de bon augure pour la montée.
Bref, qui « Voit Tournaboup va au bout »…en général en 7h selon les estimations (pas faux, je mettrai 6h40)
Pour ceux qui ne connaissent pas c’est très technique, caillouteux et il est difficile d’apercevoir ou d’anticiper la trace. Et encore il faut jour, je n’imagine pas de nuit pour les plus lents
C’est donc assez démoralisant lorsqu’on ne connait pas le parcours. A ce moment je calme un peu le jeu et décide de me mettre dans les pas de coureurs du 120 qui ont un bon rythme.
Sur cette portion, je conseille grandement de ranger les bâtons : j’y trouve un meilleur équilibre sautant de roches en roches quitte à mettre les mains lorsque cela est nécessaire.
Au-delà de l’effort cette partie est magnifique, il faut l’apprécier : torrent, alpage de rêve, un coin incroyable pour venir en famille (avec le lac d’Ourrec évoqué plus haut)
Lorsque vous apercevez un gros refuge en construction c’est que le ravito approche ! Il est en effet à 3 minutes derrières
J’y suis à 10h20 – 61ème.
A cet endroit le ravito est vraiment chouette. Nous sommes plusieurs coureurs des deux courses posés dans l’herbe. L’ambiance est bonne car tout le monde sait que le plus dur est fait et que, sans pépin, la course est gagnée.
Une nouvelle fois j’opte pour la soupe tomates bien salée
La suite c’est une petite – mais difficile – section pour rejoindre la Hourquète Nère (+310 D+), dernière grosse difficulté.
Je le dis à chaque fois mais face à ce mur, les coureurs qui découvrent ce lieu pour la première fois se demandent par où nous allons passer.
La réponse est : sur la droite de cette muraille où l’on peut voir de loin les coureurs plus rapides qui cheminent.
Difficile à croire qu’il ne faut que 40 à 45 minutes du ravito pour rallier ce point et pourtant c’est le cas. L’an passé j’avais eu besoin de dormir dans l’herbe 20 minutes, pas besoin cette année.
Une fois en haut et avant de s’engager vers les 7 km qui mène à Merlans, il est nécessaire de faire un bon check : je pense notamment aux pieds qui vont être très sollicités sur cette dernière partie. Je profite de la vue au sommet pour me poser, mettre de la NOK et changer de chaussettes.
La descente vers le lac de l’Oule est vraiment usante. D’abord raide et technique puis il s’agit d’un long faux plat descendant sans aucun répit. C’est ne Néouvielle = beau à tomber mais très piégeux avec ses pierres, racines, irrégularités diverses. La chaleur est cette fois très installée. C’est un four mais le torrent permet de se mouiller autant de fois que voulu.
Et puis, enfin ce dédale se termine et nous bifurquons à gauche pour remonter sur le dernier ravito de la course. Après tout ce que nous venons de vivre et dans l’euphorie de la ligne qui approche, franchement ça passe tout seul.
D’abord 220 de D+ assez réguliers en alpage, puis le ravito de Merlans toujours aussi bien achalandé et enfin les derniers 180 de D+ jusqu’au Col de Portet ou nous étions hier matin...une éternité
Il est 13h12, j’ai deux heures d’avance sur 2021. Tout va bien, je suis 60ème.
Descente finale :
Sur la première partie en balcon, je suis vraiment en mode « finir assez tranquille » sur ces 12 km. J’alterne course et marche rapide sans autre objectif que de finir.
Mais, je me connais…j’aperçois un dossard rouge derrière et surtout plusieurs devant.
L’arrivée au cap de Pède à 6km de Vielle Aure est marquée par un virage à droite en angle droit et une pente très raide dans la foulée.
A ma grande surprise plusieurs coureurs sont quasi arrêtés soit par appréhension, soit à cause de quadris fusillés. De mon côté les jambes vont bien, je me lance donc à fond dans la descente.
Je serai en mesure de courir sur un bon rythme jusqu’à l’arrivée ce qui me permet de doubler 4 dossards rouges.
Arrivée à Vignec, je m’arrête comme c’est désormais la tradition pour me rafraichir et me « refaire une beauté » à la fontaine.
Je me remets en route et aperçois devant moi 3 coureurs nouveaux « rouges » à portée de fusil juste avant la rivière qui mène à l’arrivée.
Ils sont rejoints par leurs enfants pour faire le dernier kilo main dans la main. Fin de partie, impossible pour moi de les rattraper, il serait inconvenant, inapproprié de les doubler alors je trottine moi aussi tout en profitant du sentier de la rivière et des encouragements du public.
A 15h10 je passe la ligne avec 2h40 d’avance sur 2021. Evidemment toute l’équipe est là. Cette arrivée est vraiment magique même s’il y a un peu moins de monde que l’an passé (l’heure s’y prête un peu moins sans doute).
Qu’est-ce que j’aime ce village : cadeau Finisher, bière en terrasse, EXCELLENTES glaces maisons de chez DD (ne passez pas à côté de celle à la myrtille !).
Je profite de la navette pour aller me doucher au Camping (NB : le chauffeur – accent espagnol – était vraiment super sympa, dispo et arrangeant), mais décidemment quelle organisation aux petits oignons.
Mon équipe doit reprendre la route de son côté pour des contraintes familiales.
Je me couche dans ma tente pour dormir de 17h30 à 22h30 puis je prends la route du retour pour Orléans durant la nuit. Après qq pauses dodo, à 9h30 dimanche je suis chez moi
Un grand merci à François, Miche, l’orga, les bénévoles et tout le village de Vielle Aure
C’était top, mais vraiment ! Dans cette course j’ai vraiment connu l’ombre et la lumière
Vive le trail (même si je n’aurais jamais dit ça le premier jour)
8 commentaires
Commentaire de Zucchini posté le 30-08-2022 à 06:08:47
Très beau récit, Belle aventure humaine et sportive ! C'est génial ce que tu as vécu! encore une fois ça fait envie d'y aller l'an prochain ! bonne récup à toi Gilles
Commentaire de Gilles45 posté le 31-08-2022 à 17:46:39
Tu devrais signer David si la motivation pour le long revient ! parfait dosage entre le roulant (UTMB) et les presque trop technique pour moi (EB)
Commentaire de jujuhrc posté le 30-08-2022 à 22:02:14
Superbe récit et très belle course Gilles. Cauterets c'est le point crucial du GRP.
Commentaire de Gilles45 posté le 31-08-2022 à 17:47:26
Oh oui, tellement d'accord pour Cauterets. je dirais quand même que quand tu vois Luz tu vas quasi au bout.
Commentaire de coincoin29 posté le 31-08-2022 à 17:37:53
C'est marrant, en me disant que tu devais être à peu près en même temps que moi (mais sur 120) à Tournaboup le samedi matin j'ai vérifié et ça n'a pas coupé: départ à 8h40 pour les deux!
Tu est donc le gillou qui bénéficiait des chaleureux encouragements d'une supportrice féminine "allez gillou!" et que j'ai essayé de suivre quelque temps dans Néouvielle!
Super récit et bonne récup!
Commentaire de Gilles45 posté le 31-08-2022 à 17:45:35
Et oui...si ce n'est que ce n'étais pas une supportrice mais 4 (3 filles et un gars tous en t shirt roses) !!
C'est trop bête que nous n'ayons pas pu papoter...j'avais la casquette KKR rouge (celle qui fait gagner 15% de vitesse :-))
A la prochaine j'espère
Commentaire de jb600cbr posté le 01-09-2022 à 14:41:03
bon franchement c'est chiant ces récits.
Ca donne envi de s'inscrire et d'y retourner :-) GRP un jour GRP toujours.
bravo pour ta ténacité
Commentaire de Thomas02 posté le 05-09-2022 à 10:16:21
Bravo, superbe course de ta part encore une fois, je reste admiratif. La montée au serpolet m'a paru plus facile cette année comparée à l'an dernier, comme quoi le ressenti de chacun est différent.
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