L'auteur : pipo33
La course : PicAriège - 73 km
Date : 13/8/2021
Lieu : Auzat (Ariège)
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Distance : 73km
Objectif : Faire un temps
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Ça fait qqs temps que je regarde pour faire la PicAPica : un ultra dans les Pyrénées ariègeoises réputé parmi les plus dur de France, si ce n’est le plus dur (110km pour 11000 de D+, des passages à plus de 3000m, et un terrain pas facile type l’Echappée Belle avec beaucoup de cailloux : bref un trail comme je les aime J)
Mais bon, ça me semblait un morceau un peu costaud pour être considéré comme une préparation à une autre course (la Diag par exemple J)
Et en 2020, l’organisation à eu l’excellente idée de proposé un format 70km : une PicAPica allégée (enfin il reste 7000m de dénivelé, 3 pics à plus de 3000m quand même donc ça reste un bon morceaux). En prépa de la diag, ça me semblait parfait et me voila donc inscrit sur ce format.
Le Covid passe par là, et la diag comme la petite sœur de la PicAPica sont annulées L
Qu’à cela ne tienne, on remet ça en 2021 (aussi bien la diag que le 70km) !
Et au mois de mai, les organisateurs (avant ou après un apéro, la légende n’est pas clair sur ce point J) ont une idée à la con : Et si on proposait aux coureurs un petit défi : participer à toutes les courses du challenge (enfin presque toutes les courses puisque 2 courses se déroulent en même temps le dimanche matin). A savoir :
le jeudi soir un KV (3.5km/1080 D+)
le vendredi la PicAriège (le 70km qu’ils ont baptisé à l’occasion)
le samedi le marathon du Montcalm (l’historique 42km et 2700D+)
le dimanche le trail des Novis (25km pour 1300D+).
Il ne manquerait que le trail des mineurs (un 13km qui correspond à la première partie des Novis) pour faire vraiment toutes les courses…
Déjà inscrit pour la PicAriège, je me dis que c’est dommage de pas rentabiliser le déplacement J Un petit mail à l’organisation et me voilà inscrit au premier défi du Montcalm, comme 17 autres fadas ! J’entraine aussi Céline dans mon sillage, mais comme elle est raisonnable, elle ne s’inscrit que sur le KV.
Et donc, 1 mois après avoir enchainé le LUT et GR20 en 7j (duquel j’ai ramené un petit parasite sympathique qui m’a mis KO une petite semaine au passage), me voilà à Auzat, petit village pas loin de Tarascon sur Ariège. Pas forcément super confiant, mais prêt à en découdre !
Après un mois de juillet et un début aout tout pourri niveau météo, le ciel a décidé de mettre la barre sur plein soleil et a partir du mercredi, la température monte en flèche. Il doit faire pas loin de 35°C le jeudi pour le KV (la tomme de fromage offerte à tous les participants de la PicAriège a fortement apprécié elle aussi : heureusement qu’on avait accès à un frigo dans l’hébergement).
On part en mode contre la montre (un départ toutes les qqs secondes, plutôt que un départ groupé), et KV oblige, on attaque droit dans le pentu !
Enfin, le début n’est pas trop pentu, donc on peut trottiner sur environ 500m, jusqu’à un petit ruisseau gardé par des vaches dont certaines n’ont pas l’air de trop apprécier qu’on les dérange dans leur broutage (une fois en haut, j’en entendrai qqs un dire qu’ils se sont même fait plus ou moins charger J)
Comme je ne veux pas trop m’exploser dès le départ vu le programme du weekend, je pars plutôt prudemment (enfin prudemment pour un KV, ça reste un effort assez soutenu), mais je ne me fais pas doubler tant que ça. On démarre en sous-bois, ce qui évite de trop cuire. Mais environ à la moitié, on se retrouve à découvert, avec un petit vent chaud qui vient renforcer l’effet du soleil. Ça transpire beaucoup, ça tire la langue. D’autant plus que tout le monde a raté le ravito de mi-parcours qui consistait en fait en 3 bénévoles assis sur un tronc avec 2 petites bouteilles d’eau chacun. Tout le monde les a pris pour des supporters simplement venu encourager un coureur (ou une coureuse) !
Le chemin est malgré tout pas trop technique, donc je réussi à garder mon rythme. Je recommence même à doubler qqs uns qui sont bien sur parti trop vite et sont en train d’exploser en vol (forcément, quand tu pars au rupteur dès le départ, difficile de tenir très longtemps, n’est ce pas Baptiste !)
Les quelques dernières 100aine de mètres de dénivelé sont un peu plus velues, mais on aperçoit le sommet, donc ça met du baume au cœur à tout le monde.
Je finis donc cette montée en 57min17 (25ème/93).
J’attends Céline qui est partie pas mal de temps après moi et qui met 1h40 pour finir, en en profitant pour discuter avec ceux qui arrivent au fur et à mesure.
On redescend tranquillement, puis le temps de rentrer à notre hébergement, de manger et de mettre la touche final à mon sac, on se met au lit le plus vite possible : demain un gros morceau m’attend il faut mieux optimiser le sommeil !
Samedi matin, 3h : le réveil sonne et il pique les yeux L 4h30 de sommeil c’est pas trop moult …
Mais il faut ça pour être à 4h30 pour le briefing d’avant départ de la PicAriège.
Petit dej rapide à l’appart, on se prépare et Céline m’amène sur la ligne de départ.
Un petit café avec un petit Lu, on écoute le briefing d’une oreille distraite, déjà concentré sur la (grosse) tâche à venir et c’est paaaaaarti !
On commence par une petite montée de 1800D+ (non non, je me suis pas trompé) qui va nous emmener à près de 2500m d’altitude en une petite 10aine de km. Sur ces 1800 D+, on reprend le chemin du KV d’hier, donc j’en connais déjà la moitié J. Rythme un peu plus tranquille que la veille (nuit et économie d’énergie oblige) je mets grosso modo 1h15 sur le parcours du KV, 2h au total. Le soleil se lève gentiment sur la colonne de frontales. J’aime cette ambiance nocturne : tout le monde est concentré, dans sa petite bulle de lumière.
Une fois en haut, on ne traine pas : on a une descente de 800m sur 5 km gentillette, en zig zag, pas trop trop technique qui nous emmène au premier ravito. Ça permet de dérouler les jambes. Les sensations sont bonnes, c’est cool. On est a l’ombre, mais on sent malgré tout la température qui commence à monter (il faisait déjà 20°C à 5h…)
Arrivé en bas, on double un concurrent qui a l’air d’en chier. Grosse douleur au tendon d’achille. Pour lui la course s’arrètera là, il est sans doute le premier à abandonner, mais pas le dernier L
Ravito rapide : ça fait 2h30 qu’on est parti, tout est encore bien plein. Je suis en retard par rapport à ce que j’avais prévu (1h30-2h) mais en y réfléchissant, ça n’était pas possible : j’ai dû me planter dans mes calculs. On verra en arrivant au prochain ravito dans 2h-2h30 toujours d’après mes savants calculs…
Et on remonte l’équivalent de ce qu’on vient de descendre, un petit passage en crête qui permet de longer qqs jolis lac d’altitude et c’est déjà le 2eme ravito (21km de course). On est parti depuis 4h30 (donc je suis bien revenu dans mes temps prévus), et j’ai prévu que la portion jusqu’au prochain ravito durerait encore plus de 2h30. Donc je prends un peu plus de temps pour bien remplir les flasques, et m’alimenter correctement. Bizarrement, jusqu’à présent, je n’ai pas trop mangé, contrairement au LUT où j’ai vraiment beaucoup tapé dans mon stock. Comme dirait Forrest : les ultras, c’est comme une boite de chocolats : on sait jamais sur quoi on va tomber quand on en commence un J
On commence par une petite montée bien raide de 500D+ en 2km qui nous amène au sommet du Malcaras. C’est très technique : beaucoup de cailloux, et quand on est pas dans les cailloux, on est dans les rochers J. Ça me rappelle l’échappée Belle, c’est dire ! Il me faut près d’1h pour y arriver. On approche les 2900m d’altitude, mais je suis content, je n’en ressent pas trop les effets (encore une grosse différence avec le LUT). La vue au sommet est très sympa !
On attaque ensuite une groooooosse descente de plus de 1200D- en 4km. Si le début est dans les cailloux un peu chiants, les 2 derniers tiers sont plutôt dans une herbe typique de la région : le GISPET ! Personne ne connait et pourtant ça va devenir notre pire cauchemar. L’orga nous avait prévenu au briefing : les gispet, ça glisse autant quand c’est sec que quand c’est humide. Du coup, je démarre prudemment, puis je prends un peu de confiance. En plus le chemin commence à être bien tracé et la végétation n’est pas très dense. Et forcément, ça finit sur les fesses : ils n’ont pas menti !!! Mais en plus, cette cochonnerie pique affreusement. Je repart prudemment et zip, le pied droit qui part sur le coté. Une vrai galère J
Bon, je fini quand même la descente en mélangeant glissade, touch end go des fesses sur le chemin (j’ai d’ailleurs surnommé cette plante le gispète la gueule pendant cette descente J).
J’essaye malgré tout de ne pas trop être sur la retenue d’une part pour ne pas trop me cramer les cuisses, et d’autre part parce que ça ne sert à rien, même pas vite, ça glisse quand même :D
Je me retrouve à la base vie vers 11h30, donc plutôt dans la fourchette rapide de mes prévisions : content, plutôt en bonne forme. Je retrouve mon sac d’allègement et Céline J. La prochaine section va durer 4-5h si je ne me suis pas trompé. Les bénévoles sont super sympas, le ravitos est copieux : tout me fait envie (surtout les petites crêpes et la pastèque). Céline m’a aussi amené un sandwich spécial sportif (je peux vous donner la recette si vous voulez). Et pour couronner le tout, un resto du coin fait une animation burger local, offert à tous les coureurs qui le souhaite !
Avec tout ce que j’ai pris sur le ravito, un burger en plus ne serait vraiment pas raisonnable. Mais l’odeur alléchante et la vue de l’engin me fait trop envie : je récupère le mien et le confie à Céline : je sais ce que je mangerai ce soir !!!
Je repars après une bonne 1/2h, rassasié, les flasques et le camelbak remplis et le moral au beau fixe ! Paré pour attaquer la grande montée du Riufret qui va nous conduire au sommet du Montcalm, à plus de 3000m d’altitude. Céline récupère mon sac d’allègement et mon burger. Elle va essayer de faire une petite rando dans l’après-midi et de venir me retrouver deux ravitos plus loin (mais un paquet d’heures quand même)
Il fait très chaud dans cette montée, bien qu’elle soit sur le versant à l’ombre (heureusement). Mais le paysage est magnifique. On longe un torrent qui dévale la pente. C’est assez vert : toujours du gispet, mais le chemin est beaucoup mieux tracé, donc on ne marche pas dessus. Par contre on s’y pique les mains quand on veut s’y agripper pour se hisser un peu.
Je rattrape qqs concurrents avec lesquels je discute un moment. L’un d’entre eux est déjà venu en reco dans le coin, il m’explique la suite de la montée. Ça va encore être long : je n’en attendait pas moins.
Un peu après les 2500m, on arrive sur un plateau beaucoup plus sec (enfin, un plateau penché qui monte bien quand même) : le paysage redevient plus minéral (comprenez c’est encore une fois plein de cailloux J) mais ça reste joli. Au loin (enfin on a même l’impression que c’est trèèès loin) on aperçoit le Montcalm et le pic d’Estat qui nous attendent à plus de 3000m. Au final, cette portion minérale passe plutôt rapidement (même si certains passage ressemble plus a de l’escalade qu’a du trail : merci l’entrainement sur les 25 bosses J et j’arrive au sommet du Montcalm un peu plus de 2h30 après avoir quitté la base vie. C’est plutôt bien. Redescente au col à 2900 et on enchaine directement sur le pique d’Estat à 3175m et le Verdaguer à 3120m. Hop, les 3 sommets de 3000m c’est fait ! Un peu plus de 10h de course, 35km et déjà plus de 4500D+ avalés. La plupart des coureurs en profitent pour faire une pause. Beaucoup sont déjà pas mal marqués. Moi je me sens plutôt bien. Je blague un peu avec les bénévoles qui sont toujours super sympas et je repars rapidement. Il reste encore 4 « petits » kilomètres et 800m de descente (qu’on reprendra demain lors du marathon en montée en en descente : ils sont sympa l’orga : à chaque course on fait une reco pour la suivante J) avant le ravito. Et comme le reste de la course, ça n’est pas très roulant. Encore très minéral et technique.
Il me faut une bonne heure pour arriver au refuge. Je suis toujours dans la fourchette basse de mes prévisions de temps de passage, les bénévoles sont toujours super cool, et il y a encore de la pastèque.
Par contre, on est en plein soleil, il fait chaud, donc je ne m’arrête pas trop trop longtemps pour ne pas rôtir ! D’autant plus que je vois débarquer un petit papi en T-Shirt rose qui a l’air frais lui aussi(je lui donne au moins 65 ans. Mais en vrai il n’en a que 58 donc pas si vieux que ça mais je ne le sais pas). Mon honneur veut que je ne me laisse pas dépasser, non mais Oh ! C’est un local de l’étape apparemment parce qu’il se met à discuter avec les bénévoles et leur parle de cette « putain de raspe » qui reste. Je ne sais pas encore de quoi il parle, amis je vais comprendre un peu plus tard (y’a trop de suspense dans ce récit) …
Il nous reste encore 1000 m de descente et 5 petits kilomètre avant le prochain ravito assez conséquent, celui où Céline doit essayer de venir me m’y retrouver.
Les bénévoles m’annoncent que ça va être plus roulant, et ça l’est !
J’entends un autre concurrent derrière moi, alors je relâche pas la pression. Heureusement ce n’est pas le Tshirt rose que je vois dans le rétro. On commence à discuter, tout en enchainant les virages en épingles. On arrive assez vite sous le couvert des arbres. Ça fait du bien aussi de retrouver un peu d’ombre (je parle pas de fraicheur, parce qu’il doit quand même faire une 30aine de degré bien qu’on soit toujours à plus de 1000m d’altitude. Et du coup, mine de rien, on accélère gentiment ! Les jambes répondent bien, ça déroule, le temps est magnifique, un chouette moment !
On arrive au ravito en 45 petites minutes après avoir longé un petit ruisseau. Mon camarade de descente en a profiter pour faire un stop se mettre la tête dans la flotte pour se rafraichir.
Il y a encore des crêpes, de la pastèque du chocolat même pas fondu et Céline qui a fini sa rando est là pour m’accueillir. Tout va très très bien !!!
Je prends encore une fois mon temps (30 minute ici aussi). Au briefing ce matin, on nous avait prévenu : repartez frais de l’Artigues (le nom du ravito) parce que la route est encore longue jusqu’au prochain ravito (13km pour 1600D+), et encore plus longue jusqu’à l’arrivée !
Je change de chaussures parce que ma paire actuelle a déjà connu pas mal d’aventures (elle m’a accompagné sur le LUT, sur une bonne partie du GR20, et j’en passe) et les rochers ariégeois ont fini par l’achever : je suis en pneus lisses depuis un bon moment (avec qqs glissades dans la dernière descente qui m’ont un peu alertées), qqs crampons sont même carrément arrachés. Bref un petit pincement au cœur au moment de dire au revoir à ces fidèles compagnes mais il faut ce qu’il faut …
Un bénévole s’aperçoit que j’ai pris un coup de soleil sur la nuque, et propose de me passer de la crème solaire ! J’ai jamais vu un truc comme ça : ils sont vraiment au top niveau !!!
Le Tshirt rose arrive lui aussi et je repart. 100m de bitumes et on tourne à gauche sur un chemin de terre qui s’élève dans les arbres. Sur le panneau indicateur : « RASPE ». Ah, la voila donc cette putain de Raspe J. Pour le moment, rien de bien compliqué. Un peu dur de se remettre dans le bain après une grosse pause, mais je ne suis pas inquiet : c’est la dernière grosse montée de l’épreuve : 1500D+ en 6.5km. C’est raide, mais sur le papier : rien d’infaisable. D’autant qu’on enchaine avec une descente de 5km pour 1000D+ pour arriver sur le dernier ravito de l’étape. Sur mes prévisions, j’ai prévu 4 à 5h pour y arriver. Vu que je suis plutôt dans le bas des prévisions jusqu’à présent, je me dit qu’en un peu plus de 2h30 je suis en haut, et une bonne heure de plus pour la descente ça devrait le faire. Impeccable : j’arriverai au ravito avec la nuit : idéal pour me re-équiper avec la frontale et compagnie !
Assez vite, je sors des arbres, et je me retrouve à longer un ruisseau dans une espèce de garrigue. C’est très joli (sur la photo, on est dans la montée de la raspe : la montagne en face, c’est le Montcalm.
Par contre, on retrouve le fameux gispet, et en plus le chemin est régulièrement en devers : ça glisse L. Et j’ai beau regarder ma montre, je n’avance pas : ni en terme de km, ni en terme de D+. A tel point que je me demande si elle n’a pas buggé….
En plus, je suis tout seul : pas un seul autre concurrent en vue pour me rendre compte si je suis le seul en galère ou pas. Pourtant plusieurs sont parti du ravito peu de temps avant moi (qqs minutes tout au plus)
Dans le doute, j’essaye de mettre un coup d’accélérateur, mais rien n’y fait : les kms ne défilent pas, et l’altitude reste désespérément au même niveau ….
Après un temps qui me parait infini (mais en vrai surement autour de 45 min), j’aperçois enfin un petit bonhomme plus haut sur le chemin : c’est bon signe : je ne suis plus seul : j’ai un objectif en vue. Je vais pouvoir m’y accrocher !
Et je ne vois toujours personne derrière : c’est bon signe aussi J
En fonction du relief et des virages, il apparait et disparait mais j’ai l’impression de le rejoindre très rapidement
Et en effet, je ne tarde pas à le retrouver : allongé au bord du ruisseau, en train de se rouler dans sa veste. C’est le concurrent avec qui on a fait la descente du Montcalm a fond de train. Je suis surpris de le voir si mal, alors qu’il était si bien dans la descente il y a peu de temps…
Je prends le temps de prendre de ses nouvelles : petit coup de chaud + fatigue. Il se sent pas bien, et a déjà vomi qqs fois.
Lui aussi a trouvé ce bout de chemin en dévers, avec le gispet bien dégueulasse et a pris un petit coup au moral.
Par prudence, il s’est rafraichi dans le ruisseau et va se poser un peu. Il a de la bouffe, de l’eau, donc je repars (je peux de toute façon pas faire grand-chose). Rien que d’avoir échangé qqs mots et partager nos impressions sur ce debut de montée, ça fait du bien au moral.
Mais dans l’affaire j’ai perdu mon point de repère. Je continue à mon rythme. La montre se débloque petit à petit. Les kms ne défilent toujours pas, mais je commence à prendre de l’altitude. Petit à petit le décor se fait de plus en plus minéral, le devers disparait, tout comme le gispet (enfin !!!). Et la pente se fait de plus en plus raide aussi. Ça devient technique, voire très technique. Le chemin n’est plus marqué du tout. On se retrouve à tirer « dré dans le pentu » entre les balises (qui sont heureusement assez nombreuses). J’avance toujours pas, mais au moins, je sais pourquoi !!!
Je retrouve aussi 2 concurrents devant moi qui me permettent de me redonner un objectif ! J’aperçois aussi un autre concurrent derrière moi. Ce n’est pas mon camarade de descente : son sac à dos n’est pas de la même couleur. Donc je me motive : ne pas mollir, rattraper les 2 de devant et ne pas laisser celui de derrière me rejoindre. J’enclenche le mode machine : débrancheage du cerveau, et les cuisses qui passe en mode « vérin » ça pousse, ça tire, ça pousse, ça tire. Je n’ai pas de bâtons pour me donner un rythme, mais je fais comme si !
Et ça marche : je fonds (plutôt comme une glace au soleil que comme un faucon sur sa proie) sur mes prédécesseurs, et j’ai beau me retourner : je ne vois plus mon poursuivant : ouf !
Si les kms ne défilent pas, le chrono lui, par contre, tourne. Déjà plus de 2h30 que je suis parti et je ne vois toujours pas le sommet. Le soleil commence à baisser. On est déjà dans l’ombre même si il fait encore chaud (heureusement parce que en plein cagnard, ça aurait été encore pire).
Je double le premier coureur devant moi.Un petit espagnol qui s’accroche un peu, mais qui finit par craquer (je me rendrais compte le lendemain que lui aussi fait le défi).
Puis je rattrape le second. On échange qqs mots (il est français, c’est plus facile J) mais lui ne s’accroche pas longtemps
10 fois j’ai l’impression d’arriver au sommet. Et 10 fois le chemin bifurque et il en reste encore à monter. Mentalement c’est un passage assez compliqué à gérer. Physiquement ça va, mais j’ai du mal à ne pas me laisser abattre. Je vais chercher bien au fond de moi pour garder le rythme.
Encore un petit effort et j’arrive enfin pour de vrai au sommet !!! il est déjà autour de 21h.
Je discute un peu avec les bénévoles en haut, mais pas trop parce que les 2 que j’ai doublé sont déjà sur mes talons !!!
Le jour a bien diminué. Rejoindre le ravito avant la nuit me semble bien compromis maintenant. Je ne mets pas la frontale quand même : on sait jamais on va pas se porter la poisse !!!
Le début de la descente est technique. Et en plus, le balisage est pas top à cet endroit (c’est la première fois) ou alors c’est moi qui suit fatigué…
Je rate des balises 1 ou 2 fois ce qui fait que les 2 de derrière me rattrapent à chaque fois L
Petit à petit ça devient quand même moins technique, mais le jour tombe de plus en plus. Qqs petites erreurs techniques sans conséquences (heureusement) et qqs balises supplémentaires ratée me convainquent de sortir la frontale quand même. Tant pis pour l’objectif d’arriver au refuge sans.
Au loin, une lumière rouge (un concurrent ?), et encore plus loin, j’aperçois les lumières du refuge mais il est difficile de juger les distances dans le noir. J’essaye de voir le refuge le plus souvent possible au lieu de regarder le chemin. Et forcément, ça se finit par une mini gamelle avec mini tordage de cheville. Je m’auto engueule : c’est pas le moment de faire le con !!!
Je rattrape rapidement la lumière rouge, pas un concurrent, mais un bénévole, qui va passer la nuit au milieu de nulle part pour guider les coureurs. Je n’entends plus mes 2 concurrents derrière : eux aussi ont dû ralentir le rythme avec la nuit.
Je poursuis vers le refuge, mais à un moment, encore plus de balises !!! C’est pas possible, il l’a fait exprès le baliseur L Je commence à pester tout seul quand j’entends 2 voix féminine qui m’appelle :
« OUHOUH, c’est par là ! C’est les vaches qui sont descendues au bord de la rivière qui ont tout arraché »
Moi (encore un peu agacé mais un peu amusé par l’histoire finalemet) :
« Par là où ? je sais pas si vous avez remarqué, mais il fait nuit : je vous vois pas ! »
Les filles : « Il faut longer le ruisseau sur 2-300 m et vous aller retrouver le balisage. Courage, vous êtes presque au ravito » (Surement des bénévoles qui sont venu se mettre là en prévision du débalisage, et qui vont passer une sacré nuit de merde : sans tente ni rien, à l’arrache : chapeau ! J’espère pour elles qu’ils organiseront des rotations….
Bref, en effet, je finis par retrouver les balises, puis rapidement le ravito !
Il fait du bien celui-là !!! Putain de Raspe !!! J’ai mis autour de 5h pour y arriver : c’était dans la fourchette bien haute de mes prévisions L
Je me pose un peu, je regarde derrière et je vois non pas 2 mais 4 balises pas trop trop loin. Tant pis pour le classement, je les attends pour repartir : c’est plus prudent de courir à plusieurs de nuit quand même. J’en profite pour bavarder 10min avec les bénévoles qui sont, comme partout super sympa. On rigole sur le fait que je sois parisien : je suis le premier qu’ils voient :D
Dans les 4, il y a les 2 que j’ai doublé en haut de la raspe, un 3eme inconnu et LE T-SHIRT ROSE ! Il s’accroche sacrément le papi (enfin, c’est toujours pas un vrai papi, mais sur le moment, je le savais pas J)
Il est presque 22h30, je repart avec le français et l’espagnol que j’ai doublé dans la montée : les autres profite un peu plus longtemps du ravito.
Il reste presque 15 km et peu de montée (enfin comparativement à tout ce qu’on a déjà fait : à peine 500m) et un peu plus de 1000 de d-
Je prévoyais entre 2h et 2h30 pour cette portion mais vu ce que je viens de faire ça sera surement plutôt 2h30-3h. Je préviens Céline qu’elle n’est pas obligée d’arriver trop tôt à l’arrivée : dommage elle est déjà sur place, elle ira faire un somme dans la voiture en m’attendant (c’est une petite femme attentionnée : je sais pas si je vous l’ai déjà dit J)
Ça commence avec une petite montée de 3-400m, on discute un peu avec le français qui imprime un bon rythme. L’espagnol ne parlant pas un mot de français, et pas beaucoup plus en anglais…. Lui fait cette course en préparation pour le Tor des Géants : RESPECT. Mais il pense que ça sera ça dernière course : il est fatigué de la course à pieds : de devoir s’entrainer tout le temps etc etc. A presque 50ans il a coché toutes les cases de sa ToDo List, il va surement raccrocher les baskets L Au moins pour un temps (je suis sûr qu’il y reviendra avec plaisir après un bon break J)
J’aime cette ambiance nocturne, avec le calme, les étoiles et juste 2-3 coureurs au milieu de nulle part. Quand on regarde en face, on voit qqs frontales éparses qui descendent aussi vers le refuge. Il y a de la vie dans ses montagnes (mais pas trop quand même)
Assez vite on bascule dans la descente. Le Français m’annonce qu’il va trop nous ralentir et se laisse gentiment distancer. L’espagnol reste bien accroché.
C’est roulant, il reste un peu de jus au fond bonhomme, le chemin est roulant, et le moral plutôt sur la pente ascendante donc j’accélère un peu (le vieux cheval qui sent l’écurie comme aurait dit mon grand-père)
En théorie, il reste un passage en crête avec qqs petits coups de cul, puis on arrivera au Check Point n°4 (après les 3 des sommets à 3000) qui marquera la fin du D+ de la course. On a hâte d’y être !
Assez rapidement, on voit les lumière d’Auzat en bas, puis on réussit à distinguer le stade ! Hop petit coup de boost supplémentaire au moral.
Du coup, comme pour le ravito précédent, je cherche ce fichu stade entre les arbres dès que possible et forcément ne regardant plus le chemin, je prends une racine et la gamelle associée ! ça réveille et ça permet de se reconcentrer pour les derniers km !
Je vois pas trop de coup de coup, mais malgré tout, on arrive au CP4. On l’attendait celui là. D’autant plus que le petit panneau indiquant la crête est déjà passé depuis un petit moment ! Joie, bonheur : il ne reste plus que de la descente !!!
Dernier petit coup d’accélérateur, et ….
…. Encore un coup de cul ??? Le plus gros depuis le début de la descente. Bon, on le passe quand même facile, on redescend, o refait 100m et on retombe sur un nouveau coup de cul ??? Palsambleu, les fourbes ont mis le CP AVANT la crête et pas après !!! Fracture du moral.
Heureusement ça reste tout petit, ça se passe même en courant. L’espagnol craque et se laisse distancer aussi.
Bref, un bon petit km et j’arrive pour de vraie dans la descente finale ! Je lâche rien, j’enchaine les virages, le chemin est de plus en plus large, et j’entends la voix du speaker qui accueille les arrivants. Comme disent ceux qui en boivent : ça sent la bière !!!
Je débouche enfin sur la route : le stade s’offre à moi, a moins de 100m quelle délivrance. Le dernier point de bénévole est en vue ! Mais pourquoi il a un petit panneau dans la main et indique un chemin à l’opposé du stade celui-là ??? J’arrive et il m’annonce : « C’est par là : encore une petite boucle de 1,5 km »
Je l’aurais tué ! Le stade est juste là ! les boules : Enorme fracture du moral sur ce coup (j’ai dû être à moitié aimable quand je lui ai parlé, et je dois pas être le seul)
Bref 10 minutes plus tard qui me paraissent interminables, j’entre enfin sur le stade pour un dernier demi-tour de piste. La délivrance ! Pas la force de sprinter.
Je regarde ma montre : finalement, il est même pas 1h du matin : un tout petit peu plus de 2h depuis le dernier ravito. J’ai pas mal gazé sur cette portion. Ça me permet de finir juste sous les 20h de course. Je suis dans mes prévisions.
Et avec Céline m’attend à l’arrivée, ça me remonte bien le moral !
Bon, il est quand même 1h du mat, il faut rentrer à l’appart, me doucher, j’ai mon sac à préparer pour le marathon demain et le réveil est déjà programmé à 5h du mat. Donc on s’attarde pas ! chaque minute de sommeil va compter !
Je retrouve quand même avec grand plaisir mon burger récupéré à la base vie ce midi : même réchauffé au micro-onde, il reste super bon !!! un petit plaisir avant d’aller dormir J
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