L'auteur : Grom
La course : Madeira Island Ultra Trail - 85 km
Date : 28/4/2018
Lieu : Funchal (Portugal)
Affichage : 2384 vues
Distance : 85km
Objectif : Se défoncer
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Ce trail de Madère, c’est une histoire qui commence en novembre. Plus précisément le 1er novembre, c’est-à-dire le lendemain de l’ouverture des inscriptions. Petite visite du site de la course et je m’aperçois qu’il ne reste plus que 50 places de disponible pour la course de 85 km. Donc sans savoir comment cela s’organisera, ni si j’en suis capable, je fais chauffer la CB !
Une fois cette étape remplie (la plus facile), il faut se lancer dans celle de l'entraînement ! J’essaie de le rationaliser en utilisant l’outil stravistix pour Strava, pour augmenter les charges d'entraînement sans tomber dans la fatigue excessive. J’avais déjà fait ainsi sur la barjo en juin dernier, et ça m’avait plutôt réussi, avec un temps meilleur que l’objectif. Après cette période d'entraînement pour Madère, je me retrouve avec le même niveau de “fitness” et de “form” qu’au départ de la barjo, ce qui était le but recherché. Mais je sais aussi que cet outil ne mesure pas si l'entraînement a été adapté au terrain cassant de l’île, ce qui est, de toute façon, difficile à reproduire dans nos contrées.
Nous arrivons donc sur l’île la veille de la course, avec son lot d’occupation variée : récupération de la voiture, des dossards (puisque Sara fait le 42 km), du logement puis préparation du matériel, avant d’aller se coucher tôt !
Le lendemain, levé à 5h00, petit-déj puis mon père m’emmène au départ. Et là une première surprise : il pleut des trombes d’eau ! Ca valait le coup de quitter la Normandie ! Le speaker essaie tant bien que mal de mettre de l’ambiance à coup de musique d’ AC/DC, mais chacun reste un peu abrité où il peut et le départ sera donné avec 5 minutes de retard.
1er tronçon : Sao Vicente - Encumeada
Malgré un dénivelé pas ridicule (800 m), le terrain est plutôt facile et le rythme est bon. Une bonne frayeur quand même pendant une descente parmi les fougères avec une terre rendue ultra glissante par la pluie. 2 gars de l'île nous font comprendre qu’on n’est pas assez rapide. Résultat : le premier me donne un coup d’épaule au passage (merci !) et le deuxième part en sucette. J’ai bien crû au tacle par derrière avec carton rouge et cheville en vrac de mon côté. Heureusement, il me passe à quelques centimètres. L’autre souvenir de cette partie, c’est celui de rejoindre les coureurs de la grande course (115 km), qui ont 30 bornes de plus dans les jambes et une nuit passée sous cette pluie. Certains semblent rincés dans tous les sens du terme !
Assez vite, nous traversons une première forêt, avec ses fougères arborescentes et ses lauriers. Entre cette végétation presque unique au monde et la bruine persistante, on s’attendrait à voir un tyrannosaure débouler au coin du chemin ! J’essaie quelques photos, mais avec la pluie et le jour qui se lève, c’est forcément flou…
2ème tronçon : Encumeada - Curral das Freiras
C’est parti pour une longue section (3h) avec tout ce que je suis venu chercher : des paysages magnifiques, une végétation unique (même les lichens sont magnifiques !), des montées abruptes et évidemment des descentes du même tonneau. Je me sens bien, dans les temps planifiés. La pluie se calme, je profite et j’ai l’impression que cette section passe très rapidement.
Malgré tout, cette section annonce la couleur du reste de la journée : on va monter et descendre des marches aujourd’hui. Ben oui, quand les dénivelés dépassent les 20% en montée comme en descente, soit on prévient les coureurs qu’il faut prévoir un baudrier, soit on taille des marches. Et on en verra de toutes sortes : taillées dans la terre avec renfort ou non de rondins, dans la roche, au milieu des racines, en métal, bétonnées…
J’arrive au ravitaillement mais là, il y a une mauvaise surprise : au départ, nous pouvions donner un sac avec du matériel de rechange, qui devait nous attendre à ce ravitaillement selon les informations données sur le site. Mais finalement, ce sac m’attend 2 ravitaillements plus loin, et je n’avais pas vu ce changement d’info… Du coup, je n’ai presque plus de barres à grignoter dans mon sac et je ne peux pas enfiler le tee-shirt sec que j’attendai avec impatience. Je me déconcentre, je perds du temps et je ne pense même pas à prendre une banane avant de repartir pour compenser.
3ème tronçon : Curral das Freiras - Pico Ruivo.
Et j’aurai dû la prendre cette banane puisque nous attend un des gros morceau de la journée : la montée au sommet de l’île, avec 1 300 m de D+. Pour autant, le départ est agréable avec une montée régulière dans une forêt d’eucalyptus à un bon rythme (entre 700 et 800 m de D+ par heure, peut-être trop rapide...). Puis nous quittons le monde végétal pour aborder le monde minéral. Malgré la beauté du paysage, je commence à faiblir, il ne me reste qu’une barre (c’est mon obsession à ce moment-là); mais à voir les indications de ma montre, il ne reste que quelques centaines de mètres avant le ravitaillement. Et là, c’est la fringale. D’un seul coup, des étoiles devant la vue, je titube et donc je m’assoie immédiatement pour manger cette dernière barre. Cela apporte un peu d’énergie et je me dit que ce ravito va arriver. En fait, il est encore à 1,5 km; mais avec le dénivelé, ça fait 20 minutes, bien, bien longues. Alors soit ma montre a été défaillante, soit ce sont les indications de la course. J’opte pour cette deuxième solution, puisque arrivé au ravito en question, je vois un panneau de randonnée indiquant le village du précédent ravito à 11,1 km alors que nous avons fait des détours par rapport au sentier de rando et que la section est donnée pour faire 10,8 km…
Autant le dire, l’arrêt à ce ravito a de nouveau été long et j’ai avalé tout ce que j’ai trouvé dans n’importe quel ordre : fruits, fromages, biscuits, tartines de nutella…
4ème tronçon : Pico Ruivo - Chao de Lagoa
A nouveau un gros morceau minéral qui rejoint les 2 sommets de l’île avec des montées et des descentes abruptes, toujours parmi les marches. Mais aussi des tunnels piétonniers creusés à flanc de montagne et un passage en crête sur un escalier avec au moins 400 m de vide des 2 côtés, grandiose ! Le terrain est technique, la fringale se fait encore un peu ressentir, donc j’avance à mon rythme (c’est-à-dire lentement…). Nous quittons le monde minéral pour retrouver des pelouses, et du coup un peu de rythme jusqu’à arriver au ravitaillement où m’attend enfin mon sac de délestage. Le bonheur d’enfiler un tee-shirt sec !
5ème tronçon : Chao de Lagoa - Poiso
Je repars relativement requinqué avec une section qui comporte une belle descente (- 800 m) suivi d’une belle remontée (+ 700 m) (Ben, dans ce cas, ça a servi à quoi de descendre ?). La descente est à nouveau technique, mais cette fois à travers les racines. Je ne perds pas trop de temps, même si je me fais doubler, mais moins qu’au cours de mes trails précédents. On aborde la dernière montée de la journée; ils ne vont donc pas trop nous faire souffrir ? Perdu, c’est à nouveau abrupt et dans les racines, mais en même temps c’est logique puisque c’est ce que l’on venait de descendre… Ce dénivelé se calme dans les 3 derniers km avant le ravitaillement, il doit être seulement autour des 10%...
6ème tronçon : Poiso - Portella
Il faut le dire, une section facile. 800 m de D- sans piège. Ca laisse l’occasion de courir et d’essayer de rattraper du temps; puisque jusqu’à ma fringale, j’étais dans mes objectifs.
7ème tronçon : Portella - Lorana
La nuit est tombé. Le sentier est une légère descente boueuse en sous-bois. Donc je cours quand je peux, sinon, je marche. Le rythme me permet de reprendre à nouveau du temps par rapport à mes prévisions. Sauf qu’arrive la dernière grosse descente : entre 30 et 40% parmi les racines et la boue, tout ça à la frontale ! Autant dire que toute l’avance prise au début de cette section a été reperdue.
8ème tronçon : Lorana - Machico
C’est la dernière section qui commence par longer la mer par un sentier du type sentier des douaniers à la Hague. En théorie c’est beau mais là, je ne vois rien; et ce n’est pas forcément facile à courir. Je marche donc beaucoup, en me disant que ça économise les jambes quand le chemin deviendra facile. Ca me donne bonne conscience mais c’est illusoire. En effet, quand nous quittons ce sentier, c’est pour longer une lévada, un canal d’irrigation typique de l’île, sur un chemin d’une quarantaine de cm de large, avec des jambes de bois. Autant être franc, je n’ai pas apprécié cette partie… Mais nous descendons sur Machico, notre point d’arrivée, avec un dernier kilomètre de route, ce qui permet de courir devant des spectateurs toujours nombreux.
Ca y est, cette rude et magnifique journée est finie ! Il est 23h49, ouf, je m’étais promis d’arriver le même jour que mon départ. Pour les chiffres, j’aurai mis 16h43 et je finis 148ème sur 403 partants.
Evidemment, je recommande à toute personne qui en a la possibilité de faire cette épreuve, rien que pour la grandeur et la diversité des paysages traversés en une journée. Je voudrai finir en remerciant ma famille qui m’a laissé m'entrainer pour cet objectif et les bénévoles toujours avenants !
Pour la version avec les photos c'est ici : publication sur strava
2 commentaires
Commentaire de lds posté le 23-08-2018 à 10:38:31
Bonjour,
Merci pour ce chouette CR! J'envisage de courir le 85 km en avril 2019...Ce sera une première pour moi cette distance car jamais fait plus de 40 en trail! Pourrais-tu me dire les grandes lignes de ta prépa stp? Merci par avance.
Laëtitia
Commentaire de bubulle posté le 17-04-2019 à 10:17:52
Bon, bin j'ai l'impression que ta description préfigure bien ce que devrait être ma course. Merci pour les précieux détails sur la nature du terrain rencontré, je saurai encore mieux à quoi m'attendre moi qui n'aime pas partir dans l'inconnu...
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