Récit de la course : Chongli 100 Ultra Sky Trail Challenge 2017, par jujuhrc

L'auteur : jujuhrc

La course : Chongli 100 Ultra Sky Trail Challenge

Date : 11/8/2017

Lieu : Beijing (Pekin) (Chine)

Affichage : 728 vues

Distance : 168km

Objectif : Pas d'objectif

2 commentaires

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Made in China 2

Lorsque le «Chongli 100 Ultra sky Trail Challenge» annonce qu’il va organiser un 100 miles dans le cadre de son week-end de course mi-Aout (qui comporte déjà un 110km, un 60km et un 25km) je ne suis pas long à me décider. J’avais déjà participé au 60km l’an dernier et l’idée de tenter mon premier 160km en Chine me plait bien. Après tout on y aura passé 5 ans de notre vie et quoi de mieux que d’y finir une course de cette ampleur pour graver en moi la pratique de ma passion dans ce pays. Par contre c’est vraiment proche de la MH, juste 5 semaines après.

Me voilà donc inscrit avec l’option «navette».  

Le plan d’entrainement va être relativement simple, on fait la MH et puis on passe les 5 semaines tranquille. 

La Montagnhard va bien se passer sans aucune blessure hormis les ampoules. Je vais faire quelques sorties vraiment cool avec ma femme et mon père. Puis de retour en Chine principalement de la piscine et avec un trail de 20km et 1500m deux semaine avant la course. Tout va bien donc même si il fait quand même chaud la semaine avant la course.

Je profiterai de mon trail de préparation à Pékin pour y retirer mon kit de course avec mon dossard ainsi que mes sacs de délestages. J’aurai le dossard S016.

 

On aura aussi droit enfin à la carte et au profil un peu plus détaillée

Le sac sera au CP7 à presque mi-course. Un bon premier objectif de course. J’identifie aussi très vite que la section CP8, CP9, CP10 va être redoutable à l'entrée de la deuxième nuit. Les BH semble large avec au CP7 un passage à 17h30 et au CP11 un passage à 6h30. Le départ de la course sera à 22h le Vendredi soir.

 C’est un point que je trouve vraiment sympa ce départ à 22h. J’aurai toute la journée pour faire tranquillement le trajet de Tianjin à Chongli sans avoir à passer une nuit là haut et devoir se lever très top. Puis la nuit d’avant dans son lit ça n’a pas de prix.

 Il me faudra donc prendre, un taxi, le train jusqu’à Pékin puis le métro jusqu’à la navette.

 La classe avec mes sacs dans le métro de Pékin.

 

Puis on arrive à la navette. La aussi les Chinois sont quand même au top niveau organisation. Ils mettent en place une navette de Pékin vers le lieu de la course. Il faut quand même 4h de route. La mienne est à 14h. 

Dés que je rentre dans le bus je pense m’être trompé, la moyenne d'âge est entre 50 et 60 ans et les gens n’ont pas du tout le profil de coureurs de 100 miles. Mais non c’est bien la bonne. Je vais rapidement me rendre compte que toutes ces personnes sont en fait les bénévoles du week-end. Alors ça c’est énorme! Il règne une ambiance géniale du coup. Rapidement je devient l’attraction car je suis le seul «western». On arrive à communiquer avec 2 anciens grâce à une femme qui parle un peu Anglais. En fait c’est un club de bénévole qui prend part à toute les courses de la région. C’est génial pour eux car le week-end est entièrement pris en charge par l’orga, du transport à l’hôtel jusqu’a la nourriture. 

 

Au bout du trajet qui passera vite finalement on arrive dans les montagnes qui vont accueillir les JO d’hiver 2022.

Le ciel est quand même très menaçant.

Le départ est situé dans la station de ski de Chongli au pied de 2 grands hôtels bien sûr plein de coureurs et de bénévoles. Nous arrivons vers 18h, il va falloir attendre 4 heures. Juste après notre arrivée le ciel gronde et l’averse arrive.

Je trouve refuge sous une tente de l’organisation. Mais l’averse dure et la température baisse. Malgré mon repas j’ai froid et il commence à faire nuit. C’est pas super motivant pour me préparer et heureusement je vais trouver meilleure place dans le hall d’entrée de l'hôtel ou l’accueil nous ouvre une sale pour nous préparer. J’y retrouve mes deux bénévoles du bus.

Je fais aussi la rencontre d’un coureur qui parle un peu Anglais et qui va gentiment me faire la traduction du briefing de course. Ca va être un peu mon ange gardien. 

L’ambiance extérieure me fera opter pour un départ avec du long aux jambes et au corps. Choix que je ne vais pas regretter.

Finalement l’averse cesse 20 minutes avant le départ de la course. On ne sera que 40 au départ, je serai bien sur le seul Français et aussi le seul «western». Il y aura 2 coréens. 

Départ:

Le départ est donc donné à l’heure avec la nuit noire. Je connais le début de parcours et je marche de suite avec un petit groupe pour atteindre rapidement la crête. De suite je suis rassuré sur la météo car la lune sort des nuages. On va ensuite bouffer un peu de route mais on aperçoit la lueur des villages en fond de la vallée rendant le parcours sympa. On plonge soudainement sur notre gauche pour attaquer un single super ludique en sous-bois pour perdre très vite 400m.  Il faut que me bride pour ne pas courir car la route va être longue. Le premier ravito arrive. On me propose un café et j’accepte car il fait un peu froid et ça me réchauffera.   

CP1 11km

Je le déguste en marchant mais il n’a pas un super gout. Je balance la fin et me dirige vers la première explication du parcours. Le début est calme mais la pente s’accentue très rapidement pour devenir vraiment très raide. Le coup est dur, je souffle comme un buffle et le cuisseau à chaud. Incroyable ce n’est pas fini ça monte toujours avec le même pourcentage sur un chemin très technique dans la foret. Je stoppe 2 minutes pour reprendre mon souffle alors que nous sommes à peine au km 20. Finalement la crête est là avec en prime un bon petit vent frais pour refroidir la machine. Un petit tour sur les futures pistes de ski des JO 2022 et nous voilà au CP2.

CP2   25.5km  4h15

Petite pause ici car on est en plein vent et je n’ai pas trop l’appétit. D’autant qu’il n’y a que 5km avant le CP3 qui est une base plus grosse. C’est quand même bizarre qu’après 14km je n’ai pas faim, plus encore la vue du ravito me répugne presque. Je tente une pâte d’amande que recrache aussitôt. Quelques instant plus tard je vomi presque. Du coup les jambes n’y sont plus et le moral en prend un coup. Faire les 140 km restant dans cet état, ça va pas le faire. 

 CP3  31km    5h17

J’essaye une soupe chaude au ravito mais sans succès, je recrache tout. Je pars faire un petit dodo. Mais 10 minutes plus tard je suis réveillé par des nausées. Je sors mais j’ai froid puis j’ai chaud sous la tente. Le moral est au plus bas et je commence à envisager de rendre le dossard. La suite est une boucle de 20km pour revenir au CP3 via le CP4. Je puise dans mes forces pour repartir en me disant que je verrai bien de retour ici. La descente est occupée à imaginer la logistique après mon abandon et comment passer la nuit suivante sur le site de la course en attendant le bus du Dimanche. Pour l’heure je suis en compagnie du dossard S009 et 2 autres coureurs plus jeunes que l’on va semer rapidement. S009 ne parle pas Anglais mais semble apprécier ma compagnie. Il a bien vu que je n’allais pas bien et il essaye de me motiver. On arrive au CP4 et j’accuse le coup. Seul un verre de coca me ferai du bien mais il n’y en pas ici.

CP4

S009 continu de me motiver et je le suis de loin. Le jour se lève mais aussi avec lui un brouillard très épais arrive. Moi qui comptais sur les premières lueurs du jour pour me réchauffer, c’est loupé ! Il a pris quelques longueurs d’avance et je le distingue a peine avec le brouillard mais soudain il fait demi-tour…......plus de balise ! Va s’en suivre une grosse partie de jardinage ou on finira à 15 coureurs pour enfin retrouver notre chemin dans le brouillard. Il y a avec nous entre autre S009 et mon pote qui parle anglais. Du coup cette partie d’orientation me fait un peu oublier mon bleue à l’âme. La fin est un calvaire car je n’ai plus de jus et mon mal de ventre est bien présent. L’abandon est clairement à l’ordre du jour car je ne me vois pas continuer sans pouvoir manger. Au ravito un des coureurs me propose un sachet pour mon mal de ventre et je décide de dormir 1h avant de prendre une décision.

CP3 bis 50,5km  9h30

Je me réveille après 45 minutes de sieste. Je demande une soupe de pâtes et……ça passe ! Le moral aussi a pris un coup de neuf avec la sieste donc je décide de repartir au moins jusqu’au CP7. On part sur une belle piste 4X4 à flanc de montagne. Je vais croiser le dernier concurrent avant le CP6 ! Presque 20km tout seul au milieu des « Grassland » et des champs de chou fleurs (un comble pour le pays de l’enfant unique). La descente vers le CP5 est magnifique le long d’un joli ruisseau.


CP5

J’arrive à m’alimenter correctement ici aussi, signe que mon estomac va mieux. Le moral revient aussi tranquillement, l’idée de pouvoir me changer au CP7 me réconforte. Pour rejoindre le CP6 on va suivre une superbe crête entres les Eoliennes et les restes de la Grande Muraille. Quand je dis « restes » c’est peu de le dire. On distingue juste une ligne de pierres avec un mur ou deux restants debout là ou devaient être les tours. Oui faut y croire !


Juste avant le CP6 je croise enfin deux coureurs dont la deuxième féminine (sur 2 au départ). Elle a une blessure à la cheville et ne pourra pas finir la course. Puis au ravito je croise mon «ange gardien» du départ qui pensait que j’avais abandonné. Ravito qui doit être superbe sans brouillard.  

 CP6 68,5km   13h38

On décide de repartir ensemble pour rallier la base de vie après une très longue descente bien ennuyeuse et 4km sur une route. Etape à oublier. On en profite pour disserter alimentation. Il semble comme un coq en patte avec les ravitos locaux alors que je ne teste plus rien hormis les pâtes et la pastèque. Je rêve d’un bon ravito à la Française alors qu’il m’explique avoir abandonné la CCC l’an derniers ne pouvant plus rien manger. Même le fromage et la charcuterie.  

CP7 77,5km   15h25

Enfin la base de vie. On est reçu comme des rois, nos sacs arrivent sans rien demander. Il y a au moins 20 bénévoles pour une course avec 40 partants je vous laisse imaginer leurs taux d’occupation. Ils sont au petit soin. Pastèques à volonté pour moi avec juste une soupe pour compléter. A nouveau et un petit dodo et c’est reparti après une séance de photos avec les bénévoles.

Il me semble avoir oublié quelque chose au ravito...............je devais abandonné ici!  C’est dingue comment les petites siestes peuvent me nettoyer la tête de mes idées noires.  On enchaine ici les bon coup de cul dans un paysage très sympa.

Les jambes avancent mieux aussi et je commence à être dans mon rythme après presque 80km de course. Comme hier en fin de journée les gros nuages noir arrivent. 

Je rejoins le CP8 juste avant l'averse.

 CP8

Le sommet de la course est juste après et il va se gravir sous la pluie, le vent et l’orage non loin. On ne traine donc pas on va attaquer la grande descente que je craignait tant vers le CP9. Mes craintes vont se confirmer, après un sentier superbe en sous-bois on tombe sur une large piste qui n’en fini pas. C’est plat, c’est monotone et la nuit tombe. Je n’en vois jamais la fin et je commence à pester contre l’orga! Je rejoins un groupe de 4 que je redirige vers le bon chemin. Je ne comprend pas grand chose au Chinois mais ils râlent aussi! Finalement on arrive sur un ravito minable au bout du monde.......on peste encore! Bon finalement ça occupe l’esprit de rayer contre quelque chose.........merci l’orga pour cette étape minable!

 CP9

Du coup je me greffe à ce groupe de 4 pour affronter notre deuxième nuit. On va jardiner un peu au milieu d’un village car le parcours nous fait traverser un chantier qui est clairement interdit au public (panneau à l’appui). Ca à du bon la flexibilité Chinoise. Le groupe à grossi et mon «ange gardien» et «S009» sont avec nous. On fini une bonne grimpette pour rejoindre le CP10 et les coureurs du 100km. 

 CP10 112km   25h51

J’arrive ici avec l’intention de dormir mais il y a un monde fou. Dedans il fait chaud et dehors il fait froid avec le vent. Je repars donc avec les 2 plus rapides du groupe. Mais ça ne va plus! Mes yeux sont dans le brouillard, je manque me faire mal en tombant à 2 reprises! En rentrant dans la forêt ma décision est prise........dodo, ça devient dangereux de continuer!. Je m’allonge sur mon sac et m’endors de suite.

Soudain mes enfants me secoue en me disant qu’encore j’ai oublié le réveil. Je les renvois mais ils insistent! J’ouvre les yeux! Je vois un sac et des bâtons au sol! Deux coureurs passent à côté de moi, machinalement je leurs emboite le pas mais je ne sais pas ou je suis et qu’est ce que je fais là ou milieu de la nuit! Et soudain je réalise..........Les BH! Merde, j’ai dormi combien de temps? La BH du CP11 est à 6h du matin. Il fait toujours nuit donc ça devrait le faire mais je prend quand même un gros coup de speed. Je double et relance dans ce terrain super technique, je cours même assez rapidement. Je reprend mes esprits  et je rejoins mon «ange gardien» qui pour le coup me rassure de sa présence. Je verrai après coup avoir dormi 45 minutes. J’arrive au CP11 avec 3h d’avance sur les BH.J’y retrouve une bonne partie de mon groupe soit en train de dormir soit sur le point d’y aller. Je suis encore sur le coup de ma montée d’adrénaline donc la pause sera courte. 

 CP11 123km  29h33

Après une soupe je suis de nouveau en route. Les premières lueurs du jour arrivent et cela me permet de profiter de ce joli sentier que les habitants ont joliment décoré avec des parterre de fleurs, des nains de jardins, des éoliennes de toutes les formes et des fontaines..................et tout ça au fin fond de la Chine rurale!!!!!!! J’en avais entendu parlé mais je n’avais jamais expérimenté ce phénomène ..........des hallucination! Et ça va durer jusqu’au CP12. 

 CP12

Je n’ai pas le temps de voir la tente que j’attend un cris au loin, «Faguagen», le «Français» en Chinois. C’est la femme du bus qui tient le ravito, elle n’en revient pas de me voir ici; moi non plus d’ailleurs. Petit dodo et puis on repars avec mon «ange gardien» et «S009» qui sont là à mon réveil. La BH du CP14 est à 14h et il ne nous reste que 20km et il est 6h30..........ça sent bon! On va encore jardiner un peu sur la crête mais dans l’ensemble le balisage aura été au top sur cette course. On reste à 3, on est bien, on se comprend même si on ne parle pas la même langue et que l’on vient de passer 2 nuit dehors. Ils me forcent à courir dans les descente et moi je les tire en montées. 

 CP13  142km   34h51

On rejoint les coureurs du 60 ici. Il commence à faire chaud et je peux enfin courir en manches courtes. Mes 2 compagnons accusent le coup et ne suivent plus dans cette grande pente. J’arrive à courir pour rejoindre le dernier ravito de la course. 

 CP14  154km   37h59

 Je repars d’ici seul et je repense à cette course alors qu’on remonte un vallon absolument magnifique en sous-bois. Je suis vraiment content d’avoir su faire le dos rond alors que ça n’allais pas du tout la veille, ce même moral m’avait lâché l’an dernier sur la MH. J’ai aussi découvert que les micros-siestes m’ont fais le plus grand bien tout au long de la course (4 siestes au total pour 3 heures de sommeil). Je suis rassuré sur ma capacité à enchainer les grosses courses et surtout le feu est vert pour encore monter dans la catégorie supérieure pour mes prochains ultras de 2018.

On fini pour dévaler les pistes de Chongli pour rallier l’arrivée. Un dernier faux plat montant et on attend maintenant le speaker en contre-bas. Pour la première fois sur une course les larmes montent, de bonheur certainement de fatigue surement.

 

Arrives 168km  41h27


Me voilà donc finisher d’un 100 miles. Je suis 19ième sur 28 arrivants. La médaille est énorme comme ma satisfaction. J’ai encore vécu une expérience inoubliable et humainement incroyable. L'accueil et la chaleurs des bénévoles et l’entraide entre coureurs, même avec la barrière de la langue ont été au dessus de mes attentes. Je pensais le trail Chinois plus matérialiste que ça mais je m’était trompé. Ils ont une force morale que j’admire et savent se contenter de peu. L’organisation était au top, difficiles de juger les ravitos car nous n’avons pas la même culture pour l’alimentation. Les paysage sont sympa hormis une ou deux sections. La proximité de la muraille donne un peu de poids historique à cet ultra et l'environnement autour du futur site des JO nous rappelle aussi  la démesure dont sont capable les Chinois.

J’ai trouvé ce que j’étais venu cherché avec cette immersion totale dans la Chine du trail. Expérience que je recommande!




2 commentaires

Commentaire de vinx posté le 16-10-2017 à 19:16:25

Un poil trop peu de participants pour le jeu des pronos ;o)
Bravo pour la balade

Commentaire de pinafl posté le 17-10-2017 à 12:12:35

28 arrivants pour un 100 miles... Tu as dû souvent te sentir bien seul! Bravo pour avoir fini en tous cas.

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