Récit de la course : Val d'Aran by UTMB - VDA 2021, par Fironman

L'auteur : Fironman

La course : Val d'Aran by UTMB - VDA

Date : 9/7/2021

Lieu : Vielha (Espagne)

Affichage : 950 vues

Distance : 162km

Objectif : Objectif majeur

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VAL D'ARAN by UTMB 2021

 

Vielha - Bossost

C'est finalement 475 rescapés, sur les 941 traileurs ayant pris le départ à Vielha ce vendredi 9 juillet à 18h, qui auront rejoint l’arrivée endéans les 48h autorisées afin de faire sonner la cloche validant le billet pour l’UTMB 2022.
Il fait chaud en ce début de soirée, nous sommes rangés dans 4 boxes de départ pour finalement se regrouper et prendre un départ massif. Nous pouvons enlever le masque après 300 m pour attaquer, dès la sortie de la ville, un tronçon bétonné de 5 km et s’élevant, déjà, de 450 m d’altitude. Le peloton est compact, nerveux, ça pousse, ça donne du bâton, bref un départ classique. J’espère un étirement rapide de tous ces traileurs mais ce ne sera pas le cas, il y aura des bouchons et des ralentissements mais jamais très longs et ce, jusqu’au 2ème sommet, situé au km 35. Je prends mon mal en patience, j’avance à mon rythme et j’essaye de me faufiler pour ne pas être trop gêné dans ma progression. Y en a même qui utilisent leur téléphone sur le sentier, ce qui crée des bouchons derrière eux et quand on leur fait la remarque, il le prennent mal. Après un peu de plat, nous attaquons une pente très facile techniquement mais qui nous mène en droite ligne vers le sommet, on se prend 850m de D+ en 4 km avec un ravito au milieu. Je dépasse du monde au ravito, je recharge mes 2 flasques en vitesse et je me remets au boulot. On est en file sur la trace mais le rythme est bon et me convient bien. Je ne regarde pas le classement, je m’en tiens à mon tableau de marche qui est compris entre 4 et 5 km/h de moyenne. Je bascule au Montpius (2270m) dans une descente un peu plus technique, je dépasse beaucoup, je reste concentré malgré la beauté du panorama. On alterne descentes et montées très sèches en suivant la crête qui nous offre une vue superbe sur Vielha illuminé.
 
Nous continuons à descendre sur un sentier facile mais, à nouveau, en ligne droite et ça fait mal aux jambes mais il faut bien contrôler sa vitesse tout en étant le plus relâché possible, pas évident. Je perds 1100 de dénivelé en 13 km. On commence à attaquer le second col au km 27 alors que la nuit est tombée depuis le ravito précédent. 1300 mètres de dénivelé sur 7km500, le début est assez tranquille jusqu’au ravitaillement « Artiga de Lin » puis très raide et droit dans la pente jusqu’au sommet Pas dera Escaleta (2450m), nous sommes toujours dans une file mais un peu moins dense et sur un rythme plus soutenu. Après une descente courte mais très sévère, on évolue en crête en alternant légères montées et descentes sur 9 km avant de descendre à travers les courbes de niveau jusqu’à la 1ère base de vie à Bossost. Je suis souvent seul ou avec un tout petit groupe pour cette descente qui nous fait perdre 1400 m en 11 km, on traverse le pont qui enjambe la Garona sous les encouragements des spectateurs et des familles qui attendent leur favori. Il est 4h50 quand je rentre à la base de vie de Bossost. Il y déjà pas mal de mines déconfites et il y a une ambiance un peu morose, déjà beaucoup de désillusion dans les yeux. Je crème mes pieds abondamment, deux tartines au choco, un café, du coca et des fruits pour mon ravitaillement, je refais le plein d’aquarius dans les flasques et à 5 heures, je quitte Bossost un peu fatigué par la nuit mais motivé. 11 heures de course, 57 km et déjà 4166 m de D+ dans les jambons.

 

Bossost - Plan Beret

Pendant 7 km, on longe la Garone sur un terrain souvent plat, il fait encore sombre et ma lampe n’éclaire plus assez pour que je puisse courir. Je devrais prendre ma seconde lampe dans mon sac et suivre tous ceux qui me dépassent en trottinant. J’en ai pas l’envie, j’ai, en fait, un gros coup de mou. A Pontaut, on commence à monter par un chemin en lacets jusqu’à Canejan, joli village que j’atteins à 6h39, ravitaillement express et en route pour San Joan de Toran ( km 72 )en suivant un sentier en sous-bois qui monte très légèrement. Je suis sur un faux rythme et je me fais dépasser mais je n’ai pas trop la pêche en ce début de journée. Sur 8 km, on passe de 1100 m à 2350 m (Pica Paloméra), d’abord par un chemin en sous-bois puis par un vrai sentier de montagne bien caillouteux, je suis un petit groupe et je retrouve de l’énergie avec ces magnifiques paysages et ce beau soleil qui nous accompagne. On passe sur un ancien chemin de fer en altitude qui servait pour des mines, on avance dans un décor de carte postale, il y a de nombreux lacs et ça rend le périple un peu plus digeste, ce panorama me booste. Je profite à fond de cette belle journée tout en restant concentré sur le parcours, la gestion des ravitaillements, du chrono et de la fatigue. Après une légère descente, je passe le Coth de Maubèrme (2540m) pour attaquer la descente vers le refuge de Montgarri, 9 km et 900 de D-, un peu technique dans les rochers pour le début et sur un sentier tranquille dans les bois pour atteindre ce ravitaillement où il y a juste un refuge, une cour et une église, c’est très joli et très fréquenté, il y a plein de monde au resto du refuge et le long de la rivière qui borde celui-ci. Il est 14h45, j’ai atteint le 100ème km et il fait très chaud. Je mange beaucoup de fruits, recharge mes flasques et je m’assieds quelques minutes.
Dans 5 km, j’atteindrai la base de vie où mon sac de « remise à neuf » m’attend. J’atteins Plan Beret, une station de remontées mécaniques, à 16h05. Je me nettoie au tuyau d’arrosage, je me change complètement, je remets abondamment de la crème aux pieds et à tous les endroits de frottement, je me ravitaille, je mets ma lampe à charger sur ma batterie portable et une fois que tout est en ordre, je me lance pour les 60 derniers kilomètres, je suis resté 35’ au ravitaillement, mon arrêt le plus long !
 

Plan Beret - Vielha

Ici, je suis en terrain connu pendant 14 km. Après un peu de plat, j’entame la descente vers Salardu, l’endroit où je loge mais je ne reverrai mon hôtel que demain matin, si tout va bien. Je trottine toute la descente (6km et 650 D-) puis après un ravito express, j’attaque en trottinant dès que je peux, le faux-plat qui nous mène vers le col suivant. Passage triomphal à Tredos, où une foule attablée devant mojitos et tapas nous encourage follement, obligé de courir et faire bonne figure dans ces circonstances ! Mais je me retrouve bien vite seul à la sortie du village et j’entame une vraie montée par ce chemin des sorcières à Tredos. Après quelques kilomètres, je bifurque à droite pour terminer cette montée à 2000 m sur un sentier à fort dénivelé qui serpente dans un bois. On bascule pour redescendre jusqu’au ravito Bahns Tredos à 1770 m. Il est 20h52, je m’équipe pour la nuit, lampe et bandana, pas d’autre équipement car il fait assez chaud, pour le moment. On doit maintenant franchir le Coth de Podo à 2600 m par une montée assez technique et difficile. C’est très raide au milieu des bois pour le début et je dois allumer ma lampe très tôt. Il y a 2 personnes qui me suivent et je rejoins un Espagnol qui ouvre la route. Ensuite, nous pénétrons dans un décor minéral où nous nous faufilons au milieu des innombrables lacs. Le gars devant moi s’est arrêté et ceux qui me suivaient aussi, je crois que le gars en avait marre d’ouvrir la route. Le terrain devient très difficile et on évolue principalement sur de gros pierriers où chaque prise d’appui est compliquée mais c’est un terrain que j’aime beaucoup, un peu comme en Corse, et sur lequel j’aime imprimer un rythme constant qui force à rester très concentré. Nous apercevons l’eau des lacs seulement quand on se trouve le long de sa berge pourtant on en longe pas moins de sept jusqu’au sommet ! Je passe le col à 0h18 soit 3heures 1/4 pour 9 km et 900 m de D+. Je parviens à intégrer un groupe pour la descente qui est tout aussi technique que la montée. Ce train d’une dizaine de traileurs a un bon rythme, bien régulier mais, malheureusement, le gars devant moi chute et le temps de se relever, l’essentiel du groupe s’est envolé ! Le gars reprend la descente mais, en manque de confiance, il n’avance plus assez vite, je décide donc de le dépasser et d’essayer de rejoindre le groupe. Passage à gué, tout le monde est passé, je repère les pierres sur lesquelles je vais prendre appui, je m’élance mais, je ne sais pas pourquoi, j’ai planté mon bâton et il est resté coincé. Bardaf, c’est l’embardée. Je me retrouve couché à plat ventre dans la rivière, je gueule mais personne ne se retourne, ni s’arrête, c’est la course…
 
Bref, je suis blessé aux doigts, trempé jusqu’aux os et mes chaussures sont également remplies d’eau. Bon, il ne fait pas trop froid, je repars, je me changerai en bas, si nécessaire. Je rejoins le train et je finis la descente en serre-file jusqu’au ravito (1983m). Je suis déjà presque sec sauf les pieds et ça, ça m’emmerde un peu mais bon, j’ai pas le choix. Il est 2h06 quand j’atteins le ravitaillement, je me goinfre de coca, tartines au choco, quelques bonbons et bananes, j’ai toujours la pêche, ça ne va pas durer. Une très courte ascension mais très raide (300D+ sur 1km800) nous attend à la sortie du ravito, on est parfois à la limite entre trail et escalade ! Puis, on entame une très longue descente, mais assez sévère au milieu des bois, jusqu’à Ressec. 7 km de sentier un peu monotone où on perd quand même 900m. Vers 4h, je commence à somnoler et, parfois, m’endormir en marchant. Je suis seul, je ne marche plus très droit, j’ai des hallucinations, je dois vraiment lutter pour avancer. Plus trop de lucidité, je ne vois pas la fin, je ne sais pas combien il me reste jusqu’au ravito, je n’ai qu’une seule envie : dormir !
A 5h20, je rentre dans la tente du ravito, je m’assois directement, je ferme les yeux, je suis (presque) parti ! Bon, que fais-je ? Je dors une heure puis je repars ? Je me ravitaille, pas de café donc du coca, j’avale deux trois bricoles et je vais consulter la suite des événements. 6km800 dont 5 km de montée avec 735 m de D+ mais sur du sentier facile et en forêt, apparemment. Bon, dans une heure il fera jour, je repars, j’avance comme un zombie, je dors debout mais j’avance, le sentier est facile, je tire bien sur mes bâtons, je traîne ma carcasse en essayant de me sortir de cette torpeur. Allez, vers 6h30 le soleil nous dit bonjour et je retrouve ma lucidité, je suis presqu’au bout. Je bascule sur cette colline et j’aperçois le dernier ravito là-bas, au loin, je descends vraiment tranquillement au milieu des hautes herbes, ça descend fort et mes quadriceps ont démissionné depuis longtemps. Je me suis fait dépasser au moins par dix gars depuis Ressec mais je ne parviens plus à suivre, surtout en descente.

 
J’arrive au Ravito, tout le monde s’est éclipsé en vitesse, il est 7h55, je comprends alors qu’on est dans la course pour faire sub 40h. Et je dois être le dernier de ces candidats ! Bon, quel est la topo de cette finale ? 1km 600 et 350 m de D+ suivi d’une descente de 6km 600 et 1200 de D- et c’est bien cette descente qui me fait peur ! La montée se fait au milieu d’un pré avec des vaches, je subis une attaque en règle de mouchettes vachement agressives, Arrivé au col, je m’arrête, je remets tout mon sac en ordre, je fais une dernière pause pipi puis j’attaque cette descente. Même si je n’avance pas très vite, je cours pratiquement tout le temps. On est sur du 20% et si ce n’est pas très technique, c’est difficile de simplement contrôler sa vitesse après 160 bornes, 10500 de D+ et deux nuits blanches. Quand j’arrive en bas, je reçois plein d’encouragements, quel bonheur de pouvoir courir sur de l’asphalte plus ou moins plate ! Je savoure mon arrivée, il y a du monde aux terrasses et les acclamations sont nombreuses. J’arrive seul et je fais tinter la cloche avec énergie. J’en ai fini avec ce parcours en 39h49 et je suis très satisfait !
 
Il est dix heures, je vais récupérer mon sac de la base de vie de Beret, je vais voir l’horaire de bus, j’en ai un à 11h qui me ramènera à Salardu. Le tout est de ne pas s’endormir.
Finalement, je me couche à l’hôtel vers midi jusqu’à 17h, je prépare mes affaires puis je m’offre un bon resto. Je rentre à 21h pour regarder la finale de l’Euro puis je m’endors du sommeil du juste. Le lendemain à 8h, petit déjeuner, départ à 9 heures et à minuit, j’arrive enfin à la maison. 15 heures de route en moto dont 11 sous la drache ! Quelle aventure ! 
Endroit magnifique, très belle vallée, très accueillante et parsemée de randos et d’activités montagnardes de tous niveaux. Les gens sont super sympas. La course est finalement très exigeante et les barrières horaires assez serrées. A découvrir !
 
 
 
 

3 commentaires

Commentaire de Benman posté le 23-07-2021 à 14:51:39

Salut Fironman. Belle aventure et bravo pour cette perf. Par contre, tes images ne s'affichent me semble-t-il pas. Il y a un tuto en ligne pour importer des photos hébergées ailleurs (ex flickr)

Commentaire de Royal Bâtard posté le 09-08-2021 à 09:21:44

Course incroyable, technique, sauvage, mais en prairies. En plus les photos sont top, faut que je récupère les miennes !!! J'ai pas fait sub40, j'ai mis 40h10 ! J'ai fait une vidéo en 3 épisodes si ça t'intéresse, c'est ici : https://www.youtube.com/watch?v=KepO3QIWHJg
Bien à toi !

Commentaire de Fironman posté le 09-08-2021 à 19:43:10

Merci, je vais aller voir ce film et bravo à toi, on a du se croiser si on est à 20’ d’écart ! 😉

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