Récit de la course : Marathon de Budapest 2015, par Tikadi

L'auteur : Tikadi

La course : Marathon de Budapest

Date : 11/10/2015

Lieu : Budapest (Hongrie)

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Distance : 42.195km

Objectif : Terminer

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Marathon de Budapest 2015

Réveil à 7h.
Petit déjeuner rapide et échange avec la french team de l’hôtel, petit groupe de 8 personnes venant de St-Etienne (transit par Genève pour prendre le vol EasyJet). Sourires et discussions sur le tracé de la course. Encouragements et bonne ambiance. Où seront placées les étapes clés ? Dur, facile, difficile… chacun y va de son analyse personnelle. :)
 
8h - Retour à la chambre et vérification du sac. Tout y est. On y go ! Direction le métro, Oktogon place. La météo n’est pas très fun en ce dimanche matin : pluie fine et température ne dépassant pas les 10°C. Qu’importe… on verra bien. Dans la station, de nombreux coureurs sont déjà présents. Contrôle des tickets sur le quai. La rame arrive… sans commentaire… c’est blindé !!! Bon, va falloir marcher… Distance estimée : 3 km.
 
8h30 - Dans une heure, le départ. Un petit moment de stress : je pense au vestiaire, la consigne, la foule… ça va le faire. Je me fais dépasser par un couple de Suédois portant un casque de viking bleu et jaune en tissus avec l’inscription Sweeden écrit en gros. Sympa, i like dat spirit ! Il fait frais et cette pluie fine nous accompagne. Je me dirige vers la place des Héros. Petite pensée à nos amis turcs en passant devant l’ambassade...
15 mn plus tard, nous y voilà ! De l’excitation, de la joie de voir autant de participants converger vers le village du marathon. On s’échauffe, on vient déguisés, des policiers, une circulation alternée, des ballons, des barrières, de la musique et la ligne d’arrivée juste là-bas comme pour nous dire « Attrape-moi si tu peux ». Dans 4h ou moins, on y sera.
Direction les vestiaires et 15 mn plus tard, le tour est joué. Je suis prêt. La pluie a cessé et désormais il fait bon. Le ciel est toujours laiteux et cela devrait s’arranger dans la matinée. J’ai encore 30 minutes devant moi pour rejoindre la zone des 3h30-4h. Je me balade, regarde, apprécie la diversité des prénoms sur les dossards. Hongrie, France, Danemark, Allemagne, Italie, Afrique du Sud. Chaque coureur vient avec son histoire, son parcours. Tous différents mais tous unis dans un même événement : passionnant. Je kiffe.
 
9h15 - Dans l’enclos. On s’échauffe, la tension monte et le speaker encourage la foule stimulée par une rythmique techno. Quel va être le tube du moment ? On trépigne et déjà les regards se portent sur la ligne de départ, quelques vingtaines de mètres plus loin.
 
9h30 - Notre zone de départ est désormais pleine. Les meneurs d’allure, ceux que nous ne rattraperons jamais, sont désormais partis sous les applaudissements de la foule comptacte et impatiente. Notre tour arrive quelques minutes plus tard… C’est la folie ! Ne pas tomber et rester concentré. C’est fait, je passe sous la structure gonflable qui annonce le début de notre aventure collective. Devant nous, l’inconnu et la joie d’y être enfin. Emportés par notre soif de liberté, nous filons l’avenue Andrássy à un rythme soutenu de 13-14 km/h. Il faut que je retrouve ma vitesse de croisière, ne pas s’affoler. Pour cette première heure, ce sera 12 km/h. Je me focalise donc sur ma foulée. Être régulier et attentif. La position de mes pieds, être légèrement penché, dos aligné, tout est ok, yapuka laisser dérouler. Les changements de macadam s’effectuent durant trente minutes. Le public nous accompagne par ses « bravo » et son entousiasme.
 
7 km - Premier pont. La pente est bien présente… et nous entamons cette première traversée accompagnés par le tramway sur notre gauche. Les passagers nous observent et nous leur rendons la politesse par quelques sourires et signes de la main. Nous arrivons sur l’île Marguerite (Margit-sziget). Notre petit jogging dominical traverse donc un grand parc boisé parsemé de quelques fontaines mais majoritairement constitué de grandes surfaces gazonnées. Nous continuons, direction nord. Petite montée qui casse bien les guiboles et hop, nous voilà à courir sur le périphérique. Deux voies sur trois sont neutralisées par le marathon. Une longue file de véhicule roulent au pas et viennent, tout comme le tramway, nous accompagner sur environ 250 m. « Mais d’où sortent tous ces coureurs ? »
 
10 km - Seconde phase du parcours : descente le long du Danube sur 5 km. Les ravitaillements constitués au début par des gobelets d’eau sont désormais accompagnés par de la boisson isotonique, des bananes et du sucre. Premier relai du marathon par équipe et il faut garder son calme quand un coureur vous double à toute vitesse… Nous continuons notre longue descente en direction du pont des chaînes (Széchenyi Lánchíd) et Buda sur notre droite est magnifique. La route semble descendre… cela veut dire qu’au retour nous aurons un peu mal aux jambes… A ma gauche, le sublime et féérique parlement hongrois (Kossuth Lajos tér) datant de 1904. Un jour, il faudra que j’aille le visiter.
 
Arrivée au Pont des chaînes (Széchenyi lánchíd). Nous entamons la longue et mesurée montée de cet ouvrage imposant, veillant à ne pas trébucher ou glisser sur les rails du tramway. A mi-longueur, j’aperçois le tunnel qui traverse la colline du château. Mon rendez-vous est pris à 11h au kilomètre 17 avec Dodo et Eta. Je suis à l’heure. Ma montre m’indique que ses piles sont faibles… Obsolescence programmée en pleine course = déception et inquiétude ! Sur quel rythme vais-je devoir me caler ? Peu importe, pour l’instant, il faut se concentrer sur la course. Virage à droite et hop, une belle montée avant d’entamer la descente qui nous mènera sur la rive du Danube. Les jambes répondent mais bedaine, telle un alien, s’est invitée à la course. Abdo-lescence certifiée ! Cet hiver, il va falloir jouer du gainage et de la salade verte. :D
 
17 km - Dodo est là en vélo ! Il m’attend tout sourire avec son appareil photo. Quelle joie ! Je bifurque sur le trottoir et débouche sur Alagút u (??). Une petite pause photo, des rires, de la joie et Eta qui filme du troisième étage !!! Ravitaillement bonheur. Merci d’être là. Je repars ému de cette rencontre et je me fais aspirer par le tunnel. Cela résonne, on cri, on hurle, on gueule ! Petit délire passager (PDP). Petite boucle et hop, nous revoilà sur la berge du Danube. Passer sous les ponts, monotonie et ravitaillements sur 5 km. Beaucoup d’animations musicales sur tout le tracé. On passe du rock d’AC/DC à de la musique militaire, du jazz à de la techno, de la musique traditionnelle... Patchwork musical et sonorités métissées nous font oublier durant quelques instants le rythme régulier qui nous accompagne depuis le départ.
 
23 km - Je m’ennuie... et dire que nous n’en sommes qu’à la moitié… Les remontées de berge sont assez simple mais le retour vers le pont de la Liberté (Szabadság híd) est un long et régulier faux plat. Des pavés, du bitume, des vélos, de la musique, des hourras… et Dodo qui débouche en vélo au détour d’un virage. Cool ! Il m’accompagne jusqu’à la fin ?
 
25 km - La traversée du pont se fait tranquillement et j’apprécie la descente sur la rive gauche. Les jambes répondent et le moral est bon. Ma montre me lâche. Je la rallume et dix minutes plus tard, elle s’éteint. Bon, je la rallumerai quand il faudra vérifier l’allure afin de ne pas me cramer. La longue remontée de 6 km pour atteindre le périphérique nord s’effectuera alors en solo, sans GPS… Passer le mur des 30 km, c’est possible ! Oui, la remontée est longue et hésitante parfois. Bedaine cours avec moi… Je tente quelques mots avec mes coéquipiers d’un jour et je prends mon mal en patience en saluant, en souriant et remerciant le public omniprésent tout au long du parcours. Dodo est toujours là. Il me surprend au coin d’une rue, le long de la piste cyclable. Il filme et m’encourage ! J’oublie quelques instants la fatigue et les kilomètres à faire.
 
32 km : C’est dur, j’en ai plein les pattes… et nous entamons l’approche sur le périphérique. Oh surprise, une seule voie pour courir !! La voiture reconquiert son territoire petit à petit. Vite, vite, plus le temps de saluer les automobilistes… CO2 je te hais ! Nous revenons alors sur l’île Marguerite. Havre de paix provisoire avant d’entamer la dernière partie de la course. Je ramasse un drapeau hongrois sur le macadam. Un beau souvenir en perspective...
 
La remontée vers le pont Margaret (Margit Hid) me permet d’encourager et de remettre en course un compatriote français en panne d’H2O. Il a soif et marche, fatigué. « ça va ? Besoin d’aide ? - j’ai soif ! mais allez-y. - Vous inquiétez pas… je n’ai pas de temps de prévu. - Ok, c’est gentil. Merci. » Il me sourit et se relance sur quelques mètres. Il se remets à trottiner. Je l’accompagne ainsi jusqu’à la rive droite. Je lui souhaite bonne chance et profite de la descente pour me détendre un petit peu.

37,5 km - Les jambes sont lourdes et je suis impatient d’arriver mais un nouvel obstacle se dresse devant nous : le fameux pont ferroviaire dont m’avait parlé Dodo. Il n’est pas haut mais juste ce qu’il faut pour vous stopper net si vous ne le prenez pas dans le sens du poilDoucement, être régulier au niveau du rythme mais les jambes sont lourdes. La descente n’est pas forcement appréciée. Il ne me reste que 3,195 km. Un ravitaillement et j’ingurgite rapidement mon verre de boisson isotonique. Ma petite éponge qui m’accompagne depuis le début de course m’a rendu un grand service. Là encore, j’apprécie de boire sans avoir à renverser la moindre goutte sur la route.

39 km - Toujours en vie et cette avenue me met à l’épreuve. Une nouvelle descente pour passer sous la voie ferrée et remonter encore et encore… Je fatigue. Je tente de trouver le bon raisonnement pour évacuer les mauvaises pensées. Je me focalise sur ma foulée. Chaque mètre est une victoire sur moi-même. Dodo est à ma gauche, je le vois slalomer entre les piétons. « Super Olivier » Merci Dodo - Merci de m’accompagner. Je pense alors à Papa. Lui aussi m’accompagne. Je n’avais jamais couru seul depuis le marathon de Berlin. La pente devient plus douce et j’arrive à la place des Héros (Hősök tere). Ambiance, musique, applaudissements…. 40,5 km d’effectués. J’accélère sur 100 m pour me décongestionner les jambes. Je sais qu’à cet instant là, il me reste une petite difficulté juste avant les 100 m menant à l’arrivée. Je me relance puis je reviens à un rythme de croisière.

41 km - Pas le temps de prendre le dernier ravitaillement. Un peu plus d’un kilomètre à faire sur une route qui n’est plus tout jeune : des trous, du pavé, des feuilles et toujours autant de monde à courir. Je discute avec un Italien qui me fait comprendre en me montrant ses mains que ses semelles de chaussures sont défectueuses... Allez hop, un encouragement et nous voilà filer à un rythme plus rapide sur une courte distance. Je le lâche. Je n’en peux plus. Je ne comprends pas. Bedaine !!!

42 km - Dodo est toujours là et il continue de filmerAu fur et à mesure que l’on se rapproche du dénouement, la tension monte et je ne cesse de penser à l’arrivée et au sprint !!! J’espère avoir encore du Benzine pour les 100 derniers mètres… Oui, ça fonctionne. J’accélère et j’allonge la foulée. J’en ai encore sous les pieds, je tourne sur la gauche et hop, je file, j’accélère, stimulé par les encouragements et par l’envie d’en finir ! J’ai juste le temps de ressortir le drapeau hongrois et les bras tendus, j’exulte de joie en franchissant la ligne d’arrivée. C’est fait !!!
 
"Diane, une petite remarque : inutile que je porte un t-shirt taille S pour me donner l’impression d’être bien gaulé... si, en levant les bras, on aperçoit ma bedaine saluer ainsi la foule avec insistance... :)" - Dale Cooper, Twin Peaks :)
 
Nous sommes à nouveau réunis juste derrière le sas. Médaillés, ravitaillés et heureux. J’adore cet instant où nous partageons la même joie, celle d’avoir encore réussi cette épreuve. Dodo est là avec son vélo, il m’attends avec un sac. Il est retourné à la maison me chercher des affaires propres ! Ils sont adorables ! Je le remercie d’être là. C’est réconfortant. On parle, on échange, il me fait part de son émotion, de cette ambiance festive qui sent bon... la sueur et le Décontractyl. Quelques photos souvenir et on se retrouve quinze minutes plus tard au même endroit, le temps que je me change.
 
Le retour se fait donc à pied, histoire de gommer légèrement les premières courbatures. Revenir à un rythme normal et se détendre. Le temps est stable, pas une goutte de pluie durant la course mais il ne faut pas tarder. Le froid et la fatigue n’attendent pas. Direction l’hôtel pour une bonne douche et deux heures de sommeil avant de rejoindre mes chers amis Hongrois côté Buda.
 
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De belles rencontres, des sourires et de belles discussions en hongrois, anglais et français durant ces trois jours passés à Budapest. Un sentiment de liberté et aussi celui de faire partie d'une grande famille. De l'attention et l'envie que ces échanges soient constructifs et enrichissant humainement.
 
Durant la course, nous sommes livrés à nous mêmes, face à nos choix, à nos décisions. On peut passer d'un état de bien-être à l'envie de tout arrêter et d'abandonner. Qu'est-ce qu'une course face à la préparation ? On se sent alors ridicule parfois d'avoir à valider sur 42,195 km tant d'efforts et d'engagements envers soi-même, responsabilité envers ses amis, ceux que l’on aime et qui nous accompagnent en pensées. Juste avoir du plaisir et pouvoir partager notre récit avec notre entourage, nos amis. Inciter aussi au voyage, à aller à la découverte de soi et de l’autre. Prochain rendez-vous : Barcelone, Venise, Athènes ou Amsterdam ?

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